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Décisions

CA Paris, Pôle 5 ch. 4, 13 avril 2016, n° 13-24840

PARIS

Confirmation

PARTIES

Demandeur :

Impérial Pub (SARL), GPS (SARL)

Défendeur :

La Poste (SA), Médiapost

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Cocchiello

Conseillers :

Mme Mouthon Vidilles, M. Thomas

T. Com. Paris, du 22 nov. 2013

22 novembre 2013

La SA Mediapost, créée en 1987, est une filiale à 95 % de la société Sofipost, elle-même filiale à 95 % de la SA La Poste; elle exerce sur le marché national une activité de distribution de prospectus publicitaires en boîtes à lettres.

La Sarl Imperial Pub et la Sarl Gps qui entretiennent d'étroites relations commerciales, exercent en Ile de France la même activité que la Sa Mediapost.

En 2001, la société Mediapost s'est rapprochée de la société Delta Diffusion qui exerce également dans le secteur de la publicité non adressée (PNA). Le projet de concentration a été soumis au ministre de l'économie, des finances et de l'industrie qui par lettre du 14 août 2001, a considéré qu'il n'y avait pas lieu de saisir le Conseil de la concurrence. En 2003, la société Mediapost a racheté la société Delta Diffusion.

Soutenant que depuis 2010, elles déploraient la perte de clients importants, notamment dans le secteur de la grande distribution, au profit de la société Mediapost, pertes qu'elles attribuent au fait que cette dernière profite des avantages que confère à la Poste sa qualité de prestataire du service universel postal, les sociétés Imperial Pub et Gps ont, par exploit daté du 16 février 2012, assigné les sociétés La Poste et Mediapost devant le tribunal de commerce de Paris en indemnisation pour abus de position dominante par la pratique de prix prédateurs.

Par jugement du 22 novembre 2013, le tribunal de commerce de Paris a débouté les sociétés Imperial Pub et Gps de l'ensemble de leurs demandes.

Vu l'appel interjeté le 24 décembre 2013 et les dernières conclusions signifiées le 30 juin 2014 par lesquelles la Sarl Imperial Pub et la Sarl Gps demandent à la cour de :

- infirmer le jugement du Tribunal de commerce de Paris du 22 novembre 2012 en toutes ses Dispositions

- débouter La Poste et Mediapost de l'ensemble de leurs demandes fins et conclusions

- constater que les agissements des sociétés La Poste et Mediapost sont constitutifs d'abus de position dominante en conséquence, à titre principal,

- condamner les sociétés La Poste et Mediapost à payer aux sociétés Imperial Pub et Gps la somme de 1.800.000 euros à titre de dommages et intérêts subsidiairement,

- solliciter l'avis du Conseil de la concurrence

- désigner tel expert afin d'évaluer le dédommagement dû par La Poste et Mediapost aux sociétés Imperial Pub et Gps en application de la directive 2008/6/CE dans tous les cas,

- condamner les sociétés La Poste et Mediapost au paiement de la somme de 10.000 euros au titre des dispositions de l'article 700 du Code de Procédure Civile dont distraction au profit de Maître Jean-Loup PEYTAVI

- condamner les sociétés La Poste et Mediapost aux entiers dépens ;

Vu les dernières conclusions signifiées le 2 mai 2014 par lesquelles la Sa La Poste et la Sa Mediapost demandent à la cour de :

Vu la directive 2008/6/CE

Constater que cette directive ne prévoit aucun dédommagement au bénéfice des sociétés Imperial Pub et Gps ; Vu l'article 102 du Traité sur le fonctionnement de l'Union européenne,

Vu l'article L. 420-2 du Code de commerce

- constater qu'Imperial Pub et Gps n'apportent pas la preuve d'un quelconque abus de position dominante ; Vu les articles L.462-3 et R.462-3 du Code de commerce,

- à titre principal, rejeter la demande de Saisine de l'Autorité de la concurrence pour avis ; Ou

- à titre subsidiaire, circonscrire toute éventuelle demande d'avis à l'Autorité de la concurrence que la Cour jugerait utile de formuler à la seule question de Savoir si les prix pratiqués par Mediapost lors de l'appel d'offres de Casino " Distribution boîtes aux lettres décentralisée Hypers/Supers 2011 " peuvent être considérés comme entrant dans le cadre d'une stratégie de prédation ; En conséquence,

- à titre principal, débouter Imperial Pub et Gps de leurs demandes sur le fondement de la directive 2008/6/CE, de l'article 102 du Traité sur le fonctionnement de l'Union européenne, de l'article L.420-2 du Code de commerce et des articles L.462-3 et R.462-3 du Code de commerce ; ou

- à titre subsidiaire, dans l'éventualité où la Cour jugerait utile, avant dire droit, de formuler une demande d'avis à l'Autorité de la concurrence sur le fondement des articles L.462-3 et R.462-3 du Code de commerce, circonscrire une telle demande d'avis à la seule question de Savoir si les prix pratiqués par Mediapost lors de l'appel d'offres de Casino "Distribution boîtes aux lettres décentralisée Hypers/Supers 2011 " peuvent être considérés comme entrant dans le cadre d'une stratégie de prédation ;

en tout état de cause,

- condamner les sociétés Imperial Pub et Gps à verser aux sociétés La Poste et Mediapost la somme de 15.000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;

- condamner les sociétés Imperial Pub et Gps aux entiers dépens dont distraction au profit de Maître TEYTAUD, Avocat, conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile ;

Sur ce,

Considérant que le tribunal de commerce a débouté les demanderesses de l'ensemble de leurs demandes aux motifs que les points identifiés par l'étude Wik Consult (exonération de TVA, prépaiement des frais de port, faibles coûts de transaction) comme étant susceptibles de donner lieu à des avantages immatériels, constituaient des économies permettant de pratiquer des meilleurs prix pour les consommateurs et ne présentaient pas de difficultés au regard du droit de la concurrence, qu'en ce qui concerne la TVA, la société La Poste n'en est exonérée que pour les seuls produits du service universel, que les prestations offertes par Mediapost n'en sont pas exonérées, que la mutualisation de la main d'œuvre n'est pas démontrée, que l'utilisation croisée de bases de données n'est pas non plus prouvée et que les demanderesses ne rapportaient pas de preuves des prix soit disant prédateurs de Mediapost ;

Considérant que pour solliciter l'infirmation de ce jugement, les sociétés appelantes indiquent en préambule que depuis deux ans, elles déplorent la perte de clients importants au profit de la société Mediapost qui profite, en tant que filiale, de la position dominante de La Poste et de sa qualité de prestataire du service universel pour pratiquer des prix prédateurs ; qu'elle rappellent fonder leurs demandes de dédommagement sur les dispositions des articles 82 CE et L 420-2 du code de commerce et non sur la directive 2008/6/CE ; qu'elles insistent sur l'opacité des comptes de La Poste qui n'aurait pas permis de mettre à jour les pratiques répréhensibles ; qu'elles se réfèrent aux avis de l'Arcep et au rapport du cabinet Wik-Consult mandaté par l'Arcep, publié en mai 2010 intitulé 'L'évaluation des avantages immatériels dans le cadre du service universel postal' ; qu'elles font valoir en substance que la société Mediapost utilise les avantages immatériels de la société La Poste pour développer son activité faussant ainsi le jeu de la concurrence en proposant des prix très bas empêchant ses concurrents de s'aligner sur les prix qu'elle pratique et d'utiliser les mêmes méthodes de distribution ; qu'elles précisent que l'utilisation de la technique de la 'distribution par poignée'permet à Mediapost de réduire ses coûts de distribution ; qu'elles estiment démontrer de façon incontestable par les pièces qu'elles versent aux débats (constat par les syndicats CGT et SUD dans un article du journal l'Union Champagne Ardennes Picardie, le forum des postiers, le rapport Wik, un article du Point relatant la plainte de salariés de Mediapost pour travail dissimulé) la mutualisation de la main d'œuvre des intimées ; qu'elles ajoutent que l'exonération de TVA dont bénéficie La Poste en sa qualité de prestataire du service universel constitue un avantage, que La Poste bénéficie de la base de données de l'ensemble des bénéficiaires du service universel permettant d'offrir un service présenté comme exclusif, 'la gamme select' qui permet un 'ciblage à l'adresse'que les autres concurrents ne peuvent proposer ; qu'elles en déduisent que La Poste utilise plusieurs de ses ressources et avantages pour permettre à la société Mediapost de pratiquer des tarifs très bas ; qu'elles précisent avoir été informées des pratiques déloyales en matière tarifaire lors de la perte du client Casino ; qu'en tant que de besoin, elles invitent la cour à solliciter, en application des dispositions de l'article L 462-3 du code de commerce, l'avis de l'Autorité de la concurrence concernant la pratique de prix prédateurs ; qu'enfin, s'agissant de l'évaluation du dédommagement auquel elles peuvent prétendre, elles se prévalent d'un rapport du Cabinet d'expertise Gmba ;

Considérant qu'en réplique, les sociétés intimées rappellent que le dédommagement prévu par la directive européenne 2008/6/CE est prévu au seul bénéfice du prestataire de service universel, et non au bénéfice des prestataires de services concurrents ; qu'elles soutiennent, en substance, que les demandes des sociétés appelantes se résument à des allégations non fondées et insuffisantes en droit pour caractériser un quelconque abus de position dominante ; qu'elles affirment que l'opacité des comptes alléguée n'est pas démontrée car l'Arcep et les audits ont constaté la conformité des comptes de La Poste ; qu'à cet égard, elles relèvent que les avis de l'Arcep visés par les appelantes ne visent pas le marché de la PNA ; qu'elles considèrent que La Poste n'a fait bénéficier Mediapost d'aucun des prétendus avantages ou ressources tirés de sa qualité de prestataire de service universel, que les avantages immatériels allégués ne sont pas certains et doivent, en tout état de cause, être nuancés compte tenu des coûts induits par les prestations de service universel ; qu'elles ajoutent qu'il ne peut être reproché à la Poste de bénéficier d'une bonne image ou d'une bonne réputation ou encore d'économies d'échelle, économies qui ne sont pas problématiques au regard du droit de la concurrence et permettent de pratiquer des meilleurs prix aux consommateurs ; qu'elles font observer, concernant la TVA, que les prestations offertes par Mediapost n'en sont pas exonérées et qu'en outre l'avantage que le groupe La Poste tirerait d'une exonération de TVA sur ses prestations de service universel n'est pas démontré ; que s'agissant d'une mutualisation de la main d'œuvre, elles estiment qu'elle n'est pas prouvée et serait, en tout état de cause, insuffisante à constituer un abus de position dominante dès lors que la pratique de prix prédateurs n'est pas démontrée ; qu'elles considèrent également que la preuve d'une utilisation croisée de bases de données n'est pas rapportée ; qu'enfin, elles affirment que l'existence de prix prédateurs n'est pas avérée dès lors que les sociétés appelantes ne démontrent pas que les prix soient inférieurs à la moyenne des coûts variables ou qu'ils seraient inférieurs à la moyenne des coûts totaux mais supérieurs à la moyenne des coûts variables ; qu'elles ajoutent que Mediapost pratique des prix supérieurs à ceux des concurrents, qu'elle est bénéficiaire sur son activité d'imprimés sans adresse de sorte qu'elle ne consent aucun sacrifice à court terme dans le but d'évincer ses concurrents et que par ailleurs, elle perd régulièrement un nombre important de clients ; qu'elles relèvent que les pratiques tarifaires déloyales invoquées pour la perte du client Casino ne sont nullement étayées ; qu'elles concluent donc à l'absence d'abus de position dominante et s'opposent à la demande d'avis de l'Autorité de la concurrence qu'elles estiment irrecevable et en tout état de cause, inutile à la solution du litige, la cour disposant de tous les éléments de fait et de droit lui permettant de juger la présente affaire ; qu'enfin, s'agissant de l'évaluation du préjudice prétendument subi par les appelantes, elles considèrent qu'elles se fondent sur des prémisses erronées et se réfèrent à des agissements non prouvés et, de surcroît, ne présentant aucun lien de causalité avec les pertes qu'elles auraient subies ;

Considérant que l'article 82 du traité CE devenu l'article 102 TFUE interdit l'exploitation abusive d'une position dominante sur le marché intérieur ou une partie substantielle de celui-ci ; que selon l'article 420-2 du code de commerce, " Est prohibée, dans les conditions prévues à l'article L. 420-1, l'exploitation abusive par une entreprise ou un groupe d'entreprises d'une position dominante sur le marché intérieur ou une partie substantielle de celui-ci. Ces abus peuvent notamment consister en refus de vente, en ventes liées ou en conditions de vente discriminatoires ainsi que dans la rupture de relations commerciales établies, au seul motif que le partenaire refuse de se soumettre à des conditions commerciales injustifiées. Est en outre prohibée, dès lors qu'elle est susceptible d'affecter le fonctionnement ou la structure de la concurrence, l'exploitation abusive par une entreprise ou un groupe d'entreprises de l'état de dépendance économique dans lequel se trouve à son égard une entreprise cliente ou fournisseur. Ces abus peuvent notamment consister en refus de vente, en ventes liées, en pratiques discriminatoires visées au I de l'article L. 442-6 ou en accords de gamme " ;

Sur les pratiques imputées à Mediapost :

Considérant que les sociétés appelantes soutiennent que Mediapost pratique des prix prédateurs, ce qui serait constitutif d'un abus de position dominante ;

Considérant que les parties ne contestent pas l'existence d'un marché de la publicité non adressée en Ile de France sur lequel elles sont en concurrence ; qu'elles ne contestent pas le caractère substituable de leurs services ; que la position dominante qu'occuperait sur ce marché la société Mediapost, filiale du groupe La Poste, ne fait l'objet d'aucun débat entre elles ;

Considérant qu'il appartient aux sociétés Imperial Pub et Gps qui invoquent un abus de position dominante par une pratique de prix prédateurs, d'en rapporter la preuve ; qu'un tel abus ne saurait se déduire de la seule existence d'une position dominante et/ou d'avantages immatériels dont Mediapost serait bénéficiaire par l'intermédiaire de La Poste dans le cadre du service universel postal ; qu'il sera rappelé que la pratique de prédation consiste pour une entreprise en position dominante à fixer ses prix à un niveau tel qu'elle supporte des pertes ou renonce à des bénéfices à court terme, et ce, délibérément, de façon à évincer ou à discipliner un ou plusieurs de ses concurrents en vue de remonter ultérieurement ses prix afin de récupérer ses pertes, portant de ce fait préjudice aux consommateurs ; que la preuve de la prédation ne sera établie que si les sociétés appelantes démontrent que le comportement adopté par Mediapost en matière de prix s'inscrit dans une stratégie de prédation, c'est-à-dire une stratégie visant le découragement de ses concurrents et la récupération ultérieure des pertes initialement subies ; qu'il leur appartient, à tout le moins, de démontrer l'existence d'un ensemble d'indices laissant présumer la commission d'une prédation ;

Considérant qu'il doit être d'ores et déjà constaté que la Sarl Imperial Pub et la Sarl Gps qui soutiennent que Mediapost propose des prix très bas par rapport à ceux pratiqués par ses concurrents, ne produisent aucun élément à cet égard ; qu'elles déduisent de la perte de clients importants -qu'elles s'abstiennent, au demeurant, d'identifier à l'exception du client Casino- au profit de Mediapost, une pratique par celle-ci de prix prédateurs ; qu'elles présument l'existence de rabais qu'elle consentirait, du fait des avantages immatériels dont sa maison mère lui ferait profiter à seule fin d'évincer ses concurrents ;

Considérant que la Sarl Imperial Pub et la Sarl Gps ne justifient aucunement que la perte du client Casino soit intervenue en suite d'une pratique tarifaire déloyale ; que les documents relatifs à l'appel d'offres concernant le marché avec le groupe Casino qu'elles produisent aux débats ne constituent pas un élément de preuve ni même un commencement de preuve ; qu'en toute hypothèse, il est constant que comme l'a souligné l'Autorité de la concurrence, pour être abusive, une pratique de prix bas doit revêtir un caractère suffisamment permanent et étendu de sorte que l'on puisse en déduire qu'elle fait partie d'une stratégie de détournement de clientèle d'un concurrent et d'éviction de celui-ci ; que la seule perte d'un client ne caractérise pas une telle pratique ; Sur les pratiques imputées à La Poste :

Considérant que les sociétés appelantes soutiennent que les avantages consentis par La Poste à sa filiale constituent un abus de position dominante de La Poste ; qu'elle aurait permis à Mediapost de pratiquer des prix prédateurs en lui faisant profiter de son image de marque et des avantages immatériels dont elle bénéficie dans le cadre du service universel ;

Considérant que si les pratiques de diversification des opérateurs historiques , et notamment la création de filiales opérant en dehors du coeur de l'ancien monopole, ne sont pas anticoncurrentielles en soi, c'est à la condition que les conditions de la concurrence ne soient pas faussées ; que si l'opérateur historique permet à sa filiale de pratiquer des prix bas sur un marché concurrentiel grâce à des subventions croisées, sous forme d'avantages matériels divers provenant de ses activités exercées en monopole ou sous le régime du service public, conduisant à affecter la concurrence sur ce marché connexe, ou entretient la confusion entre leurs activités respectives, faisant indûment bénéficier la filiale de l'image du service public, celui-ci peut être convaincu d'abus de position dominante ; Mais considérant, en premier lieu, que les appelantes ne démontrent pas en l'espèce sur quel marché la Poste serait en position dominante ;

Considérant, en second lieu, qu'il est constant, comme l'a relevé l'étude réalisée par le cabinet WIk Consult en mai 2010, que La Poste dispose d'une bonne image de marque et de réputation acquise depuis de nombreuses années et qu'elle a une connaissance détaillée du marché français du courrier et des colis ; qu'elle bénéficie en tant que prestataire désigné tenu à une obligation de service universel d'un certain nombre d'avantages immatériels (économies d'envergure et d'échelle, coûts partagés de distribution, exonération de TVA) ;

Considérant que la Sarl Imperial Pub et la Sarl Gps soutiennent que les sociétés intimées pratiquent une mutualisation de la main d'œuvre qui permettrait à Mediapost de bénéficier d'économies d'envergure en ce que, notamment, les facteurs distribueraient les prospectus publicitaires au cours de leurs tournées ;

Mais considérant que les seules pièces versées aux débats à cet égard, soit un article du journal l'Union Champagne Ardennes Picardie, un extrait du forum des postiers, des tracts des syndicats CNT PTT, SUD PTT et CFDT et un article du Point relatant la plainte de salariés de Mediapost pour travail dissimulé, ne concernent aucunement le marché pertinent, soit celui de la région Ile de France et qu'en outre, elles ne relatent que des interrogations et des inquiétudes ; qu'elles sont donc inopérantes à établir l'existence d'une mutualisation par les sociétés intimées sur le marché en cause ; que l'interview du directeur des ressources humaines de Mediapost que les sociétés appelantes se contentent de produire sans, au demeurant, procéder à une quelconque analyse des termes, et qui fait seulement état de l'existence de 15.000 salariés dont 90 % sont des distributeurs professionnels, est inopérant à démontrer la mise en œuvre d'une mutualisation ; qu'en outre, la Sarl Imperial Pub et la Sarl Gps se gardent de rappeler qu'il existe un régime dérogatoire en zone rurale où La Poste ouvre son réseau de distribution à tout opérateur de publicité non adressée qui en ferait la demande ;

Considérant qu'à cet égard, la Sarl Imperial Pub et la Sarl Gps ne peuvent pas plus utilement se prévaloir de l'étude Wik Consult laquelle, si elle relève que des économies d'échelle et d'envergure apparaissent dans et entre les produits relevant de l'obligation de service universel (OSU), ne considère toutefois pas, contrairement à ce que soutiennent les sociétés appelantes, que ces économies bénéficient, par principe, aux produits non-OSU mais envisage seulement une telle éventualité lorsque la fabrication des produits OSU diminue le coût de unitaire de fabrication des produits non-OSU ;

Considérant par ailleurs que si La Poste est exonérée de TVA, elle ne l'est que pour les seuls produits du service universel ; que l'activité de distribution d'imprimés publicitaires par Mediapost est assujettie à la TVA ; que les sociétés appelantes se contentent d'affirmer péremptoirement que " la Poste et Mediapost peuvent jouer sur les deux tableaux et cumuler ainsi les avantages puisque l'activité de l'une est assujettie et pas celle de l'autre" alors qu'il ne ressort d'aucun élément que l'exonération de TVA pour les produits du service universel distribués par La Poste ait un quelconque impact sur le coût des produits de Mediapost et partant sur les prix pratiqués par celle-ci ; qu'à titre surabondant, il sera relevé que l'exonération de TVA dont bénéfice La Poste ne constitue pas toujours un avantage ; qu'ainsi, lorsque le client est récupérateur de TVA, l'Arcep a considéré que La Poste était désavantagée par rapport à un concurrent aussi efficace en ce qu'elle supportait la TVA cachée sur les achats intermédiaires et la taxe sur les Salaires, ce qui constitue un surcoût fiscal ;

Considérant en outre qu'il ne ressort d'aucun élément que Mediapost utilise la base de données de l'ensemble des bénéficiaires du service universel que lui communiquerait La Poste ; qu'il n'est notamment pas établi que le ciblage à l'adresse revendiqué par Mediapost le serait à partir des données communiquées par La Poste ; que la Sarl Imperial Pub et la Sarl Gps procèdent, là encore, par voie d'affirmation ;

Considérant qu'en définitive, les sociétés appelantes ne rapportent pas la preuve de la prédation ; qu'à tout le moins, elles ne justifient d'aucun indice laissant présumer l'existence d'une pratique de prix prédateurs ; qu'en conséquence, aucun élément ne justifie de la nécessité de solliciter l'avis de l'Autorité de la concurrence ; qu'aucun abus n'est démontré ni du chef de La Poste ni du chef de Mediapost ; que le jugement entrepris sera donc confirmé en ce qu'il a débouté la Sarl Imperial Pub et la Sarl Gps de l'intégralité de leurs demandes ;

Par ces motifs, La Cour, confirme le jugement entrepris en toutes ses dispositions, et y ajoutant, condamne in solidum la SARL imperial pub et la SARL gps aux dépens de l'appel, autorise maître teytaud, avocat, à recouvrer les dépens dans les conditions de l'article 699 du code de procédure civile, condamne in solidum la SARL imperial pub et la SARL gps à verser à la société la somme de 10.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.