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Décisions

CA Paris, Pôle 5 ch. 11, 3 juin 2016, n° 13-20341

PARIS

Arrêt

Confirmation

PARTIES

Demandeur :

Sergio Bossi (SARL)

Défendeur :

Cordula da Cunha, Cordula conseil (SARL), Hair JBV (Sté), Levy (ès qual.)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Birolleau

Conseillers :

Mmes Lis Schaal, Nicoletis

Avocats :

Mes Fisselier, Martin, Khaiat, Podoski

T. com. Paris, du 27 sept. 2013

27 septembre 2013

Mme Maria Cristina Cordula da Cunha, qui exerce la profession de conseillère en image au sein de la société Cordula conseil, et celle d'animatrice d'émission télévisées, notamment dans les émissions " Nouveau look pour une nouvelle vie " et " Magnifique by Cristina ", a découvert au mois de mars 2011 qu'il existait sur la page Web du site Internet de la société Groupon France une annonce pour un salon de coiffure Sergio Bossi, situé avenue de la République à Paris, qui utilisait, sans son accord, son prénom associé au titre de l'émission dont elle est l'animatrice " Nouveau look pour une nouvelle vie ".

L'offre parue sur le site Groupon comportait, sous la description des prestations proposées par " Sergio Bossi, coiffeur visagiste de prestige ", le texte suivant " Cette nuit, j'ai fait un rêve étrange. J'ai rêvé que je participais à l'émission " Nouveau look pour une nouvelle vie ". Là Christina me passait en détail. Elle mettait à la poubelle mon vieux pattes d'éph, jetait par la fenêtre mes Docks Martens, criait au sacrilège en voyant que je portais encore (ou déjà) de la lingerie Playtex "

" Après avoir revu et corrigé ma garde-robe, elle s'en est prise à ma coiffure.

Christina : " Ma chérie, ma chérie ! Pourquoi tu t'enlaidis ainsi. Une coiffure comme ça ce n'est pas permis ! Allez viens je t'emmène voir Eddy, il fait des miracles. "

Mais qui était donc cet Eddy. J'ai pris place sur le fauteuil, près du bac à shampoing, quand soudain Eddy a fait son entrée.

Mais cet Eddy. C'était Edouard et ses mains en ciseaux argentés !!

Dans un sursaut je me suis réveillée tremblante, frissonnante, sous le choc ! "

Estimant que cette promotion, valable du 10 mars au 10 septembre 2012, utilisait, sans son accord, sa notoriété dans le but d'attirer les consommateurs en leur faisant faussement croire qu'elle parrainait cette offre et qu'elle recommandait ce salon de coiffure, le conseil de Mme Cordula da Cunha a mis en demeure, par lettre du 22 mars 2012, les sociétés Groupon France, Sergio Bossi et Hair JBV, franchisé Sergio Bossi, de faire immédiatement cesser la diffusion de cette offre promotionnelle.

Par acte du 11 avril 2012, Mme Cordula da Cunha et la société Cordula conseil ont assigné en référé les sociétés Groupon France, Sergio Bossi, Hair JBV, ainsi que le commissaire à l'exécution du plan de cette société, afin d'obtenir le retrait de la page publicitaire litigieuse, la condamnation in solidum des trois sociétés à lui verser la somme de 15 000 euros en réparation de son préjudice ainsi que des mesures de publication.

Une transaction étant intervenue avant l'audience avec la société Groupon France, Mme Cordula da Cunha et la société Cordula conseil se sont désistées de leurs demandes à l'encontre de cette société.

Par ordonnance du 25 avril 2012 le juge des référés du Tribunal de commerce de Paris a dit n'y avoir lieu à référé et a rejeté la demande de passerelle faute d'urgence.

Par acte du 10 juillet 2012 Mme Cordula da Cunha et la société Cordula conseil ont assigné la société Sergio Bossi, la société Hair JBV et le commissaire à l'exécution du plan de cette société devant le Tribunal de commerce de Paris.

Par jugement du 29 novembre 2012, le Tribunal de commerce de Paris a prononcé la liquidation judiciaire de la société Hair JBV.

Par lettre recommandée avec avis de réception du 18 janvier 2013, Mme Cordula da Cunha et la société Cordula conseil ont régulièrement déclaré leur créance au passif de la société JBV Hair, entre les mains de la Selafa MJA, prise en la personne de Maître Frédérique Levy, ès-qualités de liquidateur judiciaire.

Par acte du 31 janvier 2013, Mme Cordula da Cunha et la société Cordula conseil ont assigné en intervention forcée devant le Tribunal de commerce de Paris le liquidateur judiciaire de la société Hair JBV, pour voir constater et fixer leur créance au passif de la société Hair JBV.

La Selafa MJA, prise en la personne de Maître Frédérique Levy, ès-qualités de liquidateur judiciaire de la société Hair JBV, n'a pas comparu et n'a pas constitué avocat.

Par jugement du 27 septembre 2013 le Tribunal de commerce a :

- ordonné la jonction des deux affaires

- pris acte du désistement d'instance et d'action des défenderesses à l'encontre de Me Perdureau, ès-qualités de Commisaire à l'Exécution du plan de la société Hair JBV;

- condamné in solidum la société Sergio Bossi et la Selafa MJA, prise en la personne de Maître Levy, ès-qualités de liquidateur judiciaire de la société Hair JBV, à verser à Mme Cordula et à la SARL Cordula conseil, la somme de 2 000 euros au titre du préjudice subi du fait des actes de concurrence déloyale, ainsi que 2 500 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile.

- débouté les parties de toutes leurs autres demandes.

- condamné in solidum la société Sergio Bossi et la Selafa MJA, prise en la personne de Maître Levy, ès-qualités de liquidateur judiciaire de la société Hair JBV, aux dépens.

Par déclaration du 22 octobre 2013 la société Sergio Bossi a interjeté appel de ce jugement.

Vu les dernières conclusions n° 2, déposées et notifiées le 16 février 2016, par lesquelles la société Sergio Bossi demande à la cour de :

Au visa des dispositions de l'article 1382 du Code civil,

- réformer le jugement dont appel en ce qu'il a condamné in solidum la société Sergio Bossi et la Selafa MJA prise en la personne de Maître Frédérique Levy, ès-qualités de Liquidateur Judiciaire de la société Hair JBV, à payer à Mme Cristina Cordula et à la société Cordula conseil les sommes de 2 000 euros de dommages et intérêts au titre du préjudice subi du fait des actes de concurrence déloyale et de 2 500 euros sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile outre les dépens de l'instance ;

Et statuant à nouveau

- dire et juger que le franchisé est un commerçant indépendant et qu'en tant que tel il a toute latitude pour faire la publicité qu'il entend devoir faire et qu'en conséquence la société Sergio Bossi n'avait pas à s'immiscer dans la politique publicitaire de son franchisé la société Hair JBV ;

- dire et juger que la société Sergio Bossi n'a pas commis de faute en ne contrôlant pas la publicité qui était faite par son franchisé sur le site Internet Groupon ;

- dire et juger, que Mme Cordula et la société Cordula conseil ne démontrent ni l'existence ni le quantum du préjudice allégué ;

En conséquence :

- débouter Mme Cordula et la société Cordula conseil de l'ensemble de leurs demandes ;

- condamner solidairement Mme Cordula et la société Cordula conseil à payer à la société Sergio Bossi la somme de 4 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile, ainsi que les entiers dépens de première instance et d'appel dont distraction pour ceux d'appel au profit de la SCP AFG, Avocat, conformément aux dispositions de l'article 699 du Code de procédure civile.

Vu les dernières conclusions n° 3, déposées et notifiées le 2 mars 2016, par lesquelles Mme Cordula da Cunha et la société Cordula conseil demandent à la cour de :

Au visa des articles 1382 du Code civil, L. 120-1 et L. 121-1 et suivants du Code de commerce,

- dire et juger Mme Cristina Cordula et la société Cordula conseil recevables et bien fondées en leurs demandes, fins et conclusions, ainsi qu'en leur appel incident,

- débouter la société Sergio Bossi de ses demandes, fins et conclusions,

Ce faisant,

- confirmer le jugement en ce qu'il a :

ordonné la jonction de l'affaire enrôlée devant le tribunal sous le RG n° 2012051353, avec celle opposant Mme Cristina Cordula et la société Cordula conseil à la Selafa MJA ès qualité de liquidateur judiciaire de la société Hair JBV, assignée en intervention forcée selon acte du 31 Janvier 2013,

- pris acte du désistement d'instance et d'action de Mme Cristina Cordula et la société Cordula conseil à l'encontre de Me Perdureau ès qualité de Commissaire à l'Exécution du Plan de la société Hair JBV,

- condamné in solidum à la somme de 2 000 euros la société Sergio Bossi et la Selafa MJA prise en la personne de Maitre Frédérique Levy, ès-qualités de liquidateur judiciaire de la société Hair JBV, au titre du préjudice subi du fait des actes de concurrence déloyale,

- condamné in solidum la société Sergio Bossi et la Selafa MJA prise en la personne de Maitre Frédérique Levy, ès qualités de liquidateur judiciaire de la société Hair JBV, à payer à Madame Cristina Cordula d'une part et à la société Cordula conseil d'autre part la somme de 2 500 euros sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile,

- condamné in solidum la société Sergio Bossi et la Selafa MJA prise en la personne de Maitre Frédérique Levy, ès-qualités de liquidateur judiciaire de la société Hair JBV, aux entiers dépens,

- l'infirmer en ce qu'il a débouté Mme Cristina Cordula et la société Cordula conseil de leurs autres demandes plus amples ou contraires,

Statuant à nouveau et y ajoutant,

- fixer la créance de Mme Cristina Cordula au passif de la société Hair JBV en liquidation judiciaire à la somme de :

- 15 000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation des préjudices subis,

- 2 500 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile,

- dépens d'instance.

- fixer la créance de la société Cordula conseil au passif de la société Hair JBV en liquidation judiciaire à la somme de :

- 15 000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation des préjudices subis,

- 2 500 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile,

- dépens d'instance.

- s'entendre condamner la société Sergio Bossi à payer à Mme Cristina Cordula la somme totale de 15 000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation des préjudices subis,

- s'entendre condamner la société Sergio Bossi à payer à la société Cordula conseil la somme totale de 15 000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation des préjudices subis,

- s'entendre condamner la société Sergio Bossi à payer à Mme Cristina Cordula et à la société Cordula conseil la somme de 3 500 euros pour chacune au titre de l'article 700 du Code de procédure civile,

- s'entendre condamner in solidum la société Sergio Bossi et la société Mandataires judiciaires Associés, Selafa " MJA " prise en la personne de Maître Frédérique Levy, ès-qualités de liquidateur judiciaire de la société Hair JBV, aux entiers dépens d'appel que Maître Gilles Khaiat pourra recouvrer selon les dispositions de l'article 699 du Code de procédure civile.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 3 mars 2016.

Par courrier du 3 mars 2016, le conseil de l'appelante a demandé le report de l'ordonnance de clôture " en raison des conclusions et des pièces qui viennent de m'être signifiées par mon confrère Khaiat et sur lesquelles je souhaite recevoir les observations de ma mandante ".

Par conclusions, déposées et notifiées le 11 mars 2016, la société Sergio Bossi a demandé au conseiller de la mise en état de :

Au visa des articles 783, alinéa 2, et 784 du Code de procédure civile,

- révoquer l'ordonnance de clôture prononcée le 3 mars 2016,

- déclarer recevable les conclusions d'appelant responsives et récapitulatives signifiées le 11 mars 2016

A titre subsidiaire,

- déclarer tardives les conclusions n° 3 et pièce 21 signifiées par Mme Cordula et la société Cordula conseil le 2 mars 2016 à 18 h 01

En tout état de cause

- réserver les dépens.

Le 11 mars 2016, la société Sergio Bossi a déposé et notifié des conclusions n° 3 responsives et récapitulatives.

Le 11 mars 2016, Mme Cordula da Cunha et la société Cordula conseil ont déposées et notifiées des conclusions d'opposition à révocation, par lesquelles elles demandent à la cour de :

Au visa de l'article 783 et 784 du Code de procédure civile,

- constater l'absence de " cause grave "

- rejeter les conclusions de Sergio Bossi,

- s'entendre condamner la société Sergio Bossi aux entiers dépens de l'incident que Maître Gilles Khaiat pourra recouvrer selon les dispositions de l'article 699 du Code de procédure civile.

Cela étant exposé, LA COUR

Sur la recevabilité des conclusions n° 3 de la société Sergio Bossi :

Considérant que Mme Cordula da Cunha et la société Cordula conseil sollicitent que soit constatée l'absence de " cause grave " justifiant la révocation de l'ordonnance de clôture rendue le 3 mars 2016 et que les conclusions n° 3 de la société Sergio Bossi, déposées et notifiées le 11 mars 2016, soient rejetées des débats ;

Considérant que la société Sergio Bossi sollicite, à titre principal, la révocation de l'ordonnance de clôture au motif que les intimées ont signifié leurs conclusions n° 3 le 2 mars 2016 à 18 h 01, la mettant ainsi dans l'impossibilité de répondre à ces écritures ; qu'à titre subsidiaire, l'appelante demande que les conclusions n° 3 et la pièce 21 de Mme Cordula da Cunha et de la société Cordula conseil soient rejetées des débats en les déclarant tardives sur le fondement de l'article 15 du Code de procédure civile ;

Mais considérant, d'une part, que dans la procédure ordinaire avec représentation obligatoire en appel, les parties peuvent, jusqu'à la clôture de l'instruction, invoquer de nouveaux moyens et conclure à nouveau ; que, d'autre part, l'ordonnance de clôture ne peut être révoquée que s'il se révèle une cause grave depuis qu'elle a été rendue ; que si les intimées ont déposé la veille de l'ordonnance de clôture des conclusions et une pièce n° 21 en réponse aux conclusions de l'appelante du 16 février 2016, cependant l'appelante, qui se plaint de ne pas avoir pu répondre à ces conclusions, n'allègue ni ne démontre, que les conclusions des appelantes du 2 mars 2016 comportaient un moyen nouveau ou que la communication de la pièce n° 21, contenant des extraits d'articles de magazines, nécessitait le dépôt de nouvelles conclusions en réponse ; que la violation des dispositions des articles 15 et 16 du Code de procédure civile n'étant pas établie, les conclusions des intimées du 2 mars 2016 sont recevables ; que la société Sergio Bossi ne justifiant pas d'une cause grave survenue postérieurement au prononcé de l'ordonnance de clôture du 3 mars 2016, sa demande de ce chef doit être rejetée et les conclusions déposées le 11 mars 2016 déclarées irrecevables ;

Sur les fautes reprochées à la société Sergio Bossi

Considérant que la société Sergio Bossi expose qu'elle n'avait aucune obligation de surveillance des agissements de son franchisé et qu'elle n'a commis aucune faute causant un préjudice à Mme Cordula da Cunha et à la société Cordula conseil ; qu'elle n'a pas demandé à la société Groupon d'intégrer la publicité mentionnant le nom de Mme Cristina Cordula sur son site Internet ; qu'elle est un franchiseur, qui, en tant que tel, laisse toute latitude à ses franchisés quant à la publicité qu'ils entendent faire pour développer leur activité ; que le principe d'indépendance juridique entre le franchisé et le franchiseur quant à la publicité ne lui permet pas de s'immiscer dans les choix publicitaires du franchisé, ni même d'avoir connaissance de la publicité figurant sur le site Groupon ; qu'il ne peut donc lui être reproché d'avoir commis une faute pour ne pas avoir surveillé les agissements de la société Hair JBV ; qu'elle n'a commis aucune faute en ne sollicitant pas le retrait de la publicité litigieuse ; que la théorie de l'apparence ne peut s'appliquer dans la mesure où le lien contractuel entre les sociétés Hair JBV et Sergio Bossi n'a jamais souffert de la moindre ambiguïté ;

Considérant que Mme Cordula da Cunha et la société Cordula conseil soutiennent que la société Sergio Bossi, qui a commis plusieurs fautes, a engagé sa responsabilité délictuelle ; que Mme Cordula n'a pas donné son accord aux sociétés Hair JBV "Sergio Bossi", Sergio Bossi et Groupon France pour associer sa personnalité et son image à l'offre promotionnelle pour un salon de coiffure Sergio Bossi ; que cette pratique constitue une atteinte aux droits de la personnalité de Mme Cordula et, en outre, une publicité mensongère et une pratique commerciale déloyale au sens de l'article L. 120-1 du Code de commerce, destinée à tromper les consommateurs sur l'identité, les qualités, les aptitudes et les droits du professionnel au sens de l'article L. 121-1 du Code de la consommation ;

Considérant que les intimées exposent également que l'utilisation sans autorisation par la société Sergio Bossi de la personnalité de Mme Cordula porte atteinte aux droits dont la société Cordula conseil dispose sur l'image de Mme Cordula ; que cette utilisation est en outre contraire aux partenariats que la société Cordula conseil a effectué avec d'autres salons de coiffure, qui se sont plaints de cette concurrence particulièrement déloyale ; que de surcroît, cette utilisation de la personnalité de Mme Cordula pour un salon de coiffure dont les clientes sont mécontentes représente une atteinte à la notoriété de la société Cordula conseil et une perte de crédit professionnel préjudiciable ;

Considérant que les intimées soutiennent que les sociétés Hair JBV " Sergio Bossi " et Sergio Bossi ont profité de manière déloyale et indue de la notoriété de Mme Cordula et de la société Cordula conseil, de leur travail, savoir-faire et investissements dans le domaine du relooking, qui est un nouveau marché florissant ; que ce comportement parasitaire constitue une faute même en l'absence de toute situation de concurrence et de risque de confusion ;

Considérant que Mme Cordula et de la société Cordula conseil exposent que l'indépendance juridique entre le franchisé et le franchiseur trouve ses limites dans l'obligation de conseil et d'assistance du franchiseur qui porte sur divers aspects dont la publicité, et dans l'obligation incombant au franchiseur de contrôler son réseau qui comprend notamment l'obligation de sommer le franchisé de mettre un terme aux agissements frauduleux auxquels il se livrerait ;

Que l'appelante a reconnu ne pas être intervenue auprès de son franchisé pour lui rappeler ses obligations, ni pour voir modifier l'offre publicitaire litigieuse qui a été mise en ligne au moins depuis le 10 mars 2012 et maintenue jusqu'à jusqu'à la signature de la transaction conclue avec la société Groupon, qui l'a retirée de son site après le 23 avril 2012, toutefois même lorsqu'il n'est plus possible de bénéficier des offres celles-ci restent en ligne ;

Que les mentions figurant sur les documents publicitaires doivent clairement faire apparaître qu'il s'agit d'une campagne axée sur un établissement précis et non pour une enseigne ; qu'une ambiguïté dans l'indication d'un franchisé peut exposer le franchiseur sur le fondement de la théorie de l'apparence ;

Que la présentation de l'offre litigieuse permet de penser que la société Sergio Bossi a conclu un partenariat avec la société Groupon ;

Mais considérant que nonobstant le principe d'indépendance juridique entre le franchisé et le franchiseur, ce dernier à l'obligation de veiller à l'image du réseau et au respect de cette image et du concept franchisé, notamment par ses franchisés ; que le franchiseur a également l'obligation de promouvoir l'image et la renommée du réseau par des campagnes de publicité financées avec les redevances versées par les franchisés ; que lorsque les franchisés effectuent des campagnes publicitaires locales, celles-ci sont soumises, sinon à l'autorisation, du moins à l'approbation et au contrôle du franchiseur ;

Que malgré que la société Sergio Bossi se soit abstenue de produire le contrat de franchise signé avec la société Hair JBV, dissimulant ainsi les conditions exactes dans lesquelles cette société était autorisée à effectuer de la publicité pour son salon de coiffure, il apparaît que la société Sergio Bossi n'a pas rempli son obligation de contrôle de son réseau ; que, de plus, l'offre diffusée au public sur le site Groupon permettait d'acquérir des bons d'achat pour des prestations auprès de la société Hair JBV, mais assurait également une publicité directe pour la société Sergio Bossi, puisque seuls sa marque et son logo apparaissaient sur l'offre, le nom de la société Hair JBV n'étant pas mentionné mais seulement son adresse ; que, d'ailleurs, l'offre promotionnelle se terminait par ces mots " Sergio Bossi présenté par Groupon.fr " ;

Qu'il apparaît que l'offre publiée sur le site Groupon assurait une publicité pour la marque Sergio Bossi, qui était seule mise en avant ; qu'ainsi l'appelante, en vertu des obligations qui lui incombent en sa qualité de franchiseur, ne pouvait qu'avoir connaissance de cette offre promotionnelle et publicitaire diffusée sur Internet et qu'à défaut elle a gravement manqué à ses obligations issues du contrat de franchise ; que les intimées, tiers à ce contrat, sont bien fondées de rechercher sa responsabilité délictuelle en raison de ces manquements contractuels ;

Considérant que la société Sergio Bossi a également commis une faute en n'intervenant pas auprès de la société Groupon pour faire retirer l'offre litigieuse, alors que les intimées lui en avaient fait la demande par lettre du 22 mars 2012 ; qu'enfin, comme le font remarquer les intimées, la présentation de l'offre, qui constitue aussi une publicité pour l'appelante, permet de penser que cette offre a fait l'objet d'un accord entre les sociétés Sergio Bossi et Groupon ;

Considérant qu'il n'est pas contesté que ni Mme Cordula da Cunha, ni la société Cordula conseil, qui a obtenu par contrat du 29 juillet 2010 l'exclusivité de la gestion de l'image de Mme Cordula da Cunha et de ses partenariats, n'ont donné leur accord pour que la personnalité et la notoriété de Mme Cordula da Cunha soient associées à l'offre promotionnelle en cause ; que le texte faisant intervenir Mme Cordula da Cunha est suffisamment explicite, notamment par la référence à l'émission télévisée qu'elle anime " Nouveau look pour une nouvelle vie ", à des expressions qui lui sont propres et malgré la faute d'orthographe sur son prénom, pour que celle-ci ait pu être associée à la franchise Sergio Bossi et même perçue comme recommandant le salon de la société Hair JBV ; que Mme Cordula da Cunha, qui bénéficie d'une large audience dans les médias et auprès du public, est appréciée et réputée pour ses conseils dans le domaine de la mode, de la beauté et du relooking ; que la société Sergio Bossi a ainsi, gratuitement et à l'insu des intimées, utilisé à son profit la personnalité, la réputation et la notoriété de Mme Cordula da Cunha ;

Considérant que le comportement de la société Sergio Bossi constitue une atteinte aux droits de la personnalité de Mme Cordula da Cunha et aux droits dont dispose la société Cordula conseil sur l'image et les partenariats de Mme Cordula da Cunha ; qu'en s'immisçant dans le sillage de Mme Cordula da Cunha, afin de tirer profit, sans rien dépenser, des efforts et du savoir-faire des intimées, la société Sergio Bossi a commis des agissements parasitaires à leur préjudice ; que la société Sergio Bossi a agi de concert avec son franchisé la société Hair JBV, qui a engagé sa responsabilité et doit être tenue à réparation ;

Sur le préjudice

Considérant que Mme Cordula da Cunha et la société Cordula conseil exposent que leur renommée a été entachée en étant associée à un service dont la qualité a été ouvertement critiquée ; que de ce fait, la confiance du public a été ébranlée ; qu'elles sont fondées à demander la réparation de leur entier préjudice patrimonial et moral ;

Qu'à défaut de connaître le chiffre d'affaires généré par la campagne publicitaire litigieuse, il convient de retenir que Groupon fait partie des 15 premiers sites " e-commerce " les plus visités en France avec une moyenne de 7 966 000 visiteurs par mois (soit en moyenne 930 000 visiteurs par jour) soit une couverture moyenne de 19 % de la population internaute ; que ce site fait partie des trois premiers sites et applications mobiles les plus visités en France ; que Groupon a publié un chiffre d'affaires plus que quintuplé de 1,2 milliard d'euros au titre de 2012 ; que la couverture médiatique de l'offre a été particulièrement importante, et ceci sans compter les autres modes de communication par Twitter, Facebook, courriels, ou le bouche à oreilles ; qu'une cinquantaine de clients au moins se sont inscrits sur le site pour profiter de l'offre en cause ; qu'à supposer que seulement 25 % aient été insatisfaits (ce qui parait réduit vu les avis d'insatisfaction publiés sur le web), ce nombre rapporté au prix d'un coffret relooking basic femme (800 euros) vendu par Mme Cordula da Cunha, entraîne un manque à gagner subi d'au moins 10 000 euros ;

Que si une transaction est intervenue avec la société Groupon visant à assurer l'indemnisation du préjudice constitué par l'association du nom et de la réputation de Mme Cordula da Cunha au site Groupon, les préjudices notamment d'atteinte aux droits de la personnalité, d'atteinte à l'image, de manque à gagner et de préjudice moral n'ont fait l'objet d'aucune indemnisation ;

Que les intimées sollicitent que les sociétés Sergio Bossi et Hair JBV soient condamnées chacune à leur verser les sommes totales de 10 000 euros au titre du préjudice patrimonial et 5 000 euros au titre du préjudice moral ;

Considérant que la société Sergio Bossi répond que Mme Cordula et la société Cordula conseil ne démontrent ni l'existence ni le quantum des préjudices allégués ; que les intimées ne produisent pas le texte de la transaction intervenue avec la société Groupon France alors qu'il est manifeste, puisque les intimées se sont désistées à son encontre, que la société Groupon a réparé leur préjudice en tout ou partie ; qu'en conséquence, à défaut de production de cette transaction, il y a lieu de considérer que les intimées ont d'ores et déjà été remplies de leur droit du fait de la transaction intervenue avec la société Groupon et que leur préjudice ayant été réparé elles ne peuvent demander la condamnation de la société Sergio Bossi et de la société Hair JBV au paiement de dommages et intérêts en réparation de ce même préjudice ;

Que la société Cordula conseil exploitant l'image de Mme Cordula da Cunha ne peuvent solliciter la réparation de préjudices rigoureusement identiques ; que Mme Cordula da Cunha ne peut sérieusement affirmer que l'association de son nom à la marque Sergio Bossi serait seule à l'origine d'un quelconque préjudice dans la mesure où elle n'hésite pas à associer son image et son nom à des produits qui ne sont pas haut de gamme comme dans le cadre de la campagne " Cristina Cordula pour Tati "; que ne produisant pas leurs comptes, les intimées ne démontrent ni la réalité du chiffre d'affaires réalisé ou de la perte alléguée, ni même la preuve d'une perte de confiance des consommateurs ;

Mais considérant qu'il résulte des pièces produites aux débats que le salon de coiffure exploité par la société Hair JBV faisait l'objet de commentaires négatifs sur des forums Internet, qu'une téléspectatrice, ayant acheté un bon Groupon, s'est plainte de la mauvaise qualité des prestations de la société Hair JBV et de la mauvaise recommandation donnée par Mme Cordula da Cunha, qu'un coiffeur partenaire de la société Cordula conseil s'est plaint de la concurrence qui lui été ainsi faite par la société Sergio Bossi ;

Que l'existence d'un préjudice causé à Mme Cordula da Cunha et à la société Cordula conseil par l'exploitation sans autorisation de la réputation et de la notoriété de Mme Cordula da Cunha est ainsi établi ; que ce préjudice est d'autant plus important que l'offre litigieuse a été diffusée sur Internet par l'intermédiaire d'un site marchand très fréquenté qui propose de bonnes affaires ; que les intimées établissent que l'utilisation du nom et de l'image de Mme Cordula da Cunha donne lieu à l'établissement d'un contrat et au paiement d'une rémunération qui a fait défaut en l'espèce ;

Que la transaction intervenue entre les intimées et la société Groupon, qui n'est pas versée au débats en raison de son caractère confidentiel, ne peut porter que sur les agissements de cette société et non sur ceux imputables à l'appelante ; qu'il ne peut être tiré aucune conséquence de la participation, contre rémunération, de Mme Cordula da Cunha a une opération promotionnelle avec les magasins Tati, car il s'agit d'une pratique en vogue auprès de certaines personnalités connues du monde de la mode ;

Que, eu égard notamment à la durée de parution de l'offre promotionnelle litigieuse sur Internet, il y a lieu de juger que les sociétés Sergio Bossi et Hair JBV, représentée par son liquidateur, sont redevables chacune envers Mme Cordula da Cunha des sommes de 8 000 euros au titre du préjudice patrimonial et de 5 000 euros au titre du préjudice moral et envers la société Cordula conseil de la somme de 5 000 euros au titre du préjudice patrimonial ;

Par ces motifs, Déclare recevables les conclusions n° III et la pièce 21 notifiées le 2 mars 2016 par Mme Maria Cristina Cordula da Cunha et de la SARL Cordula conseil ; Déclare irrecevables les conclusions n° 3 notifiées le 11 mars 2016 par la SARL Sergio Bossi ; Confirme le jugement sauf en sa disposition ayant condamné in solidum à la somme de 2000 euros la société Sergio Bossi et la Selafa MJA, prise en la personne de Maître Frédérique Levy, es-qualités de liquidateur judiciaire de la société Hair JBV, au titre du préjudice subi du fait des actes de concurrence déloyale ; Et statuant à nouveau, Dit que la SARL Sergio Bossi et la SARL Hair JBV ont porté atteinte aux droits de la personnalité de Mme Maria Cristina Cordula da Cunha et commis des actes de parasitisme à son encontre ainsi qu'à l'encontre de la SARL Cordula conseil ; Fixe la créance de Mme Maria Cristina Cordula da Cunha au passif de la société Hair JBV, à titre chirographaire, aux sommes de : - 8 000 euros au titre du préjudice patrimonial - 5 000 euros au titre du préjudice moral - 1 000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile Fixe la créance de la SARL Cordula conseil au passif de la société Hair JBV, à titre chirographaire, aux sommes de : - 5 000 euros au titre du préjudice patrimonial - 1 000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile Condamne la SARL Sergio Bossi à payer à Mme Maria Cristina Cordula da Cunha les sommes de : - 8 000 euros au titre du préjudice patrimonial - 5 000 euros au titre du préjudice moral - 2 000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile Condamne la SARL Sergio Bossi à payer à la SARL Cordula conseil les sommes de : - 5 000 euros au titre du préjudice patrimonial - 2 000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile Déboute les parties de leurs autres demandes ; Condamne la SARL Sergio Bossi aux dépens d'appel qui pourrons être recouvrés en application de l'article 699 du Code de procédure civile.