Cass. com., 12 avril 2016, n° 13-28.217
COUR DE CASSATION
Arrêt
Cassation
PARTIES
Demandeur :
Auchan France (SA)
Défendeur :
Carrefour hypermarchés (SAS), CSF (SAS)
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
Mme Mouillard
Rapporteur :
Mme Le Bras
Avocat général :
M. Debacq
Avocats :
SCP Monod, Colin, Stoclet, SCP Odent, Poulet
LA COUR : - Attendu, selon l'arrêt attaqué, que la société Auchan France (la société Auchan) a lancé dans l'un de ses magasins situé à Marne-la-Vallée une campagne publicitaire qui comparait le prix de quatorze produits de consommation courante, vendus par deux magasins Carrefour du département du Val-de-Marne, exploités respectivement par la société Carrefour hypermarchés et la société CSF France (les sociétés Carrefour) ; qu'estimant que la société Auchan avait effectué une publicité comparative illicite et trompeuse, les sociétés Carrefour l'ont assignée en paiement de dommages-intérêts pour concurrence déloyale et dénigrement ;
Sur le premier moyen, pris en sa quatrième branche : - Vu l'article L. 121-8 du Code de la consommation ; - Attendu que pour dire que la société Auchan a commis des actes de concurrence déloyale et de dénigrement au détriment des sociétés Carrefour en effectuant une publicité comparative illicite utilisant le slogan "Une preuve de plus qu'Auchan est moins cher" et pour, en conséquence, la condamner à verser la somme de 30 000 euros à la société Carrefour hypermarchés et celle de 15 000 euros à la société CSF France à titre de dommages-intérêts, l'arrêt, après avoir relevé que la publicité comparative vise à démontrer, par la comparaison des prix de quatorze produits de grande marque, que Auchan est moins cher que l'enseigne Carrefour dont deux magasins sont nommément désignés, retient que cette publicité ne repose pas sur un panel suffisamment représentatif de produits couramment consommés ; qu'il en déduit qu'une telle publicité, qui ne remplit pas la condition d'objectivité exigée par l'article L. 121-8 du Code de la consommation, n'est pas licite ;
Qu'en se déterminant ainsi, sans décrire les produits comparés, ni rechercher concrètement s'ils étaient représentatifs des différentes catégories de produits couramment consommés, la cour d'appel a privé sa décision de base légale ;
Sur le même moyen, pris en sa cinquième branche : - Vu l'article L. 121-8 du Code de la consommation ; - Attendu que pour statuer comme il fait, l'arrêt retient encore que la publicité repose uniquement sur des produits sélectionnés par la société Auchan elle-même ;
Qu'en se déterminant ainsi, par un motif impropre à caractériser l'absence de condition d'objectivité, la cour d'appel a privé sa décision de base légale ;
Et sur le second moyen, pris en sa deuxième branche : - Vu l'article L. 121-9, 2° du Code de la consommation ; - Attendu que pour qualifier la publicité de dénigrante, l'arrêt retient que la véracité de la publicité comparative dont le slogan véhicule l'idée que les magasins exploités par les sociétés Carrefour pratiquent des prix nettement, voire très supérieurs à ceux de la société Auchan, n'est ni démontrée ni vérifiable par les consommateurs ;
Qu'en se déterminant ainsi, par un motif inopérant, la cour d'appel a privé sa décision de base légale ;
Par ces motifs, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs : casse et annule, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 18 septembre 2013, entre les parties, par la Cour d'appel de Paris ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la Cour d'appel de Paris, autrement composée.