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Décisions

CA Aix-en-Provence, 8e ch. A, 24 mars 2016, n° 13-23856

AIX-EN-PROVENCE

Arrêt

Confirmation

PARTIES

Demandeur :

Danideo (SARL)

Défendeur :

Phocéenne de Restauration (SAS) , Dubble Food Developpement (SARL)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Roussel

Conseillers :

Mmes Durand, Dubois

Avocats :

Mes Levaique, Delmonte, Bensoussan, Ropars

T. com. Marseille, du 5 déc. 2013

5 décembre 2013

Madame X, responsable commerciale, directrice des ventes dans le secteur du négoce en plastiques industriels, puis gérante de station-service, après avoir reçu le 20 juillet 2010 le document d'informations précontractuelles de la franchise " Dubble ", (DIP) a signé le 1er septembre 2010 avec la société Phocéenne de Restauration un contrat de réservation de zone et versé une somme de 5 000 euros à titre d'indemnité de réservation.

Le contrat d'une durée de 6 mois avait pour objet de permettre au candidat d'entamer toutes les démarches permettant l'implantation et l'ouverture d'un ou plusieurs points de vente " Dubble " sur la zone Marseille centre-ville, 1er et 6e arrondissements.

Le 17 novembre 2010 le contrat de franchise exclusive a été signé entre les mêmes parties, Madame X pour son compte ou celui de toute société qu'elle serait amenée à créer.

Le franchiseur y exposait avoir développé un concept de restauration rapide " à la Française " (sandwiches, salades, soupes...) et l'exploiter sous l'enseigne " Dubble ", Madame X disant envisager d'exploiter un établissement sous cette enseigne <adresse>.

Ce contrat était d'une durée de 7 ans à compter de sa signature, pouvant être renouvelé par accord explicite entre les parties.

En contrepartie du droit d'exploiter l'enseigne et le savoir-faire du franchiseur Madame X réglait la somme de 15 000 euros HT au titre du droit d'entrée et s'engageait à lui verser une redevance annuelle égale à 5 % HT du chiffre d'affaires réalisé par l'ensemble de ses points de vente avec un minimum garanti de 7 200 euros par an et par point de vente, payable mensuellement par douzième.

Il était en outre prévu que lorsque le réseau atteindrait le nombre de 25 points de vente, les campagnes de communication globales seraient mises en place, le franchiseur réglant une redevance de communication d'un montant maximal de 1 % HT de son chiffre d'affaires HT.

Le 25 juin 2012 un avenant au contrat de franchise a été conclu entre la société Danideo, ayant pour gérante Madame X, et la société Dubble Food Developpement, venant aux droits et obligations du franchiseur Phocéenne de Restauration, le franchisé disant accepter la substitution de franchiseur prenant effet à compter du 1er juillet 2012.

Par exploits des 21 et 26 février 2013 Madame X et la SARL Danideo ont assigné la société Phocéenne de Restauration et la société Dubble food Developement devant le Tribunal de commerce de Marseille, au visa des articles 1109, 1110, 1147, 1149, 1382 et 1383 du Code civil, L. 330-3 et R. 330-3 du Code de commerce, aux fins d'entendre prononcer la nullité du contrat de franchise et condamner solidairement la société Phocéenne de Restauration et la société Dubble Food Developement au paiement de la somme de 176 434 euros, ainsi qu'à leur restituer l'intégralité des redevances versées, la somme de 20 000 euros en réparation du préjudice moral, outre celle de 1 362 euros par mois à compter du 1er décembre 2010 jusqu'au paiement à intervenir, au titre du préjudice financier au profit de Madame X en son nom personnel.

Par jugement du 5 décembre 2013 le tribunal a :

Déclaré la société Danideo et Madame X irrecevables en leurs demandes dirigées contre la société Phocéenne de Restauration,

En conséquence,

Mis hors de cause la société Phocéenne de Restauration sans dépens,

Déclaré Madame X irrecevable en ses demandes,

Débouté la société Danideo de toutes ses demandes, fins et conclusions,

Prononcé la résiliation du contrat de franchise du 17 novembre 2010 aux torts de la société Danideo,

Condamné la société Danideo à payer à la société Dubble Food Développement la somme de 2 431,39 euros TTC au titre des redevances impayées au jour de la résiliation du contrat et celle de 14 400 euros au titre de l'indemnité de résiliation anticipée du contrat de franchise,

Débouté la société Dubble Food Développement de ses autres demandes reconventionnelles,

Condamné la société Danideo au paiement de la somme de 1 000 euros en application de l'article 700 du Code de procédure civile,

Laissé les dépens à la charge de la société Danideo et Madame X,

Rejeté pour le surplus toutes les autres demandes, fins et conclusions contraires aux dispositions du jugement.

Par acte du 12 décembre 2013 la société Danideo et Madame X ont interjeté appel de cette décision.

La société Danideo a été placée en liquidation judiciaire le 6 janvier 2014.

Par conclusions récapitulatives déposées et notifiées le 11 mars 2014, tenues pour intégralement reprises, la SCP Y, mandataire judiciaire, liquidateur judiciaire à la procédure collective de la société Danideo, intervenant volontaire, et Madame X, demandent à la cour de :

Vu les articles 1109, 1110, 1147, 1149, 1382 et 1383 du Code civil, L. 330-3 et R. 330-3 du Code de commerce,

Vu l'article 5 du règlement CE n° 2790/1999 du 22 décembre 1999,

Vu le jugement du Tribunal de commerce de Marseille en date du 6 janvier 2014 ayant ouvert la liquidation judiciaire de la société Danideo,

Prononcer la nullité du contrat de franchise Dubble du 17 novembre 2010,

Recevoir en son intervention volontaire la SCP Y, mandataire judiciaire, liquidateur judiciaire à la procédure collective de la société Danideo,

En conséquence,

Condamner solidairement la société Phocéenne de Restauration et la société Dubble Food Developpement à payer à la SCP Y, mandataire judiciaire, une somme de 176 434 euros au titre de restitutions consécutives à l'annulation du contrat et de dommages et intérêts complémentaires, à restituer l'intégralité des redevances versées à compter du 1er décembre 2010 et jusqu'au jugement (SIC) à intervenir,

Condamner la société Phocéenne de Restauration à verser à Madame X en son nom personnel la somme de 20 000 euros à titre de son préjudice moral et celle de 1 362 euros par mois à compter du 1er décembre 2010 jusqu'au jugement (SIC) à intervenir,

Dire que ces sommes porteront intérêts au taux légal et anatocisme,

Débouter les sociétés Phocéenne de Restauration et Dubble Food Developpement de l'intégralité de leurs demandes, fins et conclusions,

Les condamner solidairement au paiement de la somme de 5 000 euros en application de l'article 700 du Code de procédure civile et aux dépens.

Par conclusions récapitulatives déposées et notifiées le 20 janvier 2016, tenues pour intégralement reprises, la société Dubble Food Developpement, la société Phocéenne de Restauration en liquidation judiciaire depuis le 8 avril 2015, et Me Z, ès qualités de liquidateur judiciaire de la société Phocéenne de Restauration, demandent à la cour de :

Donner acte à Me Z de son intervention volontaire à la procédure en qualité de liquidateur judiciaire de la société Phocéenne de Restauration,

Confirmer le jugement entrepris,

Juger irrecevables les dernières demandes formulées contre la société Phocéenne de Restauration,

Mettre hors de cause la société Phocéenne de Restauration,

Débouter Me A, ès qualités de liquidateur judiciaire de la société Danideo et Madame X de l'ensemble de leurs demandes, fins et conclusions,

Constater le bien fondé, et au besoin, Prononcer, la résiliation du contrat de franchise aux torts exclusifs de la société Danideo à effet du 5 mars 2013,

Fixer au passif de la société Danideo la créance au titre de l'indemnité contractuelle de résiliation du contrat de franchise à ses torts à la somme de 14 400 euros et celle de redevances impayées à la somme de 2 431,39 euros TTC, celle de frais irrépétibles de première instance à la somme de 1 000 euros,

Y ajoutant,

Fixer au passif de la société Danideo la créance de frais irrépétibles d'appel à la somme de 5 000 euros,

Condamner solidairement Me A, ès qualités, Madame X aux entiers dépens.

L'affaire a été clôturée en l'état le 27 janvier 2016.

Motifs

Attendu qu'il est donné acte à Me Z de son intervention volontaire en qualité de liquidateur judiciaire à la procédure collective de la SAS Phocéenne de Restauration et à la SCP Y de son intervention volontaire en qualité de mandataire judiciaire, liquidateur judiciaire à la procédure collective de la SARL Danideo ;

Sur la recevabilité des demandes dirigées contre la société Phocéenne de Restauration :

Attendu que la société Phocéenne de Restauration, désireuse de rationaliser son organisation, a confié à la société Dubble Food Developpement l'activité de développement du réseau des franchisés ;

Attendu qu'elle a transféré à la société Dubble Food Developpement tous les droits et obligations de la société Phocéenne de Restauration au titre du contrat de franchise du 17 novembre 2010 et la société Danideo a expressément accepté cette substitution de franchiseur ;

Attendu que les demandes dirigées à l'encontre de la société Phocéenne de Restauration, tant par la société Danideo que par Madame X à titre personnel, sont en conséquence irrecevables ;

Attendu que la société Phocéenne de Restauration a été justement mise hors de cause par les premiers juges ;

Sur les demandes présentées par Madame X à titre personnel :

Attendu que Madame X s'est substituée la société Danideo dans le contrat de franchise ;

Attendu qu'elle soutient toutefois subir un préjudice personnel consistant, d'une part, en un préjudice moral et, d'autre part, en un préjudice financier, exposant n'avoir perçu aucun revenu pendant le temps d'exploitation du point de vente à l'enseigne " Dubble " par la société Danideo, alors qu'elle percevait un salaire net par mois de 1 362 euros dans son précédent emploi ;

Attendu qu'elle ne dirige toutefois ses prétentions qu'à l'égard de la seule société Phocéenne de Restauration, mise hors de cause, et non à l'encontre de la société Dubble Food Developpement ayant seule la qualité de franchiseur au titre du contrat conclu le 17 novembre 2010 ;

Attendu que ses demandes sont en conséquence rejetées comme étant irrecevables ;

Sur la nullité du contrat de franchise :

Attendu qu'en vertu de l'article L. 330-3 du Code de commerce : " Toute personne qui met à la disposition d'une autre personne un nom commercial, une marque ou une enseigne, en exigeant d'elle un engagement d'exclusivité ou de quasi-exclusivité pour l'exercice de son activité, est tenue, préalablement à la signature de tout contrat conclu dans l'intérêt commun des deux parties, de fournir à l'autre partie un document donnant des informations sincères, qui lui permette de s'engager en connaissance de cause. Ce document, dont le contenu est fixé par décret, précise notamment, l'ancienneté et l'expérience de l'entreprise, l'état et les perspectives de développement du marché concerné, l'importance du réseau d'exploitants, la durée, les conditions de renouvellement, de résiliation et de cession du contrat ainsi que le champ des exclusivités. Lorsque le versement d'une somme est exigé préalablement à la signature du contrat mentionné ci-dessus, notamment pour obtenir la réservation d'une zone, les prestations assurées en contrepartie de cette somme sont précisées par écrit, ainsi que les obligations réciproques des parties en cas de dédit. Le document prévu au premier alinéa ainsi que le projet de contrat sont communiqués vingt jours minimum avant la signature du contrat, ou, le cas échéant, avant le versement de la somme mentionnée à l'alinéa précédent. " ;

Attendu que l'article R. 330-1 du même Code dispose que " Le document prévu au premier alinéa de l'article L. 330-3 contient les informations suivantes :

1° L'adresse du siège de l'entreprise et la nature de ses activités avec l'indication de sa forme juridique et de l'identité du chef d'entreprise s'il s'agit d'une personne physique ou des dirigeants s'il s'agit d'une personne morale ; le cas échéant, le montant du capital ;

2° Les mentions visées aux 1° et 2° de l'article R. 123-237 ou le numéro d'inscription au répertoire des métiers ainsi que la date et le numéro d'enregistrement ou du dépôt de la marque et, dans le cas où la marque qui doit faire l'objet du contrat a été acquise à la suite d'une cession ou d'une licence, la date et le numéro de l'inscription correspondante au registre national des marques avec, pour les contrats de licence, l'indication de la durée pour laquelle la licence a été consentie ;

3° La ou les domiciliations bancaires de l'entreprise. Cette information peut être limitée aux cinq principales domiciliations bancaires ;

4° La date de la création de l'entreprise avec un rappel des principales étapes de son évolution, y compris celle du réseau d'exploitants, s'il y a lieu, ainsi que toutes indications permettant d'apprécier l'expérience professionnelle acquise par l'exploitant ou par les dirigeants.

Les informations mentionnées à l'alinéa précédent peuvent ne porter que sur les cinq dernières années qui précèdent celle de la remise du document. Elles doivent être complétées par une présentation de l'état général et local du marché des produits ou services devant faire l'objet du contrat et des perspectives de développement de ce marché.

Doivent être annexés à cette partie du document les comptes annuels des deux derniers exercices ou, pour les sociétés dont les titres financiers sont admis aux négociations sur un marché réglementé, les rapports établis au titre des deux derniers exercices en application du III de l'article L. 451-1-2 du Code monétaire et financier ;

5° Une présentation du réseau d'exploitants qui comporte :

a) La liste des entreprises qui en font partie avec l'indication pour chacune d'elles du mode d'exploitation convenu ;

b) L'adresse des entreprises établies en France avec lesquelles la personne qui propose le contrat est liée par des contrats de même nature que celui dont la conclusion est envisagée ; la date de conclusion ou de renouvellement de ces contrats est précisée ;

Lorsque le réseau compte plus de cinquante exploitants, les informations mentionnées à l'alinéa précédent ne sont exigées que pour les cinquante entreprises les plus proches du lieu de l'exploitation envisagée ;

c) Le nombre d'entreprises qui, étant liées au réseau par des contrats de même nature que celui dont la conclusion est envisagée, ont cessé de faire partie du réseau au cours de l'année précédant celle de la délivrance du document. Le document précise si le contrat est venu à expiration ou s'il a été résilié ou annulé ;

d) S'il y a lieu, la présence, dans la zone d'activité de l'implantation prévue par le contrat proposé, de tout établissement dans lequel sont offerts, avec l'accord exprès de la personne qui propose le contrat, les produits ou services faisant l'objet de celui-ci ;

6° L'indication de la durée du contrat proposé, des conditions de renouvellement, de résiliation et de cession, ainsi que le champ des exclusivités.

Le document précise, en outre, la nature et le montant des dépenses et investissements spécifiques à l'enseigne ou à la marque que la personne destinataire du projet de contrat engage avant de commencer l'exploitation. " ;

Attendu que la méconnaissance des dispositions de l'article L. 330-3 du Code de commerce n'entraîne la nullité de la convention qu'autant qu'elle a pour effet de vicier le consentement du cocontractant créancier de l'obligation d'information ;

Attendu que la société Danideo soutient, d'une part, que le contrat de franchise a été signé sur la base d'une erreur substantielle sur les potentialités de l'affiliation au réseau " Dubble ", provoquée par le comportement de la société Phocéenne de Restauration et, d'autre part, que le savoir-faire transmis ne repose sur aucune réalité et ne respecte pas la réglementation européenne ;

En ce qui concerne l'erreur provoquée par le cocontractant :

Attendu que le DIP a été remis à la candidate à la franchise le 20 juillet 2010, plus de 20 jours avant la signature du contrat de réservation et 4 mois avant celle du contrat de franchise ;

Attendu que ce document présentait les curriculum vitae du président et des actionnaires de la société franchiseur, l'historique et le développement du concept " Dubble " né en 2006 et exploité depuis par la société Phocéenne de Restauration, faisait état de l'existence au 20 juillet 2010 de 5 points de vente sur Marseille exploités en propres par la société Phocéenne de restauration, listés comme établissements de cette dernière sur le Kbis annexé au DIP et existant bien à cette date, les résultats de la société Phocéenne de Restauration de 2006 à 2009 et celui prévu en 2010, les comptes d'exploitation 2009 et le détail des comptes de résultat des deux établissements " pilotes " " Joliette " et " Prado " créés en 2008, le lancement récent de la franchise en novembre 2009, l'existence de plusieurs contrats de réservation signés en mars 2010, dont deux sur Marseille ;

Attendu qu'il faisait le point, de la page 7 à 11 et en annexe 7, sur l'état général du marché du sandwich, en annexe 8 présentait le marché local à partir d'études de clientèle réalisées en 2009 démontrant que 80 % des clients venaient à pied d'un rayon de 5 mn, concluant " l'étude du marché local ne peut en conséquence être réalisé qu'une fois le local d'exploitation identifié, elle relève donc de la responsabilité du franchisé. Les informations minimales à recueillir sont : l'offre de restauration dans le périmètre de chalandise, avec focus sur la concurrence directe éventuelle, l'offre commerciale hors restauration, permettant éventuellement d'évaluer la typologie de clientèle fréquentant le secteur, les implantations de tailles significatives de bureaux, tant administratifs que publics ou privés " ; que les résultats de l'enquête clientèle réalisée en juin 2009 dans les établissements " Prado " et " St Charles " étaient également annexés à ce document, de même qu'un " budget prévisionnel type " à titre indicatif ;

Attendu que Madame X était donc parfaitement informée de la nécessité de réaliser par elle-même une étude du marché local selon les critères précités, une fois envisagé le lieu d'implantation du point de vente, en l'espèce <adresse> ;

Attendu qu'elle ne peut donc reprocher au franchiseur une insuffisance d'information sur le marché local alors qu'en tout état de cause la loi n'impose pas à l'animateur d'un réseau une étude du marché local ;

Attendu par ailleurs qu'elle a visité les établissements " Prado " et " St Charles " et a rencontré leur exploitant avant de signer le contrat de franchise et ne peut en conséquence soutenir valablement qu'ils n'existaient pas au 20 juillet 2010 ;

Attendu que la reprise par deux franchisés en 2012 de ces deux établissements exploités sous l'enseigne " Dubble " par la société Phocéenne de Restauration depuis 2008 n'a pu altérer le consentement de Madame X lors de la signature, le 17 novembre 2010, du contrat de franchise ;

Attendu que le franchisé ne peut non plus valablement reprocher au franchiseur de ne pas l'avoir informé de l'ouverture de procédures de liquidation judiciaire à l'égard des sociétés franchisées de Lille et de Nancy, la première directement le 28 mars 2011, la seconde le 15 novembre 2012 après l'ouverture d'une procédure de sauvegarde le 30 novembre 2011, ces événements étant largement postérieurs à la signature de son contrat de franchise ;

Attendu que le franchiseur a communiqué un prévisionnel " type " établi sur 250 jours ouvrés développant trois hypothèses de chiffre d'affaires, variant entre 500 euros et 850 euros HT/jour, prévoyant le salaire d'un employé mais non la rémunération du responsable seulement mentionnée pour mémoire " p.m " ;

Attendu que ce prévisionnel type ne constitue pas le prévisionnel d'activité du franchisé auquel l'établissement incombait ;

Attendu que la société Danideo soutient que le prévisionnel spécifique à l'établissement Dubble " Castellane " était pour le moins irréaliste et l'a induite en erreur sur la rentabilité attendue ;

Attendu que ce prévisionnel a été établi par la société Danideo en corrélation avec le franchiseur sur la perspective de 300 jours ouvrés, option d'ouverture choisie par le franchisé, et une variation de chiffre d'affaires entre 600 à 950 euros HT/jour ;

Attendu que si au 31 décembre 2011 le chiffre d'affaires réalisé est de 74 310 euros et le résultat d'exploitation de - 30 794 euros, il est constant que le point de vente exploité par la société Danideo n'a été ouvert que le 1er mars 2011, fermé au mois d'août et la plupart des samedis et que sur 203 jours d'ouverture le ratio jour est de 366 euros HT ;

Attendu qu'au 31 décembre 2012 la société Danideo, au vu d'une simple balance provisoire et non du bilan arrêté au 31 décembre 2012, fait état d'un chiffre d'affaires de 137 954,36 euros pour un résultat négatif de 17 101,25 euros ; que le ratio, pour 237 jours ouvrés au lieu des 300 prévus, est de 582 euros HT/jour, soit une différence peu importante par rapport au minima envisagé dans le prévisionnel " type " ;

Attendu que le fait que la rentabilité a été inférieure aux résultats escomptés peut résulter de paramètres multiples, et notamment de la gestion du franchisé lui-même qui n'a pas ouvert les 300 jours prévus dans le prévisionnel établi par ses soins, ni d'ailleurs même les 250 jours ouvrés du prévisionnel " type ", a augmenté unilatéralement contre l'avis du franchiseur ses tarifs ;

Attendu que le caractère irréaliste du prévisionnel non respecté n'est en conséquence pas démontré ;

Attendu qu'il l'est d'autant moins que la société Dubble Food Developpement établit que d'autres points de vente (Prado Rondpoint et Prado Borely) pendant ces mêmes périodes ont réalisé des chiffres d'affaires conformes au prévisionnel "type" et largement supérieurs en 2013 ;

Attendu que l'erreur alléguée sur la rentabilité annoncée de l'activité n'est en conséquence pas établie ;

Attendu en outre que la société Danideo ne rapporte pas la preuve qui lui incombe que cette erreur aurait été provoquée par une fausse information volontairement donnée par le franchiseur, l'ayant déterminée à signer le contrat ;

Attendu que la société Danideo fait encore valoir avoir reçu une information erronée sur la marque " Dubble " soutenant que cette marque était en réalité contestable faute d'avoir été déposée par le franchiseur, seule " D Dubble " l'ayant été ;

Attendu toutefois que la marque " Dubble " a bien été déposée le 10 janvier 2006 sous le n° 06 3 402 503 à l'INPI de Marseille par Madame B sous la forme semi-figurative, composée du nom " Dubble " et d'un dessin en couleur, le mot " Dubble " en lettres blanches étant précédé d'une forme arrondie rouge et blanche, évoquant la première lettre de la marque " D " ;

Attendu que l'erreur de transcription opérée par l'INPI, rectifiée sans modification de la date d'enregistrement de la marque ni de ses composantes est sans effet sur la validité du contrat de franchise, aucune information erronée n'ayant été donnée au franchisé, et la société Danideo ne démontre d'ailleurs pas avoir jamais été inquiétée sur son usage ;

Attendu que cette marque, cédée à la société Phocéenne de Restauration par Madame B, est à ce jour la propriété de la société Dubble Food Developpement ;

Attendu qu'il résulte de ces éléments que le franchisé, avant de signer le contrat, a reçu l'intégralité des informations dont le caractère erroné n'est pas établi, lui permettant de s'engager en connaissance de cause ;

Attendu que la société Danideo est en conséquence déboutée de sa demande de nullité du contrat de franchise pour vice du consentement ;

En ce qui concerne l'absence d'originalité du " savoir-faire " :

Attendu que la franchise se caractérise par la transmission d'un savoir-faire, lequel est un ensemble substantiel d'informations pratiques non brevetées résultant de l'expérience du franchiseur et testées par celui-ci ;

Attendu que Madame X n'avait aucune expérience professionnelle dans le secteur de la restauration ;

Attendu que le concept " Dubble ", de restauration rapide " à la Française ", axée sur la diététique, le thème de la santé, du bien-être et du plaisir, porte sur une offre quotidienne de jus de fruits frais, soupes, salades et sandwichs à emporter ou déguster sur place, de desserts faits " maison ", les produits frais et naturels étant préparés sur place le jour même puis disposés dans des vitrines réfrigérés directement à la portée du consommateur ;

Attendu que le manuel " opérationnel " remis au franchisé détaille le concept, l'ensemble des informations pratiques sur les recettes, la gamme de produits offerts à la vente, leur présentation, la composition des cartes renouvelée deux fois par an, les plannings de production quotidienne, de rotation des recettes, les outils de communication, de gestion d'un point de vente et la conception des points de vente....;

Attendu que par ailleurs une formation initiale de deux semaines est assurée au franchisé avant ouverture de points de vente, à la fois théorique et pratique, puis deux fois par an lors des changements de carte ;

Attendu que le concept " Dubble ", qui dépasse largement celui d'une simple sandwicherie, possède dans ce domaine de la restauration rapide " haut de gamme " un savoir-faire identifié, consistant et bien réel, résultant de l'expérience acquise par le franchiseur en ayant testé les éléments depuis 2006 ;

Attendu qu'il permet à des personnes sans aucune expérience dans cette activité de prendre en main un tel commerce en mettant immédiatement en œuvre cette offre nouvelle de restauration appliquant les règles du management de la restauration collective (ratios, pesage...) ;

Attendu que si certains franchisés ont connu des déboires, la société Dubble Food Développement démontre que son réseau existe toujours et comporte 7 points de vente dont 5 exploités en franchise ;

Attendu qu'il sera relevé par ailleurs relevé que le 27 février 2013, après l'assignation du franchiseur en nullité du contrat de franchise, la société Danideo lui a demandé de lui adresser le " Dubble kitcheen ", décrivant les nouvelles recettes de salades, wrap et plats chauds de la saison printemps été, ce qui démontre qu'elle avait avantage à les découvrir et exploiter ;

Attendu que la société Danideo et la SCP Y, ès qualités, sont déboutés de leur demande de nullité du contrat de franchise présentée de ce chef ainsi que de l'intégralité de leurs demandes d'indemnisation ;

Sur les demandes de la société Dubble Food Developpement :

Attendu que la société Danideo a cessé de régler les redevances dues au franchiseur à compter du mois décembre 2012, et n'a pas régularisé sa situation malgré une mise en demeure du 15 février 2013 ;

Attendu par ailleurs que différentes infractions aux conditions de vente lui ont été reprochées par courrier RAR du 27 septembre 2012 : produits de la carte automne hiver mis en vente de manière prématurée contre l'avis du franchisé, produits non siglés ...;

Attendu qu'en fait la société Danideo souhaitait depuis fin septembre 2012 vendre le fonds de commerce avec l'appui du franchiseur ;

Attendu qu'aux termes de l'article 22 du contrat en cas d'inexécution par l'une des parties d'une seule de ses obligations contractuelles, la résiliation du contrat est encourue de plein droit 30 jours après une mise en demeure et notamment en cas d'impayés, et de non-respect des conditions de vente, d'agencement du magasin ;

Attendu que suite à la réception le 21 février 2013 de l'assignation en nullité du contrat de franchise pour information précontractuelle lacunaire et mensongère et savoir-faire inexistant, la société Dubble Food Developpement a notifié à la société Danideo, par courrier RAR du 5 mars 2013, résilier immédiatement le contrat, lui demandant de retirer l'enseigne et la signalétique " Dubble " et de ne plus utiliser la marque ;

Attendu que la résiliation du contrat a été justement prononcée dans ces circonstances par les premiers juges aux torts exclusifs de la société Danideo qui ne pouvait plus représenter le réseau " Dubble " qu'elle dénigrait et demandait à quitter ;

Attendu que la société Danideo est redevable des redevances impayées d'un montant de 2 431,39 euros TTC au jour de la résiliation du contrat, ainsi que de l'indemnité de résiliation prévue à l'article 22 du contrat, clause pénale que les premiers juges ont justement réduite à la somme de 14 400 euros représentant deux années de franchise ;

Attendu que la créance de la société Dubble Food Developpement est fixée aux sommes précitées au passif de la procédure collective de la société Danideo ;

Attendu que la société intimée ne demande plus la condamnation de la société Danideo au paiement de dommages et intérêts de 25 000 euros pour parasitisme comme le soutiennent les appelantes ;

Attendu que la société Danideo est condamnée à verser à Me Z ès qualités la somme de 1 500 euros en application de l'article 700 du Code de procédure civile au titre des frais irrépétibles d'appel, ainsi qu'aux entiers dépens ;

Attendu que les frais irrépétibles et les dépens sont employés en frais privilégiés de procédure collective ;

Par ces motifs, LA COUR statuant par mise à disposition au greffe, contradictoirement, publiquement, Prend acte des interventions volontaires de la SCP Y, mandataire judiciaire, liquidateur judiciaire à la procédure collective de la société Danideo et de Me Z, ès qualités de liquidateur judiciaire de la société Phocéenne de Restauration, Confirme le jugement attaqué en ce qu'il a : Déclaré la société Danideo et Madame X irrecevables en leurs demandes dirigées contre la société Phocéenne de Restauration, En conséquence, Mis hors de cause la société Phocéenne de Restauration sans dépens, Débouté la société Danideo de toutes ses demandes, fins et conclusions Prononcé la résiliation du contrat de franchise du 17 novembre 2010 aux torts de la société Danideo, Condamné la société Danideo au paiement de la somme de 1 000 euros en application de l'article 700 du Code de procédure civile et aux dépens, Statuant à nouveau, Fixe les créances de la société Dubble Food Developpement au passif de la procédure collective de la société Danideo à la somme de 2 431,39 euros TTC au titre des redevances impayées au jour de la résiliation du contrat et celle de 14 400 euros au titre de l'indemnité de résiliation anticipée du contrat de franchise, Y ajoutant, Déboute la société Danideo et la SCP Y, ès qualités, de leurs demandes, fins et prétentions, Condamne la société Danideo à payer à Me Z, ès qualités, la somme de 1 500 euros en application de l'article 700 du Code de procédure civile au titre des frais irrépétibles d'appel, Condamne la société Danideo aux entiers dépens, recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du Code de procédure civile, Dit les frais irrépétibles et les dépens frais privilégiés de procédure collective.