Cass. 1re civ., 6 avril 2016, n° 15-12.402
COUR DE CASSATION
Arrêt
Cassation
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
Mme Batut
Avocats :
Me Le Prado, SCP Célice, Blancpain, Soltner, Texidor, SCP Foussard, Froger
LA COUR : - Donne acte à M. F du désistement de son pourvoi en ce qu'il est dirigé contre M. X ; - Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. F (le vendeur) a donné mandat à M. Y, courtier et expert maritime, de vendre le bateau de plaisance lui appartenant ; que le second a fait paraître une annonce mentionnant que le moteur avait été " entièrement révisé " et que la motorisation était " en très bon état " ; que, le 13 septembre 2008, M. Z (l'acquéreur) a acheté ce bateau moyennant un prix de 34 000 euros, puis l'a fait expertiser par M. Y, qui a relevé son " très bon état général " ; qu'ayant rencontré des difficultés pour le manœuvrer, l'acquéreur a fait appel, le 11 mars 2009, à M. X, mécanicien naval (le mécanicien), qui, après avoir indiqué que les silentblocs étaient détruits, a établi un devis prévoyant leur remplacement ; que, l'acquéreur lui ayant confié le navire pour réparation, le 17 mars suivant, le mécanicien, a, le lendemain, constaté que la cale était remplie d'eau jusqu'à la base de la culasse du moteur ; que l'expert désigné en référé a conclu en ces termes : " la cause de la voie d'eau est un délignage du moteur affaissé à l'arrière et dévoyé sur tribord en raison d'une destruction par vétusté des deux silentblocs arrière " ; que l'acquéreur a assigné le vendeur, sur le fondement de la garantie des vices cachés, ainsi que le mécanicien et M. Y, sur le fondement de la responsabilité contractuelle ;
Sur le premier moyen du pourvoi principal : - Vu les articles 1644 et 1646 du Code civil, le premier dans sa rédaction antérieure à celle issue de la loi n° 2015-177 du 15 février 2015 ; - Attendu que le vendeur qui ignorait les vices de la chose vendue ne peut être tenu envers l'acheteur qui garde cette chose, outre les frais occasionnés par la vente, qu'à la restitution partielle du prix, telle qu'elle sera arbitrée par experts ;
Attendu que l'arrêt condamne le vendeur, in solidum avec M. Y, à payer à l'acquéreur la somme de 16 456 euros au titre du coût d'achat et d'installation d'un nouveau moteur, celle de 1 826,10 euros au titre des frais de grutage et de stationnement extérieur du bateau et celle de 800 euros au titre de la réparation de la cassure de la cloison avant timonerie ;
Qu'en statuant ainsi, alors que, selon ses propres constatations, le vendeur ne connaissait pas, au moment de la conclusion de la vente, le mauvais état des silentblocs arrière, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
Sur le second moyen du pourvoi principal : - Vu les articles 1149 et 1992 du Code civil ; - Attendu que, pour dire que, dans leurs rapports entre eux, M. Y devra garantir le vendeur à hauteur de 70 % des sommes mises à sa charge, l'arrêt, après avoir relevé que M. Y était intervenu certes comme expert pour le compte de l'acquéreur, mais aussi comme courtier mandaté par le vendeur, retient qu'il a doublement failli à sa mission en n'informant pas ce dernier de l'état des silentblocs et en faisant paraître une publicité qu'il serait possible de qualifier de mensongère sur les conditions d'entretien du voilier ;
Qu'en limitant ainsi à 70 % la garantie due par le mandataire à son mandant, alors qu'elle n'avait relevé aucune faute à l'encontre de ce dernier, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
Et sur le moyen unique du pourvoi incident : - Vu les articles 1927, 1928 et 1933 du Code civil ; - Attendu que, pour rejeter les demandes formées contre le mécanicien, l'arrêt énonce qu'aucun élément ne permet de retenir la responsabilité de ce dernier, la voie d'eau n'étant nullement survenue de son fait et étant totalement imprévisible pour lui, en l'absence de renseignements suffisants de la part de l'acquéreur quant à la présence récurrente d'eau dans la cale ;
Qu'en se déterminant ainsi, sans rechercher si le fait que le mécanicien ait, antérieurement au dépôt, constaté la destruction des silentblocs et préconisé leur changement n'était pas de nature à exclure qu'il puisse être étranger à la détérioration de la chose déposée, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision.
Par ces motifs : casse et annule, mais seulement en ce qu'il condamne M. F, in solidum avec M. Y, à payer à M. Z les sommes de 16 456 euros au titre du coût global d'achat et d'installation sur le bateau d'un nouveau moteur, 1 826,10 euros au titre des frais de grutage et de stationnement et 800 euros au titre du coût de réparation de la cassure de la cloison avant timonerie, en ce qu'il dit que, dans leurs rapports entre eux, M. Y devra garantir M. F à hauteur de 70 % des sommes mises à sa charge, tant en principal qu'en frais et accessoires, et en ce qu'il rejette les demandes formées par M. Z contre M. X, l'arrêt rendu le 2 décembre 2014, entre les parties, par la Cour d'appel de Caen ; remet, en conséquence, sur ces points, la cause et les parties dans létat où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la Cour dappel de Rouen.