CA Paris, Pôle 5 ch. 2, 25 mars 2016, n° 14-05672
PARIS
Arrêt
PARTIES
Demandeur :
Insert (SA)
Défendeur :
De Keating (Selarl)
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
Mme Perrin
Conseillers :
Mmes Nerot, Renard
Avocats :
Mes Hart de Keating, Boccon-Gibod, Kukulski, Henry, Waxin
La société Insert est spécialisée dans l'affichage urbain de proximité par l'achat, la vente et la location de surfaces publicitaires ainsi que dans la mise en œuvre par tous moyens d'opérations publicitaires et de promotion
La société Caldness a été créée le 12 janvier 2012 par M. Christopher Hermelin, ancien directeur marketing, communication et commercial de la société Insert avec une activité identique.
Monsieur Christopher Hermelin, qui n'était tenu à aucune clause de non concurrence, a signé un protocole transactionnel le 9 mai 2011 qui a mis 'n au litige l'opposant à son ancien employeur.
Cependant, la société Insert, reprochant à la société Caldness divers agissements déloyaux, et de manière générale, un manquement à son engagement de loyauté souscrit lors de la signature du protocole transactionnel, a été autorisée, sur requête, par le Président du Tribunal de commerce de Paris, à assigner celle-ci à bref délai ce qu'elle a fait par actes des 28 juin et 2 juillet 2013.
Par jugement contradictoire rendu le 17 février 2014, assorti de l'exécution provisoire, le Tribunal de commerce de Paris a :
- dit que la SAS Caldness s'est rendue coupable de parasitisme et de dénigrement ;
- condamné la SAS Caldness à verser à la SA Insert la somme de 20 000 euro à titre de dommages-intérêts ;
- dit que la SA Insert s'est rendue coupable de dénigrement et d'actes de concurrence déloyale ;
- condamné la SA Insert à verser à la SAS Caldness la somme de 80 000 euro à titre de dommages-intérêts ;
- prononcé la compensation judiciaire des condamnations ;
- condamné la SA Insert à verser à la SAS Caldness la somme de 15 000 euro au titre de l'article 700 du CPC ;
- débouté des demandes plus amples et contraires;
- ordonné l'exécution provisoire avec constitution partielle par la SAS Caldness, à hauteur de 45 000 euro, d'une garantie chez une banque établie en France, couvrant l'exigibilité et le remboursement éventuel des condamnations se rapportant aux indemnités allouées ;
- condamné la SA Insert aux dépens de l'instance,
La société Insert a fait appel de ce jugement par déclaration au greffe en date du 12 mars 2014.
Par dernières écritures noti'ées par voie électronique le 21 janvier 2016, auxquelles il est expressément renvoyé, la société Insert demande à la cour de :
- dire et juger la société Insert recevable et bien fondée en son appel et y faisant droit,
- débouter la société Caldness en toutes ses demandes, fins et conclusions en cause d'appel,
- confirmer le jugement rendu le 17 février 2014 par le Tribunal de commerce de Paris, en ses dispositions relatives à la responsabilité de la société Caldness pour parasitisme et dénigrement à l'encontre de la société Insert,
le reformer partiellement,
En conséquence, et y ajoutant :
- condamner la société Caldness à verser à la société Insert la somme de 30 000 euro au titre de l'atteinte portée à son image,
- condamner la société Caldness à verser à la société Insert la somme de 40 000 euro au titre des dommages et intérêts pour parasitisme.
- infirmer le jugement rendu le 17 février 2014 par le Tribunal de commerce de Paris, en ce qu'il a :
- débouté la société Insert de son chef de démarchage illicite résultant du comportement de la société Caldness,
- débouté la société Insert de son chef de dépose illicite et détérioration des panneaux publicitaires,
- débouté la société Insert de son chef de publicité trompeuse au sens de l'article L. 121-1 du Code de la consommation,
- dit que la société Insert s'était rendue coupable de dénigrement et d'actes de concurrence déloyale.
Et statuant à nouveau :
- dire et juger que la société Caldness s'est rendue coupable de démarchage illicite à l'encontre de la société Insert,
En conséquence :
- condamner la société Caldness à verser à la société Insert la somme de 275 000 euro au titre du préjudice résultant du détournement illicite de ses partenaires commerçants,
- condamner la société Caldness à verser à la société Insert la somme de 50 000 euro au titre du préjudice résultat des frais engagés,
- condamner la société Caldness à verser à la société Insert la somme de 30 000 euro au titre du trouble commercial engendré par les actes de concurrence déloyale de la société Caldness.
Et statuant à nouveau :
- dire et juger que la société Caldness s'est rendue coupable de dépose illicite et détérioration des panneaux publicitaires de la société Insert,
En conséquence :
- condamner la société Caldness à verser à la société Insert la somme de 101 162,46 euro au titre du préjudice résultant du remplacement de ses panneaux publicitaires.
En tout état de cause:
- condamner la société Caldness à verser à la société Insert la somme de 30 000 euro au titre de l'article 700 du Code de procédure civile,
- condamner la société Caldness à verser à la société Insert les entiers dépens de première instance et d'appel et lui accorder les bénéfices des dispositions de l'article 699 du Code de procédure civile.
Par dernières écritures noti'ées par voie électronique le 11 décembre 2015, auxquelles il est expressément renvoyé, Maître Christian Hart de Keating, la Selarl de Keating; es-qualités de liquidateur judiciaire de la société Caldness; demande à la cour de :
- donner acte à Maître Christian Hart de Keating, ès-qualités, de son intervention volontaire à la présente procédure pour le compte de la société Caldness, en liquidation judiciaire ;
- déclarer la société Caldness recevable et bien fondée en son appel incident
- dire que la société Insert a commis des actes de concurrence déloyale au préjudice de la société Caldness,
- condamner la société Insert à verser des dommages et intérêts à hauteur de 2 800 000 euro en réparation du préjudice commercial et des frais supportés indument par la société Caldness en raison de ses agissements ;
- condamner la société Insert à verser des dommages et intérêts à hauteur de 200 000 euro en réparation de son préjudice moral et d'image au profit de la société Caldness ;
- condamner la société Insert à payer à la société Caldness 30.000 euro sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile ;
- condamner la société Insert aux dépens.
La Cour renvoie, pour un plus ample exposé des faits et prétentions initiales des parties, à la décision déférée et aux écritures susvisées, par application des dispositions de l'article 455 du Code de procédure civile.
Motifs
Considérant que la société Insert soutient que la société Caldness a démarché de manière spécifique et systématique les commerçants annonceurs qui étaient ses partenaires ainsi que ses clients en usant de méthodes déloyales et notamment en la dénigrant et en faisant résilier par ces derniers les conventions de mise à disposition d'espaces publicitaires souscrits avec elle.
Considérant que la société Caldness fait valoir qu'elle n'a fait que démarcher des clients mécontents de la société Insert qui ont contracté avec elle et que la société Insert a réagi par des procédés déloyaux pour les amener à résilier leurs nouveaux engagements.
Sur les faits dénoncés par la société Insert
Sur le démarchage allégué
Considérant que la société Insert cite précisément 19 commerçants qui, après avoir résilié leur contrat avec elles, ont souscrit un nouveau contrat avec la société Caldness en l'espace de trois mois et expose que ce sont aujourd'hui au total près de 500 commerces qui ont été abusivement démarchés par la société Caldness et qui ont résilié leur contrat ce qui a engendré la dépose d'environ 1350 panneaux publicitaires.
Considérant que la prospection de la clientèle d'un concurrent constitue une pratique commerciale normale qui n'est pas en soi condamnable, quand bien même elle serait préjudiciable à la société qui s'en estime victime ; que M. Hermelin n'était tenu à l'égard de la société Insert d'aucune clause de non-concurrence de sorte qu'il pouvait visiter la clientèle de son ancien employeur même à plusieurs reprises pour proposer ses propres conventions, que, si l'accord du commerçant de souscrire un nouveau contrat supposait la résiliation du contrat préexistant liant celui-ci à la société Insert, cette décision était un choix du commerçant et ne caractérise pas un démarchage illicite de la part de la société Caldness.
Considérant que la société Insert fait valoir que les lettres de résiliation ont été rédigées en des termes identiques et que les commerçants partenaires ont motivé leur décision de résiliation sur la base d'une information inexacte intentionnellement fournie par la société Caldness ; que force est de constater comme l'a fait le juge des référés que les commerçants qui les ont signées ont motivé la résiliation par des motifs propres, invoquant notamment le défaut de paiement du preneur et des entretiens avec un représentant de la société Insert.
Considérant que la société Caldness expose qu'un certain nombre de commerçants étaient mécontents notamment pour ne pas avoir reçu régulièrement et dans les conditions contractuelles convenues paiement des loyers et produit ainsi les courriers adressés par M. Redon pour se plaindre de cette situation ; que la société Insert ne saurait le contester puisqu'elle prétend que la situation a été régularisée à l'occasion du changement de l'équipe dirigeante sans pour autant en justifier ; que, dans ces conditions, un certain nombre de clients démarchés par la société Caldness ont résilié le contrat les liant à la société Insert ; qu'il importe peu que les lettres de résiliation aient été semblables ; que force est de constater que quelques commerçants se sont rétractés quand d'autres ont accepté le contrat proposé par la société Caldness ce qui démontre qu'ils avaient été avertis des conditions de souscription d'un nouveau contrat et de la résiliation nécessaire de celui les liant à la société Insert ; que la société Insert ne rapporte pas la preuve que les 19 commerçants partenaires qu'elle cite auraient résilié leur contrat pour des motifs fallacieux.
Considérant que les courriers de résiliation visaient à tort la loi du 29 décembre 1979, qui été abrogée par une ordonnance du 18 septembre 2000 et qui exigeait une mise en demeure de payer restée sans effet durant un mois; que dès lors les commerçants pouvaient résilier leur contrat du seul fait d'une inexécution.
Considérant que, si M. Christopher Hermelin a choisi de cibler sa prospection sur les clients de la société Insert en ce que les panneaux Caldness ont été apposés au lieu et place des seuls panneaux d'Insert alors que des panneaux d'autres concurrents étaient maintenus et que 80% des implantations de Caldness ont été réalisées sur les commerces parisiens partenaires d'Insert alors que ceux-ci ne représentent pourtant à peine que 10 % du nombre des commerçants parisiens ce qui n'est pas contesté, il était libre d'adopter une telle stratégie pour la société Caldness qu'il venait de créer.
Considérant que, concernant ses partenaires annonceurs, la société Insert soutient que la société Caldness a démarché l'Etablissement public du Palais de la Porte Dorée et a, par courriel du 13 mai 2013, tenté de lui faire croire que ses affiches pour la campagne publicitaire "Vies d'exil 1954-1962" avaient été posées par la société Insert dans des panneaux propriété de Caldness.
Considérant que le courrier en cause ne mentionne pas la société Insert , ayant eu pour objet de s'enquérir de l'afficheur ou du prestataire à l'occasion d'une publicité Insert apposé sur un panneau Caldness ; que, si par ce même courrier la société Caldness a proposé ses services, ce démarchage ne repose, au demeurant sur aucun terme dénigrant à l'égard de la société Insert, ni sur une quelconque manœuvre dès lors que la société Insert ne conteste pas l'existence de sa publicité en cause sur un panneau Caldness.
Sur le dénigrement
Considérant que la société Insert soutient que la société Caldness l'a dénigrée publiquement à plusieurs reprises aux fins d'obtenir des marchés et de construire son portefeuille de commerçants partenaires et ce, notamment du fait de l'envoi d'un courrier aux partenaires d'Insert en date du 2 avril 2013 dans lequel Caldness n'hésite pas à soutenir que "des collaborateurs de la société Insert ont menacé certains commerçants ayant contracté avec notre société".
Considérant que ce courrier mentionne également que la société Insert s'expose à des condamnations pour concurrence déloyale.
Considérant que la société Caldness ne conteste ni avoir diffusé ce courrier aux partenaires de la société Insert; que ces faits constituent un acte de dénigrement comme l'ont à bon droit retenu les premiers juges.
Sur les actes de parasitisme
Considérant que la société Insert expose avoir développé une gamme de produits spécifiques axée essentiellement sur des visuels hauts de gamme et technologiques, faisant valoir qu'elle emploie des photographes afin de réaliser en son nom et pour son compte des reportages photographiques des campagnes réalisées par ses soins, pour être utilisés ultérieurement dans ses plaquettes commerciales; qu'elle soutient que la société Caldness en a profité indûment en utilisant dans une plaquette commerciale, des visuels ayant antérieurement servi à des campagnes publicitaires .
Considérant que pour présenter son offre Eté 2011 et illustrer les campagnes publicitaires qu'elle affiche, la société Insert a diffusé une plaquette commerciale comprenant notamment :
* un panneau "Mr Freeze" situé sur le commerce "Aux Délices de Charlotte" sous contrat avec elle depuis le 23 mars 2010,
* un panneau "Sprite" situé sur le commerce "le Bistrot bleu" sous contrat avec elle depuis le 6 juillet 2005, localisé à Marseille, ville dont est absente la société Caldness.
Considérant que la société Caldness ne conteste pas avoir inséré les photographies des panneaux Insert contenant des affiches "Mr Freeze"et "Sprite", prétendant que la société Insert ne détenait aucun droit sur ces visuels et ajoutant que la plaquette litigieuse n'a plus été utilisée par elle, dans un souci d'apaisement, depuis la réception de l'assignation en référé que la société Insert lui avait fait délivrer ; que si, pour justifier de ses droits, elle produit une convention du 24 janvier 2013 passée avec la société de graphisme Franck Capelli, celle-ci ne porte pas sur les photographies en cause .
Considérant que les commerces précités étant ses partenaires et les panneaux étant les siens, la société Insert apparaît comme titulaire des droits y afférant en l'absence de preuve contraire; que, quand bien même les photographies figurant sur les panneaux sont issues d'une base de données photographiques libres de tout droit, la société Caldness ayant repris la photographie des panneaux eux-mêmes sur lesquels figure la mention Insert, se trouve dès lors parfaitement caractérisée l'utilisation par la société Caldness de l'investissement de la société Insert.
Considérant que la société Insert invoque l'utilisation par la société Caldness d'une plaquette réalisée pour une campagne SFR ce que conteste la société Caldness qui expose qu'il s'agit de la première opération publicitaire qu'elle a menée en 2012 sous son ancienne enseigne qui était alors Ness Media ; que M Régent, directeur de l'agence de communication Postercope qui travaille avec SFR a écrit le 22 mai 2013 " une partie du dispositif a été confié à la société Nes Media " ; que s'il a indiqué que " malgré nos relances auprès de cette société, le 29 mai 2012, Ness Media était toujours dans l'incapacité de nous transmettre des justificatifs de pose de la campagne ou de leurs emplacements ", la société Insert ne démontre pas que la société Caldness s'est appropriée les résultats quand bien même elle se serait vu retirer le dossier à la suite de l'inexécution des prestations confiées à la société Ness Media.
Considérant que la société Insert affirme avoir réalisé, en juillet 2013, à l'occasion d'un partenariat avec la société Orange une présentation intitulée " Reporting Opération Spéciale " en utilisant une technologie innovante, dont s'est servie la société Caldness ; que celle-ci ne conteste pas avoir utilisé le visuel créé, faisant valoir qu'elle y a été autorisée par la société Orange, titulaire des droits sur celui-ci, sans que la preuve contraire soit rapportée.
Considérant qu'il résulte néanmoins de ces éléments que la société Caldness a illustré des prestations publicitaires en utilisant sans autorisation des visuels réalisés par la société Insert et s'est approprié son travail et ses investissements; que c'est à bon droit que le tribunal a retenu que la société Caldness a ainsi commis des actes de parasitisme.
Sur les pratiques commerciales trompeuses
Considérant que la société Insert soutient que les présentations commerciales querellées doivent aussi être retenues comme constitutives d'une pratique commerciale trompeuse relevant des dispositions de l'article L. 121-1 du Code de la consommation.
Considérant que l'article L. 121-1 a pour objet de protéger le consommateur en interdisant toute publicité de nature à l'induire en erreur ; qu'il dispose en son alinéa " qu'une pratique commerciale est trompeuse si elle est commise dans l'une des circonstances suivantes :
1° lorsqu'elle crée une confusion avec un autre bien ou service, une marque, un nom commercial ou un autre signe distinctif d'un concurrent ".
Considérant que la société Caldness ne conteste pas avoir repris les photographies des panneaux de la plaquette de la société Insert ; qu'il n'est pas démontré, ni même allégué que la publicité apposée par la société Caldness sur ses panneaux et dont l'objet n'est même pas précisé à la Cour ait été de nature à tromper le consommateur dont il ne peut dès lors être soutenu que la décision d'achat serait affectée à raison d'un risque de confusion entre les deux sociétés de publicité.
Considérant qu'il y a lieu de confirmer la décision entreprise qui a débouté la société Insert de ce chef.
Considérant que la société Insert ne soutient plus en cause d'appel l'existence d'une publicité comparative et dénigrante.
Sur l'appel incident de la société Caldness
Considérant que la société Caldness estime avoir été elle aussi victime d'actes de concurrence déloyale de la part de la société Insert.
Sur les actes de dénigrement
Considérant que la société Caldness soutient avoir fait l'objet de dénigrement par la société Insert auprès des sociétés Havas Media et UMT Havas Media ainsi qu'auprès des commerçants-bailleurs.
Considérant qu'à l'appui de cette affirmation la société Caldness produit un courrier du directeur d'Havas Média en date du 18 avril 2013 ; que ce courrier fait état de propos de" certains concurrents " sans citer la société Insert ; que, si la société Caldness indique s'être expliquée auprès de la société Havas et lui avoir transmis les documents adressés à ses nouveaux clients, il ne résulte pas de ce courrier la démonstration d'actes de dénigrement commis par la société Insert auprès de cet annonceur, quand bien même celui-ci a mis fin à ses relations avec elle.
Considérant que la société Caldness produit un courrier non daté mais comportant le logo Insert écrivant " quelques ex collaborateurs tentent de monter une société concurrente... Nous menons actuellement une procédure contentieuse auprès du tribunal contre cette société "; qu'il n'est pas contesté que ce courrier a été diffusé et que la société Caldness, bien qu'elle ne soit pas nommément désignée, n'en était pas moins parfaitement identifiable ; que se trouve caractérisé un acte de dénigrement à son encontre.
Considérant que la société Caldness soutient que la société Insert a commis des actes de dénigrement auprès de commerçants bailleurs, en leur faisant croire que ses méthodes étaient illégales et qu'ils pouvaient encourir des amendes au lieu de contester judiciairement les résiliations et qu'ainsi 59 lettres de résiliation identiques lui ont été adressées entre janvier 2013 et juin 2014.
Considérant qu'il résulte de ces lettres qu'un certain nombre de commerçants ont résilié le contrat conclu avec la société Caldness en invoquant, d'une part, une implantation des panneaux de la société Caldness en totale infraction avec les dispositions réglementaires, d'autre part, en infraction à l'article R. 581-67 du Code de l'environnement alors qu'aucun élément ne vient étayer le fait que ces infractions étaient commises de façon systématique et constituaient la cause des résiliations ;que la société Insert n'en rapporte pas la preuve puisque dans un seul cas, la société Caldness, quand bien même elle a écrit le 4 juin 2013 à son client pour l'aviser du démontage de 25 panneaux sur 27, lui a garanti paiement des loyers convenus de sorte qu'il n'y a pas eu de résiliation; que, dès lors, les mentions cochées sur des imprimées de résiliation fournis par la société Insert ne peuvent l'avoir été que sur des affirmations de la société Insert pour récupérer les clients en cause et sont parfaitement dénigrantes.
Considérant que la société Caldness expose que les courriers de résiliation mettent en évidence un processus " d'industrialisation " des résiliations par la société Insert en ce que celles-ci ont été multipliées pour un seul et même client ; que s'agissant de la résiliation par la société Sari et la société Godasses 2000, elle a reçu trois courriers de chacune de ces sociétés dont deux dactylographiés invoquant chacun des motifs différents ; qu'elle fait observer qu'elle a également reçu deux courriers manuscrits de résiliation de la société Insou 786 dont l'un présente la même écriture que celui reçu de la société Godasses 2000 et deux courriers de résiliation identiques de la société Ikorine à deux mois d'intervalle, que d'autres courriers de résiliation ne comportent pas de signature, de nom ou de tampon de la société.
Considérant que la société Caldness a fait dresser deux constats d'huissier aux termes desquels il a été constaté que, pour plusieurs dizaines de courriers de résiliation qu'elle avait reçus, l'écriture figurant sur l'enveloppe était la même, les courriers émanaient du même bureau de poste, plusieurs textes dactylographiés comportaient le même texte et les lettres manuscrites le même motif de résiliation; qu'il ressort de ces envois que la société Insert est intervenue de façon systématique chez les clients qu'elle avait perdus et les a convaincus de rompre le contrat conclu avec la société Caldness sous des motifs trompeurs.
Considérant que la société Caldness invoque un harcèlement et des menaces sur ses clients commerçants quand bien même ils n'étaient pas précédemment les clients de la société Insert; qu'elle produit notamment pour en faire la démonstration les 13 attestations qui ont été retenues par les premiers juges.
Considérant que la société Insert soutient que doivent être écartées les attestations suivantes :
celle de Mme Colin en ce qu'elle présente un parallélisme de forme avec celle de Mme Wezranowska ; que pour autant elle ne remet pas en cause les signatures qui sont différentes,
celle de M. Charhine Driss en ce qu'elle présente un parallélisme de formes avec celle de M. Sarfati, cette dernière présentant selon la société Insert une signature différente de celle figurant sur le contrat de mise à disposition et ne mentionnant pas la société Insert ; que pour autant ces observations ne remettent pas en cause les signatures des attestations,
celle de Mme Le Goff en ce qu'elle constituerait un faux, la société Insert soutenant que l'intéressée n'a pas pu commettre une faute sur son propre nom en écrivant et en signant Legoff ; que toutefois si son auteur a indiqué le 21 novembre 2013 " Je ne veux pas être dans l'action juridique ", elle n'a pas contesté sa signature ; que la société Caldness fait observer que l'auteur est une dame âgée,
celles de M. Gérard Salem qui constituerait un faux car le titre de séjour produit en photocopie indique " M.Ait Hammou Salem " avec une signature différente, le kbis confirmant que ce dernier est le gérant ; qu'il y a lieu de constater qu'ont été produites deux attestations au nom respectif de chacun d'eux et que, si elles sont libellées en des termes identiques, il n'y a pas lieu pour autant de les écarter puisqu'elles sont parfaitement individualisées,
celles de M. Kemmache car censées avoir été écrites par une seule personne et comportant des signatures différentes ; que, si la société Caldness ne conteste pas cette différence, il y a lieu de constater que l'attestation produite par la société Caldness mentionne bien M. Kemmache comme auteur alors que l'autre postérieure n'est pas identifiable de sorte que le rapprochement est inopérant,
celles de M. Beghal Kaci, de M. Smail Saadi et de Mme Jakab Edita car écrites par la même personne; qu'il s'agit d'une affirmation de la société Insert non vérifiée alors que les signatures et les documents d'identité permettent de retenir qu'il s'agit de personnes distinctes, chacune étant au demeurant commerçant et son commerce étant identifié,
celle de M. Jin Anbo en ce qu'elle comporte une faute sur le nom du commerce écrit " Lutecia " au lieu de " Lutetia " et alors que cette faute corrigée se retrouve dans le contrat rédigé par le commercial de la société Caldness; que cette faute qui n'entache pas au demeurant la phonétique du nom n'est pas de nature à mettre en cause la teneur même de l'attestation et son auteur,
celle de Mme Ezzakri, établie en qualité de gérante du fonds de commerce car la carte nationale d'identité l'accompagnant est celle de M. Said Ezzakri ; que pour autant ni la qualité ni la signature de l'intéressée ne sont contestées.
celle de M. Duong du 10 octobre 2013 dans la mesure où il a établi une seconde attestation en date du 25 novembre 2013 par laquelle il indique " Je souhaite aujourd'hui conserver mon partenariat avec Caldness et Insert "; que celle-ci qui ne constitue pas une rétractation de la première ne saurait la remettre en cause,
celle de M. Fouquet du 10 octobre 2013 ; que s'il s'est rétracté le 20 novembre 2013, cette circonstance n'est pas de nature à remettre en cause son attestation,
celles de M. Najibi en ce qu'elles présentent deux écritures différentes et que la carte d'identité est illisible ; que pour autant l'identité de l'auteur des attestations n'est pas remise en cause,
celle de M. Li en ce qu'elle est datée du 31 mai 2013 et que le constat d'huissier établi le même jour a constaté que le gérant est absent ; que cette absence à ce moment-là ne remet pas en cause l'attestation qu'il a établie,
celle de Mme Palis en ce que sa signature et celle figurant sur la copie du permis de conduire sont différentes ; que pour autant le document d'identité produit démontre l'identité de l'auteur de l'attestation et aucun élément ne permet de l'écarter du seul fait de ce que les signatures ne sont pas parfaitement semblables, la cour observant que le permis est en date du 5 novembre 1998 et l'attestation du 25 avril 2014,
celle du dirigeant du commerce des 4 Saisons en ce que celui-ci ne doit pas être confondu avec le commerce homonyme localisé non pas dans le 12e arrondissement mais dans le 19e ; que pour autant l'auteur de l'attestation indique bien avoir pris peur après la visite du commercial de la société Insert au motif que les panneaux Caldness étaient en infraction de sorte qu'il n'y a pas lieu d'écarter cette attestation, aucune confusion n'étant démontrée quant à son auteur,
celles de la boulangerie Les Moissons et de la boulangerie Basso car elles ne sont pas accompagnées de pièces d'identité et que leurs signatures sont différentes de celles figurant sur les lettres de résiliation.
Considérant que force est de constater que les griefs de la société Insert ne sont pas dans leur majorité pertinents quand bien même certaines attestations présentent des défauts; que si la société Insert fait état de faux, elle ne justifie d'aucune plainte ; que de plus la société Caldness produit d'autres attestations qui ne sont pas critiquées (pièces 92, 93, 121 et 177) et qui corroborent les attestations précitées caractérisant le fait que la société Insert est intervenue pour récupérer des contrats en usant de moyens déloyaux
Considérant que, si la société Caldness ajoute que les commerciaux de la société Insert se sont fait passer pour des agents de la mairie et produit l'attestation de Mme Hanachi qui relate " avoir été visitée le 15 juillet 2013 " par des agents de la mairie de Paris pour me signifier la non légalité des panneaux publicitaires installés par la société Caldness ", cette attestation ne démontre pas qu'il s'agissait de commerciaux de la société Insert.
Qu'elle produit en revanche l'attestation de Mme Palis qui atteste de ce que la société Insert lui a indiqué qu'elle aurait de problèmes avec la mairie et celle de Mme Colin qui atteste qu'alors qu'elle n'a jamais contracté avec la société Insert, elle a été approchée par M. Christophe Jean pour lui dire que ses panneaux Caldness étaient illégaux et lui " avait fait peur en lui énumérant les multiples amendes ... ".
Considérant que la société Caldness fait observer que la lettre recommandée de résiliation qui lui a été adressée par la boulangerie pâtisserie sise au [...] qui avait précédemment résilié son contrat avec la société Insert le 12 février 2013 porte la date du 3 avril alors qu'elle n'a été prise en charge par la poste que le 7 mai 2013 ; qu'elle produit un constat d'huissier dressé le 3 juin 2013 qui relève la présence de 8 panneaux d'affichage tous de la société Caldness ce qui démontre que ce client n'entendait pas résilier le contrat passé avec elle et ayant fait suite à celui conclu précédemment avec la société Insert.
Considérant qu'il résulte de ces éléments que la société Insert a usé de manœuvres déloyales auprès des clients de la société Caldness.
Sur les actes d'intimidation à l'égard de M. Hermelin, dirigeant de la société Caldness et des commerciaux
Considérant que la société Caldness fait état de courriers recommandés adressés une ou deux fois par semaine à son dirigeant dans des termes comminatoires.
Qu'elle vise un courrier recommandé du 2 mai 2013 qui vise la diffusion de la plaquette commerciale et la décision du juge des référés, précisant que la société Insert a l'intention d'engager une procédure au fond; que cette menace correspond à des faits avérés dont la société Insert était fondée à tirer les conséquences dans le cadre d'une procédure contentieuse.
Que, pour autant, la société Insert a de nouveau écrit les 7 et 15 et 31 mai 2013 persistant dans ses accusations ; que, par un autre courrier du 7 juin 2013 elle s'est plaint de l'agression d'un de ses salariés par une commerciale de la société Caldness alors que celle-ci avait porté plainte au commissariat pour violence sur sa personne, relatant que le représentant de la société Insert lui avait pris de force son téléphone portable avec lequel elle tentait de prendre une photographie pour attester du démontage par celui-ci des panneaux Caldness pour poser les panneaux Insert sur le commerce [...] .
Considérant que la société Insert affirme que ses courriers des 15 et 31 mai 2013 font suite aux actes de dénigrement commis par la société Caldness auprès de l'un de ses annonceurs, l'Etablissement public de la Porte Dorée; que comme il a été vu précédemment, aucun acte de dénigrement n'a été retenu à l'encontre de la société Caldness de ce chef.
Considérant qu'il résulte de ces éléments que la société Insert a multiplié les courriers envoyés au dirigeant de la société Caldness ce qui dans le contexte, la société Caldness étant une société récemment créée, avait manifestement un but d'intimidation.
Considérant que la société Caldness évoque un harcèlement et des menaces sur ses commerciaux ; qu'elle produit le courrier que M. Abchiche adressé le 31 juillet 2013 à la société Insert en réponse à un courrier du 24 juillet 2013 indiquant " Je m'étonne du contenu de ce courrier et des accusations que vous portez à nouveau à mon encontre " ; que la société Insert fait valoir que ce commercial a commencé de démarcher des clients pour le compte de la société Caldness alors qu'il était encore son salarié et qu'il a divulgué à un journaliste des informations confidentielles qui lui avaient été transmises à l'occasion de ses précédentes fonctions de délégué du personnel ; que la société Caldness ne conteste pas ces circonstances de sorte que s'agissant d'un contentieux personnel, il ne saurait être déduit du courrier adressé à l'intéressé des menaces ou des actes d'intimidation.
Considérant que la société Caldness produit le courriel d'un autre de ses commerciaux, M. Palin qui indique s'être fait verbalement agressé par un afficheur de la société Insert et avoir déposé une main courante.
Considérant que ces éléments démontrent l'agressivité développée par la société Insert à l'encontre de sa concurrente ; c'est dès lors à bon droit que les premiers juges ont retenu que l'envoi au dirigeant de la société Caldness de courriers menaçant dans un laps de temps limité et alors que les parties avaient déjà soumis leurs litiges au tribunal de commerce constituait une faute et engageait la responsabilité de la société Insert.
Sur la dépose des panneaux
Considérant que la société Insert soutient que 1363 panneaux lui appartenant ont été déposés illégalement par la société Caldness et qu'elle a dû commander 300 nouveaux panneaux dès le 13 mai 2013 pour un prix de 55 362,84euro et 775 panneaux le 16 avril 2013 pour un montant de 45 799,62 euro.
Considérant que la société Caldness ne saurait contester la dépose des panneaux de la société Insert puisqu'elle a installé ses propres panneaux et qu'elle soutient avoir fait l'objet de faits identiques commis par la société Caldness sur ses panneaux, soit 123 démontages dont 60 ayant concerné des commerçants avec lesquels la société Insert n'était plus sous contrat.
Considérant que par courrier du 23 mai 2013, la société Insert a mis en demeure la société Caldness de cesser ses opérations de démontage et de lui restituer les panneaux démontés ; que le 24 septembre 2013, elle lui a indiqué qu'elle se tenait à sa disposition pour lui restituer les panneaux irrégulièrement mis en place en remplacement des siens ; qu'elle reconnaît ainsi avoir réalisé des déposes de panneaux.
Considérant que si la société Caldness verse une attestation de M. Folliot, ancien directeur général de la société Insert, qui indique avoir " constaté de septembre 2005 à septembre 2006 " une pratique d'enlèvements des panneaux ", ces faits ne concernent pas les panneaux de la société Caldness qui n'existait pas lors de la période visée ; que, pour autant, la société Caldness produit des attestations de commerçants, des procès-verbaux de constats d'huissiers mettant en évidence les démontages qui ont été opérés de ces panneaux.
Qu'elle produit un constat d'huissier dressé le 30 mai 2013 recueillant les déclarations de M. Zgueb qui indique que sa façade comportait des panneaux d'affichage, tous de la société Caldness et que des employés de la société Insert sont intervenus et " ont décollé tous les panneaux pour les remplacer par des panneaux d'affichage Insert "et les avaient emportés en lui précisant qu'ils seraient déposés chez la société Caldness ; que l'huissier a constaté la présence des 6 panneaux Insert;
Considérant en conséquence qu'il résulte de ces éléments que les deux sociétés ont respectivement procédé à la dépose des panneaux au gré des résiliations intervenues ; que les courriers échangés démontrent que les panneaux, s'ils ont été enlevés, restaient à disposition de la société concurrente; que ces faits avérés s'inscrivent dans des agissements déloyaux de l'une comme de l'autre des sociétés.
Sur les affichages
Considérant que la société Caldness ajoute que la société Insert a fait procéder à des affichages sur des panneaux lui appartenant.
Qu'elle a fait constater par un procès-verbal de constat d'huissier que sur trois supports d'affichage à la boulangerie pâtisserie sise [...], l'un comportait une affiche de la société Insert; qu'elle verse une attestation de M. Charuel, gérant d'un salon de coiffure, qui relate avoir constaté qu'au cours de la semaine du 7 mai 2013; une affiche avait été remplacée sans son accord par une affiche intitulée " Vies d'exil 1954/1962.... " de la société Insert.; que se trouvent ainsi caractérisés des agissements déloyaux.
Considérant que la société Caldness ajoute que la société Insert a procédé à des affichages sauvages illégaux sur des commerces abandonnés ou désaffectés, produisant des procès-verbaux de constat d'huissier en date du 11 avril et du 25 juin 2013 ; que pour autant ceux-ci ne rapportent pas la preuve qu'il s'agit de bâtiments abandonnés, ni que la société Insert n'avait pas d'autorisation des propriétaires de lieux ; que c'est à juste titre que les premiers juges ont écarté le moyen de l'affichage sauvage avancé par la société Caldness comme constituant un avantage concurrentiel.
Sur les irrégularités affectant les sites internet www.Insert.fr, www.offremedia.fr et www.mediatables.fr
Considérant que la société Caldness soutient que la société Insert a fait apparaître de fausses informations sur son site internet.
Considérant qu'une pratique commerciale est trompeuse au sens de l'article L. 121-1 du Code de la consommation si elle est commise dans l'une des circonstances suivantes :
" *' 2° Lorsqu'elle repose sur des allégations, indications ou présentations fausses ou de nature à induire en erreur et portant sur l'un ou plusieurs des éléments suivants :
a) L'existence, la disponibilité ou la nature du bien ou du service ;
*'+
f) L'identité, les qualités, les aptitudes et les droits du professionnel ".
Considérant que la société Caldness affirme que la société Insert prétend faussement détenir une " implantation sur 100% des agglomérations de plus de 100 000 habitants "et disposer de la densité d'affichage suivante : " 1 panneau tous les 200 mètres à Paris et tous les 400 mètres en province " et avoir " 26 465 commerces partenaires contractuels "et que les indications figurant sur la fiche de présentation de la société Insert sur le site de la société Ofremedia sont également fausses en ce qu'elles indiquent :
" Les offres d'Insert
Le 25/05/2012
Comme chaque été, Insert renforce son offre permanente de 100 000 panneaux d'affichage par des panneaux supplétifs. Cette année, l'afficheur va installer 6 000 nouveaux panneaux dans les 300 stations balnéaires de France : 4 000 faces sur plus de 800 points de vente dans ses réseaux Presse et 2 000 faces sur environ 1 300 commerces de proximité sur ses réseaux Affichage Centre-Ville.
Offres en brut valables du 2 juillet au 2 septembre 2012, à partir de 135 000 euro (Affichage Centre-Ville) et 21 745 euro (Presse) ".
Considérant que la société Insert expose qu'elle constitue le plus grand réseau de France couvrant 40% de la diffusion presse au numéro ce que la société Caldness a elle-même indiqué dans ses conclusions et que le chiffre de 100 000 panneaux est justifié; que la société Caldness n'apporte pas la preuve contraire.
Que la société Caldness ajoute que sur le site www.mediatables.fr dont la société Insert déclare avoir fait l'acquisition figure une rubrique témoignages et avoir des doutes sur l'authenticité et la véracité des témoignages y figurant; elle n'apporte aucun élément justifiant son affirmation.
Considérant que la société Caldness invoque le fait que sur le site de la société Insert ne figure pas la mention obligatoire " mentions légales " ce qu'elle a fait constater par procès-verbal d'huissier du 22 avril 2013 ce qui a depuis lors été régularisé de sorte que comme l'ont retenu les premiers juges la société Caldness ne démontre pas que ce fait aurait constitué un acte de concurrence déloyale.
Sur le préjudice de la société Insert
Considérant que la société Insert prétend que son préjudice se caractérise notamment par le détournement de sa clientèle, ainsi que par les frais engagés suite à la dépose des panneaux par Caldness sur ses emplacements, ce point faisant l'objet d'un développement ultérieur) mais également par l'atteinte portée à son image.
Sur le préjudice d'image
Considérant que la société Insert fait état d'un préjudice d'image résultant des faits de dénigrement ;
Considérant que le tribunal a retenu que la société Insert n'a apporté aucun élément de nature à mesurer l'impact et le préjudice résultant du dénigrement dont elle a fait l'objet; qu'en cause d'appel elle fait valoir que le courrier en cause a été envoyé à ses partenaires commerçants et qu'elle a été contrainte de contacter individuellement chacun d'eux.
Considérant que, pour autant, le tribunal a fait une exacte appréciation de son préjudice d'image en lui allouant la somme de 15 000 euro;
Sur le préjudice résultant du parasitisme
Considérant que la société Insert fait état de la diffusion de plus de 4 000 plaquettes ayant utilisé ses visuels ;
Considérant que la société Caldness a indiqué avoir cessé d'utiliser les visuels litigieux, aucune preuve contraire n'étant rapportée; qu'il y a lieu en conséquence de débouter la société Insert de sa demande tendant à la destruction de l'intégralité des plaquettes commerciales litigieuses.
Considérant qu'il résulte nécessairement de ces actes de parasitisme un trouble commercial que les premiers juges ont à juste titre estimé à la somme de 5 000 euro.
Sur le préjudice de la société Caldness
Considérant que la société Caldness chiffre son préjudice commercial à la somme de 2 800 000 euro et son préjudice moral à 200 000 euro, produisant en cause d'appel " un rapport d'évaluation des différents chefs de préjudice subis ", rapport que la société Insert demande à la Cour d'écarter.
Considérant que l'expert, auteur de ce rapport, indique l'avoir réalisé sur la base des " informations communiquées par la société Caldness et ses conseils et que ces informations ont uniquement fait l'objet d'une étude en vue de la rédaction de ce rapport et non pas d'un audit " ; qu'il précise ainsi très exactement les limites de son travail ; que son rapport a été soumis au débat contradictoire; qu'il n'y a pas lieu de l'écarter, la Cour étant en mesure d'apprécier sa pertinence au regard des faits retenus par elle comme constitutifs de concurrence déloyale.
Considérant que la société Caldness invoque des coûts engagés en pure perte, des gains manqués et une dégradation de son image que la Cour retient dans leur principe et pour lesquels l'expert a produit une évaluation chiffrée.
Qu'il fait état de la mobilisation du personnel pour gérer le litige ; que, s'il estime à 5 le nombre de salariés concernés en mai 2013 puis à 8 en 2013 outre 50 % pour le dirigeant, chiffre passant à 3 personnes en février 2014 mais à 100 % pour le dirigeant, il s'agit d'une estimation tout comme l'évaluation qui s'ensuit, soit un montant de 219 531euro en 2013 et 137 676 euro en 2014 représentant 47 % de la masse salariale; que de même sans aucun élément à l'appui, il ajoute que ce chef de préjudice a perduré après le premier semestre 2014 représentant alors un montant mensuel de 21 140 euro ; que si le litige a impliqué le dirigeant et ses salariés, les bases de calcul retenus apparaissent manifestement exagérées au regard des faits précédemment décrits ;
Considérant que l'expert retient un préjudice résultant du démontage des panneaux alors que ceux-ci avaient été acquis progressivement depuis le début de l'activité de la société Caldness ; qu'il indique qu'au jour de son rapport " aucune sortie d'immobilisation n'est encore enregistrée ", au motif que la comptabilisation est faite par un cabinet externe ; qu'il indique néanmoins que pour l'année 2013 à la suite du recensement des immobilisations sorties, le préjudice pour ce poste s'établit à la somme de 115 679 euro en 2013 et estime celui-ci à 56 583 euro pour le premier semestre 2014, ajoutant que ce préjudice a perduré et retenant un préjudice moyen mensuel de 8 316euro ; qu'il précise toutefois que le nombre de panneaux démontés repose sur une estimation de la société Caldness; que force est de constater que l'ampleur des chiffres exposés apparaît notoirement exagéré d'autant que les deux sociétés avaient échangé des courriers dont il résulte que l'une comme l'autre tenait à disposition de sa concurrente les panneaux déposés.
Considérant que l'expert relève des coûts induits par le recours à des prestataires extérieurs soit 80 108 euro en 2013 et 10 424 en 2014 constitués par des frais d'huissiers et d'avocats, frais relevant des frais de justice dont il n'y a pas lieu de tenir compte dans la fixation du préjudice résultant directement des faits de concurrence déloyale.
Considérant que l'expert retient un préjudice au titre des gains manqués, indiquant avoir calculé ce préjudice par " différentiel entre des éléments prévisionnels attendus et ceux effectivement constatés ", estimant celui-ci à 174 000 euro pour 2013 et 406 000 euro pour le premier semestre 2014 ; qu'il n'est pour autant pas démontré l'existence du prévisionnel visé, ni justifié de son sérieux permettant de le prendre comme base d'appréciation.
Considérant que l'expert prend l'hypothèse que chaque commercial terrain de la société Caldness recrute 38 commerces par mois, chiffre correspondant à la moyenne des seuls mois de février et mars 2013, pour retenir un chiffre d'affaires perdu de 213Keuro en 2013 et de 680Keuro en 2014 et sur la base d'un taux de marge brute de 59 % un manque à gagner de 48Keuro et 83Keuro ; qu'il estime sur la même base un manque à gagner lié au retard de l'expansion de la société Caldness, estimant que 2 656 commerces de plus que les 1679 réellement installés auraient pu l'être à fin juin 2014 lesquels auraient pu générer une marge jusqu'en 2017 ; qu'il procède ainsi à une estimation parfaitement aléatoire du préjudice de la société Caldness d'autant qu'il ne tient pas compte de l'évolution du nombre de commerciaux, tout en relevant qu'il a diminué.
Considérant que la société Insert soutient que les difficultés de la société Caldness sont structurelles rendant impossible tout bénéfice, celle-ci ayant enregistré une perte de 37 500 euro dès l'exercice 2012 et de 1 415 792,55 euro au titre de l'exercice 2013 ; que la société Caldness a dû procéder à la dépose de panneaux à la demande de la ville de Paris ce qui résulte du courrier même de la société Caldness faisant état de la dépose de 25 panneaux sur 27 pour un même client ; que si à cette occasion, elle a assuré néanmoins le maintien des loyers, elle a subi une perte du fait de cette gestion, affectant le bénéfice qu'elle pouvait escompter ce qui ne saurait être imputé aux actes de concurrence déloyale de la société Insert ; que la société Insert ajoute que ses difficultés résultent aussi de la faiblesse de son coût de lancement, bien inférieur au prix moyen de réservation du marché ce qui n'est pas contesté ; que dès lors la société Caldness n'apporte aucun élément de nature à remettre en cause l'appréciation de son préjudice commercial fait par les premiers juges.
Considérant que la société Caldness a subi un préjudice d'image d'autant qu'elle avait été créée récemment ; que la Cour fixera celui-ci à la somme de 15 000 euro ; qu'il y a lieu d'ajouter à la décision entreprise de ce chef.
Sur l'article 700 du Code de procédure civile
Considérant que la société Caldness a dû engager des frais non compris dans les dépens qu'il serait inéquitable de laisser en totalité à sa charge, qu'il y a lieu de faire application des dispositions de l'article 700 dans la mesure qui sera précisée au dispositif.
Par ces motifs, LA cour, statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort, donne acte à Maître Christian Hart de Keating, ès-qualités, de son intervention volontaire à la présente procédure pour le compte de la société Caldness, en liquidation judiciaire ; confirme le jugement déféré sauf à y ajouter au titre du préjudice moral de la société Caldness, Et statuant à nouveau de ce chef, condamne la société Insert à payer à Maître Christian Hart de Keating, ès-qualités, la somme de 15 000 euro au titre du préjudice d'image subi par la société Caldness, condamne la société Insert à payer à Maître Christian Hart de Keating, ès-qualités, la somme de 15 000 euro au titre de l'article 700 du Code de procédure civile, condamne la société Insert aux dépens qui seront recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du Code de procédure civile.