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Décisions

CA Paris, Pôle 5 ch. 4, 4 mai 2016, n° 15-10674

PARIS

Arrêt

Infirmation

PARTIES

Demandeur :

Point Smoke (SARL)

Défendeur :

Cigreats (SASU)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Cocchiello

Conseillers :

Mme Mouthon Vidilles, M. Thomas

Avocats :

Mes Pinet, Chassin, Bureau, Degrand

T. com. Créteil, du 21 avr. 2015

21 avril 2015

Faits et procédure

La SARL Point Smoke et la Sasu Cigreats ont pour activité le commerce de cigarettes électroniques.

Le 18 novembre 2013, la société Point Smoke a conclu un contrat de licence de marque et d'approvisionnement exclusif pour une durée de trois ans avec la société Cigreats aux fins de permettre à cette dernière de commercialiser des cigarettes électroniques sous l'enseigne " Point Smoke " dans un point de vente d'un centre commercial Leclerc. Ce contrat contient une clause selon laquelle "'Le détaillant s'interdit de commercialiser ou de promouvoir pendant la durée du contrat des "produits concurrents" des produits, cet engagement étant indispensable au maintien de la réputation et de l'image de l'enseigne "Point Smoke" ainsi qu'à la cohésion des points de vente exerçant leurs activités sous cette enseigne."

Après avoir fait constater par procès-verbal d'huissier du 16 avril 2014 le non-respect de la clause d'approvisionnement exclusif par la société Cigreats et avoir constaté que la société Cigreats commandait des produits auprès d'autres fournisseurs concurrents de Point Smoke, la société Point Smoke a assigné cette dernière par acte du 23 mai 2014 devant le Tribunal de commerce de Créteil en sollicitant la résiliation du contrat ainsi que la réparation du préjudice subi à hauteur de 78 500 euros.

Par jugement du 21 avril 2015, le Tribunal de commerce de Créteil a :

- prononcé la nullité du contrat de licence de marque et d'approvisionnement exclusif signé le 18 novembre 2013 entre les sociétés Point Smoke et Cigreats ;

- dit que cette nullité entraine restitution pour les deux parties ;

- dit n'y avoir lieu à se prononcer sur sa résiliation ;

- débouté les parties de leurs autres demandes ;

- condamné la société Point Smoke à lui payer la somme de 1 200 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile, a débouté la demanderesse du surplus de sa demande et a débouté la société Point Smoke de sa demande formée de ce chef ;

- ordonné l'exécution provisoire de ce jugement sous réserve qu'en cas d'appel, il soit fourni par le bénéficiaire une caution égale au montant de la condamnation prononcée à son profit ;

- condamné la société Point Smoke aux dépens.

La cour est saisie de l'appel interjeté par la société Point Smoke de ce jugement.

Vu les dernières conclusions notifiées et déposées le 22 décembre 2015 par la société Point Smoke, appelant, par lesquelles il est demandé à la cour de :

In limine :

- Dire et juger que le tribunal de commerce a dans son jugement du 21 avril 2015 violé le principe du contradictoire et en se fondant sur un moyen non soulevé par les parties et en n'invitant pas les parties à présenter leurs observations sur le moyen soulevé d'office ;

A titre principal :

- Dire et juger que le contrat du 18 novembre 2013 ne constitue pas un contrat de franchise faute de tout engagement de transmission d'un quelconque savoir-faire au détaillant, mais un contrat d'approvisionnement exclusif assorti d'une licence de marque ;

- Dire et juger que le contrat du 18 novembre 2013 est valide et obligeait les parties ;

- Dire et juger que l'obligation d'approvisionnement exclusif découlant du contrat du 18 novembre 2013 est conforme aux prescriptions du droit interne et communautaire de la concurrence ;

- Dire et juger que l'obligation d'approvisionnement exclusif découlant du contrat du 18 novembre 2013 répond aux exigences de l'article L. 330-3 du Code de commerce, l'intimée ne justifiant surabondamment d'aucun vice du consentement.

- Dire et juger que l'engagement d'approvisionnement exclusif est licite, sa cause résidant dans la mise à disposition par la société Point Smoke à la société Cigreats d'une enseigne à titre de nom commercial par le biais d'une licence de marque ;

- Dire et juger que l'engagement d'approvisionnement exclusif satisfait aux conditions de validité civilistes de telles clauses ;

- Dire et juger que la société Cigreats a manqué à ses obligations aux termes du contrat en date du 18 novembre 2013 en ne s'approvisionnant pas exclusivement auprès de la société Point Smoke et en commercialisant dans son point de vente exploité sous enseigne " Point Smoke " des produits concurrents ;

En conséquence,

- Résilier le contrat en date du 18 novembre 2013, rétroactivement avec effet à compter du jugement du Tribunal de commerce de Créteil du 21 avril 2015, aux torts exclusifs de la société Cigreats ;

- Condamner la société Cigreats au paiement d'une astreinte définitive de dix mille (10 000) euros en application de l'article 5.2 du contrat en date du 18 novembre 2013 ;

- Condamner la société Cigreats au paiement au profit de la société Point Smoke des sommes suivantes à titre de dommages et intérêts :

- 50 000 euros au titre du préjudice d'image subi par la société Point Smoke ;

- 108 372,70 euros au titre du préjudice économique équivalent au montant hors taxes du coût des produits achetés par la société Cigreats auprès de fournisseurs concurrents sur la période allant du 3 octobre 2013 au 30 septembre 2014.

Subsidiairement, si par extraordinaire la cour ne retenait pas le montant hors taxes des produits achetés par la société Cigreats auprès de fournisseurs concurrents à titre de préjudice économique :

- Condamner la société Cigreats au paiement au profit de la société Point Smoke de la somme de 21 674,54 euros au titre du préjudice économique équivalent à la perte de marge brute de la société Point Smoke sur les achats effectués auprès de concurrents par la société Cigreats, sur la base d'une marge brute de la société Point Smoke de 20 % ;

En tout état de cause :

- Débouter l'intimée de l'intégralité de ses demandes, fins et prétentions ;

- Condamner la société Cigreats au paiement de la somme de sept mille cinq cent euros (7 500 euros) sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens de première instance et d'appel, dont distraction au profit de David Pinet, Lebray & associés, conformément aux dispositions de l'article 699 du Code de procédure civile.

Vu les dernières conclusions notifiées et déposées le 2 septembre 2015 par la société Cigreats, intimé, par lesquelles il est demandé à la cour de :

- Confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a requalifié le contrat de licence de marque signé le 18 novembre 2013 en contrat de franchise ;

- Confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a prononcé la nullité du contrat signé le 18 novembre 2013 ;

En conséquence,

- Débouter la société Point Smoke de sa demande de résiliation et de paiement de l'astreinte contractuelle et des indemnités au titre du préjudice subi.

- Confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a dit que la nullité entraînait restitution pour les deux parties,

- Confirmer la société Point Smoke à restituer à la société Cigreats l'ensemble des sommes versées par elle au titre du contrat signé le 18 novembre 2013.

A titre subsidiaire,

- Ramener à de plus juste proportion les sommes sollicitées par la société Pont Smoke au titre de la réparation de son préjudice,

En tout état de cause,

- Condamner la société Point Smoke à la somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile,

- Condamner la société Point Smoke aux entiers dépens dont distraction au profit de Maître Chassin en application des dispositions de l'article 699 du Code de procédure civile.

Motifs :

Sur la violation du contradictoire par les juges du fond :

Considérant que Point Smoke invoque in limine litis, la violation par les juges du fond du respect du contradictoire tel que posé par l'article 16 du Code de procédure civile en faisant valoir que la requalification du contrat litigieux en contrat de franchise par Tribunal de commerce de Créteil n'avait jamais été sollicitée comme moyen de droit par la société Cigreats,

Considérant que Cigreats soutient en revanche qu'en vertu de l'article 12 alinéa 2 du même Code le juge donne ou restitue leur exacte qualification aux actes litigieux sans s'arrêter à la dénomination que les parties en auraient proposées, et qu'en ce sens, la requalification du contrat litigieux en contrat de franchise par le juge du fond devra être confirmée,

Que selon les termes de l'article 16 du Code de procédure civile, en toute hypothèse, le juge doit faire respecter et respecter lui-même le principe du contradictoire, que la lecture des conclusions des parties et des demandes formées en première instance ne permettent pas de constater que les parties ont évoqué l'existence d'un contrat de franchise et que si le juge doit donner aux faits leur exacte qualification, s'il est nécessaire, il doit alors avoir au préalable invité les parties à s'expliquer sur la requalification envisagée, que les énonciations du jugement ne permettent pas de constater que cette obligation a été respectée,

Considérant toutefois que la société Point Smoke n'en tire aucune conséquence quant à la validité du jugement,

Considérant que la cour statuera au regard du jugement critiqué,

Sur la requalification du contrat litigieux en contrat de franchise :

Considérant que la société Point Smoke expose que le contrat litigieux ne saurait être requalifié en contrat de franchise, rappelle que la franchise se caractérise par la mise à disposition par le franchiseur au franchisé de trois éléments, soit un savoir-faire, une assistance technique et commerciale, des signes de ralliement de la clientèle ; qu'en l'espèce, si le contrat litigieux mettait à disposition de la société Cigreats les signes de ralliement de la clientèle via la commercialisation des produits sous l'enseigne Point Smoke, la transmission d'un savoir-faire à la société Cigreats y était expressément exclue et l'assistance technique et commerciale n'y était pas prévue ; qu'ainsi, le contrat litigieux est un contrat d'approvisionnement exclusif assorti d'une licence de marque obligeant les deux parties ;

Considérant que la société Cigreats, s'appuyant sur un arrêt de la cour d'appel d'Orléans du 16 avril 2015, soutient que la requalification d'un contrat de distribution en contrat de franchise est justifiée par le paiement du droit d'entrée, la fourniture de la documentation nécessaire, technique et commerciale, la mise à disposition de signes distinctifs au profit du distributeur, notamment par l'obligation d'installer une enseigne portant la marque des produits distribués, de respecter un aménagement spécifique défini, en utilisant les signes et présentoirs portant la marque, et plus généralement par l'obligation de respecter "l'image commune des points de vente", par l'intuitu personae ; qu'en l'espèce, il peut être constaté que l'ensemble de ces éléments étaient contenus dans le contrat litigieux, que le jugement doit être confirmé,

Mais considérant que le préambule du contrat signé par les parties précisait : "Le concept du fournisseur repose sur la fourniture au détaillant de cigarettes électroniques et consommables destinés à être commercialisés sous l'enseigne "Point Smoke" ainsi qu'une identité visuelle commune à l'exclusion de tout savoir-faire." ; que le contrat précisait très clairement dans son article 2.3 que l'engagement du fournisseur n'était pas celui de lui transmettre un quelconque savoir-faire ; que le contrat mettait à la charge du détaillant l'obligation de s'approvisionner exclusivement auprès de Point Smoke, de commercialiser les produits sous la marque Point Smoke en bénéficiant d'une exclusivité ; que "la documentation technique et commerciale nécessaire" que le fournisseur s'obligeait à donner au détaillant (art 3.4) devait permettre à ce dernier de donner aux clients les informations nécessaires à la bonne utilisation des produits et l'obligation du fournisseur à cet égard ne saurait être considérée comme la transmission d'un savoir-faire avec un un concept particulier et une méthode de travail propre ; que les autres éléments invoqués par Cigreats (droit d'entrée, mise à disposition de signes distinctifs : enseigne et éléments d'identification visuelle de la marque, caractère intuitu personae du contrat) ne caractérisent pas l'existence d'un contrat de franchise, étant communes à la plupart des contrats de distribution ; qu'au surplus, il n'est pas rapporté qu'au cours de son exécution, le fournisseur se soit comporté comme un franchiseur,

Considérant que le contrat signé est un contrat d'approvisionnement exclusif assorti d'une licence de marque ;

Sur la validité du contrat et sur celle de la clause d'approvisionnement :

Considérant que la société appelante considère que le document d'information précontractuel est conforme aux prescriptions de l'article L. 330-3 du Code de commerce ; que la clause d'approvisionnement exclusif du contrat litigieux est licite dans la mesure où cette exclusivité est limitée à 3 ans, et que ce délai est conforme aux prescriptions du droit interne et communautaire de la concurrence et que la nullité de la clause d'approvisionnement exclusif pour absence de cause ne saurait être prononcée au motif que la mise à disposition d'un savoir-faire, contrepartie essentielle d'une telle clause, était exclue dans le contrat litigieux alors qu'en effet, un engagement d'approvisionnement exclusif n'a pas nécessairement pour cause la transmission d'un savoir-faire, et qu'en l'espèce la contrepartie résidait dans la mise à disposition d'une enseigne par le biais de la licence de marque, et qu'en outre, la clause de non-concurrence était nécessaire "'aux intérêts légitimes de l'entreprise dans le but, notamment de protéger (...) l'identité du réseau de distribution'" et limitée à la fois dans son objet (elle ne visait que les produits concurrents) et dans sa durée (elle devait s'éteindre avec le contrat) ; qu'elle souligne que la validité de la clause n'est pas soumise aux conditions de validité des clauses de non-concurrence post-contractuelle, qu'elle est limitée quant à son objet, sa durée et indispensable au maintien et à la réputation de l'image de la marque,

Considérant que la société Cigreats demande, en invoquant les termes de l'article 1131 du Code civil, à la cour de confirmer la nullité du contrat litigieux après avoir constaté que ce dernier était dépourvu de cause dans la mesure où le savoir-faire proposé par la société Point Smoke n'était ni substantiel, ni spécifique, ni secret, qu'elle ajoute que la clause d'approvisionnement n'a pas en l'espèce été un facteur de transmission du savoir-faire du franchiseur aux franchisés ; qu'au surplus, la société Point Smoke a manqué à son devoir d'information tel que découlant de l'article L. 330-3 du Code de commerce, qu'à ce titre le document d'information précontractuel remis pas la société appelante n'est pas conforme aux prescriptions de l'article R. 330-1 du même Code, étant peu sérieux et incomplet (présentation du marché, général et local, absence de comptes annuels des deux derniers exercices, liste des entreprises liées par des contrats de même nature), et que par conséquent, le contrat litigieux devra également être déclaré nul pour vice du consentement ; que par ailleurs, la clause d'exclusivité d'approvisionnement litigieuse est restrictive de concurrence donc nulle dans la mesure où elle n'a pas constitué un facteur de transmission du savoir-faire du franchiseur au franchisé ni participé au développement de la marque et de l'enseigne ;

Mais considérant tout d'abord que la nullité du contrat ne peut être prononcée pour absence de cause, c'est-à-dire pour absence de transmission de savoir-faire, compte tenu de ce qui a été développé ci-dessus ;

Considérant que le défaut de respect des dispositions de l'article L. 330-3 et de l'article R. 330-1 du Code de commerce donne lieu au prononcé de la nullité du contrat s'il est justifié de l'existence d'un vice du consentement ;

Que le document d'information précontractuel (DIP) traduit l'obligation d'information ; qu'en l'espèce, il a été remis à Cigreats avant la signature du contrat, qu'il précise que la société a été créée en 2012 et que l'exploitation des cigarettes électronique et accessoire a débuté en octobre 2012 ; qu'il indique le chiffre d'affaires en annexe 5A, en précisant que le bilan n'est pas encore établi ; qu'il mentionne vingt-huit entreprises membres du réseau, en donne les coordonnées, le mode d'exploitation, précise le contrat qui les lie à Point Smoke en annexes 9 A et 9 B, qu'il indique que le réseau tel qu'il est présenté n'a pas été encore modifié ; que le DIP consacre l'annexe 7 à la présentation générale du marché (l'apparition de la cigarette électronique sur le marché, les parts potentielles pour cette cigarette sur le marché français...) ; que l'annexe 8 intitulée "présentation de l'état local du marché" expose "Actuellement, la politique de Point Smoke vise à s'implanter rapidement dans le secteur du Val de Marne et la Seine et Marne, avec une boutique à Maisons-Alfort, une en cours d'ouverture à Vincennes (94) et un contrat en cours de signature au Plessis Trévise (94)" et en annexe 9C - "Liste des entreprises non membres du réseau implantées dans la zone de chalandise du candidat (définie comme "rayon de 10 km à partir de Sens (89)") et approvisionnés en produits par la société Point Smoke", et ne donne aucun renseignement ;

Qu'il résulte de ces constatations que compte tenu de la création récente de la société Point Smoke, les comptes et bilans ne peuvent être fournis sans que cela soit sérieusement reproché par Cigreats à Point Smoke, que par ailleurs, le candidat est informé correctement sur la création, l'existence du réseau, sa composition ; qu'en revanche, aucun élément sérieux n'est fourni sur le marché local à l'analyse des annexes 8 et 9C, s'agissant ici d'une implantation d'un Point Smoke dans le département de l'Yonne, dans la ville de Sens, et non dans la région parisienne, que l'annexe 9 C précise uniquement la zone de chalandise du candidat,

Que si Cigreats peut se plaindre de ce manquement, il n'en demeure pas moins qu'il lui appartient de justifier que son consentement a été ainsi vicié ; que la cour constate qu'elle se borne à alléguer l'existence du vice du consentement sans autre élément ; que par conséquent, la nullité du contrat ne saurait être prononcée,

Considérant que la validité de la clause d'approvisionnement exclusif doit être examinée au regard du droit de la concurrence et également au regard du droit civil,

Considérant que le contrat précise :

Dans un article 1 "Définitions" que les "produits" désignent la gamme de cigarettes électroniques consommables ou autres composants que le détaillant s'oblige à acquérir auprès du fournisseur et dont les points de vente à l'enseigne Pont Smoke assurent la vente, à l'exclusion de tous autres produits ou services, qu'ils soient ou non similaires,

Dans un article 5 "Loyauté et non-concurrence pendant la durée du contrat" en 5.2 : "Le détaillant s'interdit expressément de commercialiser ou promouvoir pendant la durée du contrat des "produits concurrents" des produits, cet engagement étant indispensable au maintien de la réputation et l'image de marque de l'enseigne " Point Smoke " ainsi que la cohésion des points de vente exerçant leurs activités sous cette enseigne. L'expression "produits concurrents" s'entend au sens du présent article de tout substitut nicotinique à la consommation de tabac, quelle que soit sa composition, sa forme, son mode d'administration ou de consommation" ; que le texte précise encore que le détaillant permettra que soit vérifié le respect de cette obligation par des visites à tout moment ou par un audit de sa comptabilité, et que la violation de cette obligation donnera lieu à "paiement d'une astreinte définitive de dix mille euros par infraction" sans préjudice des dispositions de l'article 7.2 et de tous autres dommages-intérêts s'il y a lieu,

Considérant que la clause de non-concurrence insérée dans le contrat liant les parties doit jouer au cours de l'exécution du contrat et se trouve limitée dans le temps à cette exécution, en l'espèce, trois ans voire, en cas de renouvellement, cinq ans maximum ; qu'elle est limitée aux produits qui identifient la marque et a pour objet la protection du réseau de distribution "'Point Smoke'" ; que les conditions invoquées par Cigreats relatives à la quantité (le détaillant doit avoir un stock minimum pour pouvoir toujours répondre à la clientèle article 3.2) et à la qualité des produits, le prix de ces produits "'conseillés'" (article 3.3 du contrat) ne sont pas en cause ; que Cigreats ne démontre en rien que cette clause serait restrictive de la concurrence et par conséquent illicite,

Considérant que la nullité du contrat ne peut être prononcée pour un des moyens invoqués par Cigreats,

Sur la résiliation judiciaire :

Considérant que la société Point Smoke demande que soit prononcée la résiliation du contrat au visa de l'article 1184, aux torts exclusifs de la société Cigreats dans la mesure où il ressort des pièces versées aux débats que cette dernière a massivement violé, à plus de 46 % de ses approvisionnements, la clause d'exclusivité la liant à la société Point Smoke ; que la société Cigreats fait valoir que le contrat ne lui interdisait pas la vente d'accessoires,

Considérant que la notion de produits a été définie et rappelée de même que la clause de non-concurrence ; que lors de sa venue dans le magasin de la société Cegreats dans la galerie commerciale du centre Leclerc à Saint-Denis Les Sens le 16 avril 2014, l'huissier a relevé la présence de cinq fournisseurs pour les produits en stock dans le magasin, Calice, Fastech, Calistar, Baraclope, Point Smoke Point, outre différents produits qui ne sont pas des produits Point Smoke en vitrine, qu'il a relevé la présence de "différentes fioles de liquide E-cigarettes", classées selon les saveurs, que ces marchandises sont des "produits concurrents" des produits Point Smoke et qu'il ne s'agit pas de produits accessoires ; que la société Cegreats les obtient auprès de fournisseurs concurrents et qu'elle les propose à la vente en contravention du contrat signé avec Point Smoke,

Sur le paiement de l'astreinte contractuelle (somme de 10 000 euros) :

Considérant que l'article 5.2 prévoit une "astreinte contractuelle" ; que, compte tenu de la violation du contrat par Cigreats et de la constatation de l'infraction, la société Point Smoke peut en demander le paiement, qu'il sera fait droit à sa demande,

Sur la réparation du préjudice subi par la société Point Smoke :

Considérant que la société Point Smoke fait remarquer qu'il ressort du contrat litigieux que tous les produits achetés par la société Cigreats auprès de fournisseurs tiers étaient visés par la clause d'exclusivité la liant à la société Point Smoke et qu'en ce sens, la violation de la clause doit être appréciée vis-à-vis de l'ensemble de ces produits ; qu'ainsi, en se fondant sur les pièces versées aux débats (et notamment sur le PV de constat du 16 avril 2014), elle calcule que la violation de la clause a été portée à 46 % des approvisionnements de l'intimé soit à 108 372,70 euros, qu'il conviendra de réparer au titre du préjudice économique subi par la société Point Smoke en ajoutant une somme de 50 000 euros au titre du préjudice d'image ; que subsidiairement, il sera retenu la perte de marge brute sur les achats effectués auprès des concurrents, soit 21 674,54 euros,

Considérant que la société Cigreats soutient que nombre de produits cités dans le procès-verbal de constat tels que les pochettes ou les tours de cou étaient en réalité des produits annexes qui ne rentraient pas dans le champ du contrat litigieux et qu'à ce titre le préjudice économique allégué par la société Point Smoke devra être réévalué à hauteur des seuls produits liant les deux parties, qu'il y aura lieu de rapporter à de plus justes proportions le préjudice de Point Smoke,

Mais considérant que le préjudice économique de la société Point Smoke ne saurait être équivalent au montant des approvisionnements réalisés par Cigreats auprès de fournisseurs concurrents mais consiste en la perte de marge brute qu'elle aurait pu faire sur les achats en quantité similaire ; qu'il sera fait droit à sa demande à hauteur de la somme de 21 674,54 euros ; qu'elle ne justifie pas l'existence d'un préjudice d'image.

Par ces motifs : LA COUR, infirme le jugement, statuant à nouveau, déboute la société Cigreats de sa demande de requalification du contrat et de sa demande de nullité du contrat, prononce la résiliation du contrat signé le 18 novembre 2013 par la société Point Smoke et la société Cigreats en raison des manquements de la société Cigreats, condamne la société Cigreats à payer à la société Point Smoke les sommes de 10 000 euros et de 21 674,54 euros à titre de dommages-intérêts, déboute la société Point Smoke de sa demande de réparation pour préjudice d'image, condamne la société Cigreats à payer à la société Point Smoke la somme de 7 500 euros à titre d'indemnité pour frais irrépétibles, condamne la société Cigreats aux entiers dépens qui seront recouvrés avec le bénéfice des dispositions de l'article 699 du Code de procédure civile.