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Décisions

CA Riom, ch. civ. et com., 4 mai 2016, n° 14/02330

RIOM

Arrêt

Confirmation

PARTIES

Demandeur :

Etre et durer (EURL)

Défendeur :

Selarl MDP (ès qual), Physiomins Expansion (SAS), BNP Paribas (SA)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Riffaud

Conseillers :

MM. Beyssac, Juillard

T. com. Clermont-Ferrand, du 11 sept. 20…

11 septembre 2014

Après avoir travaillé dans la grande distribution et obtenu en 2010 un master en sciences de l'éducation, Madame X a contacté des franchiseurs, dont la SASU Physiomins Expansion (la société Physiomins) qui lui a communiqué, le 18 février 2011 un document d'information pré-contractuel (DIP).

Le 23 mars 2011, Mme X a signé un contrat de franchise lui conférant une exclusivité sur la ville de Challans (85).

L'EURL Etre et Durer a été immatriculée le 15 avril 2011 au registre du commerce et des sociétés de la Roche-Sur-Yon et a souscrit auprès de la SA BNP Paribas (la BNP), par acte sous seing privé en date du 13 mai 2011, un prêt de 50 000 euros, remboursable sur sept ans, garanti par un nantissement sur fonds de commerce et la caution de Mme X à hauteur de 57 000 euros couvrant le paiement du principal, des intérêts et le cas échéant des pénalités ou intérêts de retard.

L'EURL Etre et Durer a acheté les machines et matériels nécessaires à l'exploitation représentant une somme globale de 51 358,63 euros et a ouvert ses portes le 17 mai 2011.

L'activité et la rentabilité du centre de Challans se révélant très inférieures à ce qui était prévu, l'EURL Etre et Durer a sollicité, par lettre recommandée du 20 décembre 2011 adressée à son franchiseur une " solution à l'amiable " et interrompu le paiement des redevances.

Par lettre recommandée du 27 avril 2012, l'EURL Etre et Durer et Mme X ont saisi le Centre international de médiation et d'arbitrage (CIMA).

Aucun accord n'ayant été trouvé l'EURL Etre et Durer et Mme X ont, par actes d'huissier de justice délivrés les 4 et 6 février 2012, fait assigner la société Physiomins et la BNP devant le tribunal de commerce de Clermont-Ferrand pour voir, notamment :

- prononcer la nullité du contrat sur le fondement des articles 1116 ou 1110 du Code civil à raison d'une présentation du réseau Physiomins non conforme à la réalité occultant le manque de rentabilité chronique de ce réseau et la fusion projetée avec son principal concurrent EFFEA et de la présentation d'un compte d'exploitation prévisionnel irréaliste et exagérément optimiste ;

- constater que le contrat de franchise est dépourvu de cause en l'absence de savoir-faire et prononcer sa nullité ;

- prononcer la restitution de la somme globale de 60 897,50 euros représentant les sommes versées dans le cadre du contrat annulé ;

- condamner la société Physiomins à indemniser l'EURL Etre et Durer de son préjudice commercial évalué à 118 134,38 euros ;

- condamner la société Physiomins à indemniser Mme X de son préjudice personnel évalué à 98 000 euros ;

- subsidiairement, prononcer la résiliation du contrat de franchise aux torts du franchiseur à raison de son manquement à son obligation d'aide et d'assistance ;

- en tout état de cause, constater que la BNP a manqué à ses obligations de discernement, renseignement, conseil et mise en garde ;

- condamner la BNP in solidum avec la société Physiomins à les indemniser ;

- décharger Mme X de ses engagements de caution ;

- condamner la société Physiomins et la BNP aux entiers dépens et à leur verser une indemnité de 10 000 au titre de l'article 700 du Code de procédure civile.

Le redressement judiciaire de la société Physiomins a été ouvert par un jugement du tribunal de commerce de LYON en date du 26 mars 2013 avant d'être converti en liquidation judiciaire par jugement du 11 juin 2013, Maître Patrick-Paul D. étant désigné en qualité de liquidateur.

L'EURL Etre et Durer et Mme X ont déclaré leur créance au mandataire judiciaire à raison de l'intégralité des sommes demandées dans leur assignation, avant, par acte d'huissier de justice en date du 5 août 2013, de faire assigner la SELARL MDP, prise en la personne de Maître Patrick-P. D., ès qualités de liquidateur de la société Physiomins, devant le tribunal de commerce de Clermont-Ferrand en intervention forcée aux mêmes fins que dans leur exploit introductif d'instance.

Par jugement rendu le 11 septembre 2014, le tribunal de commerce, après avoir joint les deux instances, a :

- dit que la société Physiomins ne s'est pas livrée à des manœuvres et réticences dolosives pour obtenir l'adhésion de Mme X et de l'EURL Etre et Durer au réseau de franchise ;

- débouté l'EURL Etre et Durer et Mme X de l'ensemble de leurs demandes formées sur le fondement des articles 1110 et 1116 du Code civil à l'encontre de la société Physiomins prise en la personne de son liquidateur ;

- dit que l'absence de savoir-faire du franchiseur et partant le défaut de cause du contrat de franchise ne sont pas établis ;

- débouté, en conséquence, l'EURL Etre et Durer et Mme X de leurs demandes d'annulation du contrat fondée sur les articles 1108 et 1131 du Code civil et de restitution et indemnisation subséquentes ;

- dit que la SAS Physiomins Expansion n`a pas commis de manquement à son obligation d'assistance ;

- débouté, en conséquence, l'EURL Etre et Durer et Mme X de l'ensemble de leurs demandes formées sur le fondement de la responsabilité contractuelle à l'encontre de la société Physiomins ;

- constaté que la BNP n'a pas commis de manquement à ses obligations de conseil, d'information et de mise en garde ;

- débouté, en conséquence, l'EURL Etre et Durer et Mme X de l'ensemble de leurs demandes dirigées à l'encontre de la BNP ;

- débouté la société Physiomins, prise en la personne de son liquidateur, de l'ensemble de ses demandes reconventionnelles ;

- condamné solidairement l'EURL Etre et Durer et Madame X à payer et porter :

* à la société Physiomins prise en la personne de son liquidateur la somme de 1 000,00 au titre de l'article 700 du Code de procédure civile,

* à la BNP la somme de 1 000 euros au même titre,

- condamné solidairement 1'EURL Etre et Durer et Mme X aux dépens.

Suivant déclaration reçue au greffe de la cour le 13 octobre 2014, l'EURL Etre et Durer et Mme X ont interjeté appel de cette décision.

Aux termes de leurs dernières écritures notifiées le 4 février 2016 au moyen du RPVA, l'EURL Etre et Durer et Mme X demandent à la cour, au visa des articles L. 330-3 et R. 330-1 du Code de commerce, 1108, 1110, 1116, 1131, 1184, 2000, 1134, 1147 et 1149 du Code civil et du Code de déontologie de la franchise, d'infirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions sauf en ce qu'il a rejeté les demandes reconventionnelles du liquidateur de la société Physiomins et de :

* à l'égard de la société Physiomins représentée par son liquidateur :

au principal,

- dire que le consentement de Madame X et de la société Etre et Durer ont été viciés et qu'elles n'ont pu s'engager de façon libre et éclairée aux motifs que la société Physiomins leur a remis un DIP qui :

dissimule la réalité du réseau Physiomins et en donne une présentation non-conforme à la réalité, notamment en occultant son manque de rentabilité chronique depuis sa création et la fusion projeté avec le principal concurrent EFFEA,

contient des informations sur l'état général du marché et sur l'état du marché local et les perspectives de développement du marché non conformes aux exigences des articles L. 330-3 et R. 330-1, 4° du Code de commerce,

' contient un compte d'exploitation prévisionnel type totalement irréaliste et exagérément optimiste au regard de l'écart très important qu'il présente avec les chiffres d'affaires réalisés par la société Etre et Durer ,

ne repose pas sur des informations sérieuses, prudentes et vérifiées,

- dire que la rentabilité promise de l'enseigne a été déterminante du consentement de Madame X ;

- dire que le contrat de franchise est dépourvu de cause en l'absence de savoir-faire ;

- prononcer, en conséquence, la nullité du contrat sur le fondement des articles 1116 ou 1110 du Code civil, et/ou sur le fondement des articles 1108 et 1131 du Code civil ;

- fixer au passif de la société Physiomins les créances de restitution de la société Etre et Durer découlant des sommes versées dans le cadre de l'exécution du contrat annulé, à hauteur de la somme totale de 60.897,50 euros, se décomposant comme suit :

droit d'entrée : 15 000 euros HT,

frais de formation : 6 000 euros HT,

redevance publicité et CA : 9 027,50 euros,

factures de produits " Physiomins " : 12 036 euros,

travaux d'agencement du magasin : 26 456 euros,

- fixer au passif de la société Physiomins la créance de dommages-intérêts de l'EURL Etre et Durer correspondant à l'indemnisation de son préjudice commercial à hauteur de la somme totale de 118 134,48 euros, se décomposant comme suit :

préjudice matériel tiré du gain dont elle a été privée : 39 412 euros correspondant au résultat d'exploitation promis sur les deux premières années,

préjudice matériel tiré des pertes qu'elle a enregistrées : 78 722,48 euros correspondant aux pertes subies au jour de la présente ;

- fixer au passif de la société Physiomins la créance de dommages-intérêts de Madame X correspondant à l'indemnisation de son préjudice personnel, à hauteur de la somme de 98 000 euros, se décomposant comme suit :

manque à gagner au titre des rémunérations : 18 000 euros,

perte de chance de se voir rembourser son compte courant : 50 000 euros,

perte de chance de mieux investir son apport en capital : 10 000 euros,

préjudice moral : 20 000 euros ;

subsidiairement,

- dire que la société Physiomins a violé son obligation d'aide et assistance et a gravement manqué à l'exécution loyale et de bonne foi du contrat ;

- prononcer la résiliation du contrat de franchise aux torts exclusifs du franchiseur ;

- dire que ce comportement fautif et déloyal a causé un grave préjudice tant à Mme X qu'à l'EURL Etre et Durer qui doivent être justement indemnisées ;

- fixer au passif de la société Physiomins la créance de dommages-intérêts de l'EURL Etre et Durer à hauteur de la somme de 118 134,48 euros et la créance de dommages-intérêts de Mme X à hauteur de la somme de 98 000 euros ;

** A l'égard de la BNP :

- dire qu'en sa double qualité de banque disposant d'un pôle franchise et de banquier du franchiseur elle disposait nécessairement d'informations spécifiques qu'elle s'est gardée de communiquer ou d'intégrer dans sa prise de décision d'octroi du crédit ;

- dire qu'elle ne pouvait ignorer les difficultés du réseau Physiomins comme son absence de rentabilité et le caractère totalement irréaliste du prévisionnel qui lui a été soumis, lors de l'octroi du crédit ;

- dire qu'elle n'a procédé à aucune analyse ou vérification de la situation du franchiseur et du dossier qui lui était soumis, et fait ainsi preuve d'une légèreté blâmable ;

- dire que la BNP a manqué à ses obligations de discernement, de loyauté, renseignement, d'information et de mise en garde ;

- dire que ces manquements ont un lien de causalité direct avec le préjudice subi par les demanderesses qui, si elles avaient été justement alertées, n'auraient pas contracté avec la société Physiomins et que, ce faisant, la BNP manqué à ses obligations de conseil et de mise en garde en octroyant un crédit inconsidéré au regard du caractère irréaliste du prévisionnel qui lui a été soumis ;

- condamner, en conséquence la BNP in solidum avec la société Physiomins représentée par son liquidateur judiciaire, à indemniser les préjudices subis :

par l'EURL Etre et Durer :

- à hauteur de la somme de 47 519,50 euros qu'elle a dû acquitter en exécution du contrat de franchise (redevance publicité et CA : 9 027,50 euros ; factures de produits : 12 036 euros ; travaux d'agencement du magasin : 26 456 euros) ;

- à hauteur de la somme de 118 134,48 euros au titre du préjudice commercial ;

par Madame X à titre personnel à hauteur de la somme de 98 000 euros ;

- dire que les sommes restant dues au titre du prêt se compenseront avec les dommages-intérêts mis à la charge de la banque à due concurrence ;

- décharger Madame X de ses engagements de caution ;

en toute hypothèse :

- débouter les intimées de toutes leurs demandes, fins, moyens et conclusions ;

- fixer les postes de préjudices subis par les concluantes, ou certains d'entre eux, si la cour devait estimer qu'ils consistent en une perte de chance, à hauteur de la chance perdue, laquelle ne saurait être évaluée à moins de 80 % des montants précités ;

- fixer au passif de la société Physiomins la somme de 10 000 euros au titre des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile ;

- condamner in solidum la BNP Paribas au paiement d'une somme de 10 000 euros sur le même fondement ;

- condamner in solidum la société Physiomins représentée par son liquidateur et la BNP aux entiers dépens, en ce compris les frais d'arbitrage.

Aux termes de ses écritures notifiées le 13 mars 2015 au moyen du RPVA, la société Physiomins prise en la personne de son liquidateur conclut à la confirmation du jugement déféré en ce qu'il a rejeté la demande de nullité de contrat de franchise et l'action en responsabilité formées par les appelantes.

Elle forme appel incident et demande à la cour de :

- dire que le contrat de franchise a été résilié de manière unilatérale par l'EURL Etre et Durer par l'arrêt intempestif de l'exploitation sans notification au franchiseur ;

- condamner en conséquence l'EURL Etre et Durer et Mme X

à lui payer :

* une somme de 20 000 euros à titre de dommages-intérêts,

* la somme de 4 964,30 euros au titre d'un arriéré de facturation ;

à supporter in solidum les dépens de la procédure et à lui verser une indemnité de 4 000 euros au titre de ses frais de procès.

Elle fait plaider que s'agissant de l'information pré-contractuelle il était précisé que la marque Physiomins avait été acquise dans le cadre du plan de cession de la société LABORATOIRES MEDILIGNE adopté par le tribunal de commerce d'ANNONAY le 19 octobre 2007, qu'il était ainsi évident que la société MEDILIGNE avait connu des difficultés financières et que cet état de fait n'a nullement été dissimulé aux appelantes.

Elle ajoute que, s'agissant de l'état du réseau, elle n'a pu communiquer que les éléments qui lui avaient été transmis par l'administrateur judiciaire en ce qui concerne le nombre de centres et qu'il était rappelé que l'ensemble des contrats de franchise était exclu du plan de cession et qu'aucune manœuvre n'est ainsi susceptible de lui être reprochée.

Elle souligne que le compte prévisionnel n'a pas été établi par ses soins mais par la franchisée en collaboration avec son propre expert-comptable.

Elle réfute la responsabilité qui lui est opposée en faisant valoir que la partie adverse a, comme les autres franchisés, bénéficié de l'animation du réseau, d'une formation, du savoir-faire lié à la marque et des investissements consentis qui représentaient 472 048 euros pour l'année 2009.

Aux termes de ses dernières écritures notifiées le 19 janvier 2016 au moyen du RPVA, la BNP demande à la cour de confirmer le jugement déféré et de lui donner acte de ce qu'elle s'en rapporte sur les demandes principale et subsidiaire de l'EURL Etre et Durer et de Mme X aux fins d'annulation ou de résolution du contrat de franchise.

Elle sollicite qu'il soit :

- dit que dans l'hypothèse où le contrat de franchise serait annulé ou résolu le contrat de prêt du 13 mai 2011 ayant servi au financement du matériel toujours utilisé par l'EURL Etre et Durer poursuivrait son exécution normalement tant à l'égard de la débitrice principale que de la caution ;

- dit qu'elle n'a commis aucune faute dans l'exécution de ses obligations d'information et de mise en garde ;

et qu'en conséquence, l'EURL Etre et Durer et Mme X soient déboutées de l'ensemble de leurs demandes dirigées à son encontre au titre de l'indemnisation d'un quelconque préjudice et condamnées solidairement en tous les dépens, dont distraction au bénéfice de Maître G., ainsi qu'à lui verser une indemnité de 5 000,00 euros au titre de ses frais de procès.

Elle soutient n'avoir commis aucune faute et, qu'en tout état de cause, les préjudices invoqués ne sont pas de son fait.

Elle précise que son rôle s'est réduit à l'octroi du prêt, qu'elle n'a pas été contactée par Mme X en tant que spécialiste de la franchise ni présentée par le franchiseur et que, si elle possède un pôle franchise, elle invite toutefois les personnes intéressées à s'entourer de conseils avisés auprès d'un expert-comptable spécialisé et de faire étudier le DIP par un avocat ou un conseil juridique spécialisé et elle ajoute qu'il n'est en aucun cas prévu qu'elle effectue au lieu et place du client un audit de son projet et du réseau du franchiseur étant tenue au secret bancaire à cet égard.

Elle indique encore qu'elle n'a pas été sollicitée pour accompagner la réalisation et le financement du projet d'installation et de développement de la franchise le contrat de prêt du 13 mai 2011 n'ayant eu pour objet que le financement de l'appareillage électrique et de travaux d'aménagement.

Elle précise qu'elle a émis un avis défavorable sur une première demande d'emprunt à hauteur de 95 000 euros et que ce n'est qu'après avoir énoncé les points faibles du dossier : absence d'expérience de Mme X et absence d'une esthéticienne diplômée, difficulté à valider le prévisionnel qui ne prenait pas en considération les charges de personnel qualifié, rentabilité des franchises installées, qu'elle a accepté un financement de 50 000,00 euros alors même que Mme X décidait d'embaucher immédiatement un salarié.

Elle estime, en conséquence, avoir satisfait à ses obligations, en se livrant à une étude sérieuse de la demande de prêt, en dispensant des conseils efficaces et une mise en garde claire.

Il est renvoyé aux écritures des parties pour un plus ample exposé de leurs moyens et de leur argumentation.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 18 février 2016.

Motifs de la décision :

Sur les demandes tendant à l'annulation du contrat de franchise

L'article L. 330-3 du Code de commerce prévoit que toute personne qui met à la disposition d'une autre personne un nom commercial, une marque ou une enseigne, en exigeant d'elle un engagement d'exclusivité ou de quasi-exclusivité pour l'exercice de son activité, est tenue, préalablement à la signature de tout contrat conclu dans l'intérêt commun des deux parties, de fournir à l'autre partie un document donnant des informations sincères, qui lui permette de s'engager en connaissance de cause.

Ce DIP, dont le contenu est fixé par l'article R. 330-1 du même Code, précise, notamment, l'ancienneté et l'expérience de l'entreprise, l'état et les perspectives de développement du marché concerné, l'importance du réseau d'exploitants, la durée, les conditions de renouvellement, de résiliation et de cession du contrat ainsi que le champ des exclusivités.

La nullité du contrat n'est susceptible d'être prononcée que si le manquement au devoir d'information a eu pour effet de vicier le consentement du franchisé.

En l'espèce, Mme X et l'EURL Etre et Durer soutiennent que le DIP ne contenait pas une présentation sincère de l'évolution du réseau et de la rentabilité du concept, ce qui a vicié leur consentement par réticence dolosive ou à tout le moins par erreur substantielle, ayant été trompées par le compte d'exploitation prévisionnel avalisé par la société Physiomins et établi sur la base d'exemples par elle proposés annonçant un chiffre d'affaires de 135 000 euros la première année d'exploitation, de 141 750 euros la deuxième année et de 148 838 euros la troisième année, prévisions qui se sont révélées très éloignées du chiffre d'affaires effectivement réalisé de 33 817 euros pour la période du 17 mai au 31 décembre 2011.

Elle reproche à la société Physiomins de lui avoir dissimulé l'état véritable de son réseau qui a connu un nombre anormal de fermetures, a perdu 70 % de ses centres depuis 2001 dont 53 centres entre le rachat de l'enseigne dans le cadre du redressement judiciaire du LABORATOIRE MEDILIGNE intervenu en 2007 et l'année 2011.

Elle reproche également à cette société de ne pas lui avoir annoncé que ce réseau allait fusionner avec son concurrent direct le réseau " EFFEA " alors même que ce rapprochement était prévu depuis une année.

Néanmoins, le tribunal a rappelé à juste titre que Mme X avait été clairement informée par le DIP remis le 18 février 2011:

- que la SAS Physiomins Expansion avait acquis les éléments matériels, dont la marque Physiomins dans le cadre de la procédure de redressement judiciaire ouverte à l'égard de la société laboratoire mediligne ;

- que ce document et son annexe mentionnait les six franchisés qui avaient quitté le réseau au 31 décembre 2009 et énumérait les mouvements enregistrés entre janvier 2009 et janvier 2011 mettant en évidence 15 fermetures et seulement cinq ouvertures de centres ;

- que le DIP comportait également les derniers comptes disponibles de la société Physiomins qui, arrêtés au 31 décembre 2009, montraient des résultats en forte baisse et lourdement négatifs.

Par ailleurs, si le guide du candidat à la franchise 2011 remis à Mme X (pièce n° 19) faisait état de chiffres d'affaires élevés pour trois exemples de comptes d'exploitation prévisionnels, il ne s'agissait aucunement de prévisions s'attachant à la zone où elle entendait s'installer et elle a d'ailleurs, pour constituer son dossier, fait réaliser par son propre expert-comptable un prévisionnel notablement plus prudent se basant les prévisions ci-dessus rappelées. Quant à l'état local du marché (pièce n° 34), qui ne constitue pas une étude de marché, il mentionnait la présence de neuf concurrents dans une zone de chalandise limitée peuplée de 19 000 habitants.

En outre, s'agissant de la fusion avec le réseau EFFEA, annoncée aux adhérents par une correspondance du 26 mai 2011 (pièce n° 12) et qui se trouvait effectivement en cours de négociation lorsque le contrat litigieux a été conclu, c'est en procédant par de simples affirmations, qui ne sont pas étayées par la production d'éléments de preuve, que Mme X indique que les centres appartenant à ce réseau viendraient la concurrencer et que l'absence de liens entre ces réseaux constituait un élément déterminant de sa décision d'adhérer à la franchise Physiomins.

Il ressort de ces éléments que Mme X, qui s'engageait à titre professionnel avec le concours d'un expert-comptable pour la présentation de son compte d'exploitation prévisionnel, ne pouvait que déceler qu'elle adhérait à un réseau qui avait connu une importante défaillance s'étant traduite par un redressement judiciaire et qui se trouvait en pleine restructuration avec tous les aléas que cela comporte, le dirigeant de la société Physiomins, créateur du réseau ELYTIS, étant un partenaire expérimenté ayant connu un succès reconnu, de sorte que la restructuration du groupe repris en octobre 2007 n'était pas utopique sans toutefois être garantie.

En fonction de ces éléments, c'est à bon escient que le tribunal de commerce a écarté la demande de nullité, tant sur le fondement du dol que sur celui de l'erreur substantielle, aucun vice du consentement n'étant démontré, Mme X ne pouvant sérieusement ignorer les difficultés du réseau Physiomins auquel elle adhérait.

C'est encore à bon escient que la juridiction consulaire a considéré que le contrat n'était pas dépourvu de cause.

En effet, lorsque les parties ont contracté, les difficultés du réseau, l'aléa qui s'attachait à sa restructuration et son projet de fusion avec un réseau concurrent ne venaient pas, pour autant, vider le contrat de tout savoir faire et toute substance et les redevances de toute contrepartie.

En conséquence, le jugement critiqué sera confirmé en ce qu'il a rejeté les demandes tendant à l'annulation du contrat de franchise formée par Mme X et l'EURL Etre et Durer .

Sur la rupture du contrat et les responsabilités encourues

Présentant cette demande à titre subsidiaire, Mme X et l'EURL Etre et Durer , pour obtenir la résiliation du contrat de franchise à ses torts et le paiement de dommages-intérêts, reprochent à la société Physiomins d'avoir manqué à son obligation d'aide et d'assistance en s'abstenant de tout mettre en œuvre pour assurer le développement de son centre et en ne lui proposant pas à la suite du rapprochement avec le réseau EFFEA de sortir de la franchise.

Présentant ces demandes au titre de son appel incident, le liquidateur de la société Physiomins réitère la demande reconventionnelle tendant à voir prononcer la rupture du contrat aux torts de l'EURL Etre et Durer et à obtenir paiement de dommages-intérêts qu'il avait présentée aux premiers juges. Il sollicite également paiement d'un solde de redevances.

C'est à juste titre que les premiers juges ont constaté que Mme X avait reçu la formation initiale prévue au contrat et que la société Physiomins lui a fourni les dossiers relatifs à l'aménagement technique de son centre.

C'est encore à juste titre qu'ils ont considéré que les conditions dans lesquelles avaient été réalisée l'assistance sollicitée par le franchisé à la suite des pannes affectant la machine " IRH COCON " mettaient davantage en cause le fournisseur de cet appareil que le franchiseur et qu'elles ne pouvaient justifier la résiliation du contrat.

En revanche, force est de constater que la société Physiomins est restée sans réaction à la suite des lettres circonstanciées en date des 5 décembre 2011 et 20 décembre 2011 par lesquelles l'EURL Etre et Durer et sa gérante exposaient leurs difficultés et dénonçaient l'absence totale de rentabilité du centre.

Si la seconde de ces correspondances évoque la visite d'une animatrice du réseau le 14 décembre 2011, rien de constructif ne semble être ressorti de cette visite et la société Physiomins n'établit pas avoir proposé une quelconque assistance personnalisée à cette structure en difficulté. Elle a ainsi manqué à son obligation à ce titre.

De fait, l'EURL Etre et Durer a cessé de régler les redevances dont le paiement lui est aujourd'hui réclamé par le liquidateur à compter du mois de janvier 2012 avant d'engager la présente procédure.

Il ressort de ces constats que la rupture du contrat de franchise est intervenue à raison des manquements réciproques imputables aux deux parties devenues incapables de satisfaire à leurs obligations contractuelles au cours du mois de janvier 2012 et qu'il y a lieu, ainsi que l'ont décidé les premiers juges, de rejeter leurs demandes réciproques en paiement de dommages-intérêts ainsi que la demande formée par le liquidateur au titre du paiement des redevances.

Sur la responsabilité de la banque

Les appelantes reprochent à la BNP un manquement à son obligation de conseil et de mise en garde aux motifs qu'en sa double qualité de banque munie d'un pôle franchise, elle disposait nécessairement d'informations spécifiques qu'elle s'est gardée de communiquer ou d'intégrer dans sa prise de décision d'octroi de crédit, et que d'autre part, elle n'a procédé à aucune analyse ou vérification de la situation du franchiseur et du dossier qui lui était soumis, faisant ainsi preuve d'une légèreté blâmable.

Toutefois, il convient d'observer qu'au regard du parcours professionnel de Mme X ayant une expérience commerciale dans la grande distribution et agissant pour le compte de sa société, elle doit être considérée comme un emprunteur averti même si elle n'avait pas d'expérience en matière de franchise dans le domaine de l'amincissement.

Par ailleurs, le déroulement de ses discussions avec la banque montre qu'une première demande de financement d'un montant de 95 000 euros a été rejetée et qu'à la suite de ce refus elle a dû revoir à la baisse ses prévisions présentées avec l'assistance d'un expert-comptable et sa demande de financement de sorte qu'elle ne peut valablement reprocher à la BNP, de ne pas s'être livrée à une analyse sérieuse du projet et d'avoir manqué à son obligation de mise en garde.

Par ailleurs, Mme X et l'EURL Etre et Durer , qui procèdent par affirmations, ne démontrent pas que même disposant d'un pôle franchise la BNP aurait disposé d'informations privilégiées qu'elles-mêmes auraient ignorées.

Au surplus, le prêt a été contracté postérieurement à la conclusion du contrat de franchise, pour l'acquisition de matériel et pour un montant de 50 000 euros qui n'a rien d'inhabituel en la matière de sorte qu'il ne peut être considéré que l'accord donné par la banque à ce financement s'est révélé déterminant dans l'opération dénoncée par l'EURL Etre et Durer et sa gérante.

Sur les dépens et leurs accessoires

Mme X et l'EURL Etre et Durer qui succombent en leur appel supporteront la charge des dépens.

L'équité ne commande pas qu'une indemnité complémentaire soit accordée au liquidateur de la société Physiomins et à la BNP en application des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile.

Le bénéfice des dispositions de l'article 699 du même Code sera accordé à Maître G., avocat.

Par ces motifs, La cour, après en avoir délibéré, statuant publiquement, par arrêt contradictoire et en dernier ressort, mis à la disposition des parties au greffe de la juridiction ; Constate que la rupture du contrat de franchise est intervenue aux torts réciproques des parties ; Confirme le jugement entrepris ; Condamne Mme X et l'EURL Etre et Durer aux dépens d'appel ; Accorde à Maître G. le droit de recouvrer directement ceux des dépens dont elle aura fait l'avance sans en avoir reçu provision.