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Décisions

Cass. com., 3 mai 2016, n° 14-28.044

COUR DE CASSATION

Arrêt

Cassation

PARTIES

Demandeur :

Thillaye, GSI (Sté), Eurofield (Sté), GS investissement (Sté), Cosinvest (Sté), Art-Dan (Sté), Slotam (Sté), Art-Dan Île-de-France (Sté)

Défendeur :

Fieldturf Tarkett (Sté)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Mouillard

Rapporteur :

Mme Orsini

Avocat général :

Mme Pénichon

Conseiller :

Mme Riffault-Silk

Avocats :

SCP Rousseau, Tapie, SCP Piwnica, Molinié

Cass. com. n° 14-28.044

3 mai 2016

LA COUR : - Attendu, selon l'arrêt attaqué, qu'après son licenciement de la société Fieldturf Tarkett (la société Fieldturf), spécialisée dans la conception, la fabrication, la commercialisation et la pose de revêtements sportifs, M. Thillaye a créé, en décembre 2005, la société GS investissement (la société GSI) dont l'objet était de recueillir les participations qu'il détenait, au travers de la société Cosinvest dont il avait le contrôle, dans les sociétés Solomat, aux droits de laquelle est venue la société Slotam, Art-Dan Île-de-France et Art-Dan, spécialisées dans la pose de revêtements de sols sportifs, puis, en avril 2006, la société Eurofield, ayant la même activité que la société Fieldturf ; que reprochant à M. Thillaye, en ses qualités de représentant permanent de la société GSI, présidente de la société Eurofield, et de président de la société GSI, et aux sociétés Eurofield, GSI, Cosinvest, Slotam, Art-Dan Île-de-France et Art-Dan (les sociétés) des actes de concurrence déloyale, la société Fieldturf les a assignés en paiement de dommages-intérêts ;

Sur le premier moyen, pris en sa première branche : - Vu l'article 455 du Code de procédure civile : - Attendu que pour dire que les sociétés et M. Thillaye ont commis des actes de concurrence déloyale au préjudice de la société Fieldturf, l'arrêt retient que le débauchage auquel s'est livrée la société Eurofield s'est traduit par des départs de salariés occupant des postes clé et détenant des connaissances précises sur les modes de fabrication et de distribution des produits et que tel est le cas de MM. Leurs, Rousseau et Miranda ;

Qu'en statuant ainsi, sans répondre aux conclusions de la société Eurofield qui faisait valoir, pour écarter tout acte de débauchage fautif, que M. Rousseau n'avait jamais été salarié de la société Fieldturf et que MM. Miranda et Leurs avaient été licenciés par cette société, la cour d'appel a méconnu les exigences du texte susvisé ;

Et sur le même moyen, pris en ses deuxième et troisième branches :- Vu l'article 1382 du Code civil ;

Attendu que pour dire que les sociétés et M. Thillaye ont commis des actes de concurrence déloyale au préjudice de la société Fieldturf, l'arrêt retient que, si le débauchage de salariés de la société Fieldturf ne peut être qualifié de massif, il s'est traduit par des départs de salariés occupant des postes clé et détenant des connaissances précises sur les modes de fabrication et de distribution des produits et relève que les personnels dirigeants de la société Eurofield viennent de la société Fieldturf et que la société Eurofield a incité plusieurs salariés au départ ; qu'il retient encore que ces débauchages ou tentatives de débauchage, facilités par la proximité géographique des usines des deux sociétés, sont graves en ce qu'ils ont permis à la société Eurofield d'utiliser le savoir, l'organisation, les structures et les moyens de la société Fieldturf pour se créer rapidement une place sur le marché qu'elle n'aurait pu acquérir en si peu de temps par des moyens licites ; qu'il ajoute que ce débauchage de salariés s'inscrit ainsi dans une action concertée destinée à détourner et à s'approprier la clientèle de la société Eurofield en utilisant systématiquement son expérience, ce qui caractérise un défaut de loyauté et qu'il retient encore que ces faits ont conduit à désorganiser le réseau commercial de la société Fieldturf ;

Qu'en se déterminant ainsi, sans caractériser l'existence de manœuvres déloyales de débauchage ni préciser, de manière concrète, en quoi ce débauchage avait entraîné une désorganisation de la société Fieldturf, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale ;

Par ces motifs et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs : casse et annule, mais seulement en ce qu'il dit que Eurofield, GSI, Coinvest, M. Thillaye, Art-Dan, Slotam, Art-Dan Île-de-France ont commis des actes de concurrence déloyale, les condamne in solidum à payer à la société Fieldturf Tarkett la somme de 250 000 euros en réparation de son préjudice commercial sur le fondement de la perte de chance, ordonne la publication du dispositif de la décision et en ce qu'il statue sur les dépens et l'article 700 du Code de procédure civile, l'arrêt rendu le 2 octobre 2014, entre les parties, par la Cour d'appel de Versailles.