CA Paris, Pôle 5 ch. 5, 12 mai 2016, n° 14-15509
PARIS
Arrêt
Infirmation partielle
PARTIES
Demandeur :
Orfeor (SAS)
Défendeur :
Infodette (SAS), Seldon.Fin (SAS)
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Dabosville
Conseillers :
M. Loos, Mme Schaller
Avocats :
Mes Hermet Lartigue, Carbasse, Anquetil, Dirou
Faits et procédure
La société Orféor et la société Infodette sont des sociétés de conseil spécialisées dans l'assistance des collectivités locales et établissements publics pour la gestion de leur trésorerie et de leur endettement.
Depuis 2008, la société Orféor permet à ses clients d'accéder à une plate-forme internet de suivi en temps réel de leur tableau de bord et de données informatives. Elle est dirigée par M. Andrieu.
La société Infodette est propriétaire de sa propre plate-forme de données et de gestion.
Dirigée par M. Sebé, elle est filiale de la holding familiale Gestion et Finance, également propriétaire de la société Seldon.Fin, éditeur de logiciel, qui héberge la société Infodette et sa plate-forme éponyme.
A compter de juin 2007 la société Orféor et la société Infodette ont collaboré et envisagé une fusion-absorption destinée à mutualiser leurs moyens et compétences. Elles ont également entrepris des actions communes de développement de leurs outils.
Un projet de fusion a été déposé et publié via le greffe du Tribunal de commerce de Bayonne en juillet 2009.
En novembre 2009 la société Seldon s'est rapprochée d'un concurrent de la société Orféor, la société Ciril.
La fusion Orféor-Infodette ne s'est pas réalisée.
Au 1er janvier 2010, les clients de la société Orféor n'ont plus été en mesure d'accéder à la plate-forme de la société Infodette. Le service a été partiellement rétabli le 3 janvier 2010 dans le cadre d'un processus de révision des accords antérieurs et de paiement par la société Orféor de divers frais et redevances d'utilisation.
Par courrier du 8 juin 2011, la société Infodette a dénoncé les accords la liant à la société Orféor à effet du 31 décembre 2011.
La séparation effective, compte tenu des problèmes de transferts de données et de paiement de redevances résiduelles, a donné lieu à divers épisodes judiciaires tant devant le juge des référés que devant les juges du fond du Tribunal de commerce de Bayonne.
Par acte extrajudiciaire en date du 25 juillet 2013, la société Orféor a assigné tant la société Infodette que la société Seldon.Fin devant le Tribunal de commerce de Bordeaux.
Par une décision en date du 2 mai 2014, le Tribunal de commerce de Bordeaux a :
- débouté la société Seldon.Fin et la société Infodette de leurs exceptions d'incompétence et de litispendance ;
- débouté la société Seldon.Fin et la société Infodette de leur demande de mise hors de cause de la société Seldon.Fin ;
- condamné solidairement la société Seldon.Fin et la société Infodette à payer à la société Orféor 25 000 euro de dommages et intérêts à titre de préjudice commercial et d'image résultant des faits de dénigrement ;
- débouté la société Orféor du surplus de ses demandes indemnitaires et de sa demande de publication de la présente décision ;
- dit n'y avoir lieu à exécution provisoire.
Vu l'appel interjeté par la société Orféor le 21 juillet 2014 contre cette décision.
Vu les dernières conclusions signifiées le 10 février 2016 par la société Orféor par lesquelles il est demandé à la cour de :
- se déclarer compétente pour connaître de la présente action ;
- confirmer le jugement dont appel en ce qu'il a :
débouté la société Seldon.Fin et la société Infodette de leurs exceptions d'incompétence et de litispendance ;
débouté la société Seldon.Fin et la société Infodette de leur demande de mise hors de cause ;
dit et jugé que l'abandon du projet de fusion par la société Infodette est constitutif d'une rupture abusive des pourparlers ;
dit et jugé que la société Infodette et la société Seldon.Fin ont abusé de la dépendance économique de la société Orféor à leur égard;
dit et jugé que la publication sur le site de la société Seldon du communiqué du mois de décembre 2012 et l'envoi à la clientèle de la société Orféor de l'email circulaire en date du 17 avril 2013 sont constitutifs d'actes de concurrence déloyale de la part de la société Infodette et la société Seldon.Fin et condamné lesdites sociétés à indemniser la société Orféor du préjudice subi à ce titre ;
- l'infirmer pour le surplus et statuant à nouveau :
- dire et juger que la société Infodette et la société Seldon.Fin ont commis des actes de violence à l'égard de la société Orféor ayant vicié son consentement afférent aux reconnaissances de dettes du 4 janvier 2010 ;
- dire et juger que la société Infodette et la société Seldon.Fin ont obtenu sous la menace d'une rupture brutale des relations commerciales des conditions manifestement abusives concernant les prix des services rendus en 2008 et 2009 ;
- dire et juger que la société Infodette et la société Seldon.Fin ont obtenu de la société Orféor des avantages ne correspondant à aucun service commercial effectivement rendu ou manifestement disproportionnés au regard de la valeur des services rendus ;
- dire et juger que la société Orféor a subi un préjudice du fait de ces agissements ;
Et en conséquence,
- condamner la société Infodette à verser à la société Orféor, la somme de 98 200 euro en réparation du préjudice subi du fait de la rupture abusive des pourparlers de fusion-absorption dont elle s'est rendue coupable ;
- dire et juger que les reconnaissances de dette du 4 janvier 2010 sont nulles en présence d'un consentement vicié de la société Orféor et comme résultant d'un abus de dépendance économique de la part de la société Infodette et la société Seldon.Fin ;
- condamner solidairement les sociétés Infodette et Seldon.Fin à verser à la société Orféor la somme de 37 300 euro, augmentée des intérêts légaux à compter du 28 juillet 2010, en réparation des travaux effectués dans l'intérêt de la société Seldon.Fin mais non payés à la société Orféor ;
- condamner solidairement les sociétés Infodette et Seldon.Fin à verser à la société Orféor la somme de 72 925 euro, en réparation du préjudice né des pertes subies et du manque à gagner induit par les coupures d'accès à la plate-forme ;
- condamner solidairement les sociétés Infodette et Seldon.Fin à verser à la société Orféor la somme de 50 000 euro, en réparation du préjudice né du dénigrement causé par la société Seldon.Fin et la société Infodette et de l'atteinte à l'image qui en est résultée pour la société Orféor ;
- ordonner la publication de la décision à intervenir dans tout journal ou toute revue à choisir par la société Orféor aux frais des intimées dans la limite de 5 000 euro ;
- condamner solidairement les sociétés Infodette et Seldon.Fin à verser la somme de 30 000 euro à la société Orféor au titre de l'article 700 du Code de procédure civile ;
- condamner solidairement les sociétés Infodette et Seldon.Fin aux entiers dépens, dont distraction au profite de Me Hermet Lartigue au titre de l'article 699 du Code de procédure civile.
Vu les dernières conclusions signifiées le 10 février 2016 par la société Seldon.Fin en présence de la société Infodette par lesquelles il est demandé à la cour de :
- se déclarer incompétent au profit du Tribunal de commerce de Bayonne ;
- mettre hors de cause la société Seldon.Fin
- débouter la société Orféor de l'ensemble de ses demandes tant contre la société Seldon.fin que la société Infodette.
A titre reconventionnel,
- condamner la société Orféor au paiement de la somme de 5 000 euro au profit des sociétés Seldon.Fin et Infodette au titre de l'article 700 du Code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens de l'instance.
Motifs de la décision
Sur les exceptions d'incompétence et de litispendance
Est soulevée par les intimées l'incompétence du Tribunal de commerce de Bordeaux, motif pris qu'en matière de rupture abusive de pourparlers contractuels le lieu de compétence territoriale est le lieu de droit commun du domicile de la société défenderesse ou le lieu des faits fautifs, en l'espèce soit Bayonne, soit Paris, ce d'autant qu'il existait un premier litige entre la société Infodette et la société Orféor inhérent à l'exécution d'une convention de fourniture d'application ;
Mais la cour estime que c'est par des motifs pertinents qu'elle adopte que le premier juge a fait une juste appréciation du droit et des moyens des parties en retenant que dès lors que la société Orféor invoquait un moyen tiré de pratiques anti-concurrentielles et de pratiques restrictives de concurrence, les règles de compétence spéciales édictées par les articles L. 420-7 et L. 442-6 du Code de commerce trouvaient application et justifiaient de la saisine du Tribunal de commerce de Bordeaux, listé par les articles R. 420-3 et D. 442-3 parmi les huit tribunaux de commerce compétents pour connaître de ces types de litiges ;
Les sociétés Infodette et Seldon Fin invoquent également la litispendance tirée de la circonstance que le litige n'est pas uniquement un litige de paiement de redevances mais concerne l'exécution d'une convention de mise à disposition qui a été conclue entre les sociétés Orféor et Infodette en compensation de la non-concrétisation du projet de fusion ; elles relèvent ainsi une unicité de litige entre la procédure concernant l'exécution de cette convention et le présent litige de rupture de pourparlers contractuels aux opérations de fusion ;
Il est ainsi fait état d'un " véritable détournement de procédure " et d'une " violation des règles de compétence territoriale et d'attribution de la juridiction commerciale " découlant de la saisine du Tribunal de commerce de Bordeaux aux dépens du Tribunal de commerce de Bayonne ;
Mais, outre le fait que l'instance devant le Tribunal de commerce de Bayonne concernait des paiements de facture et était parfaitement distincte de celle initiée à Bordeaux qui touchait, quant à elle, à l'essence même des relations de base entre les sociétés en cause, aucune litispendance ne pouvait s'appliquer dès lors que ce second litige reposait sur des demandes relevant d'une compétence spécifique ;
Le jugement est en conséquence confirmé sur ce point.
Au fond
Sur la rupture abusive des pourparlers, la société Orféor fait valoir qu'une rupture présentant un caractère abusif engage la responsabilité délictuelle de son auteur, notamment en raison de l'abandon soudain du projet de fusion-absorption par la société Infodette ; que, en l'espèce, la rupture de ces pourparlers par Infodette est intervenue extrêmement tardivement, en novembre 2009, alors que les procès-verbaux des assemblées générales extraordinaires étaient déjà rédigés et que l'ensemble des formalités nécessaires à la fusion avait été effectué (nomination d'un commissaire à la fusion, publication le 7 juillet 2009 du projet de fusion par le greffe du Tribunal de commerce de Bayonne) ; qu'ainsi le premier juge a lui-même relevé que le principe de la fusion avait dépassé le stade du simple projet : " il est avéré que le traité de fusion, pour n'avoir pas été finalisé, a fait l'objet de démarches le faisant sortir du champ des projets " ;
Qu'il ne faisait aucun doute pour Orféor que l'opération de fusion-absorption allait aboutir, Infodette n'ayant jamais émis la moindre réserve sur le projet avant sa décision de retrait et ayant, au contraire, toujours incité Orféor à entreprendre de nombreuses démarches administratives en vue de la fusion à intervenir (changement de siège social, nomination de Monsieur Gilles Sebé en qualité de directeur général délégué d'Orféor, nomination du commissaire aux comptes d'Infodette et Seldon en qualité de commissaire aux comptes d'Orféor, transformation d'Orféor en société par actions simplifiée, etc...) ;
Elle prétend ainsi que l'annonce par Infodette de son retrait du projet de fusion est donc intervenue subitement, sans qu'Orféor n'ait pu l'anticiper, le comportement de Gilles Sebé et d'Infodette en 2008 et 2009 l'ayant entretenue dans l'idée que la fusion-absorption était sur le point de se réaliser ;
La société Infodette conteste formellement cette version des faits et soutient que la suspension du projet ne correspondait en rien à une rupture brutale de pourparlers et encore moins à un arrêt des relations d'affaires entre Infodette et Orféor ; qu'en effet si le projet de fusion était suspendu, les relations d'affaires entre les deux sociétés allaient continuer ;
Elle argue de ce que l'arrêté de comptes sorti fin 2008 a révélé les très mauvais résultats économiques de la société La Ronnade - devenue entre-temps Orféor SAS - sur l'exercice comptable de l'année 2008, l'obligeant de différer une seconde fois le projet de fusion au deuxième trimestre 2009 afin d'attendre les résultats définitifs de l'exercice 2008 d'Orféor au mois de mars 2009 (établissement du bilan définitif) ; que ce deuxième bilan a confirmé les difficultés économiques d'Orféor et ses très mauvais résultats réalisés pour l'exercice de l'année 2008, l'entreprise connaissant une forte baisse de son chiffre d'affaires qui passait de 766 000 euro en 2007 à 708 107 euro en 2008 soit une baisse de 10 %, ce chiffre n'étant en outre obtenu que par un transfert d'affaires apportées par Infodette dans le courant de l'année 2008 sans aucune contre-partie ; que si en 2009, le chiffre d'affaires remontait à 792 786 euro, la société voyait son résultat passer de - 8 229 euro en 2008 à - 60 792 euro en 2009, traduisant une forte baisse de rentabilité ;
Qu'ainsi Infodette se retrouvait face à un projet fusion avec une société dont les résultats étaient déficitaires sur les exercices 2008 et 2009 et un chiffre d'affaires en baisse et que, de ce fait les parités envisagées dans le traité de fusion devenaient impossible à justifier, les valorisations du projet initial de fusion ne correspondant plus à rien ;
La société Seldon revendique pour sa part sa mise hors cause, estimant être étrangère à ce litige, dès lors que, éditeur de logiciels, elle n'a aucune activité commune avec Orféor ;
Sur quoi
La mise hors cause de la société Seldon ne peut être prononcée dans la mesure où le fondement des prétentions de la société Orféor repose sur l'existence alléguée d'une action conjointe de celle-ci et d'Infodette dont le dirigeant commun, Gilles Sebé, userait comme moyen de pression ;
Force est ensuite de relever que les parties sont en phase sur le fait qu'Infodette a mis fin au processus de fusion en novembre 2009 ; cet échec a été précédé d'un signe avant-coureur significatif, relevé par le premier juge, s'agissant de l'association de la société Seldon avec le groupe Ciril, concurrent de la société Orféor ; et celle-ci mentionne en outre que dès le mois d'octobre 2009, Seldon n'a pas hésité à répondre à un appel d'offres lancé par le CHU de Limoges, faisant ainsi concurrence directe à Orféor ;
Force est également de constater que la société Infodette justifie cette rupture comme la conséquence inéluctable de la publication, tardive, des comptes qui n'est intervenue qu'au mois de mars 2009 révélant, selon ses termes " un effondrement " du chiffre d'affaires de Orféor ; or, cette explication est dénuée de toute cohérence au regard du fait que le processus de rupture a débuté en novembre, la société Infodette ne donnant aucune explication sur le fait que dans ce délai les formalités de fusion aient continué et progressé ;
Pour autant, si la société Orféor, à l'appui de ses revendications, cite essentiellement les échanges de fin d'année entre Messieurs Andrieu et Sebé, elle reste muette sur sa propre réaction durant la période précédente, pourtant essentielle, allant du mois de novembre à l'échec officiel de la fusion ;
Et, de fait, il découle des mails échangés en fin d'année que ce sont ces soudaines discussions échangées dans un laps de temps très restreint et dans une période particulière, qui ont à la fois soldé le projet de fusion et conduit les parties à conclure de nouveaux accords, eux-mêmes discutés comme entachés de pressions diverses ;
A l'occasion de cette mise à plat de leurs relations les deux dirigeants ont effectivement procédé, de manière passionnelle, à une remise à plat conflictuelle des divers angles de leurs relations et griefs respectifs : problèmes de fond, notamment de paiements, du montant de la participation d'Orféor, et négociations sur les chiffres et exigences financières, celles, notamment, de M. Sebé ;
Il convient dès lors d'examiner la question de la rupture au regard de la validité de ces nouveaux accords ;
Ces points ont un certain nombre de dénominateurs communs, dont, essentiellement, celui de la dépendance économique alléguée par la société Orféor ;
Au terme de l'article L. 420-2 du Code de commerce :
" Est prohibée, dans les conditions prévues à l'article L. 420-1, l'exploitation abusive par une entreprise ou un groupe d'entreprises d'une position dominante sur le marché intérieur ou une partie substantielle de celui-ci. Ces abus peuvent notamment consister en refus de vente, en ventes liées ou en conditions de vente discriminatoires ainsi que dans la rupture de relations commerciales établies, au seul motif que le partenaire refuse de se soumettre à des conditions commerciales injustifiées. Est en outre prohibée, dès lors qu'elle est susceptible d'affecter le fonctionnement ou la structure de la concurrence, l'exploitation abusive par une entreprise ou un groupe d'entreprises de l'état de dépendance économique dans lequel se trouve à son égard une entreprise cliente ou fournisseur. Ces abus peuvent notamment consister en refus de vente, en ventes liées, en pratiques discriminatoires visées au I de l'article L. 442-6 ou en accords de gamme. " ;
La société Orféor soutient que les agissements d'Infodette et Seldon à son égard relèvent d'une telle situation, tous les critères de la dépendance étant réunis en l'espèce : selon l'appelante, à compter de l'échec du projet de fusion, Orféor a toujours été dépendante économiquement de Seldon et d'Infodette, dès lors que, tout au long de ses relations commerciales avec ces deux sociétés, elle était dans l'impossibilité la plus totale de leur substituer un autre fournisseur de plate-forme dans des conditions équivalentes ; elle explique en effet que, à l'époque de la rupture du projet de fusion, il n'existait pour l'essentiel qu'une seule plate-forme de gestion de dettes publiques en ligne sur le marché français, concurrente de la plate-forme concernée et que la seule alternative théorique à Infodette et Seldon était celle d'une société dénommée Finance Active, société directement concurrente d'Orféor, qui n'aurait donc jamais concédé le moindre droit d'usage sur sa plate-forme à cette dernière, circonstance qui " accentuait " naturellement l'état de dépendance économique d'Orféor vis-à-vis de Seldon et Infodette ;
La société Orféor précise en outre que la plate-forme Infodette mise à sa disposition avait fait l'objet tout au long des années 2008 et 2009 de développements spécifiques, propres à répondre aux besoins des clients d'Orféor, et que toute mise en place d'une solution alternative aurait inévitablement nécessité un laps de temps incompressible, ce dont Orféor ne disposait absolument pas compte-tenu des échéances extrêmement serrées imposées par Gilles Sebé ;
Mais elle ajoute que c'est surtout la pression exercée par Gilles Sebé à son encontre, et la menace perpétuelle de voir l'accès à la plate-forme suspendu en l'absence de conclusion d'un contrat avec Infodette, qui l'ont empêchée de se tourner vers tout autre prestataire ;
In fine la société Orféor relève que la dépendance qu'elle invoque était " avant tout technique " ;
Force est de constater cependant que ces arguments ne sont pas pertinents ;
La société Orféor fait en effet une confusion entre la situation des parties en décembre 2009 et la situation objective des deux entreprises avec lesquelles elle avait noué un partenariat, et qu'elle inclut du reste dans une même entité ; or il n'est pas cohérent de prétendre que la société Infodette était elle-même en position dominante, alors qu'elle devait être absorbée par la société Orféor : celle-ci explique que, en réalité c'est par le biais de Seldon que M. Sebé aurait obtenu un tel pouvoir de pression ; mais ce faisant la société Orféor n'explique pas en quoi cette même plate-forme à laquelle elle a très librement adhéré en 2007 dans un objectif de fusion, ne représentait pas pour elle à l'époque une contrainte au sens de l'article L. 420-2 précité et qu'elle le soit devenue en décembre 2009 ;
En réalité la société Orféor ne justifie à aucun moment de l'absence de toute autre solution de fonctionnement, et elle invoque du reste, ainsi qu'il l'a été noté, que c'est le laps de temps trop court qui a couru depuis novembre 2009 qui l'a privée de cette solution - preuve en est qu'une autre issue existait ; la société Orféor est, de fait, défaillante à démontrer que, que ce soit en France ou en Europe, voire dans un périmètre plus étendu, seule la société Seldon était en mesure de lui fournir les prestations qui lui étaient indispensables - ce qui ne saurait évidemment s'entendre de la position qui est devenue la sienne le 31 décembre 2009 en terme de pouvoir de négociation, ce du fait de l'imprévision de sa partenaire ;
Il a déjà été, en effet, relevé que la société Orféor est taisante sur toute forme de réaction de sa part passé le mois de novembre, et cette carence a été naturellement cause de ce que, dans l'espoir manifeste que la situation allait s'éclaircir, elle s'est trouvée en position d'infériorité lorsque M Sebé a confirmé son refus de réaliser la fusion et que, de facto, s'est posée la question de la suite des relations commerciales, et, notamment, l'accès à la plate-forme ;
La conclusion de cet état de fait est qu'ainsi M. Andrieu a placé son entreprise, non dans un état de dépendance au sens des dispositions précitées, mais au seul sens commercial d'une négociation mal anticipée ;
Une seconde conclusion en découle qui est que le caractère brutal et infondé de la rupture du projet de fusion ne peut être revendiqué par la société Orféor qui a passivement admis cette décision en novembre, en a pris la mesure près de deux mois plus tard, et en a avalisé le principe en acceptant une nouvelle collaboration dont la vivacité des échanges qui en a été le prélude n'infirme pas la réalité ;
S'agissant de ce deuxième volet du litige la société Orféor objecte que, dans la poursuite du processus de pressions, elle a été contrainte d'accepter des clauses contraires à ses intérêts et qui ne découlent que des actes de violence - au sens des articles 1109 et suivants du code civil - des menaces et pressions qu'elle a subis, que facilitait son état de dépendance, et qui ont vicié son consentement ;
La société Orféor explique sur ce point que Gilles Sebé n'a pas hésité à exercer un véritable chantage à l'égard de son ex-partenaire, la menaçant d'une coupure d'accès de la plate-forme si celui-ci n'acceptait pas ses conditions de sortie du projet de fusion et d'utilisation future de la plate-forme ; qu'il a ainsi fixé arbitrairement la date du 31 décembre 2009 ' soit à peine deux mois après l'annonce de son abandon du projet de fusion ' pour la conclusion d'un accord relatif à la fois à la régularisation des flux financiers intervenus entre les différentes sociétés en 2008 et 2009 et aux conditions de la mise à disposition envers Orféor de la " plate-forme Infodette " qui avait été développée pour elle, faute de quoi il menaçait explicitement Orféor d'interrompre l'accès à cette plate-forme, ce dès le 1er janvier 2010 ;
La société Orféor cite à l'appui de cette thèse les courriels suivants :
- 27 décembre 2009 : " Il reste 4 jours pour aboutir à un accord. Je te confirme qu'à défaut d'accord Seldon Finance interrompra le service au 1er janvier. Cela nous laissera tout le temps nécessaire pour continuer les discussions entre Orféor et Infodette ".
- emails du 29 et 30 décembre 2009, comportant de nouvelles menaces :
" J-2 et nous avons fait un grand pas en arrière. L'interruption pure et simple du service se profile ".
" Le temps presse, les échéances approchent, et le temps n'est plus à la discussion mais à l'action " ;
Ce à quoi, le 31 décembre 2009, Bernard Andrieu, lui objecté
" Tu rappelles une échéance que tu es le seul à avoir fixé et sur laquelle j'ai depuis le début fait toute réserve compte-tenu de la difficulté du détricotage de la fusion et des conséquences très dommageables de cette dernière notamment pour Orféor.
Tu menaces maintenant d'une nouvelle suspension du service pour une raison différente de la précédente, laquelle est maintenant liée à un accord sur les termes du contrat. Où veux-tu en venir ' Une telle suspension ne peut qu'entraîner là encore que des conséquences dommageables notamment pour Orféor.
Il me semble vraiment que les choses sont suffisamment avancées tant sur le traitement du passé (nos mails d'hier) que sur les bases d'une future collaboration pour éviter d'en arriver là et plutôt poursuivre nos échanges, certes rapidement, mais dans les tous premiers jours de 2010.
J'aimerais, et tu peux le comprendre, recueillir un avis de mon avocat."
La société Orféor souligne que Gilles Sebé a répondu par email du même jour :
" Tu veux recueillir l'avis de ton avocat - c'est donc que c'est plus important pour toi que la suspension du service, c'est ton droit, tu devras en assumer les conséquences. " et que, mettant ces menaces à exécution, Seldon n'a pas hésité, le 1er janvier 2010, à couper l'accès aux serveurs qui hébergeaient la plate-forme Infodette utilisée par les clients et les consultants d'Orféor, interdisant alors l'accès à l'ensemble des bases de données clients, ce qui a inévitablement eu un impact catastrophique pour Orféor, ses consultants se trouvant privés de tout support de travail afin de formuler leurs analyses et recommandations, et ses clients ne pouvant accéder à aucune des données dont ils avaient pourtant besoin quotidiennement dans le cadre de la gestion active de leur dette ;
La société Orféor explique ainsi que, ayant elle-même, le 1er janvier 2010, proposé une démarche constructive afin de " repart[ir] sur de meilleures bases ", le 3 janvier 2010, Gilles Sebé s'est engagé à rétablir un accès limité à la plate-forme à la condition sine qua non qu'Orféor accepte expressément les modalités de sortie du projet de fusion telles qu'unilatéralement décidées par lui et que Bernard Andrieu, qui venait d'être hospitalisé, n'a eu d'autre choix que de s'exécuter en signant, sous la contrainte, des reconnaissances de dettes dans lesquelles, comme l'exigeait Gilles Sebé :
- l'ensemble des frais de recherches et développements initialement immobilisés dans les comptes d'Orféor en 2008 et 2009 dans la mesure où la plate-forme devait devenir à terme la propriété d'Orféor ont été totalement repassés en charges en 2009 dès lors que la plate-forme n'était plus un actif d'Orféor,
- Infodette a imposé à Orféor le paiement d'une redevance rétroactive au titre de la mise à disposition de la plate-forme sur cette période 2008 / 2009 et,
- Seldon a édité de nouvelles factures aux titres de prestations de recherche et développement, des abonnements à Reuters et Fininfo et à une ligne internet haut débit pour couvrir la totalité de la période 2008 / 2009 ;
La société Orféor relève ainsi l'enclenchement d'un processus constituant selon son expert-comptable un non-sens économique, que caractérisent les chiffres suivants résultant de ce que pour la période 2008 / 2009, elle été contrainte de supporter les sommes suivantes :
- 42 570 euro HT payés à Seldon au titre d'abonnements aux bases de données financières (Reuters, Finifo) et à l'Internet Haut débit (Pièces n°8 et 20) ;
-14 000 euro HT payés à Seldon au titre de l'hébergement de l'application et des bases de données et de l'administration des serveurs ;
- 40 654 euro HT payés à Seldon au titre des prestations de recherche et développement de la plate-forme Orféor ;
- 13 250 euro HT payés à Loré Finance au titre des interventions de Charlotte Sebé-Valette (fille de Gilles Sebé) concernant la correction d'anomalies diverses de la plate-forme ;
- 101 216 euro HT payés à Infodette au titre de droits d'utilisation et d'hébergement concédés rétroactivement par celle-ci sur la période ;
Elle a du en conséquence prendre à sa charge à la fois :
- pour un total de 110 384 euro HT les frais de recherche et développement, la correction d'anomalies (" débuggage "), les abonnements aux bases de données financières, les frais d'hébergement d'une plate-forme sur laquelle elle n'avait désormais plus aucun droit de propriété ;
- tout en versant également une redevance de 101 216 euro HT au titre de droits d'utilisation et d'hébergement concédés rétroactivement par Infodette sur cette période ;
La cour estime cependant qu'il n'est pas possible de faire droit aux prétentions d'Orféor, fondées sur une révision d'accords qui, pour être allégués avoir été imposés sous la contrainte, n'ont jamais ensuite été dénoncés par elle avant qu'Infodette ne le fasse le 8 juin 2011, cette dernière ayant en outre, par avenant, prolongé ce délai afin de permettre à la société Orféor de continuer à avoir accès au contrat de fourniture hébergée ;
Si en effet M. Sebé n'a pas manqué, lors d'une négociation commerciale sans concession, d'user de l'avantage qu'il avait sur la société Orféor au travers de la plate-forme Seldon, il est remarquable que la société Orféor, une fois ses intérêts préservés dans l'urgence, n'ait pas jugé utile de renégocier ou remettre en cause cet accord prétendument léonin, et il est loisible de penser que, en réalité, la nécessité pour elle de céder dans l'immédiat aux exigences de son partenaire comportait in fine des contreparties suffisantes pour garantir les intérêts de l'entreprise ; il n'est en effet pas raisonnable de prétendre que le bilan de cet accord de décembre 2009 n'a pu être fait des années plus tard sans qu'à tout le moins la prétendue nocivité n'ait pu en être anticipée lors même que Bernard Andrieu, qui avait en main toutes les données nécessaires, en acceptait les bases ;
La société Infodette est du reste fondée à souligner que, entre 2010 et 2012 le chiffre d'affaires de la société Orféor a progressé de près de 50 % ;
S'agissant des pratiques restrictives de concurrence ;
L'article L. 442-6, I du Code de commerce dispose en ses alinéas 1 et 4 que :
" engage la responsabilité de son auteur et l'oblige à réparer le préjudice causé le fait par tout commerçant [...] :
1° d'obtenir ou de tenter d'obtenir d'un partenaire commercial un avantage quelconque ne correspondant à aucun service commercial effectivement rendu ou manifestement disproportionné au regard de la valeur du service rendu [...].
4° d'obtenir ou de tenter d'obtenir, sous la menace d'une rupture brutale totale ou partielle des relations commerciales, des conditions manifestement abusives concernant les prix, les délais de paiement, les modalités de vente ou les services ne relevant pas des obligations d'achat et de vente ".
La société Orféor soutient à cet égard que, en la menaçant de lui suspendre l'accès à la plate-forme Infodette, outil indispensable à l'exercice de son activité, les sociétés Seldon et Infodette ont obtenu respectivement de sa part le versement des sommes de 45 946 euro TTC et 54 480 euro TTC au titre des retraitements financiers issus de l'abandon du projet de fusion et la prise en charge des coûts de développement de la plate-forme et des prestations associées (hébergement, abonnements aux bases de données financières, maintenance corrective), outre le versement d'une redevance artificielle à Infodette au titre de la mise à disposition de la plate-forme sur cette période - tous frais injustifiés, ainsi qu'il l'a déjà été évoqué plus haut ; que ces versements étaient donc manifestement abusifs en leur principe et d'un montant disproportionné au regard de la valeur du service effectivement rendu, puisqu'ils aboutissent à une double rémunération des services fournis par Seldon et Infodette ;
Mais, il a été dit que la société Orféor ne démontrait pas qu'elle était elle-même dans un état de dépendance et d'incapacité de conclure avec un autre partenaire ; qu'elle a accepté, dans un processus global, de solder dans l'urgence le contentieux l'opposant à Gilles Sebé ;
Ainsi, le fait que, pour garantir l'accès à la plate-forme Infodette elle ait consenti des concessions importantes ne signifie pas pour autant que les conditions querellées aient été abusives au sens des dispositions précitées ; la teneur des mails échangés entre Gilles Sebé et Bernard Andrieu atteste du reste de ce que chaque partie a été en mesure de négocier à mesure des enjeux respectifs ;
S'évince de ce qui précède que les demandes de dommages et intérêts présentées par la société Orféor au titre de la rupture du processus de fusion et des accords qui en ont suivi sont rejetées ;
Les ultimes péripéties, avec leurs implications sur le plan judiciaire, qui ont entouré la rupture finale des relations entre les parties n'entreraient pas ici en jeu, si elles ne s'étaient pas, selon, la société Orféor, caractérisées par une attitude de dénigrement initiée par la société Seldon.
Sur le dénigrement
La société Orféor accuse les sociétés Seldon et Infodette d'avoir, depuis la fin du Contrat, entrepris une véritable campagne de dénigrement à son encontre ;
Elle expose que dès décembre 2012, Seldon a publié sur son site un communiqué intitulé " Fin de l'accord de distribution Orféor-Infodette " qui visait clairement à inciter les clients d'Orféor à délaisser la nouvelle plate-forme d'Orféor et à se rabattre sur les logiciels de Seldon, laquelle n'hésitait pas à affirmer que la fin du partenariat entre Infodette et Orféor engendrerait " la fin des droits d'accès à la plate-forme de suivi de la dette commercialisée par la société Orféor au 31 décembre 2012 " allant même jusqu'à s'excuser " par avance des problématiques pouvant être engendrées par cette évolution " ;
La société Orféor estime que de telles affirmations sont non seulement mensongères mais également " totalement dénigrantes " à son encontre, qu'elle a demandé en vain à Seldon de retirer ce communiqué et de cesser toute communication autour de la fin du contrat mais qu'elle a eu connaissance au mois d'avril 2013 de l'envoi massif par Seldon d'emails circulaires à la quasi-totalité de sa clientèle, et rédigés comme suit :
" Madame, Monsieur,
Jusqu'au 31 décembre 2012, la société Orféor distribuait notre outil de gestion de la dette. Depuis, elle a choisi de le remplacer par une nouvelle plate-forme.
Celle-ci a été mise en place chez ses clients à compter du 1er janvier 2013 mais les fonctionnalités fournies ne semblent pas répondre aux attentes de ses utilisateurs.
En effet, nous avons été contactés par certains d'entre eux qui cherchent une autre solution. Nous pouvons vous fournir en quelques heures un outil équivalent à l'ancien, qui intègre vos données de dette et permet à votre consultant actuel de continuer à vous accompagner dans la gestion de vos emprunts.
Vous êtes peut-être aujourd'hui dans cette situation. Dans ce cas, n'hésitez pas à nous contacter, notre équipe commerciale est à votre entière disposition pour discuter de ces éléments. " ;
La société Orféor argue en outre de la mauvaise foi de Seldon qui prétend que cet email circulaire n'aurait été envoyé qu'à six destinataires (au prétexte qu'Orféor ne verse que 6 mails aux débats), alors qu'elle reconnaissait, elle-même, dans ces écritures en première instance avoir envoyé ce courrier à des dizaines de destinataires ;
La société Seldon entend en effet minimiser le nombre et la portée de ces envois qu'elle qualifie de simple information objective due à ses clients afin de les aviser de la fin de l'utilisation de la plate forme et de la fin du contrat de mise à disposition du logiciel de gestion de dettes entre Infodette et Orféor ; elle dénie ainsi que les termes de ces mails soient diffamatoires ou dénigrants et s'estime victime d'une atteinte à la libre expression commerciale qui doit présider à la compétition normale que des sociétés livrent sur un marché ;
La cour relève que quand bien même les termes utilisés par Seldon concernent clairement la capacité d'Orféor à faire face à la situation nouvelle engendrée par la rupture des relations entre elles le fait de s'excuser " par avance des problématiques pouvant être engendrées par cette évolution ", relève de termes suffisamment flous pour ne pas traduire " l'intention manifeste de Seldon de nuire aux activités d'Orféor " ;
Le communiqué cité ci-dessus est certes d'une teneur beaucoup plus agressive mais qui reste néanmoins dans les limites du démarchage et de la libre expression commerciale qui doit présider à la compétition normale que des sociétés livrent sur un marché ;
Les demandes de dommages et intérêts et de publication de la société Orféor sont en conséquence rejetées ;
Sur le préjudice né des pertes subies et manque à gagner induits par les coupures d'accès à la plate-forme
La société Orféor soutient que l'abus, par Infodette et Seldon, de la dépendance technique dans laquelle elle se trouvait lui a été extrêmement préjudiciable, les menaces à répétition de ces deux sociétés et, surtout leur mise à exécution ayant eu un impact direct dans les relations commerciales qu'entretenait Orféor avec ses propres clients ; elle explique que les coupures systématiques organisées par Infodette et Seldon ont privé régulièrement ses propres clients d'accès à leur principal outil de travail, suscitant en retour le mécontentement de ces clients à Orféor, qui n'a eu d'autre choix que de leur offrir des remises sur les sommes prévues contractuellement ; qu'ainsi, " sur l'ensemble de la période ", le montant total des remises qu'Orféor a été tenue d'effectuer du fait des interruptions d'accès à la plate-forme effectuées par Infodette et Seldon s'est élevé à 34 925 euro ;
La société Orféor ajoute que, par ailleurs, ses équipes ont dû, tout au long du Contrat, passer de nombreuses heures à négocier avec Infodette et Seldon pour permettre le rétablissement des accès à la plate-forme, soit une perte de temps qui aurait pu être mis à profit pour développer sa clientèle ou être davantage présent auprès de ses clients, et elle sollicite à ce titre l'attribution d'une somme de 38 000 euro (19 jours) hommes passés par Bernard Andrieu (taux journalier de 880 euro), 10 jours hommes passés par Alexis M. (taux journalier de 700 euro) et 17 jours hommes passés par Philippe M. (taux journalier 700 euro) et 4 jours hommes passés par Valérie L. (taux journalier de 680 euro), soit 19 x 880 + 10 x 700 + 17 x 700 + 4 x 680 = 38 340 euro arrondis à 38 000 euro) ;
La cour relève que, au rebours de la lecture qu'en fait la société Infodette, ces chiffres ne se limitent pas au seul processus de décembre 2009, mais concernent l'application des accords qui s'en sont suivis ;
Pour autant, il convient, de nouveau, de rappeler l'absence de dépendance économique, termes revendiqués à tort par la société Orféor pour qualifier ses relations avec la société Infodette ;
Le conflit entre les deux entreprises reposait pour partie, et avant même l'échec de la fusion, sur la question des sommes dues par la société Orféor au titre de l'accès à la plate-forme et, en validant les accords de janvier 2010, cette dernière était parfaitement au fait du risque de coupures, découlant d'un avantage indéniable qu'avait sur elle la société Infodette ; il a été rappelé qu'elle avait néanmoins privilégié cette solution ;
La société Orféor rappelle que, effectivement, Gilles Sebé a reconnu : " c'est devant le refus répété de prendre en compte les sommes dues contractuellement que nous avons été amenés à couper l'accès direct aux clients " ; ces propos s'inscrivent dans une des nombreuses discussions tenues entre les deux dirigeants et qui comportaient des accusations mutuelles de mauvaise foi et d'application déloyale des accords passés, chaque partie imputant à l'autre des retards de paiement ou des blocages de prestations, et de recourir au chantage ;
En réalité les coupures alléguées ne sont pas démontrées ni dans leur réalité et leur effectivité ni dans leur ampleur et la pièce n° 45 sur laquelle s'appuie la société Orféor fait certes état de remises effectuées auprès de quelques clients sans pour autant en déterminer l'origine, et notamment par la production de plaintes émanant de ceux-ci ; le préjudice commercial allégué ne peut être retenu ;
La demande est en conséquence rejetée ;
Aucune considération tirée de l'équité ne conduit à faire application des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile.
Par ces motifs Infirme partiellement le jugement. Statuant à nouveau, Déboute la société Orféor de ses prétentions au titre de l'existence d'un dénigrement. Confirme le jugement pour le surplus. Rejette toutes autres demandes. Condamne la société Orféor aux dépens.