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Décisions

Cass. com., 6 septembre 2016, n° 15-15.086

COUR DE CASSATION

Arrêt

Rejet

PARTIES

Demandeur :

Eclatec (SAS)

Défendeur :

Marchal transports (SA)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Mouillard

Rapporteur :

Mme Tréard

Avocat général :

M. Debacq

Avocats :

SCP Waquet, Farge, Hazan, SCP Boré, Salve de Bruneton

T. com. Nancy, du 21 oct. 2010

21 octobre 2010

LA COUR : - Sur le premier moyen : - Attendu, selon l'arrêt attaqué (Nancy, 24 septembre 2014), que la société Eclairage technique Eclatec (la société Eclatec) a confié à la société Marchal transports (la société Marchal) des prestations de transport à compter de l'année 2000 ; que certaines de ces prestations ont fait l'objet d'une convention spécifique conclue en 2005 pour une durée de deux ans, renouvelable après négociations entre les parties ; que par lettre du 3 mars 2009, la société Eclatec a informé la société Marchal de la cessation de leurs relations d'affaires ; que, par acte du 24 septembre 2009, la société Marchal a assigné la société Eclatec, en lui reprochant la résiliation fautive du contrat de 2005 et le caractère brutal de la rupture des prestations habituelles réalisées hors contrat ;

Attendu que la société Eclatec fait grief à l'arrêt de dire qu'elle a rompu brutalement ses relations commerciales avec la société Marchal, pour celles extérieures au contrat du 15 février 2005, et de la condamner à payer des dommages-intérêts à cette dernière alors, selon le moyen : 1°) qu'il incombe à celui qui invoque la brusque rupture d'une relation commerciale établie, de rapporter la preuve d'une relation de cette nature ; qu'en jugeant que la société Eclatec " ne démontr[ait] pas que les prestations commandées à la société Marchal Transports avaient des objets différents, insusceptibles de caractériser une relation commerciale, régulière, significative et stable, au sens [de l'article L. 442-6, I, 5°, du Code de commerce] ", la cour d'appel a inversé la charge de la preuve et a violé l'article 1315 du Code civil, ensemble l'article L. 442-6, I, 5° du Code de commerce ; 2°) que dans ses conclusions d'appel, la société Eclatec faisait valoir que la réduction du volume d'affaires confiée à la société Marchal, intervenue avant la cessation totale des relations commerciales, résultait de la perte par la société Eclatec d'un marché en Italie ; que dès lors, en jugeant que " la société Eclatec ne conteste pas avoir, consécutivement à la résiliation du contrat du 15 février 2005, fortement réduit puis cessé ses relations commerciales non comprises dans cet accord passé avec la société Marchal ", cependant que la société Eclatec soutenait que cette réduction trouvait sa source dans la perte d'un marché et non dans la dénonciation du contrat du 15 février 2005, la cour d'appel a dénaturé les conclusions d'appel de la société Eclatec et a violé l'article 4 du Code de procédure civile ; 3°) que dans ses écritures d'appel, la société Eclatec soulignait le faible poids du courant d'affaires constitué des prestations hors contrat, en indiquant notamment qu'" en 2008, les transports " hors contrat " ne représentaient que 1,5 % de l'activité globale de la société [Marchal Transports] "; que dès lors, en ne recherchant pas, comme elle y était invitée, si le très faible poids de ce courant d'affaires n'excluait pas une brusque rupture lors de la cessation des relations hors contrat, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 442-6, I, 5° du Code de commerce ;

Mais attendu, d'une part, qu'après avoir constaté que la société Eclatec confiait habituellement à la société Marchal des prestations de transport, que les parties entretenaient des relations d'affaires depuis cinq ans lors de la conclusion du contrat du 15 février 2005 et qu'un chiffre d'affaires annuel moyen de 311 300 euros avait été réalisé dans ce cadre par la société Marchal pendant la période 2000-2004, l'arrêt relève que ces relations se sont poursuivies, parallèlement aux prestations servies dans le cadre du contrat et qu'elles ont permis à la société Marchal de réaliser un chiffre d'affaires annuel moyen de 430 158 euros au cours de la période 2006-2008 ; qu'en cet état, la cour d'appel, après avoir rappelé qu'une succession de contrats ponctuels peut suffire à caractériser une relation commerciale établie au sens de l'article L. 442-6, I, 5° du Code de commerce si ces contrats portent sur un même objet, et constaté que la société Eclatec ne démontrait pas que tel n'était pas le cas, n'a pas inversé la charge de la preuve en retenant qu'était ainsi établie l'existence d'une relation suivie, stable et habituelle ;

Attendu, d'autre part, que la société Eclatec avait fait valoir dans ses conclusions qu'à l'époque où elle avait été amenée à dénoncer le contrat de février 2005, en raison de l'échec des négociations antérieures, elle n'avait nullement pour intention d'interrompre toutes relations avec la société Marchal mais que " c'est le comportement adopté par cette dernière et le caractère proprement extravagant de ses prétentions qui l'ont amenée à cesser toutes relations avec elle " ; que la cour d'appel n'a donc pas dénaturé ces écritures en retenant que cette société ne contestait pas avoir, consécutivement à la résiliation du contrat du 15 février 2005, fortement réduit puis cessé ses relations commerciales non comprises dans l'accord passé avec la société Marchal ;

Attendu, enfin, que la cour d'appel n'avait pas à effectuer la recherche inopérante invoquée par la troisième branche, le faible volume d'un courant d'affaires n'ayant pas d'incidence sur la brutalité de la rupture ; d'où il suit que le moyen n'est fondé en aucune de ses branches ;

Et attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur le second moyen, qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;

Par ces motifs : rejette le pourvoi.