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Décisions

CA Paris, Pôle 5 ch. 4, 29 juin 2016, n° 14-00335

PARIS

Arrêt

Infirmation

PARTIES

Demandeur :

Coty France (SAS)

Défendeur :

Brandalley France (SA)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Cocchiello

Conseillers :

Mme Mouthon-Vidilles, M. Thomas

Avocats :

Mes Bouzidi-Fabre, Ponthieu, Fajgenbaum

T. com. Paris, du 18 déc. 2013

18 décembre 2013

Faits et procédure

Le groupe international Coty est divisé en deux unités : Coty Prestige crée des parfums sous différentes marques de luxe, gère ces marque de luxe ; Coty Beauty gère les marques commercialisées au sein de la moyenne et grande distribution.

Coty Prestige bénéficie de licences exclusives dans le monde entier pour la création, le développement et la commercialisation, des marques suivantes: Bottega Veneta, Balenciaga, Calvin Klein, Cerruti, Chloe, Chopard, Davidoff, Gwen Stefani, Guess, Jil Sander, Joop !, Jette Joop, Jennifer Lopez, Karl Lagerfeld, Kenneth Cole, Lancaster, Marc Jacobs, Nikos, Sarah Jessica Parker, Vera Wang et Vivienne Westwood.

La filiale française de Coty, la SAS Coty France Division Prestige (la "société Coty") commercialise des produits cosmétiques et de parfumerie de luxe par l'intermédiaire de différents distributeurs en France.

Créée en 2005, la société Brandalley France se présente comme un "pure player e.commerce", c'est-à-dire qu'elle exerce son activité de vente de produits de différentes marques, principalement vêtements, bijoux, maroquinerie et parfums, exclusivement au travers de son site www.brandalley.fr. Elle effectue des ventes, soit par son catalogue présenté sur Internet, soit par des ventes " flash ". Dans ce cas, elle ne dispose pas du stock directement, mais en a réservé une quantité maximum chez son fournisseur, à l'intérieur de laquelle elle commande globalement les quantités passées par ses propres clients, dont elle assure elle-même ensuite les livraisons.

A plusieurs reprises, les 20 et 22 mars 2009, pour la vente de produits Calvin Klein, Jennifer Lopez et Sarah Jessica, les 17 mai et 2 juin 2009 pour des produits Calvin Klein, et les 15 et 21 février 2010, pour des produits Calvin Klein, Cerutti, Davidoff et Gwen Stefani, la société Brandalley a organisé des ventes flashs ayant fait l'objet de mise en demeure par la société Coty France.

La société Coty a demandé la communication des factures des fournisseurs et a mis la société Brandalley France en demeure de cesser les ventes.

Par acte du 16 juillet 2010, la société Coty a assigné la société Brandalley devant le Tribunal de commerce de Paris, sollicitait quelques mois plus tard la radiation de l'affaire puis son réenrolement, pour obtenir réparation de son préjudice et qu'injonction soit faite à la société Brandalley de cesser ses agissements déloyaux.

Par jugement du 18 décembre 2013, le Tribunal de commerce de Paris a :

- dit irrecevable la SAS Coty France - Division Prestige en ses demandes,

- condamné la SAS Coty France - Division Prestige à verser à la SA Brandalley France la somme de 20 000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile,

- débouté les parties de leurs demandes, autres, plus amples ou contraires ;

- condamné la SAS Coty France - Division Prestige aux dépens, dont ceux à recouvrer par le greffe, liquidés à la somme de 82,17 euros dont 13,25 euros de TVA

La cour est saisie de l'appel interjeté par la société Coty France - Division Prestige de ce jugement.

Vu les dernières conclusions notifiées et déposées le 26 avril 2016 par la société SAS Coty France, appelante, par lesquelles il est demandé à la cour de :

Juger recevable et bien fondée la société Coty France en toutes ses demandes, moyens, fins et prétentions,

Y faire droit, et en conséquence :

Enjoindre à Brandalley qui commercialise sur son site www.brandalley.fr les produits litigieux, de communiquer le nom des fournisseurs, autres que la société Star Perfumes, auprès desquels elle s'est approvisionnée pour la vente des produits des marques Calvin Klein, Cerruti, Chopard, Chloe, Guess, Davidoff, Joop ! Jennifer Lopez, Lancaster, Sarah Jessica Parker, et de transmettre les factures correspondantes,

Constater que Brandalley a commercialisé sur son site www.brandalley.fr des produits de Coty France, notamment des marques Calvin Klein, Cerruti, Chopard, Chloe, Guess, Davidoff, Joop ! Jennifer Lopez, Lancaster, Sarah Jessica Parker,

Constater que ces produits sont distribués par la société Coty France par l'intermédiaire d'un réseau de distribution sélective,

Dire et juger licite le réseau de distribution sélective de Coty France,

Dire et juger que la vente des produits des marques Calvin Klein, Cerruti, Chopard, Chloe, Guess, Davidoff, Joop ! Jennifer Lopez, Lancaster, Sarah Jessica Parker, par Brandalley par le biais de son site Internet www.brandalley.fr, sans l'autorisation de la société Coty France, est constitutive de concurrence déloyale, de publicité trompeuse et de parasitisme,

Condamner Brandalley au paiement de 10 000 euros de dommages et intérêts au titre du préjudice moral subi,

Ordonner l'interdiction de toute commercialisation sur le site Internet www.brandalley.fr, ou sur tout autre site Internet, ou de quelque autre manière que ce soit, des parfums de marques distribuées par la société Coty France : Bottega Veneta, Balenciaga, Calvin Klein, Cerruti, Chloe, Chopard, Davidoff, Gwen Stefani, Guess, Jil Sander, Joop !, Jette Joop, Jennifer Lopez, Karl Lagerfeld, Kenneth Cole, Lancaster, Marc Jacobs, Nikos, Sarah Jessica Parker, Vera Wang et Vivienne Westwood ;

Ordonner l'interdiction définitive de toute utilisation non autorisée des droits de propriété intellectuelle de la société Coty France portant sur les parfums de marques qu'elle distribue : Bottega Veneta, Balenciaga, Calvin Klein, Cerruti, Chloe, Chopard, Davidoff, Gwen Stefani, Guess, Jil Sander, Joop !, Jette Joop, Jennifer Lopez, Karl Lagerfeld, Kenneth Cole, Lancaster, Marc Jacobs, Nikos, Sarah Jessica Parker, Vera Wang et Vivienne Westwood, et notamment l'utilisation du nom de ces marques sur le site Internet www.brandalley.fr, ou tout autre site Internet ou de quelque autre manière que ce soit, et des photographies de leurs produits,

Ordonner la communication de tous les éléments comptables de Brandalley, depuis l'année de son immatriculation, soit depuis 2005, afférents à la vente des marques susvisées, de manière à permettre à Coty France de parfaire son préjudice par la suite,

Ordonner la publication de l'arrêt à intervenir sur la page d'accueil du site Internet www.brandalley.fr, sur au moins la moitié de la page d'accueil, dans les huit jours de sa signification et pendant un délai d'un mois, sous astreinte de 1 000 euros par jour de retard et par jour manquant,

Et Réserver, le cas échéant, la liquidation des astreintes,

Ordonner la publication de l'arrêt à intervenir dans les trois magazines au choix de la société Coty France et aux frais exclusifs de Brandalley, et ce dans la limite de 15 000 euros,

Rappeler le caractère exécutoire de l'arrêt à intervenir,

Condamner Brandalley à payer à la société Coty France la somme de 10 000 euros au titre des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens.

Vu les dernières conclusions notifiées et déposées le 5 avril 2016 par la société Cigreats, intimé, par lesquelles il est demandé à la cour de :

Confirmer le jugement rendu le 18 décembre 2013 par le Tribunal de commerce de Paris en toutes ses dispositions et par conséquence en ce qu'il a :

Dit irrecevable la SAS Coty France - Division Prestige en ses demandes,

Condamné la SAS Coty France - Division Prestige à verser à la SA Brandalley France la somme de 20 000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile,

Débouté les parties de leurs demandes, autres, plus amples ou contraires ;

Condamné la SAS Coty France - Division Prestige aux dépens, dont ceux à recouvrer par le greffe, liquidés à la somme de 82,17 euros dont 13,25 euros de TVA ;

Et y ajoutant :

Condamner au surplus la société Coty France à verser à la société Brandalley une somme supplémentaire de 25 000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile,

La condamner aux entiers dépens,

A titre infiniment subsidiaire,

Consulter l'Autorité de la concurrence afin que cette dernière donne son avis sur la question suivante : " La société Coty France, qui prétend être en droit de commercialiser en exclusivité les parfums de marques " Bottega Veneta, Balenciaga, Calvin Klein, Cerruti, Chloe, Chopard, Davidoff, Gwen Stefani, Guess, Jil Sander, Joop !, Jette Joop, Jennifer Lopez, Karl Lagerfeld, Kenneth Cole, Lancaster, Marc Jacobs, Nikos, Sarah Jessica Parker, Vera Wang et Vivienne Westwood" peut-elle interdire leur vente au détail à un distributeur spécialisé dans le commerce en ligne en faisant valoir l'existence d'un réseau de distribution sélective dont elle prétend être à la tête, alors :

- qu'elle se dispense d'apporter la preuve de son existence pour les produits en cause (absence de contrats de distribution sélective signés et non tronqués, antérieurs à la délivrance de l'assignation),

- que le groupe auquel elle appartient a librement mis les produits en cause sur le marché auprès d'intermédiaires en amont, et

- qu'elle n'est pas en mesure de justifier du bénéfice de l'exemption revendiquée en application des règlements communautaires "

Motifs :

Sur la qualité et l'intérêt à agir de la société Coty France :

Considérant que la société Brandalley soutient qu'en l'absence de justification du bénéfice à titre exclusif des licences sur les produits concernés par la procédure, la société Coty ne démontre pas sa qualité et son intérêt à agir et qu'elle a le droit d'établir le réseau de distribution sélective dont elle fait état ;

Considérant que Coty estime rapporter la preuve de ce qu'elle peut exploiter les licences de marque, en versant aux débats les courriers de titulaires des marques attestant que le groupe Coty bénéficie des licences de marque et des extraits de certains de ses contrats de licence exclusiveet qu'elle est habilitée à exercer toute action judiciaire en vue de sanctionner toute violation de ses droits,

Mais considérant que la recevabilité de l'action de Coty France contre Brandalley ne saurait être subordonnée à sa qualité de titulaire ou non des droits d'exploitation des marques ci-dessus relevées dans la mesure où le litige ne porte pas sur la titularité des droits et leur utilisation ; que l'action de Coty a pour objet, par la sanction des actes de concurrence déloyale qu'elle entend voir prononcer, de faire respecter le réseau de distribution sélective de ces produits qu'elle a mis en place, et qu'elle a ainsi qualité à agir (pour avoir mis en place un réseau) et intérêt à agir (pour protéger ce réseau),

Que par ailleurs, superfétatoirement, la lecture des documents que verse la société Coty France aux débats, il apparaît que les titulaires de marques ont concédé à Coty Inc. et pour certains également à ses filiales, parmi lesquelles se trouve la société Coty France, le droit d'utiliser leurs marques : que Coty France verse aux débats l'attestation délivrée par Calvin Klein à Coty GmbH qui précise que Coty Inc. et ses filiales sont pleinement autorisées à utiliser les marques Calvin Klein, ce qui confirme ainsi une précédente autorisation du 5 février 2010 d'agir si besoin est en contrefaçon ; que Coty disposait de droit d'utiliser une marque au moins lorsqu'elle a engagé l'action contre la société Brandalley, peu important au surplus que l'inscription au registre national des marques ait eu lieu ou non,

Considérant que l'action de Coty est recevable,

Sur le réseau de distribution sélective :

Sur l'existence du réseau de distribution sélective

Considérant que la société Coty rappelle que la preuve de l'existence et de la licéité d'un réseau de distribution est établie dès lors que les fabricants produisent le contrat type les liant aux distributeurs agréés et qu'elle a versé aux débats les documents et éléments qui justifient sans contestation l'existence de son réseau de distribution sélective,

Considérant que la société Brandalley soutient que la preuve de l'existence du réseau de distribution sélective à la date de l'assignation n'est pas faite par les documents produits, que la société Coty France a versé très tardivement des contrats de distribution agréée datés du 26 août 2008 et 23 mars 2010, antérieurs à l'assignation et vraisemblablement tronqués, soulignant que seules la première et dernière pages ont été communiquées, que les différents contrats postérieurs ou non datés ne permettent pas de démontrer qu'à la date de l'assignation, la société Coty bénéficiait d'un réseau de distribution sélective, que la lettre d'exemption de janvier 2002 communiquée est obsolète, qu'enfin, Coty n'explique pas en quoi les marques qu'elle commercialise supposent de recourir à un mode de distribution sélectif,

Mais considérant que se prévalant d'actes de concurrence déloyale commis à son encontre, la société Coty France doit rapporter la preuve que le réseau de distribution sélective était justifié par les produits devant être commercialisés et qu'elle l'avait mis en place au moment des faits relatés dans les procès-verbaux de constats qu'elle verse aux débats ;

Que la nature des produits commercialisés, marques de luxe pour certaines prestigieuses, exige une qualification du distributeur qui doit offrir à la clientèle des services et assistance de qualité, un point de vente qui reflète le prestige des marques, un environnement adapté que seul la distribution sélective par réseau permet d'obtenir ;

Que toutefois, les différentes décisions intervenues entre Coty et des parties autres que celles présentes dans ce litige, qui ont pu reconnaître l'existence ou la validité du réseau, ne peuvent être invoquées pour faire la preuve, dans ce litige, de l'existence du réseau et de sa licéité ;

Qu'il sera observé que la société Coty verse aux débats différents contrats de distribution sélective des produits en pièces 3, 3b à 3f ; que la pièce 3 est un contrat-type de distribution "vierge", que les pièces 3b à 3f sont des photocopies plus ou moins complètes des contrats signés par Coty et des distributeurs agréés ;

Que, pour ce qui concerne l'existence du réseau de distribution sélective, Coty verse aux débats plusieurs contrats intitulés "contrat de distributeur agréé" dont seuls les contrat signés avec Burdin le 26 août 2008, Le Bon Marché le 23 mars 2010 et Edith Harlay le 26 juillet 2011 sont antérieurs aux ventes flash reprochées à Brandalley ; que les autres contrats produits sont postérieurs (notamment celui signé avec Marionnaud du 3 janvier 2013), celui signé avec Sephora étant quant à lui non daté ; que néanmoins, Coty peut prétendre justifier l'existence d'un réseau de distribution sélective pour les produits au moment des faits litigieux par la production des contrats Burdin, Le Bon Marché et Edith Harlay dont la première et dernière pages sont seules transmises mais dont la présentation est identique à celle du contrat-type et des contrats Marionnaud et Sephora, ces eux-mêmes transmis en intégralité ;

Que les produits vendus par Brandalley (Calvin Klein, Jennifer Lopez, Sarah Jessica Parker, Cerutti, Davidoff, Gwen Stefani) sont, à l'exception des produits Gwen Stefani, concernés par les trois contrats de distribution sélective,

Sur la licéité du réseau de distribution :

Considérant que la société Coty affirme que le réseau de distribution sélective respecte les conditions légales et jurisprudentielles, que son réseau répond aux trois critères posés par l'article 101 §1 du TFUE et L. 420-1 du Code de commerce (justifié par la nature du produit, les critères doivent être objectifs, qualitatifs, fixés de manière uniforme, et appliqués de façon non discriminatoire, et les critères ne doivent pas aller au-delà de ce qui est nécessaire,

Qu'elle fait état de la validité de principe des accords de distribution sélective consacrée par le règlement d'exemption de la Commission n° 2790/99, expose détenir moins de 30 % de part de marché ; qu'elle soutient que les contrats de distribution sélective ne contiennent aucune clause noire,

Que la licéité de son contrat a été reconnue par de nombreuses décisions, que le contrat a été notifié à la Commission européenne en 1997 qui a jugé en 2002 que le contrat pouvait bénéficier d'une exemption,

Que l'étanchéité de son réseau est assurée par les termes du contrat de distribution (article 3-4-3) qui interdisent à ses distributeurs de revendre les produits à des revendeurs " non-agrées " et mais que les failles éventuelles dans l'étanchéité ne permettent pas pourtant de conclure à l'illicéité du réseau,

Considérant que la société Brandalley estime que selon les différentes pièces du dossier, l'appelante ne démontre n'avoir mis en place un réseau de distribution sélective que pour certaines marques et non pour toutes celles sur lesquelles elle prétend détenir des droits,

Que la société Coty France ne justifie pas la licéité du réseau de distribution sélective, ne rapportant pas la preuve d'avoir une part de marché inférieure à 30 % pour que son réseau de distribution sélective bénéficie d'une validité de principe, étant au surplus rappelé qu'elle n'a pas démontré qu'elle pouvait mettre en place un réseau de distribution sélective pour plusieurs marques ;

Que Brandalley expose s'être approvisionnée auprès de la société CRM laquelle a acquis les produits auprès de la société Glendale dont le fournisseur est la société Flagrances Sales, cette dernière n'étant qu'une société du groupe Coty ; que dès lors, l'étanchéité du réseau est quasi inexistante en France et dans l'Union européenne, que la société Coty France ne fait pas la preuve contraire de sorte qu'elle tente abusivement d'empêcher la commercialisation des produits en cause,

Qu'en cas de doute sur l'illicéité ou non du réseau de distribution sélective mis en place par la société Coty France, il y aurait lieu de faire usage des dispositions de l'article L. 462-3 du Code de commerce, de saisir pour avis l'Autorité de la concurrence sur la licéité du réseau de distribution sélective revendiqué par la requérante,

Mais considérant que Coty a mis en place un réseau de distribution sélective dont elle doit justifier la licéité,

Que, pour ce qui concerne l'étanchéité du réseau, le contrat comporte en son article 3.4.3 une disposition destinée à assurer l'étanchéité juridique du réseau en interdisant la revente à des distributeurs non agréés ; que le fait que la société Brandalley a pu s'approvisionner auprès de distributeurs anglais, ne saurait démontrer, à lui seul, l'illicéité du réseau,

Considérant que les faits à l'origine de la procédure ont eu lieu en mars 2009, février 2010 et novembre 2011 ; que pour déterminer la validité du réseau, il convient de se référer à l'article 81 §1 du traité de Rome alors en vigueur, à l'article 101 du TFUE et au règlement 2790/1999 du 22 décembre 1999 ainsi qu'à l'article L. 420-1 du Code de commerce ;

Que le règlement 2790/1999 du 22 décembre 1999 concernant l'application de l'article 81 du traité de Rome à des catégories d'accords verticaux et pratiques concertées applicable aux faits reprochés ayant eu lieu en mars 1999 et février 2010, l'article 3 du règlement UE 330/2010 de la Commission du 20 avril 2010 pour les faits de novembre 2011 prévoient une exemption pour les accords de distribution dits "accords verticaux" conclus entre les distributeurs et le fournisseur lorsque la part de marché détenue par le fournisseur ne dépasse pas 30 % et ce, sous réserve que les accords de distribution ne comportent pas de restrictions caractérisées,

Qu'en l'espèce, Coty verse aux débats les courriers établis le 6 mars 2013 par la société NPD Group selon lesquels "la part de marché valeur total parfums sélectif en France sur le cumul annuel 2010 (du 4 janvier 2010 au 2 janvier 2011) : Le Groupe Coty Prestige = 3,7% ", " sur le cumul annuel 2011 (du 3 janvier 2011 au 1er janvier 2012 : le Groupe Coty Prestige = 3,9 % ", " sur le cumul annuel 2012 (du 2 janvier 2012 au 30 décembre 2012 : le Groupe Coty Prestige = 3,7 % " ; que comme le constate justement Brandalley, Coty ne donne aucune précision sur la la qualification de la société NPD Group, sur son autorité en la matière ; que par ailleurs, ces courriers concernent le Groupe Coty Prestige et non Coty France ; qu'enfin, l'année de référence à prendre en considération pour la détermination de la part de marché est l'année précédant les faits reprochés à Brandalley, et en l'espèce, les années 2008 et 2009 pour les ventes flash de 2009 et 2010, et que, faisant état des parts de marchés des années 2010, 2011 et 2012, Coty n'établit pas la preuve que sa part de marché était inférieure à 30 % au moment des ventes flash qu'elle reproche à Brandalley,

Qu'à supposer qu'elle ait fait la preuve qu'elle détient une part de marché inférieure à 30 %, elle devrait encore justifier que son réseau est licite en ce que ses contrats de distribution ne comportent pas de clauses noires ce qu'elle ne fait qu'affirmer, alors que la lecture de son contrat de distribution en vigueur en 2008, 2010 et 2011 permet de constater : 1) que le point 3.4.2 du contrat en ce qu'il prévoit expressément la possibilité de vendre aux membres des comités d'entreprises ou des collectivités dès lors qu'ils se déplacent individuellement en tant que consommateurs directs dans les magasins pour effectuer les achats, exclut par cette disposition la vente aux agents d'achats (comités d'entreprise, collectivités) agissant pour le compte des utilisateurs finals, ce qui constitue une restriction caractérisée prévue par l'article 4c du règlement ; 2) que le point 3.4.3 édicte une interdiction de vendre à des revendeurs non agréés ; que si cette disposition est licite en ce qu'elle a pour objectif de protéger le réseau et d'en assurer l'étanchéité, en revanche, elle révèle son caractère restrictif prohibé lorsque le marché sur lequel évolue le distributeur non agréé n'est pas organisé en réseau de distribution sélective et qu'en l'espèce, Coty ne justifie pas que le système de distribution sélective couvre tous les territoires de sorte que la clause crée une restriction illicite à la concurrence (l'article 4b) ;3) que le point 3.4.3.3 interdit au distributeur agréé de réaliser une vente active d'un nouveau produit contractuel vers un Etat membre de l'Union européenne où la société Coty France ou une société du même groupe ne l'aurait pas mis en vente, pendant un délai d'un an à compter de la date du premier lancement du produit dans un Etat membre, que cette clause a pour effet de restreindre le territoire sur lequel l'acheteur peut vendre les biens contractuels, les ventes actives aux utilisateurs finaux et constitue une restriction caractérisée au sens de l'article 4.b), 4.c) et 4.d) prohibée ; qu'il apparaît que des clauses noires sont contenues dans le contrat de distribution, qui excluent tout caractère licite du réseau ;

Considérant encore que Coty ne peut justifier du bénéfice d'une exemption individuelle en produisant aux débats deux courriers du 28 novembre 2001 et du 9 janvier 2002 de la Commission européenne adressés respectivement à Lancaster Group GmbH et à Unilever Cosmetic International précisant que l'"Accord de distribution au détail" satisfait les conditions d'exemption posées par le règlement n° 2790/99 du 22 décembre 1999 alors que ces courriers ne sont pas adressés à Coty France, que l'"accord de distribution au détail" soumis à la Commission dont il est fait état n'est pas versé aux débats et alors que l'expression d'opinion que révèlent ces courriers ne lie ni les autorités nationales ni le juge national ;

Considérant en définitive, qu'il apparaît que Coty ne démontre pas la licéité du réseau de distribution qu'elle entend faire protéger en engageant cette procédure ;

Sur les fautes reprochées à Brandalley et les préjudices :

Considérant que Cotry reproche une série de faits qu'elle considère fautifs à Brandalley : qu'elle vend de façon illicite les produits du réseau, qu'elle usurpe la qualité de distributeur agréé et fait de la publicité mensongère, qu'elle porte atteinte à l'image de la marque Coty France, a un comportement parasitaire,

Considérant que Brandalley conteste ces différentes fautes,

Mais considérant que Coty ne peut reprocher à la société Brandalley d'avoir porté atteinte à l'image du réseau de distribution sélective qu'elle a constitué et dont le caractère illicite est reconnu, qu'elle ne peut lui reprocher d'avoir usurpé une qualité de "distributeur agréé" alors au surplus qu'il n'est pas démontré que les emballages des produits vendus par Brandalley comportent la mention "distributeur agréé", et d'avoir ainsi commis des actes de publicité trompeuse,

Considérant que Coty reproche à Brandalley d'avoir porté atteinte à son image, à son prestige ; qu'elle se borne à alléguer sans produire le moindre document,

Considérant pour ce qui concerne l'atteinte que porteraient les ventes flash à l'image des marques et aux parfums, qu'il y a lieu de remarquer qu'elle ne saurait invoquer un tel préjudice sinon pour la marque et les produits Calvin Klein pour laquelle elle justifie bénéficier d'un contrat de licence et d'exploitation de la marque ; que toutefois, elle n'établit pas que ces quelques "ventes privées d'une durée très limitée" comme elle les décrit elle-même, réalisées sur une année, des produits Calvin Klein, doivent être considérées comme des "braderies", ont donné une impression de "déballage" de sorte qu'elles ont dévalorisé les produits et la marque,

Considérant que Coty enfin invoque des faits de parasitisme ; que selon elle, Brandalley qui ne " détient aucun point de vente physique et n'a pas à respecter les conditions imposées par le contrat de distributeur agréé " utilise les investissements réalisés par les distributeurs ; que toutefois, la cour constate que la société Coty ne fait pas état de ses propres investissements, que par ailleurs, aucun élément n'est versé aux débats pour justifier les efforts financiers, intellectuels que les distributeurs ont pu faire dont la société Brandalley aurait profité sans bourse délier, que le parasitisme invoqué ne peut être retenu,

Considérant qu'il y a lieu de débouter la société Coty France de ses demandes,

Par ces motifs : La COUR, infirme le jugement, dit Coty France recevable en son action, déboute la société Coty France de ses demandes, la condamne à payer à société Brandalley, la somme de 35 000 euros à titre d'indemnité pour frais irrépétibles de première instance et d'appel, la condamne aux entiers dépens.