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Décisions

CA Montpellier, 2e ch., 7 juin 2016, n° 14/09470

MONTPELLIER

Arrêt

Confirmation

PARTIES

Demandeur :

AD Image (SARL), AD Photo (SARL)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Bachasson

Conseillers :

M. Bertrand, Mme Ferranet

T. com. Montpellier, du 24 nov. 2014

24 novembre 2014

La société Photo Price Diffusion (PPD), établie à Nîmes (30000) dont l'activité est la diffusion de la franchise " Photo Price " a conclu deux contrats de franchise de distribution commerciale :

- le 4 juin 2003 avec la SARL AD Image (ADI), établie à Salon-de-Provence (13300),

- le 21 octobre 2003 avec la SARL AD Photo (ADP), établie à Aubagne (13400).

Ces contrats de franchise ont fait l'objet d'une résiliation anticipée, convenue entre les parties par acte sous seing privé en date du 16 mai 2006. Le même jour, deux contrats de concession de marque commerciale étaient conclus entre la société PPD et chacune des deux sociétés, d'une durée de deux années, avec tacite reconduction d'une année, sauf dénonciation avec un préavis de deux mois.

Le 25 avril 2012 la société PPD informait les sociétés ADI et ADP qu'à compter du 1er mai suivant, les droits de concession et les consommables de sa marque ne seraient plus facturés par elle-même mais par la SARL Laurent G. Finance (LGF), société holding établie à Caveirac (30820). Cette modification résultait d'une transmission universelle du patrimoine de la société PPD à la SARL LGF.

Mais les deux sociétés ne payaient pas les sommes réclamées par cette nouvelle société puis dénonçaient, ensemble, le contrat de concession de marque le 15 janvier 2013.

Par actes d'huissier délivrés les 18 et 22 juillet 2013 aux SARL ADI et ADP, la SARL LGF les a assignées devant le Tribunal de commerce de Montpellier, réclamant leurs condamnations à lui payer, les sommes de :

- 5 000 euro, chacune, à titre de dommages et intérêts pour rupture fautive des contrats de concession de marque,

- 4 855,76 euro au titre des redevances du contrat de concession restant dues au mois de mai 2013 pour la SARL ADI,

- 5 549,44 euro au titre des redevances du contrat de concession restant dues au mois de mai 2013 pour la SARL ADP,

- 2.000 euro, chacune, à titre de dommages et intérêts pour résistance abusive,

- 1 500 euro chacune par application de l'article 700 du Code de procédure civile et les dépens.

La société LGF sollicitait également leurs condamnations à cesser d'utiliser les signes distinctifs du réseau, outre son enseigne, sa charte graphique et à restituer tous les éléments et documents qu'elles avaient en leur possession, sous astreinte de 200 euro par jour de retard à compter de la signification du jugement.

Par jugement contradictoire prononcé le 24 novembre 2014, le Tribunal de commerce de Montpellier a, notamment, au visa des articles 1116, 1134 et 1147 du Code civil ainsi que de l'article L. 330-3 du Code de commerce :

- condamné la SARL AD Image à payer à la SARL Laurent G. Finance la somme de 4 855,76 euro au titre des redevances contractuelles dues au 15 mai 2013,

- condamné la SARL AD Photo à payer à la SARL Laurent G. Finance la somme de 5 549,44 euro au titre des redevances contractuelles dues au 15 mai 2013,

- condamné la SARL AD Image et la SARL AD Photo à payer à la SARL Laurent G. Finance, chacune, la somme de 1 000 euro à titre de dommages et intérêts pour la rupture fautive des contrats,

- condamné la SARL AD Image et la SARL AD Photo à cesser d'utiliser les signes distinctifs du réseau, outre son enseigne, sa charte graphique, etc., et à restituer tous les éléments et documents qu'elles ont en leur possession, conformément à l'article 16 du contrat, sous astreinte de 200 euro chacune, par jour de retard, à compter de trois mois après la signification du jugement,

- condamné la SARL AD Image et la SARL AD Photo à payer, chacune, à la SARL Laurent G. Finance la somme de 1.000 euro par application de l'article 700 du Code de procédure civile et solidairement aux dépens.

Par déclaration d'appel parvenue au greffe de cette cour le 18 décembre 2014, les SARL AD Image et AD Photo ont interjeté appel de ce jugement.

Dans leurs dernières conclusions transmises au greffe le 10 mars 2015, les SARL ADI et ADP sollicitent notamment :

- la réformation du jugement déféré,

- que soit prononcée la nullité des renouvellements des contrats de concession à compter du 15 mai 2008, motif pris de l'absence de toute information précontractuelle à leur égard lors de la signature des contrats et de ses renouvellements successifs,

- la condamnation, en conséquence, de la SARL Laurent G. Finance à leur rembourser la somme de 16 648,32 euro chacune, au titre des redevances payées, ainsi qu'une somme de 50 000 euro à titre de dommages et intérêts, chacune, avec intérêts au taux légal et anatocisme à compter de ces conclusions ou à défaut de l'arrêt de la cour,

- l'annulation de la clause d'approvisionnement exclusif,

- la condamnation, en conséquence, de la SARL Laurent G. Finance à leur payer une somme de 20.000 euro à titre de dommages et intérêts, chacune, avec intérêts au taux légal et anatocisme à compter de ces conclusions ou à défaut de l'arrêt de la cour,

- subsidiairement, dire et juger que la résiliation est intervenue aux torts exclusifs de la société Photo Price Diffusion, devenue Laurent G. Finance, en raison du manquement à ses obligations contractuelles et à l'exécution de bonne foi des conventions,

- la condamnation de la SARL Laurent G. Finance à leur payer une somme de 15 000 euro sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile et aux dépens.

Dans ses conclusions n°1, transmises au greffe le 5 mai 2015, la SARL Laurent G. Finance conclut à la confirmation du jugement déféré et à la condamnation des sociétés AD Image et AD Photo à lui payer, chacune, une somme de 2 000 euro à titre de dommages et intérêts pour résistance abusive et celle de 3 000 euro par application des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile.

Dans des conclusions n°2 transmises au greffe de la cour le 13 avril 2016, Me Frédéric T., agissant en sa qualité de mandataire judiciaire liquidateur à la liquidation judiciaire de la SARL Laurent G. Finance, prononcée par jugement du Tribunal de commerce de Nîmes en date du 10 mars 2015, est intervenu volontairement dans la procédure d'appel et a repris à son compte les conclusions précédemment déposées par cette société.

L'ordonnance de clôture a été prononcée le 3 mai 2016, après révocation de celle en date du 12 avril 2016.

MOTIFS :

SUR LA PROCEDURE :

L'intervention volontaire de Me T., ès qualités, permet la reprise de l'instance, interrompue depuis le jugement d'ouverture, le mandataire judiciaire ne soutenant pas que les SARL AD Image et AD Photo auraient négligé de déclarer régulièrement leurs créances au passif de cette liquidation judiciaire. Il s'ensuit que les prétentions reconventionnelles de sociétés AD Image et AD Photos ne peuvent désormais tendre qu'à la fixation de leurs éventuelles créances au passif de la liquidation judiciaire de la SARL Laurent G. Finance (LGF).

SUR LA DEMANDE PRINCIPALE :

Sur les conditions de la rupture des conventions entre les parties :

La transmission des contrats de concession de marque, du fait de la transmission universelle de patrimoine entre la société PPD et la SARL LGF, a été notifiée aux SARL AD Image et AD Photo, par lettres recommandées avec accusé de réception envoyées le 25 avril 2012 (pièces n°2). Il y était précisé qu'hormis ce changement de société, aucune autre modification à la convention des parties n'était apportée.

La résiliation des contrats tacitement renouvelés pour une durée d'un an depuis le 15 mai 2008, a ensuite été dénoncée par les SARL ADI et ADP, par lettre recommandée avec accusé de réception adressées au concédant, la SARL LGF, le 15 janvier 2013 avec effet immédiat. Ceci alors qu'elles ne pouvaient les résilier, en application de l'article 13 des contrats conclu, qu'à compter du 15 mai 2013, moyennant le respect d'un préavis de deux mois. Comme motif de cette résiliation immédiate, elles invoquaient la fermeture de tous les autres magasins de photographie exploitant la marque Photo Price et le mécontentement de leurs clients. (pièces n°6).

Sur l'annulation sollicitée des contrats de concession de marque :

La nullité des contrats de concession est invoquée au motif que la société PPD, devenue LGF, à la suite d'une transmission universelle de patrimoine, n'avait pas communiqué aux candidats concessionnaires d'un réseau de distribution les informations écrites préalables prévues à l'article L. 330-3 et l'article R. 330-1 du Code de commerce ni respecté le délai de 20 jours avant la signature intervenue le 15 mai 2006, délai prévu par ce texte, pas plus qu'elle n'avait annexé aux contrats les comptes des deux dernières années.

Elles soutiennent que ces obligations, qui n'ont pas été respectées, s'appliquent dès lors qu'il a été prévu aux contrats de concession une clause d'exclusivité territoriale (article 2) et une clause d'exclusivité d'approvisionnement des concessionnaires en produits auprès du concédant. Les SARL ADI et ADP déclarent qu'elles étaient ainsi tenues à une exclusivité dans l'exploitation des activités concédées, peu important qu'elles puissent avoir d'autres activités commerciales dans des domaines différents, ce qu'a retenu la chambre commerciale de la cour de cassation dans son arrêt du 19 janvier 2010.

L'article L. 330-3 du Code de commerce s'applique à toute personne qui met à la disposition d'une autre personne un nom commercial, une marque ou une enseigne en exigeant d'elle un engagement d'exclusivité ou de quasi-exclusivité pour l'exercice de son activité.

Il ressort en l'espèce des contrats de concession de marque signés le 16 mai 2006 entre les parties que les concessionnaires :

- se voient reconnaître un licence de marque en exclusivité pour leur point de vente (article 2), le concédant s'interdisant d'accorder une autre concession portant sur les marques, sur les territoires, respectivement, de Salon de Provence et Aubagne,

- étaient tenus d'exploiter, pendant la durée du contrat, la marque Photo Price et les marques et signes attachés, à titre d'enseigne exclusive (article 4), une enseigne accessoire étant toutefois autorisée, après information du concédant, si elle ne nuit pas à sa marque,

- s'obligeaient à utiliser l'ensemble des produits labellisés de la marque Photo Price, commandés auprès du concédant, selon les besoins de son exploitation, suivant une liste actualisée établie par le concédant, (article 6)

- s'obligeaient à s'approvisionner exclusivement auprès du concédant pour les produits labellisés dont une liste non exhaustive et les tarifs étaient annexés aux contrats de concession (article 6)

- étaient laissés libres pour les autres achats de produits, matériels et services mais avec obligation d'informer le concédant des relations nouées avec ses fournisseurs (article 7),

- se voyaient interdire d'ouvrir un site internet similaire à celui crée par la SARL Photo Price Diffusion pour les produits de sa marque et les activités de son enseigne, dont l'utilisation était ouverte aux concessionnaires pour les tirages de photos commandés en ligne (article 8), seules des pages thématiques propres à chaque magasin étant loisibles pour les concessionnaires, en lien hypertexte avec le site,

- étaient tenus de respecter la charte graphique du concédant pour toute campagne promotionnelle à leur initiative (article 9).

Il s'en évince qu'il s'agissait d'un engagement souscrit par chaque concessionnaire de quasi-exclusivité, puisque l'exclusivité territoriale est une garantie pour le concessionnaire et non un engagement de sa part, bien que le contrat ne concerne qu'un seul point de vente désigné, et que l'exclusivité d'approvisionnement et d'utilisation de site internet ne porte que sur les produits labellisés Photo Price, idem pour le site internet Photo Price, la commercialisation d'autres produits, sous une autre enseigne dès lors qu'ils ne sont pas similaires étant autorisée sous réserve d'information du concédant.

Contrairement à ce que soutient la société LGF et son mandataire judiciaire liquidateur, la quasi-exclusivité de l'engagement contractuel des concessionnaires n'est nullement subordonnée à ce qu'ils justifient qu'ils réalisaient 80 % de leurs chiffres d'affaires et activité par l'utilisation de la marque Photo Price et des produits labellisés, ou qu'ils étaient en état de dépendance économique à l'égard du concédant.

Dès lors, les dispositions d'ordre public de l'article L. 330-3 du Code de commerce étaient applicables à la date de signature des deux contrats de concession de marque, le 16 mai 2006 et imposaient à la SARL PPD de communiquer aux candidats concessionnaires, 20 jours avance cette date, un document contenant les informations commerciales et comptables exigées par ce texte et ses décrets d'application.

Il n'est pas contesté que le concédant n'a pas communiqué, dans le délai légal susvisé, ni ensuite lors de chacun des renouvellements annuels par tacite reconduction, les documents requis à chacun de ses deux concessionnaires.

Mais il est de principe, ainsi que l'a rappelé la chambre commerciale de la Cour de Cassation dans son arrêt du 10 février 1998, que la nullité d'un contrat de concession de marque conclu en l'absence de la délivrance par le concédant au concessionnaire de l'information précontractuelle qu'il lui devait, n'est prononcée que s'il en résulte un vice du consentement de ce dernier.

Les SARL AD Image et AD Photos soutiennent dans leurs conclusions que leur consentement a été vicié, non pas dès l'origine du contrat de concession, le 16 mai 2006, mais seulement lors des renouvellements tacites de celui-ci, soit à compter du 15 mai 2008, en raison d'un manque d'information sur la déliquescence du réseau commercial Photo Price, la plupart des concessionnaires ayant cessé leurs activités.

Elles soutiennent qu'il ne restait plus en 2012 que les magasins de Marseille, Montélimar, Brest et Castres, outre les leurs, et que les clients des magasins fermés, tel celui de Fréjus, sont mécontents car ils ont été privés de la délivrance des tirages de leurs photos confiés dans certains magasins. Ils déclarent que 29 magasins fonctionnaient en concession ou franchise sous la marque Photo Price en 2004 mais ne justifient pas de ce que cette situation commerciale était alors un élément substantiel de leurs consentements, ni au vu des conventions conclues entre les parties ni des autres pièces versées aux débats.

En outre la disparition des accords de concession de marque d'une partie des magasins entre 2006 et 2013 constituait une information aisément accessible à tout moment par les concessionnaires, puisque le site internet du concédant indiquait le nombre et l'emplacement actualisé de ses concessionnaires, qu'ils pouvaient consulter librement.

Bien qu'imprécis quant à leur fondement juridique, les SARL AD Image et AD Photos invoquent, apparemment, le dol par réticence qu'aurait commis la société PPD lors du renouvellement tacite du 15 mai 2008, à cet égard pour les années suivantes.

Mais elles ne justifient pas, ni même n'invoquent, que le nombre et le nom des concessionnaires ayant quitté le réseau Photo Price entre le 16 mai 2006 et le 15 mai 2008, constituait une information essentielle selon eux pour la validité de leur consentement à renouveler tacitement leurs contrats de concession. Il ressort par ailleurs des pièces produites et des écritures des parties, que ni la SARL AD Photos ni la SARL AD Image n'ont sollicité de leur concédant qu'il leur indique l'état de son réseau commercial, avant le 25 avril 2012, date à laquelle il a répondu à cette question, information au demeurant accessible pour eux en consultant le site internet de la marque, indiquant tous ses points de vente ouverts, à tout moment.

Il n'est donc établi aucune réticence dolosive imputable à la société PPD, devenue LGF, lors du renouvellement tacite intervenu le 15 mai 2008 pour les deux contrats de concession, ni ultérieurement. La seule fermeture invoquée et non datée est celle du magasin de Fréjus et il n'est en rien établi qu'elle ait eu des répercussions commerciales sur les magasins d'Aubagne et de Salon de Provence, qui n'avaient pas la même clientèle, s'agissant de départements différents.

La nullité est aussi arguée au motif que le défaut d'information des concessionnaires sur la nature, les activités et la comptabilité de la SARL Laurent G. Finance, société holding financière dirigée par l'ancien gérant de la SARL PPD, M. Laurent G., a empêché qu'ils résilient leurs contrats, alors que la nature du réseau commercial se trouvait ainsi changée, par la disparition du professionnel de la photographie qui en était à l'origine.

Mais la décision sociale de dissolution de la SARL Photo Price Diffusion par l'associé unique qu'était la SARL Laurent G. Finance, dont le gérant était également M. Laurent G., et qui a entraîné la transmission universelle de son patrimoine à la société Holding a été régulièrement notifiée aux concessionnaires le 25 avril 2012, soit 20 jours avant la date de renouvellement par tacite reconduction de leurs contrats, le 15 mai 2012. Cette information n'a pas entraîné de contestation particulière, de réserve ou demande d'information complémentaire, ni de demande de résiliation anticipée de la part des concessionnaires, jusqu'au 15 janvier 2013. Le concédant y précisait que les conventions se poursuivaient comme auparavant et qu'il maintenait aussi l'existence de son réseau commercial, indiquant qu'en faisaient toujours partie les magasins de Marseille, Brest, Castres, Montélimar, outre ceux de Salon de Provence et Aubagne.

Elle ne pouvait pas non plus leur être communiquée 20 jours avant le début de leur préavis de résiliation annuelle des contrats, soit le 25 février 2012, faute d'avoir été déjà prise à ce moment.

Le fait que la documentation précontractuelle prévue par l'article L. 330-3 du Code de commerce n'ait pas non plus qu'auparavant été communiquée aux concessionnaires par le concédant n'est donc pas de nature à entraîner la nullité pour dol des renouvellements tacites intervenus le 15 mai 2012.

La seule modification de la situation contractuelle, qui est arguée par les deux concessionnaires, est la transmission universelle du patrimoine de la société concédante à une société holding, mais il apparaît qu'il s'agissait de la société détenue par l'ancien gérant de la société Photo Price Diffusion, laquelle en était auparavant l'associée unique. Cette modification de la structure de la société n'était donc pas de nature à modifier les conditions du consentement des concessionnaires. Ceci d'autant plus qu'il était stipulé dans leurs contrats de concession que la clause " d'intuitu personae " prévue à l'article 3 quant aux concessionnaires, " n'est pas opposable au concédant qui aura la liberté de céder tout ou partie de ses actifs à un tiers, en ce compris les contrats de concession de marque, sans que le cessionnaire puisse s'opposer à la transmission de son contrat, et ce quelque (quelle que) soit la forme de la cession, dès lors que le repreneur s'engage à maintenir les droits du concessionnaire sur les marques objets des présentes dans les termes et conditions du présent contrat ".

Il n'y a ainsi eu aucune réticence dolosive de la part de la SARL LGF à l'occasion du renouvellement du contrat de concession intervenu, pour chacune des deux sociétés, le 15 mai 2012, pas plus qu'auparavant.

Il convient donc de débouter les SARL AD Image et AD Photo de leurs demandes d'annulation des renouvellements tacites de leurs contrats de concession survenus à compter du 15 mai 2008 et de leurs demandes subséquentes de remboursement des redevances versées et accessoires en paiement de dommages et intérêts.

Sur la demande d'annulation de la clause d'approvisionnement exclusif :

Les SARL AD Image et AD Photo sollicitent par ailleurs que soit prononcée la nullité de la clause d'approvisionnement exclusif figurant dans leurs contrats de concession, et qu'il leur soit alloué, à ce titre, une somme de 20 000 euro à chacune en réparation du préjudice qu'elles disent avoir subi de ce chef.

Elles soutiennent que cette clause constituerait une entrave au libre jeu de la concurrence, interdite en droit interne français comme en droit communautaire. Toutefois elles n'invoquent aucune disposition légale, réglementaire ou jurisprudentielle précise comme fondement juridique de cette demande. Elles évoquent une décision du Conseil de la concurrence (28 mai 1996) et des conditions de fait applicables, selon elle, aux contrats de franchise, alors qu'il s'agit en l'occurrence de contrats de concession de marque.

Par ailleurs la validité d'une clause d'exclusivité d'approvisionnement, limitée à 10 ans, est au contraire expressément retenue à l'article L. 330-1 du Code de commerce ; en l'espèce cette clause se trouvait limitée à une durée de deux ans, puis d'un an seulement après tacite reconduction du contrat, que le concessionnaire pouvait dénoncer librement et sans pénalités en respectant seulement un préavis de deux mois avant l'échéance annuelle.

Ainsi qu'exposé plus haut, la clause d'approvisionnement exclusif ne concernait que certains produits photographiques et accessoires labellisés diffusés sous la marque commerciale concédée Photo Price, et le concessionnaire pouvait donc s'approvisionner auprès d'autres fournisseurs pour des produits non labellisés, en toute indépendance.

Contrairement aussi à ce que soutiennent les sociétés AD Image et AD Photo, non seulement le prix des produits labellisés était déterminable pour le concessionnaire mais il était même exactement déterminé, puisqu'indiqué en annexe 2 du contrat de concession du 12 mai 2006 et qu'il était stipulé que toute modification tarifaire devrait être portée sans délai à la connaissance du concessionnaire, et ne lui serait opposable que 30 jours après.

Les SARL AD Photo et AD Image n'invoquent pas non plus par ailleurs un déséquilibre significatif dans les relations contractuelles, prohibée par l'article L. 442-6 du Code de commerce.

Il convient donc de les débouter de leurs demandes d'annulation de la clause d'approvisionnement exclusif figurant dans les contrats de concession conclus avec la SARL Photo Price Diffusion, devenue SARL Laurent G. Finance, ainsi que de leur demande accessoire en paiement de dommages et intérêts de ce chef.

Sur la demande d'annulation de la clause d'utilisation du site internet pour la vente en ligne :

Les sociétés AD Photo et AD Image soutiennent aussi qu'en application de la réglementation communautaire, sans autres précisions, l'ouverture d'un site internet de vente passive, n'est pas assimilable à l'ouverture d'un point de vente et ne peut donc valablement être interdite contractuellement de façon générale à un concessionnaire. Cette interdiction contraire au droit communautaire aurait porté atteinte au développement des deux sociétés, qui sollicitent des dommages et intérêts à hauteur de la somme de 20 000 euro, chacune, de ce chef.

En l'espèce, selon les contrats litigieux, les concessionnaires se voyaient interdire d'ouvrir un site internet similaire à celui crée par la SARL Photo Price Diffusion, pour les produits de sa marque et les activités de son enseigne, dont l'utilisation était ouverte aux concessionnaires pour les tirages de photos commandés en ligne (article 8), seules des pages thématiques propres à chaque magasin étant loisibles pour les concessionnaires, en lien hypertexte avec le site.

Mais cette interdiction d'élaborer un site similaire ne portait que sur un site internet " permettant de répondre à une sollicitation active de la clientèle, en utilisant tout ou partie, sous quelque forme que ce soit, de l'enseigne, de la marque ou des signes de ralliement du réseau ". (article 8).

Il s'ensuit que, d'une part, le concessionnaire demeurait libre d'exploiter son propre site internet, y compris pour la vente en ligne, s'agissant de produits d'autres marques que celle concédée et, d'autre part que l'exclusivité d'utilisation du site internet de la marque concédée se trouve justifiée par les nécessités de bonne gestion de cette marque commerciale et du réseau l'utilisant et ne discriminait pas le concessionnaire, qui y avait accès selon le contrat.

Il y a lieu en conséquence de rejeter les demandes d'annulation de cette clause et les demandes accessoires de dommages et intérêts de ce chef.

Sur la résiliation anticipée des contrats de concession :

Subsidiairement, les sociétés AD Photo et AD Image demandent qu'il soit jugé que la résiliation anticipée des contrats de concession, intervenue à leur initiative le 15 janvier 2013, soit imputée à la SARL LGF, à ses torts et griefs exclusifs. Ils soutiennent que celle-ci a manqué à des obligations contractuelles en laissant les renouvellements tacites se poursuivre, entraînant le maintien de l'approvisionnement exclusif en produits labellisés et l'utilisation de son site internet, sans les informer qu'ils ne bénéficiaient plus de l'effet attractif de la marque, qui était au contraire devenue contreproductive, en contrepartie des redevances perçues.

Accessoirement à cette résiliation alléguée comme fautive, elles sollicitent la condamnation reconventionnelle de la SARL LGF à leur payer une somme de 50 000 euro à titre de dommages et intérêts.

Mais ainsi qu'il a déjà été exposé ci-dessus notamment :

- la clause d'approvisionnement exclusif en produits labellisés et celle d'utilisation du site internet de la marque Photo Price étaient valables, elles ont été convenues entre les parties depuis la signature des contrats de concession initiaux et n'ont pas été modifiées ensuite,

- les contrats de concession ne prévoyaient aucune obligation particulière de résultat à la charge du concédant quant au nombre de magasins utilisant sa marque ni une présence commerciale minimale dans un ressort géographique quelconque, ni comme condition de validité des conventions,

- il n'est pas établi que le départ de certains concessionnaires de la marque Photo Price entre 2008 et 2013 ait résulté d'un manquement contractuel imputable au concédant et cette information était disponible à tout moment sur le site internet marchand de la SARL PPD pour les concessionnaires,

- les concessionnaires avaient la possibilité de dénoncer chaque année, sans pénalités, leur contrat de concession, en respectant seulement un préavis de deux mois avant la date de reconduction tacite du contrat, ce qu'ils n'ont jamais fait avant le 15 janvier 2013,

- les concessionnaires ne justifient d'aucune plainte d'un de leurs clients provoquée par la disparition, avant le 15 janvier 2013, d'un autre magasin concessionnaire de la marque Photo Price ni d'une baisse de leur chiffre d'affaires réalisé avec cette marque.

D'autre part il est de principe, ainsi que l'a rappelé la chambre commerciale de la cour de Cassation sans son arrêt du 12 février 2008, que le manquement à l'obligation d'information précontractuelle ne constitue pas, à lui seul, un motif de résiliation anticipée du contrat de concession.

Enfin le concédant n'avait qu'une obligation de moyens pour promouvoir sa marque et il n'est pas justifié en quoi il aurait manqué à cette obligation, le reproche lui étant seulement fait de façon globale et imprécise de n'avoir pas effectué de publicité ni marketing depuis " plusieurs années " (sic). En effet il n'est pas soutenu notamment qu'il ait cessé d'exploiter son site internet ouvert au public avant le 15 janvier 2013, lequel constituait un outil de promotion de la marque Photo Price.

Il y a donc lieu de rejeter la demande de résiliation anticipée des contrats de concession aux torts exclusifs de la SARL LGF ainsi que la demande accessoire de dommages et intérêts des SARL AD Photo et AD Image.

SUR LA DEMANDE PRINCIPALE :

Conformément aux conventions entre les parties, la résiliation des contrats de concession notifiées au concédant par chacun des concessionnaires par lettre recommandée avec accusé de réception en date du 15 janvier 2013 n'a donc pu prendre effet qu'à l'échéance du contrat tacitement reconduit alors en cours, soit le 15 mai 2013.

La SARL LGF est donc bien fondée à solliciter leurs condamnations à lui payer les redevances contractuelles restant dues à cette date du 15 mai 2013, soit les sommes, de 4 855,76 euro pour la SARL AD Image et de 5 549,44 euro pour la SARL AD Photo qui ne sont pas particulièrement contestées en appel et sont justifiées par les factures produites (pièces n°3).

Le jugement déféré doit donc être confirmé de ces chefs, ainsi que du chef d'interdiction sous astreinte d'utiliser les signes distinctifs du réseau, en application de l'article 16 des contrats de concession, obligation incontestée également.

Il convient toutefois, comme sollicité par les SARL AD Photo et AD Image, de leur donner acte de ce qu'elles déclarent avoir cessé d'utiliser ces signes distinctifs depuis de nombreux mois, ce que ne conteste pas particulièrement la SARL LGF.

SUR LES DOMMAGES ET INTERÊTS :

En rompant de façon anticipée, sans respecter le préavis contractuel stipulé, leurs contrats de concession de marque, le 15 janvier 2013 alors qu'elles devaient ne cesser leur exploitation de cette marque le 15 mai 2013, les SARL AD Image et AD Photo ont commis une faute contractuelle. Il y a lieu en conséquence, confirmant le jugement déféré de ce chef, de les condamner, chacune, à payer une somme de 1 000 euro à titre de dommages et intérêts à la SARL LGF, laquelle ne justifie pas avoir subi un préjudice plus important que cette somme à la suite de ces faits.

La demande de dommages et intérêts pour résistance abusive présentée par la SARL LGF doit être rejetée, la position des SARL AD Photo et AD Image, bien que mal fondée et injustifiée, dans leurs refus de payer les redevances contractuelles prévues, ne caractérisant pas en l'espèce un abus de droit fautif de leur part.

SUR LES FRAIS DE PROCÉDURE ET LES DÉPENS :

Il y a lieu de confirmer aussi le jugement déféré en ce qu'il a décidé d'allouer à la SARL LGF la somme de 700 euro sur le fondement des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile que devront lui payer, chacune, les SARL AD Photo et AD Image, condamnées " in solidum " aux entiers dépens de première instance et d'appel et d'y ajouter, au titre des frais irrépétibles de procédure exposés en appel, la somme supplémentaire de 2 000 euro pour chacune d'entre elles.

Il n'est pas inéquitable en l'espèce de laisser à la charge des SARL AD Photo et AD Image les frais de procédure qui ne sont pas compris dans les dépens.

Par ces motifs, LA COUR, Statuant, publiquement, par arrêt contradictoire et en dernier ressort,Vu les articles 6 et 9 du Code de procédure civile,Vu les articles 1109, 1116, 1134, 1147, 1184 du Code civil,Vu les articles L. 330-3, R. 330-1 et L. 622-22 du Code de commerce, Donne acte à Me Frédéric T., agissant en sa qualité de mandataire judiciaire liquidateur à la liquidation judiciaire de la SARL Laurent G. Finance, prononcée par jugement du Tribunal de commerce de Nîmes en date du 10 mars 2015, de son intervention volontaire dans cette instance et constate la reprise régulière de celle-ci, après son interruption, Confirme le jugement du Tribunal de commerce de Montpellier prononcé le 24 novembre 2014, en toutes ses dispositions, Et y ajoutant : Donne acte à la SARL AD Photo et à la SAR AD Image de ce qu'elles déclarent avoir cessé d'utiliser les signes distinctifs de la marque Photo Price depuis de nombreux mois, ce que ne conteste pas particulièrement la SARL Laurent G. Finance, Condamne " in solidum " la SARL AD Photo et la SARL AD Image aux dépens de d'appel et à payer à la SARL Laurent G. Finance, prise en la personne de son mandataire liquidateur à sa liquidation judiciaire , Me Frédéric T., la somme supplémentaire de 2 000 euro, chacune, sur le fondement des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile, Rejette toutes autres demandes des parties ;