CA Versailles, 3e ch., 29 janvier 2015, n° 12-07245
VERSAILLES
Arrêt
PARTIES
Demandeur :
Symbios (sté)
Défendeur :
Metoxit AG (sté)
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
Mme Boisselet
Conseillers :
De Martel, Derniaux
Avocats :
Mes Jullien, Guttin, Lubrano-Lavadera, Frank
Faits et procédure
Une prothèse de hanche a été posée à M. Pluot, le 9 décembre 2002. Il a dû être réopéré en raison de la rupture, le 23 septembre 2004, de cette prothèse.
Après qu'une expertise judiciaire a été ordonnée, un accord amiable est intervenu entre M. Pluot et la société Symbios qui avait fabriqué et fourni le dispositif médical pour la somme de 17 000 euro.
Par jugement du tribunal de grande instance de Nanterre du du 2 septembre 2011 , la société Symbios a été condamnée à payer à la CPRP SNCF la somme de 23 733,12 euro au titre du régime de sécurité sociale, la somme de 966 euro au titre des frais de gestion et 8 180,23 euro au titre des frais exposés par l'employeur, avec intérêts au taux légal à compter du 28 août 2009, outre 1 500 euro au titre de l'article 700 du Code de procédure civile.
La société Symbios a fait assigner la société Metoxit, en sa qualité de fabricante de la tête en céramique rapportée sur la prothèse de hanche devant le tribunal de grande instance de Nanterre le 10 mars 2010 puis le 22 décembre 2010 afin de la voir condamner à la garantir du chef des sommes versées à M. Pluot et à la SNCF.
Par jugement du 7 septembre 2012, la juridiction a déclaré son action prescrite et dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du Code de procédure civile.
Les premiers juges ont fait application des dispositions de l'article 1386-17 du Code civil et considéré que la société Symbios ayant été assignée en justice par M. Pluot le 13 octobre 2006, il lui appartenait d'appeler en intervention forcée le bon fournisseur de la tête de hanche dans un délai de trois ans, ce qu'elle n'a pas fait.
La société Symbios a interjeté appel de cette décision et, aux termes de conclusions du 29 mars 2013, demande à la cour au visa des articles 1386-6 et 1386-7 du Code civil :
de dire que la cause du dommage subi par M. Pluot, chez lequel a été implantée une prothèse vendue par la société Symbios SARL, aujourd'hui Symbios SAS, est la rupture de la tête en céramique rapportée sur la prothèse et fabriquée par la société Metoxit,
de dire cette dernière co-productrice du dispositif défectueux, au sens de l'article 1386-6 du Code civil,
de dire la société Symbios fondée à exercer un recours contre son co-producteur,
de dire qu'il appartient à la société Metoxit, dont le produit est défectueux faute d'avoir présenté la sécurité souhaitée, de rapporter la preuve de sa non responsabilité selon les dispositions de l'article 1386-11 du Code civil,
subsidiairement, de dire que la société Metoxit était tenue d'une obligation de résultat en matière de sécurité, qu'il lui appartient de s'exonérer de cette obligation selon les règles d'exonération qui lui sont propres, qu'à défaut de rapporter cette preuve, la société Metoxit doit être tenue de la garantir de la condamnation prononcée à son encontre au profit de la CPRP SNCF à hauteur de 23 733,12 euro au titre des frais exposés dans le cadre de la sécurité sociale, et 1 500 euro au titre de l'article 700 du Code de procédure civile, outre 17 000 euro au titre du dommage de la victime directe indemnisée par protocole,
subsidiairement, de condamner la société Metoxit à la garantir de la moitié de ces sommes, au titre de la responsabilité solidaire de producteur, dès lors que la société Symbios a elle-même été condamnée de ce chef,
de condamner la société Metoxit à lui payer la somme de 5 000 euro au titre de l'article 700 du Code de procédure civile,
de la condamner aux dépens avec recouvrement direct.
Aux termes de conclusions du 31 janvier 2013, la société Metoxit AG demande à la cour, au visa des articles 1386-17, 1386-7 et 1386-9 du Code civil :
à titre principal, de confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a dit l'action de la société Symbios à son encontre prescrite en application de l'article 1386-17 du Code civil,
à titre subsidiaire, de juger que l'action en responsabilité de Symbios à son encontre fondée sur l'article 1386-7 du Code civil est prescrite,
à titre encore plus subsidiaire, de juger que la société Symbios n'établit pas la preuve d'un lien de causalité entre la fourniture par la société Metoxit d'une tête de prothèse et la survenance de la rupture de la prothèse fabriquée et fournie par la société Symbios et implantée à M. Pluot par le Docteur Philippe Tracol, qu'elle n'établit pas la preuve du défaut de la fourniture de la société Metoxit intégrée dans la prothèse fabriquée et fournie par la société Symbios et implantée à M. Pluot par le Docteur Philippe Tracol, en conséquence, de débouter la société Symbios de toutes ses demandes, fins et conclusions quel qu'en soit le fondement,
en tout état de cause, de condamner la société Symbios au paiement de la somme de 15 000 euro au titre de l'article 700 du Code de procédure civile et aux dépens avec recouvrement direct.
Pour un exposé plus ample des moyens des parties, il est renvoyé à leurs conclusions notifiées aux dates mentionnées ci-dessus, conformément aux dispositions de l'article 455 du Code de procédure civile.
L'ordonnance de clôture a été prononcée le 6 novembre 2014.
Sur ce
Il est de principe que le régime de la responsabilité du fait des produits défectueux exclut l'application d'autres régimes de responsabilité contractuelle ou extracontractuelle de droit commun fondés sur le défaut d'un produit qui n'offre pas la sécurité à laquelle on peut légitimement s'attendre, à l'exception de la responsabilité pour faute (distincte du défaut de sécurité du produit) et de la garantie des vices cachés.
La société Symbios ne saurait donc utilement solliciter, à titre subsidiaire, l'application du régime de responsabilité 'de droit commun' dans l'exposé de ses moyens sur le régime de preuve applicable au litige.
Elle indique d'ailleurs expressément agir à l'encontre de la société Metoxit, coproducteur du produit en cause, sur le fondement de l'article 1386-7 du Code civil et sollicite l'application du régime de prescription d'un an prévu par ce texte.
Aux termes de cette disposition, le recours du fournisseur contre le producteur obéit aux mêmes règles que la demande émanant de la victime directe du défaut ; il doit agir dans l'année suivant la date de sa citation en justice.
Ce texte ne précise pas que la citation en justice du fournisseur par la victime directe s'entend d'une citation " au fond ".
La société Symbios ne saurait utilement soutenir que le délai d'un an ne court qu'à compter de son assignation par la SNCF, employeur de M. Pluot, alors que celle-ci n'est pas la victime directe du dommage et que la société Symbios a antérieurement été assignée par M. Pluot en référé expertise le 16 octobre 2006, ce qui constitue le point de départ du délai qui lui était imparti pour mettre en cause la société Metoxit en sa qualité de fabricante de la tête de prothèse. Elle indique elle-même dans ses conclusions que la preuve de la rupture de la tête litigieuse était rapportée dans cette assignation en référé. La circonstance alléguée qu'elle a tardé à identifier son propre fournisseur du fait d'une erreur de numérotation de la pièce en cause est indifférente.
Sachant que ce n'est que le 10 mars 2010 qu'elle a fait assigner la société Metoxit, son action est prescrite.
La décision entreprise sera donc confirmée en toutes ses dispositions.
En cause d'appel, la société Symbios sera condamnée aux dépens et au paiement d'une indemnité de 2 000 euro à la société Metoxit au titre de ses frais irrépétibles.
Par ces motifs, La cour, statuant publiquement et contradictoirement, Confirme en toutes ses dispositions le jugement entrepris, Y ajoutant : Condamne la société Symbios aux dépens d'appel lesquels pourront être recouvrés dans les conditions de l'article 699 du Code de procédure civile, Condamne la société Symbios à payer à la société Metoxit la somme de 2 000 euro au titre de l'article 700 du Code de procédure civile. - prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile.