Livv
Décisions

Commission, 7 novembre 2012, n° M.6471

COMMISSION EUROPÉENNE

Résumé de la décision

déclarant une concentration compatible avec le marché intérieur et avec le fonctionnement de l'accord EEE - Outokumpu/Inoxum

Commission n° M.6471

7 novembre 2012

I. LES PARTIES

(1) Outokumpu Oyj (ci-après "Outokumpu", Finlande) est une entreprise publique finlandaise cotée à la bourse d'Helsinki. Elle produit, vend et distribue des produits en acier inoxydable et produit du ferrochrome. Elle possède des sites de production d'acier inoxydable à Tornio (Finlande), à Avesta, Nyby, Degerfors et Kloster (Suède), à Sheffield (Royaume-Uni), à New Castle et Richburg (États-Unis d'Amérique, "États-Unis"), ainsi qu'une mine de ferrochrome à Kemi (Finlande).

(2) Inoxum GmbH et Nirosta GmbH (ci-après "Inoxum", Allemagne) forment la division "acier inoxydable" de ThyssenKrupp AG (ci-après "TK", Allemagne). Inoxum produit, vend et distribue des produits en acier inoxydable, des alliages haute performance et des pièces forgées. Les principaux sites de production d'acier inoxydable d'Inoxum se trouvent à Krefeld, Bochum et Dillenburg (Allemagne), à Terni (Italie) et, hors Europe, à San Luis Potosi ("Mexinox") (Mexique), à Calvert (États-Unis) et à Shanghai (Shanghai Krupp Stainless, "SKS") (Chine). Inoxum est actuellement sous le contrôle exclusif de TK.

II. L'OPÉRATION

(3) Le 10 avril 2012, la Commission a reçu une notification de projet de concentration conformément à l'article 4 du règlement sur les concentrations, par laquelle Outokumpu acquiert, au sens de l'article 3, paragraphe 1, point b), du règlement sur les concentrations, le contrôle de l'ensemble d'Inoxum par achat d'actions (2). Outokumpu et Inoxum sont dénommées ci-après les "parties".

III. DIMENSION EUROPÉENNE

(4) En 2010, les entreprises concernées réalisaient ensemble un chiffre d'affaires total sur le plan mondial de plus de 5 000 000 000 EUR (3) (Outokumpu: 4 229 000 000 EUR; Inoxum: 6 739 000 000 EUR). Le chiffre d'affaires total de chacune des entreprises concernées dans l'Union était de plus de 250 000 000 EUR (Outokumpu: [...] EUR; Inoxum: [...] EUR). Enfin, aucune des entreprises concernées ne réalise plus des deux tiers de son chiffre d'affaires total dans l'Union à l'intérieur d'un seul et même État membre. L'opération envisagée revêt dès lors une dimension européenne au sens de l'article 1er, paragraphe 2, du règlement sur les concentrations.

IV. LA PROCÉDURE

(5) Le 21 mai 2012, la Commission a adopté une décision en vertu de l'article 6, paragraphe 1, point c), dans laquelle elle émet de sérieux doutes quant à la compatibilité de l'opération avec le marché intérieur. Le 4 juin 2012, Outokumpu a présenté ses observations écrites sur la décision adoptée en vertu de l'article 6, paragraphe 1, point c).

(6) Le 9 août 2012, la Commission a adopté une communication des griefs conformément à l'article 18 du règlement sur les concentrations. Outokumpu a répondu à la communication des griefs le 24 août 2012.

(7) Le 30 août 2012, une audition a eu lieu.

(8) Le 19 septembre 2012, Outokumpu a présenté des engagements en vertu de l'article 8, paragraphe 2, du règlement sur les concentrations (ci-après les "engagements offerts"). À la suite de la présentation des engagements offerts, la Commission a lancé une consultation des acteurs du marché afin de recueillir les avis des concurrents, des clients et des autres participants au marché concernant ces engagements.

(9) Le 1er octobre 2012, Outokumpu a présenté une proposition d'engagements révisée (les "engagements révisés"). Le même jour, la Commission a lancé une consultation des acteurs du marché sur les engagements révisés.

(10) Le 9 octobre 2012, Outokumpu a présenté une version légèrement modifiée des engagements révisés.

(11) Le 19 octobre 2012, Outokumpu a présenté des engagements définitifs (ci-après les "engagements définitifs").

(12) La réunion du comité consultatif a eu lieu le 25 octobre 2012. Le comité consultatif a examiné le présent projet de décision et a émis un avis favorable.

V. LES MARCHÉS DE PRODUITS EN CAUSE

(13) L'opération a donné lieu à plusieurs chevauchements sur le marché de l'acier inoxydable. Les parties se chevauchent notamment horizontalement en ce qui concerne la production i) de dalles, ii) de produits laminés à chaud, iii) de produits laminés à froid et iv) de bandes à haute précision ainsi que v) sur le marché de la distribution des produits en acier inoxydable. En outre, l'opération débouche sur quelques relations verticales entre les parties.

(14) Dans la présente décision, la Commission soulève des problèmes de concurrence en matière de compatibilité de l'opération avec le marché intérieur en ce qui concerne le marché des produits laminés à froid dans l'EEE. En conséquence, il ne sera question que de ce marché dans le présent résumé.

Produits plats laminés à froid

(15) L'acier inoxydable est défini comme un acier allié d'une teneur minimale en chrome de 10,5 % et d'une teneur maximale en carbone de 1,2 %.

(16) Pour certaines applications, l'acier inoxydable est en concurrence avec différents matériaux tels que l'aluminium, le cuivre, le plastique, la céramique, le composite ou l'acier au carbone. Toutefois, ses propriétés le rendent indispensable pour certaines applications dans l'ingénierie de processus, l'automobile, l'électroménager, etc. Une de ses principales propriétés est sa résistance à la corrosion.

(17) Dans des décisions antérieures, la Commission a estimé qu'il existait un marché global des produits laminés à froid (4). La Commission n'a pas jugé approprié de diviser le marché sur la base d'autres catégories, telles que le type de fini de surface, la nuance, la largeur ou l'application finale.

(18) Au cours des phases I et II, la Commission a examiné plus avant si le marché des produits laminés à froid pouvait être davantage segmenté. En particulier, la consultation des acteurs du marché visait à examiner si les segmentations du marché par nuance, famille de nuance, produit de base ou produit spécial, fini de surface et application finale pouvaient être prises en compte. Chacune de ces divisions potentielles du marché sera examinée ci-dessous.

Familles et nuances d'acier inoxydable

(19) L'acier inoxydable peut être classé en quatre grandes familles en fonction de sa composition chimique et de sa structure cristalline: i) austénitique, ii) ferritique, iii) martensitique et iv) duplex. Chacune des familles présente une composition et des propriétés physiques différentes.

(20) Toutefois, compte tenu du degré élevé de substituabilité du côté de l'offre entre les différentes nuances et familles de nuances, la présente décision considérera qu'il n'existe qu'un seul marché global pour tous les produits laminés à froid.

Produits de base ou produits spéciaux

(21) Les nuances de produits de base couvrent généralement un large éventail d'applications (environ [70-80] % des parts de marché), tandis que les nuances de produits spéciaux représentent [30-40] % des parts de marché. Il n'existe aucune définition claire, à l'échelle du secteur, des nuances pouvant être qualifiées de spéciales.

(22) Sur la base des informations recueillies au cours de la consultation des acteurs du marché, la Commission a confirmé que le degré de substitution du côté de l'offre était élevé entre les différentes nuances, qu'il s'agisse de produits de base ou spéciaux. En conséquence, la Commission estime, à la lumière des documents présentés par les parties, qu'il convient de ne pas considérer qu'il existe un marché distinct par type de nuance.

Distinction par fini de surface

(23) S'il existe divers finis de surface de produits laminés à froid, les principaux sont 2D, 2B et BA. Il existe également d'autres finis de surface qui semblent fréquemment utilisés dans l'industrie. La consultation des acteurs du marché a confirmé que la plupart des producteurs et des distributeurs possédaient l'équipement nécessaire pour produire les différents finis de surface, à la seule exception du BA, qui requiert un équipement spécial et spécifique, ainsi qu'un investissement de 220 000 000 EUR lié à l'acquisition d'une ligne BA.

(24) La présente décision examinera le marché global de la production et de l'offre de produits laminés à froid, indépendamment de leur fini de surface, ainsi que les effets de l'opération sur les éventuels segments BA et non-BA.

Distinction par application finale

(25) En fonction de l'utilisation ou de l'application finale, une nuance présentant certaines caractéristiques mécaniques est requise. De manière générale, la sélection de la nuance pour une application finale spécifique dépend, entre autres, d'exigences en matière de résistance à la corrosion, de résistance à la chaleur, de résistance, d'esthétique et d'aptitude au façonnage.

(26) L'enquête de la Commission a confirmé que plusieurs nuances et familles de nuances étaient utilisées dans la même application finale. En outre, de nombreuses nuances sont utilisées dans plusieurs applications finales. En conséquence, la Commission estime, à la lumière des documents présentés par les parties, qu'il convient de ne pas envisager une segmentation du marché par application finale.

VI. LES MARCHÉS GÉOGRAPHIQUES EN CAUSE

Marché des produits laminés à froid

(27) Dans des décisions antérieures, la Commission a considéré que la dimension possible du marché des produits laminés à froid ne dépassait pas l'Europe occidentale et englobait au moins la Communauté (5). Toutefois, la définition du marché géographique en cause est finalement restée ouverte.

(28) Les parties estiment que le marché géographique pour tous les produits en acier inoxydable, notamment les produits laminés à froid, englobe au moins l'EEE.

(29) Dans la première phase de son enquête, la Commission a trouvé des preuves confirmant que le marché des produits laminés n'était pas plus étendu que l'EEE: i) les prix des produits laminés à froid continuent d'être très variables en fonction des régions du monde, même pour ce qui est des nuances les plus courantes; ces différences ne peuvent être justifiées uniquement par les coûts de transport; ii) plus de la moitié des clients qui ont répondu aux demandes de renseignements de la Commission au cours de la première phase de l'enquête ont indiqué qu'ils n'avaient jamais acheté de produits laminés à froid à un producteur non européen, quelle que soit la famille de nuances ou la nuance; iii) les parties ont fourni des preuves économétriques et une analyse de l'élasticité critique qui démontrent que l'étendue géographique du marché ne dépasse pas l'EEE.

(30) En outre, il ressort des réponses à la deuxième phase de l'enquête de la Commission que les clients ne considèrent pas les produits laminés à froid provenant d'Asie comme un substitut parfait aux mêmes produits provenant de l'EEE pour les raisons suivantes: i) le temps d'attente plus long, ii) les questions de qualité, iii) les conditions de paiement différentes et iv) l'éventail de produits disponibles (certains n'étant produits que dans l'EEE).

(31) Aux fins de la présente décision, la Commission conclut que l'étendue géographique du marché de la production et de l'offre de produits plats laminés à froid ne dépasse pas l'EEE.

VII. APPRÉCIATION

Marché des produits laminés à froid dans l'EEE

i) Évaluation des effets de l'opération envisagée sur les parts de marché et les niveaux de concentration

(32) L'opération envisagée réduit le nombre d'acteurs intégrés européens de quatre à trois à la suite d'une fusion des numéros un et deux du marché. Inoxum est actuellement le plus grand producteur et fournisseur de produits laminés à froid présent dans l'EEE, avec une part de marché de [30-40] %. Outokumpu est le deuxième acteur le plus important sur ce marché, avec une part de [10-20] %. Aussi, l'opération donnera lieu à une part de marché combinée de [50-60] % sur le marché global de la production et de la fourniture de produits laminés à froid, et des parts combinées encore plus grandes dans des segments importants tels que les nuances austénitiques 304 ([50-60] %) et 316 ([60-70] %). Les parts de capacité combinées dépasseront elles aussi 50 %.

(33) En outre, l'entité combinée sera trois fois plus grande que son plus proche concurrent dans l'EEE après la concentration, à savoir Aperam, qui possède [10-20] % du marché, et cinq fois plus grande que le deuxième concurrent le plus important, Acerinox, dont la part de marché est de [10-20] %. Tous les autres concurrents, y compris les producteurs asiatiques qui importent vers l'Europe, sont petits, leurs parts de marché étant généralement nettement inférieures à [0-5] %.

(34) Selon une jurisprudence constante, une part de marché particulièrement élevée - 50 % et plus - peut en soi constituer la preuve de l'existence d'une position dominante (6). Dans la présente affaire, les parts de marché, l'augmentation de celles-ci et l'écart entre l'entité issue de la concentration et son plus proche concurrent sont particulièrement importants. En outre, l'industrie de l'acier inoxydable est un secteur mature, où les parts de marché et les niveaux de concentration fournissent une première indication importante et fiable du pouvoir de marché. La Commission conclut dès lors que les parts de marché élevées dans cette affaire constituent une première indication forte que l'opération envisagée aura des effets non coordonnés sur le marché des produits laminés à froid dans l'EEE en raison de la création d'une position dominante.

ii) L'accès au marché des produits laminés à froid est peu probable

(35) Même s'il n'existe aucune barrière légale à l'accès au marché des produits laminés à froid dans l'EEE, les investissements requis pour accéder à ce marché sont très élevés, étant donné que l'industrie nécessite beaucoup de capitaux. En conséquence, à l'avenir, il est peu probable que des concurrents intègrent le marché.

iii) Hypothèse d'une atteinte à la concurrence

(36) À la lumière du cadre d'appréciation établi au point 24 des lignes directrices sur l'appréciation des concentrations horizontales, la Commission a apprécié tous les facteurs pertinents pour évaluer les effets de l'opération envisagée sur le marché des produits laminés à froid dans l'EEE et a conclu que ladite opération était susceptible d'entraver de manière significative la concurrence effective sur ce marché, en particulier en raison d'effets non coordonnés dus à la création d'une position dominante.

(37) Les parties ont toutefois affirmé que l'hypothèse d'une atteinte à la concurrence soulevée par la Commission était biaisée, étant donné que la surcapacité implique que les concurrents de l'entité issue de la concentration réagiront à une hausse du prix appliquée par cette dernière, compensant ainsi tout effet anticoncurrentiel provoqué par l'opération envisagée.

(38) La Commission note que même dans les marchés caractérisés par une surcapacité au niveau sectoriel, une concentration qui conduit à une consolidation substantielle des capacités de production est susceptible d'avoir des effets non coordonnés tels que décrits au point 24 des lignes directrices sur l'appréciation des concentrations horizontales. En effet, en combinant les capacités des parties à la concentration, une fusion élimine la pression concurrentielle qui prévalait entre ces parties avant la concentration, réduisant ainsi la pression concurrentielle sur l'entité issue de la concentration par rapport à la pression concurrentielle qui pesait sur chacune des entreprises avant la concentration.

(39) Les parties affirment également que l'hypothèse d'une atteinte à la concurrence de la Commission est fondée sur l'hypothèse sous-jacente que le marché présente des éléments de coordination avant la concentration. Selon les parties, la conclusion de la Commission selon laquelle la pression concurrentielle exercée par les concurrents ne sera pas suffisante pour empêcher une hausse des prix après la concentration repose sur l'existence d'effets coordonnés.

(40) La Commission note que son hypothèse d'une atteinte à la concurrence est entièrement fondée sur des effets non coordonnés à la fois avant et après la concentration, notamment sur son appréciation de la pression concurrentielle exercée sur l'entité issue de la concentration par ses concurrents dans l'EEE. Dans son appréciation, la Commission fait toutefois remarquer que la concurrence sur le marché des produits laminés à froid dans l'EEE n'est pas aussi intense que ne le laissent supposer les arguments des parties. Plusieurs facteurs pourraient l'expliquer, notamment des faibles coûts de recherche ou de changement supportés par les clients pour changer de fournisseur; des faibles coûts encourus par les fournisseurs pour modifier leur gamme de production; des stratégies de recours à plusieurs fournisseurs par les clients; et un niveau limité mais appréciable de différenciation géographique entre les fournisseurs.

(41) De l'avis de la Commission, la situation avant la concentration correspond à une concurrence non coordonnée entre producteurs de l'EEE. Son hypothèse d'une atteinte à la concurrence ne repose pas sur l'existence d'effets coordonnés avant ou après la concentration.

iv) Recul de la concurrence entre les parties en raison de l'opération

(42) L'opération donne lieu à un chevauchement important des clients mutuels réels des parties. Les chevauchements entre les parties en ce qui concerne les familles de nuances, les finis et des segments importants de clients seront très significatifs.

(43) L'entité issue de la concentration obtiendra un pouvoir accru dans les négociations avec des clients qui se chevauchent. En outre, les stratégies de recours à plusieurs fournisseurs par les clients supposent que l'opération est susceptible de porter plus préjudice à la concurrence qu'une réduction de quatre à trois grands fournisseurs dans un secteur où ce recours à plusieurs fournisseurs est absent.

(44) Le nombre de clients qui ne peuvent acheter qu'auprès des parties est également limité. Pour ces clients, l'opération envisagée aura probablement des effets encore plus négatifs.

(45) En conséquence, l'opération envisagée conduira à un recul important de la concurrence entre les parties.

v) Effets probables, sur les importations, d'une hausse du prix des produits laminés à froid dans l'EEE due à l'opération envisagée

(46) Les importations représentent environ [10-20] % du marché de l'EEE. En 2011, les importations étaient légèrement inférieures aux exportations de l'EEE vers le reste du monde. L'EEE est donc un exportateur net de produits laminés à froid.

(47) Les concurrents non européens importent principalement dans l'EEE par l'intermédiaire de distributeurs indépendants (environ [90-100] % des importations arrivent sur le marché de l'EEE via des distributeurs). En outre, les importations représentent une catégorie d'acteurs ayant un volume de ventes et une présence limités dans l'EEE.

(48) D'après les réponses obtenues lors de la consultation des acteurs du marché réalisée par la Commission, les clients ne considèrent pas les produits laminés à froid provenant d'Asie comme un substitut parfait aux produits laminés à froid provenant de l'EEE. Cela est dû au temps d'attente, aux questions de qualité, aux conditions de paiement et à la gamme de produits disponibles.

(49) La Commission a également estimé que la compétitivité des prix des importations dépendait de plusieurs facteurs variables, notamment les fluctuations du prix du nickel, les taux de change et le rapport coût-avantage relatif de la fonte de nickel.

(50) La consultation des acteurs du marché a également montré qu'il était peu probable que les importations provenant d'Asie exercent, dans un avenir proche, une pression significativement plus forte sur les producteurs européens. Premièrement, POSCO, un puissant concurrent coréen, construit une nouvelle installation de laminage à froid en Turquie, qui fournira principalement le marché turc, et ne devrait pas avoir d'incidence significative sur le marché de l'EEE. Deuxièmement, la compétitivité des coûts des acteurs asiatiques devrait diminuer à l'avenir. L'interdiction des exportations de minerai de nickel en provenance d'Indonésie, notamment, devrait avoir une incidence négative sur la compétitivité des acteurs chinois. Troisièmement, les capacités disponibles des acteurs asiatiques et chinois devraient diminuer à l'avenir.

(51) Des éléments quantitatifs montrent également que la pression exercée par les importations en provenance d'Asie sera vraisemblablement insuffisante pour empêcher une hausse des prix. La Commission reconnaît que ces importations représentent une certaine pression concurrentielle pour les producteurs de l'EEE. Toutefois, les éléments quantitatifs ont démontré que les réactions des importations à une hausse du prix devraient être significativement plus fortes pour éliminer le risque d'une augmentation des prix. Les importations n'exerceront probablement pas une pression suffisante pour empêcher des hausses de prix après la concentration.

vi) Appréciation de la pression concurrentielle exercée par les concurrents européens (Aperam et Acerinox) sur l'entité issue de la concentration

(52) Les concurrents des parties dans l'EEE affichent des niveaux substantiels de capacités de réserve qui, selon les parties, leur permettrait de rendre une hausse des prix après la concentration non rentable pour l'entité issue de la concentration et les inciterait à agir de la sorte.

(53) En ce qui concerne la capacité, l'appréciation de la Commission a montré que la capacité nominale était susceptible d'excéder le niveau de capacité de réserve des concurrents pour les raisons suivantes: i) une utilisation à 100 % de la capacité nominale n'est pas réalisable ni viable à long terme; ii) les possibilités réelles d'expansion des concurrents sont davantage réduites par la mise en réserve et la suspension de capacités; et iii) la surcapacité devrait diminuer naturellement au cours des prochaines années à la suite de la hausse de la demande. Toutefois, la Commission conclut qu'Aperam et Acerinox affichent un certain niveau de capacité de réserve qui pourrait être suffisant pour leur permettre d'accroître suffisamment leur production afin de rendre une hausse des prix après la concentration non rentable pour l'entité issue de la concentration.

(54) Toutefois, la Commission estime que ni Aperam ni Acerinox ne seront encouragées à exercer une concurrence agressive envers l'entité issue de la concentration une fois l'opération effectuée.

(55) Selon les lignes directrices sur l'appréciation des concentrations horizontales (point 9) et la théorie économique de l'appréciation des effets coordonnés, la situation avant la concentration fournit les éléments contrefactuels pertinents pour permettre l'appréciation des concentrations.

(56) En l'espèce, la concurrence sur les prix avant la concentration entre les producteurs européens n'est pas très intense, comme démontré par la coexistence de marges positives et de surcapacités. Cela implique un certain niveau de pouvoir de marché préexistant. Les déclarations des participants au marché confirment l'avis selon lequel la concurrence avant la concentration n'est pas intense. En particulier, les concurrents des parties n'exercent pas une concurrence agressive pour remplir leurs capacités de réserve.

(57) De plus, rien n'indique qu'Aperam et Acerinox commenceront à exercer une concurrence plus agressive après la concentration. Les deux entreprises ont publiquement salué l'opération, ce qui est cohérent avec l'avis selon lequel elles espèrent que la concentration débouchera sur une hausse des prix.

(58) À l'inverse, Aperam et Acerinox pourraient exercer une concurrence moins agressive après la concentration. Premièrement, une hausse du prix par l'entité issue de la concentration réduira la pression concurrentielle sur ses concurrents. Deuxièmement, la réduction du nombre de fournisseurs signifiera que les clients auront moins de poids dans les négociations avec les fournisseurs. Troisièmement, les stratégies de recours à plusieurs fournisseurs par les clients auront pour effet qu'Aperam et Acerinox gagneront des clients et grandiront en conséquence. Quatrièmement, la hausse attendue de la demande devrait réduire les capacités de réserve disponibles des concurrents, les dissuadant ainsi d'exercer une concurrence agressive.

(59) Une évaluation détaillée des incitations des concurrents des parties confirme qu'il ne sera pas rentable pour Aperam et Acerinox de compenser une hausse des prix par l'entité issue de la concentration. En effet, les concurrents des parties n'exercent pas une concurrence agressive avant la concentration et sont peu susceptibles de le faire après.

(60) Compte tenu de ce qui précède, la Commission conclut que les concurrents européens ne sont pas encouragés à augmenter leur production suffisamment pour rendre le prix après concentration non rentable pour l'entité issue de la concentration. En conséquence, ces entreprises n'exercent pas une pression concurrentielle suffisamment forte pour empêcher une hausse des prix après la concentration.

vii) Appréciation des réactions des clients et des distributeurs indépendants et de la puissance d'achat

(61) En ce qui concerne l'évaluation de la réaction probable des distributeurs indépendants à une hausse du prix des produits laminés à froid dans l'EEE, la Commission estime que les distributeurs indépendants, contrairement à ce que les parties font valoir, n'exercent pas une forte pression concurrentielle sur l'entité issue de la concentration.

(62) En ce qui concerne la puissance d'achat, la consultation des acteurs du marché réalisée par la Commission a indiqué que la demande sur le marché de l'acier inoxydable était très fragmentée. En conséquence, les clients n'achètent généralement pas de grandes quantités d'acier inoxydable ou s'ils le font, ils ne représentent pas un pourcentage significatif des ventes des producteurs.

viii) Synergies

(63) En plus des arguments susmentionnés, la Commission a également analysé les effets des synergies potentielles générées par l'opération. La Commission a conclu que ces synergies, même si elles existaient, seraient insuffisantes puisque leur incidence sur les coûts marginaux de l'entité issue de la concentration serait relativement faible.

ix) Appréciation commune des arguments des parties

(64) Une appréciation commune à première vue des arguments défensifs avancés par les parties semble confirmer que ceux-ci ne suffisent pas pour conclure que l'opération ne constitue pas une entrave significative à une concurrence effective.

(65) De plus, la Commission a produit à cet effet un cadre cohérent d'évaluation économique permettant d'apprécier les principaux arguments des parties sur la base de l'inexistence d'effets non coordonnés.

(66) Le modèle prend pour argent comptant les principaux arguments et preuves avancés par les parties dans l'interprétation la plus compétitive et inclut également un exercice de mise en balance globale des synergies des coûts marginaux. Le modèle n'indique en rien que les arguments des parties seront conjointement suffisants pour renverser les conclusions de l'appréciation ci-dessus.

x) Conclusion

(67) Sur la base de l'analyse ci-dessus, la Commission conclut que l'élimination de la concurrence entre les parties à la concentration augmentera le pouvoir de marché de l'entité issue de la concentration. Les facteurs de contrepoids (pression des importations, réactions des concurrents à une hausse potentielle des prix après la concentration, réactions des distributeurs indépendants, synergies des coûts marginaux potentiellement liées à l'opération, puissance d'achat et accès) ne suffiront pas pour empêcher l'entité issue de la concentration d'augmenter les prix après la concentration.

(68) La Commission conclut dès lors que l'opération entravera de manière significative la concurrence effective par la création d'une position dominante sur le marché des produits laminés à froid dans l'EEE.

VIII. ENGAGEMENTS

(69) Le 19 octobre 2012, Outokumpu a offert les engagements finaux suivants:

a) la cession des unités de production d'Inoxum (comprenant toutes les activités de vente et de commercialisation, ainsi que le personnel) sur le site de production d'acier inoxydable de Terni;

b) la cession du centre de service d'acier inoxydable Terninox d'Inoxum à Ceriano Laghetto (Italie);

c) la cession du centre de service d'acier inoxydable de Willich (Allemagne);

d) au choix de l'acheteur, la cession d'un ou de plusieurs centres de service d'acier inoxydable situés en France (à Tours pour Inoxum) et/ou au Royaume-Uni (à Birmingham pour Outokumpu) et des entrepôts de Terninox à Padoue, Ancône, Florence et Bologne (Italie);

e) au choix de l'acheteur, les activités cédées comprendront l'activité de forgeage de Terni (Societa delle Fucine); et

f) au choix de l'acheteur, Outokumpu s'engage à exclure des activités d'investissement la ligne de recuit blanc de Terni LBA2.

(70) En outre, au choix d'Outokumpu, cette dernière et l'acheteur concluront un accord transitoire, aux conditions du marché, par lequel l'acheteur s'engage à fournir à Outokumpu Calvert/Mexinox des bandes noires à chaud produites à Terni.

(71) Les activités cédées n'incluent pas l'activité de fabrication de tubes de Tubificio di Terni, située à Terni.

(72) La Commission estime que les engagements, tels qu'offerts le 19 octobre 2012, sont suffisants pour garantir le maintien de la viabilité des activités cédées tout en réglant les problèmes de concurrence soulevés par l'opération envisagée.

IX. CONCLUSION

(73) La Commission conclut que, sous réserve du respect intégral des engagements offerts par les parties, le projet de concentration ne conduira pas à la création d'un acteur dominant qui aura pour résultat une entrave significative à la concurrence effective sur le marché intérieur ou une part substantielle de celui-ci. Elle déclare par conséquent la concentration compatible avec le marché intérieur et l'accord EEE conformément à l'article 2, paragraphe 2, et à l'article 8, paragraphe 2, du règlement sur les concentrations, ainsi qu'à l'article 57 de l'accord EEE.

(1) JO L 24 du 29.1.2004, p. 1.

(2) JO C 116 du 20.4.2012, p. 4.

(3) Chiffre d'affaires calculé conformément à l'article 5, paragraphe 1, du règlement sur les concentrations et à la communication juridictionnelle codifiée de la Commission concernant le règlement (CE) no 139/2004 relatif au contrôle des opérations de concentration entre entreprises (JO C 95 du 16.4.2008, p. 1).

(4) Affaire IV/M.239, Avesta/British Steel/NCC/AGA/Axel Johnson, du 4 septembre 1992; affaire IV/M.484, Krupp/Thyssen/Riva/Falck/Tadfin/AST, du 21 décembre 1994.

(5) Affaires COMP/M.5211 - Outokumpu/SoGePar du 25 juin 2008; COMP/ECSC.1351 - Usinor/Arbed/Aceralia du 21 novembre 2011 (concernant les produits en acier au carbone).

(6) Voir les lignes directrices sur l'appréciation des concentrations horizontales, point 17. La note de bas de page no 20 précise toutefois également que la question de savoir si une opération de concentration crée ou renforce une position dominante est une question distincte.