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Décisions

Cass. com., 2 février 2016, n° 13-24.582

COUR DE CASSATION

Arrêt

Cassation

PARTIES

Demandeur :

Carrosserie Mouttet (SARL)

Défendeur :

Gruau Laval (Sté)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Mouillard

Rapporteur :

Mme Le Bras

Avocats :

SCP Capron, SCP Foussard, Froger

Aix-en-Provence, 2e ch., du 18 juill. 20…

18 juillet 2013

LA COUR : - Attendu, selon l'arrêt attaqué, rendu sur renvoi après cassation (chambre commerciale, financière et économique, 20 septembre 2011, pourvoi n° 10-30.834), que la société Carrosserie Mouttet a conclu le 1er juin 1992 avec la société Gruau Laval, carrossier constructeur, un contrat d'agent exclusif auquel a fait suite, le 13 novembre 1995, un contrat de concessionnaire exclusif dans plusieurs départements du sud de la France ; que ce contrat, qui s'est renouvelé par tacite reconduction jusqu'en 2002, contenait une clause de résiliation selon laquelle la concession prendrait fin par résiliation anticipée, sans action judiciaire et formalité autre que celles prévues, par déclaration de résiliation en cas de non-paiement à son échéance d'une somme due par le concessionnaire ou d'infractions de sa part à l'une des clauses des conditions générales ou particulières arrêtées entre les parties et que, dans un tel cas, la société Gruau Laval pourrait adresser au concessionnaire une mise en demeure par lettre recommandée constatant le défaut de paiement ou l'infraction et prononçant la résiliation, celle-ci opérant de plein droit huit jours après la mise en demeure ; qu'invoquant de nombreux impayés, la société Gruau Laval a fait assigner la société Carrosserie Mouttet en paiement et a demandé que soit constatée la résiliation du contrat du fait de sa défaillance ; que, reconventionnellement, la société Carrosserie Mouttet a demandé que soit prononcée la résiliation du contrat aux torts de la société Gruau Laval et la condamnation de celle-ci à lui payer diverses sommes à titre de commissions et de dommages-intérêts ;

Sur le moyen unique, pris en sa sixième branche : - Vu l'article 1184 du Code civil ; - Attendu que pour prononcer au 20 janvier 2004 et aux torts de la société Carrosserie Mouttet la résiliation du contrat de concession, condamner cette dernière à payer à la société Gruau Laval la somme principale de 7 900,58 euros et rejeter toutes autres demandes, l'arrêt retient que les griefs de la société Carrosserie Mouttet tenant aux réponses tardives ou négatives pour les commandes, aux nouveaux agents Coder et Provence VI et à la coupure de la connexion Internet, concernent des faits postérieurs à la saisine, par la société Gruau Laval, du tribunal de commerce le 13 mars 2002, en constatation de la résiliation du contrat, ce qui les rend inopérants ;

Qu'en statuant ainsi, alors que pour apprécier si les manquements d'une partie à ses obligations sont suffisamment graves pour justifier la résiliation du contrat, les juges du fond doivent prendre en compte toutes les circonstances de la cause intervenues, y compris après l'acte introductif d'instance, jusqu'au jour de leur décision, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;

Sur le moyen, pris en sa huitième branche : - Vu l'article 1184 du Code civil ; - Attendu que pour statuer comme il fait, l'arrêt retient que la résiliation du contrat de concession aux torts de la société Carrosserie Mouttet dispense en outre d'examiner ses griefs autres que ceux tenant aux réponses tardives ou négatives pour les commandes, aux nouveaux agents Coder et Provence VI et à la coupure de la connexion Internet ;

Qu'en statuant ainsi, alors que les juges saisis d'une demande de résiliation du contrat, doivent, lorsque des manquements contractuels sont invoqués par chacune des parties, apprécier leur existence et leur gravité respective, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;

Et sur le moyen, pris en sa dixième branche : - Vu les articles 1134 et 1147 du Code civil ; - Attendu que pour rejeter sa demande de dommages-intérêts, l'arrêt retient que les griefs de la société Carrosserie Mouttet tenant aux réponses tardives ou négatives pour les commandes, aux nouveaux agents Coder et Provence VI, et à la coupure de la connexion Internet, concernent les faits postérieurs à la saisine par la société Gruau Laval du tribunal de commerce le 13 mars 2002 en constatation de la résiliation du contrat, ce qui les rend inopérants ;

Qu'en statuant ainsi, alors que le prononcé de la résiliation d'un contrat aux torts d'une partie ne dispense pas son cocontractant de son obligation de réparer le préjudice que ce dernier a pu lui causer par l'inexécution de ses obligations contractuelles, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;

Par ces motifs, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs : casse et annule, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 18 juillet 2013, entre les parties, par la Cour d'appel d'Aix-en-Provence ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la Cour d'appel de Montpellier.