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Décisions

CA Paris, Pôle 5 ch. 11, 9 septembre 2016, n° 14-08095

PARIS

Arrêt

Confirmation

PARTIES

Demandeur :

Compagnie d'Affrètement et de Transport (SA)

Défendeur :

Groupe Scutum (SAS)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Birolleau

Conseillers :

Mmes Lis Schaal, Nicoletis

Avocats :

Mes Boccon Gibod, Esquier, Charbonnier, Momiron

T. com. Paris, du 25 févr. 2014

25 février 2014

La SA Compagnie d'Affrètement et de Transport (CAT) exerce son activité dans le domaine de la logistique automobile, en qualité de commissionnaire de transport. Elle achemine des véhicules depuis ou vers ses plate-formes logistiques situées en France et en Europe, pour le compte de constructeurs automobiles.

En 2006, elle a souhaité doter 5 centres situés en France, où elle entrepose des véhicules, d'une infrastructure de sécurité communicante intégrant de la détection d'intrusions ainsi que des services de télé-vidéo surveillance et d'intervention.

A la suite d'un appel d'offres, elle a retenu la proposition conjointe de la SAS G4S télésurveillance et de la SARL Besat.

La société G4S télésurveillance, aux droits de laquelle vient la société Groupe Scutum pour l'avoir acquise puis absorbée dans le cadre d'une transmission universelle de patrimoine en date du 28 novembre 2009, a pour activité la télé vidéo surveillance et l'intervention sur site pour la gestion de la sécurité.

La société Besat a pour activité la mise en place d'infrastructures de sécurité intégrant la détection d'intrusion, la vidéo surveillance, ainsi que les services de maintenance et de supervision de ses infrastructures

Le 11 mai 2006 un contrat tripartite, dénommé " Infrastructures professionnel de sécurité communicante pour le groupe CAT vidéo surveillance et intervention, management de l'infrastructure ", a été conclu entre ces sociétés.

Ce contrat comporte 4 parties : Définition - Dispositions générales - Conditions générales G4S - Conditions générales et particulières Besat.

L'article 1 de la partie 2 du contrat dénommé " Dispositions générales " stipule que les sociétés constituent un groupement conjoint non solidaire pour la durée du contrat et que " chacun des membres du groupement n'est engagé que pour la partie du contrat qu'il exécute ".

L'article 2 de la partie 2 du contrat prévoit que l'objet du contrat est l'exécution de 2 lots de travaux, " Lot 1 : infrastructure de sécurité communicante pour les sites CAT " et " Lot 2 : services de vidéo surveillance, d'intervention et de management des infrastructures ".

La responsabilité de la conception, de l'installation et de la mise en service des infrastructures de sécurité communicantes était confiée à la société Besat, en charge du lot 1.1.

La recette des infrastructures de sécurité communicantes, la prestation de vidéo surveillance, les interventions de maintenance et le management des infrastructures étaient confiés à la société G4S, en charge des lots 1.2, 2.1, 2.2 et 2.3.

L'article 3.2, " Délai d'exécution et durée du contrat " de la partie 2 du contrat stipule " La durée du contrat pour les services de vidéo surveillance, d'interventions et de management des infrastructures est de trente-six (36) mois, à compter de la première des échéances suivantes :

- 30 jours après le prononcé de la recette du premier site, ou,

- le prononcé de la recette du dernier site. "

L'article 2.4-C " Délai/résiliation " de la partie 3 du contrat " Conditions générales G4S " stipule " Le présent contrat " est conclu pour la durée du contrat soit 36 mois à l'issue du déploiement des infrastructures puis renouvelable de 12 mois, en 12 mois par tacite reconduction, sauf résiliation expresse par l'une ou l'autre des parties, par lettre recommandée avec accusé de réception, 3 mois avant l'expiration de chaque période annuelle.

La rupture anticipée du contrat à l'initiative du client, en l'absence de justes motifs dûment constatés (déménagement, vente du bien, perte d'emploi) entraînera automatiquement le versement d'une indemnité par celui-ci, égale au montant des sommes qui auraient normalement été perçues jusqu'à la fin du contrat.'

Le 13 décembre 2007, en raison des retards dans la mise en place des infrastructures de sécurité, les trois sociétés ont signé un "Avenant n° 1" au contrat du 11 mai 2006, afin de modifier et de préciser plusieurs articles du contrat.

La société G4S a conservé la prestation de télésurveillance (lot 2.1), mais a renoncé à fournir la prestation d'intervention (lot 2.2), ainsi que la prestation de management des infrastructures (lot 2.3) qui a été confiée à la société Besat.

L'article 2 de l'avenant n° 1 " Prestation de télésurveillance ", stipule " Par dérogation à l'article 4 du Contrat, les Parties conviennent que les prestations de télésurveillance seront payées sur la base de factures trimestrielles, terme à échoir, à compter du 1er décembre 2007, jusqu'au 31 mars 2010, pour un montant trimestriel de 39 975 euros ".

L'article 3 de l'avenant n° 1 "Prestation de management des infrastructures" stipule " Afin de préciser l'article 3.2 du contrat, les parties conviennent que la prestation de management des infrastructures a démarré le 1er avril 2007 pour une durée de 36 mois.

À ce titre, les prestations de management des infrastructures ont été fournies par G4S et payées par CAT à G4S pour la période allant du 1er avril 2007 à la date des présentes et G4S reste responsable vis-à-vis de CAT de la bonne exécution desdites prestations sur cette période. Besat sera responsable de la bonne exécution des prestations de management des infrastructures à compter des présentes pour la durée restant à courir au titre de cette prestation, soit jusqu'au 31 mars 2010. "

L'article 8.3 de l'avenant n° 1, " Durée de la garantie au titre du management des infrastructures ", " Par dérogation au Contrat, les Parties conviennent que la garantie fournie par Besat à CAT au titre de la prestation de management des infrastructures court à compter du 1er avril 2007 jusqu'au 31 décembre 2007 et que l'extension de ladite garantie court à compter du 1er janvier 2008 jusqu'au 31 mars 2010. "

Par courrier recommandé du 24 mars 2010, la société CAT a informé la société Groupe Scutum de sa volonté de ne pas reconduire le contrat à son échéance le 30 juin 2010, en visant l'article 2 de l'avenant n° 1.

Par courrier et courriel du 1er avril 2010 la société CAT a demandé à l'intimée de ne pas tenir compte de son précédent courrier qui contenait une erreur et lui a signifié sa " volonté de mettre fin au contrat à son échéance au 31 mars 2010 ".

Par courriel du 8 juin 2010, la société CAT a écrit à la société Groupe Scutum " A notre sens le terme de notre relation d'affaires n'est pas au 30/06/2010. Selon les termes de l'article 2 de l'avenant les prestations de télésurveillance prennent fin au 31/03/2010. Nous souhaitons à compter du 01/04/2010 et jusqu'au 30/06/2010 toujours bénéficier de vos prestations sur ces sites. Pouvez-vous nous confirmer votre accord sur ce point ''.

Par courriel du même jour, le directeur général adjoint de la société Groupe Scutum a répondu " Je suis actuellement en déplacement, je vous confirme mon accord pour le dernier point et reviens vers vous dès demain. "

Par courrier du 11 juin 2010 la société Groupe Scutum a accusé réception du courrier de la société CAT du 24 mars 2010, a pris acte de la résiliation en indiquant que celle-ci prendrait effet le 31 mars 2011.

Par courrier du 24 juin 2010 la société CAT a contesté cette interprétation en indiquant que l'avenant n° 1 prévoyait un terme déterminé fixé au 31 mars 2010 et a dérogé d'une part à l'article 4 intitulé " durée/résiliation " du chapitre 4.2 " conditions générales de vente et de prestation de services " et à l'article C intitulé " durée-résiliation " prévu du chapitre 3 " Conditions générales G4S ".

Le contrat a été exécuté entre les parties jusqu'au 2 juillet 2010.

Par lettre recommandée avec avis de réception du 22 juillet 2010 la société Groupe Scutum, se référant au C de l'article 2. 4 de la troisième partie du contrat, a répondu que la société CAT avait rompu brutalement le contrat au cours de sa période de reconduction courant du 1er avril 2010 au 31 mars 2011 et a demandé le paiement de la somme de 39 975 euros HT au titre de la facture du deuxième trimestre 2010, ainsi que la somme de 119 924 euros correspondant aux sommes dues au titre de la rupture anticipée du contrat pour la période du 1er juillet 2010 au 31 mars 2011.

Par lettre recommandée avec avis de réception du 21 septembre 2010, la société CAT a acquiescé au paiement de la facture d'un montant de 39 975 euros HT, mais a refusé tout paiement " au titre de prestations qui seraient postérieures au 30 juin 2010 dès lors que notre contrat a atteint son terme le 30 mars et que nos relations se sont définitivement interrompues, d'un commun accord, le 30 juin ".

Par acte du 24 septembre 2012 la société Groupe Scutum a assigné la société CAT devant le Tribunal de commerce de Nanterre qui, par jugement du 1er mars 2013, s'est déclaré incompétent au profit du Tribunal de commerce de Paris.

Par jugement du 25 février 2014, le tribunal de commerce a :

- condamné la société Compagnie d'Affrètement et de Transport (CAT) à verser à la société Groupe Scutum la somme de 15 094,86 euros TTC au titre des prestations impayées nettes du dépôt de garantie et la somme de 119 925 euros, à titre d'indemnité contractuelle de rupture du contrat du 11 mai 2006 ;

- débouté la société Groupe Scutum de l'ensemble de ses demandes fondées sur l'application de l'article L. 442-6, I, 5° du Code de commerce ;

- débouté les parties de leurs demandes réciproques de dommages et intérêts ;

- condamné la société Compagnie d'Affrètement et de Transport (CAT) à verser à la société Groupe Scutum la somme de 5 000 euros sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile ;

- ordonné l'exécution provisoire de la présente décision, nonobstant appel et sans constitution de garantie ;

- débouté les parties de leurs demandes autres ;

- condamné la société Compagnie d'Affrètement et de Transport aux dépens.

Par déclaration du 10 avril 2014 la société CAT a interjeté appel de ce jugement.

Vu les dernières conclusions, déposées et notifiées le 6 avril 2016, par lesquels la société CAT demande à la cour de :

Vu les articles 1234, 1147 et 1382 du Code civil,

Vu l'article L. 442-6 du Code de commerce,

- confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a condamné la société Groupe Scutum à restituer à la société Compagnie D'affrètement Et De Transport la somme de 33 715,24 euros correspondant au dépôt de garantie ;

- confirmer le jugement en ce qu'il a débouté la société Groupe Scutum de l'ensemble de ses demandes fondées sur l'application de l'article L. 442-6, I, 5° du Code de commerce ainsi que de ses demandes de dommages et intérêts ;

Mais :

- infirmer le jugement entrepris en ce qu'il a condamné la société Compagnie d'Affrètement et de Transport à payer à la société Groupe Scutum la somme de 119 925 euros à titre d'indemnité contractuelle de rupture du contrat du 11 mai 2006 ;

- infirmer le jugement en ce qu'il a condamné la société Compagnie d'Affrètement et de Transport à payer à la société Groupe Scutum la somme de 5 000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile ;

- infirmer le jugement en ce qu'il a rejeté la demande de condamnation de la société Groupe Scutum au paiement de dommages et intérêts formulée par la société Compagnie D'affrètement Et De Transport ;

Et, statuant à nouveau :

- condamner la société Groupe Scutum à payer à la société Compagnie D'affrètement Et De Transport la somme de 20 000 euros à titre de dommages et intérêts ;

- ordonner le remboursement par la société Groupe Scutum de la somme de 140 019,86 euros payée par la société Compagnie d'Affrètement et de Transport à la société Groupe Scutum à la suite du jugement entrepris, au titre de l'exécution provisoire, avec intérêts au taux légal à compter du 10 avril 2014, date du règlement effectué par la société Compagnie d'Affrètement et de Transport, augmenté de cinq points à l'issue d'un délai de deux mois à compter du paiement fait par la société Compagnie D'affrètement Et De Transport ;

- condamner la société Groupe Scutum à payer à la société Compagnie d'Affrètement et de Transport la somme de 25 000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile ;

- condamner la société Groupe Scutum aux entiers dépens de première instance et d'appel, à recouvrer par la Selarl Lexavoué Paris-Versailles en application des dispositions de l'article 699 du Code de procédure civile.

Vu les dernières conclusions, déposées et notifiées le 18 mars 2016, par lesquelles la société Groupe Scutum demande à la cour de :

Vu les articles 1134 du Code civil, L. 442-6, I, 4° et 5°, du Code de commerce

A titre principal,

- confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a condamné la société Compagnie d'Affrètement et de Transport à la société Groupe Scutum la somme de 48 810 euros au titre de la prestation de télésurveillance au cours du deuxième trimestre 2010 et de 119 925 euros au titre de l'indemnité contractuelle de rupture du contrat du 11 mai 2006 ;

- confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a condamné la société Compagnie d'Affrètement et de Transport à payer à la société Groupe Scutum la somme de 5 000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile ;

- infirmer le jugement entrepris en ce qu'il a rejeté la demande de condamnation de la société Groupe Scutum au paiement de dommages et intérêts ;

En conséquence,

- condamner la société Groupe Scutum à payer à la société Compagnie d'Affrètement et de Transport la somme de 50 000 euros à titre de dommages et intérêts ;

- infirmer le jugement entrepris en ce qu'il a condamné la société Groupe Scutum à payer à la société Compagnie d'Affrètement et de Transport la somme de 33 715,24 euros correspondant au dépôt de garantie.

En conséquence,

- juger que la somme de 19 814,27 euros HT (14 864 euros HT + 4 949,27 euros HT) a été restituée par la société Groupe Scutum à la société Compagnie D'affrètement Et De Transport et que le reliquat du dépôt de garantie entre les mains de la société Groupe Scutum restera acquis à la société Groupe Scutum à titre d'indemnité ;

A titre subsidiaire,

- infirmer le jugement entrepris en ce qu'il a rejeté la demande de condamnation de la société Compagnie D'affrètement Et De Transport à verser à la société Groupe Scutum la somme de 34 036 euros, au titre de dommages et intérêts pour rupture abusive de relations commerciales établies ;

Par ailleurs,

- condamner la société Compagnie d'Affrètement et de Transport à payer à la société Groupe Scutum la somme de 10 000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile ;

- condamner la société Compagnie d'Affrètement et de Transport aux entiers dépens de première instance et d'appel à recouvrer par Maître Marion Charbonnier en application des dispositions de l'article 699 du Code de procédure civile.

Cela étant exposé, LA COUR

Sur le contrat du 11 mai 2006

Considérant que la société Compagnie d'Affrètement et de Transport expose que les parties n'ont jamais envisagé de reconduction du contrat, fut-elle tacite, puisqu'au contraire elles en fixaient le terme au 31 mars 2010 ; que le tribunal a mal interprété les termes du contrat et l'intention des parties en considérant, à tort, que l'article 2.4-C de la partie 3 du contrat contient une clause de tacite reconduction avec obligation de dénonciation du contrat trois mois avant son expiration, qui trouvait à s'appliquer et, qu'à défaut de dénonciation, le contrat s'est poursuivi pendant une période d'un an après son terme ;

Considérant que la société Compagnie D'affrètement Et De Transport expose également que les stipulations de l'article 3.2 de la partie 2 du contrat, qui se lisent et se comprennent avec celles de l'article 3 de l'avenant et sont constitutives des conditions particulières du contrat, prévalent à ce titre sur les conditions générales de vente de la société G4S figurant à l'article 2.4-C de la partie 3 du contrat ; que le contrat, qui contient un terme extinctif de 36 mois prévu à l'article 3.2 figurant dans la partie 2 du contrat, est à durée déterminée et prend fin automatiquement à l'échéance du terme, soit le 31 mars 2010 ; que le terme exact du contrat a été précisé par l'avenant qui a déterminé le point de départ de la durée du contrat, le 1er avril 2007 et, par conséquent, son terme au 31 mars 2010 ; qu'il est contradictoire de prévoir, dans un même contrat, un terme extinctif à une date donnée et une obligation de préavis à défaut duquel le contrat est automatiquement reconduit ;

Considérant que l'appelante soutient qu'au surplus, il résulte d'une lecture stricte de l'article 2.4-C précité que l'obligation de respecter un préavis de 3 mois pour procéder à la résiliation du contrat s'applique uniquement dans l'hypothèse où, à la suite d'un renouvellement tacite, une des parties envisage de résilier le contrat ; que, même s'il était fait application de cet article, aucune obligation de dénoncer formellement le contrat au moins trois mois avant le 31 mars 2010, soit au plus tard le 31 décembre 2009, ne pesait sur l'appelante ; que la poursuite exceptionnelle des relations contractuelles n'a été acceptée par les parties que pour une durée limitée de 3 mois et ne valait pas prorogation du contrat pour une durée de 12 mois ;

Considérant que la société Groupe Scutum expose que la société Compagnie d'Affrètement et de Transport a rompu de façon anticipée et fautive le contrat en violation des dispositions contractuelles ; que le contrat a été conclu pour une durée de 36 mois, expirant le 31 mars 2010 renouvelable pour des périodes successives d'un an ; que ce n'est qu'au mois de juin 2010, que l'appelante lui a indiqué qu'elle considérait unilatéralement que le contrat avait pris fin rétroactivement au 31 mars 2010 et qu'elle souhaitait bénéficier de ses prestations jusqu'au 30 juin 2010, alors que le contrat était déjà tacitement reconduit pour une période d'un an ; que, pour mettre fin au contrat, l'appelante aurait dû l'informer par courrier recommandé avec accusé de réception 3 mois avant l'échéance, soit le 31 décembre 2010 au plus tard ;

Considérant que la société Groupe Scutum soutient que l'avenant du 13 décembre 2007, qui a fixé le point de départ du contrat au 1er avril 2007, pour déterminer le terme de la période initiale de 36 mois, ainsi fixée au 31 mars 2010, n'a pas modifié la possibilité pour les parties de poursuivre tacitement leurs relations contractuelles au-delà de cette date, comme prévu à l'article 2.4 C du contrat ; que les relations contractuelles s'étant poursuivies au-delà du délai initial de 36 mois, les parties se sont trouvées engagées pour une nouvelle période de 12 mois, expirant le 31 mars 2011 ; que les conditions particulières figurant dans la partie 3 " Conditions générale G4S " priment sur les dispositions générales de la partie 2 intitulées " Dispositions générales " ; que le 1er avril 2010, le contrat a été tacitement reconduit pour une période de 12 mois, faute pour la société Compagnie d'Affrètement et de Transport d'avoir fait préalablement connaître son intention de mettre un terme au contrat au 31 mars 2010, et s'est poursuivi normalement jusqu'au 2 juillet 2010, date à laquelle les installations ont été déconnectées par l'appelante ;

Mais considérant que le contrat tripartite signé le 11 mai 2006 contient, dans sa partie 2, intitulée " Dispositions générales ", les conditions particulières du contrat négociées entre les trois sociétés cocontractantes ; que la partie 3, intitulée " Conditions générale G4S ", ainsi que la partie 4, intitulée " Conditions générales et particulières Besat ", contiennent les conditions générales de vente des sociétés G4S et Besat, applicables par défaut ; qu'il apparaît, à la lecture du contrat et de l'avenant, que la commune intention des parties était de faire prévaloir la partie 2, soit les conditions particulières spécifiques au contrat, sur les parties 3 et 4, soit les conditions générales de vente des sociétés prestataires, qui complètent la partie 2 du contrat, sans pouvoir y déroger ;

Considérant que, à l'article 4 " Prix " du chapitre 2 de la partie 2 du contrat, les cocontractantes ont pris soin de rappeler expressément que, en cas de divergence, les stipulations de la partie 2 du contrat prévalent sur celles des parties 3 et 4, en indiquant " Nonobstant des dispositions des conditions générales de G4S et Besat, fournies respectivement au chapitres 3 et 4.2 du présent contrat. Nonobstant des dispositions des conditions particulières de Besat, fournit au chapitre 4.1 du présent contrat, le prix des différents lots est fourni dans le tableau ci-dessous. ";

Considérant que ce même rappel express n'a pas été fait par les parties concernant l'article 3 " Délais d'exécution et durée du contrat " de la partie 2 ; que cependant la commune intention des parties de faire prévaloir les stipulations de l'article 3.2 de la partie 2 sur celles de l'article 2. 4 C de la partie 3 ne fait aucun doute, puisqu'aucune des cocontractantes ne soutient que la prise d'effet du contrat applicable est celle figurant au 1er alinéa de l'article 2. 4 C de la partie 3 du contrat, mais s'accordent à dire que seul est applicable l'article 3.2 de la partie 2, modifié par l'avenant, qui prévoit des stipulations différentes de celles stipulées à l'article 2. 4 C de la partie 3 ; que les stipulations contenues dans la partie 2 du contrat et dans l'avenant priment sur celles contenues dans la parties 3 du contrat ;

Considérant que les stipulations de l'article 9 de l'avenant, qui précisent "Le présent avenant s'incorpore audit contrat auquel il demeure annexé pour ne faire qu'un et prend effet à la date des présentes", ne rendent pas applicables les stipulations contenues dans les parties 3 et 4 du contrat qui sont contraires ou non prévues par la partie 2 du contrat ;

Considérant que l'article 3.2, relatif au lot 2, qui stipule " La durée du contrat pour les services de vidéo surveillance, d'intervention et de management des infrastructures est de 36 mois à compter de la première des échéances suivantes. ", prévoit un délai fixe d'exécution du contrat ainsi que le point de départ de ce délai, mais pas de renouvellement du contrat par tacite reconduction ; que les stipulations de l'article 3.2 de la partie 2 du contrat sont partiellement en contradiction avec celles de l'article 2. 4 C des conditions générales de vente de la société G4S, qui prévoit la même durée de 36 mois, mais un point de départ du délai différent, ainsi qu'une tacite reconduction du contrat et des modalités de résiliation ;

Considérant que 18 mois après la signature du contrat, les parties ont signé le 13 décembre 2007 un avenant, dénommé Avenant n° 1, aux fins " d'adapter le contrat sur certains points afin de faciliter son exécution par chacune des parties " ; que, dans le II " Modifications au contrat intéressant les trois parties " de l'avenant, l'article 3 stipule " Afin de préciser l'article 3.2 du contrat, les parties conviennent que la prestation de management des infrastructures a démarré le 1er avril 2007 pour une durée de 36 mois ", l'article précise que " A ce titre, les prestations de management des infrastructures ont été fournies par G4S et payées par CAT à G4S pour la pertinente courant du 1er avril 2007 à la date des présentes. Besat sera responsable de la bonne exécution des prestations de management des infrastructures à compter des présentes, pour la durée restant à courir au titre de cette prestation, soit jusqu'au 31 mars 2010 " ; que l'article 3 de l'avenant, opposable tant à la société G4S qu'à la société Besat, a expressément mis un terme la contradiction existant entre les articles 3.2 et 2.4 C précités du contrat, en réaffirmant le délai fixe de 36 mois, en fixant le point de départ de ce délai au 1er avril 2007 et la date d'expiration du contrat au 31 mars 2010 et en excluant un renouvellement du contrat par tacite reconduction ;

Considérant que d'un commun accord entre les parties, conformément aux stipulations contractuelles, le contrat signé le 11 mai 2006 a pris fin le 31 mars 2010, sans qu'il soit nécessaire à la société Compagnie d'Affrètement et de Transport d'en informer au préalable sa cocontractante ou de respecter un délai de préavis, le contrat ayant pris fin de plein droit à l'arrivée du terme ; que les courriers adressés les 24 mars et 1er avril 2010 par l'appelante à la société Groupe Scutum sont sans incidence sur l'effet extinctif produit par le terme du contrat ;

Considérant que, le contrat ayant expressément exclu la possibilité de renouvellement par tacite reconduction, la circonstance que les parties aient volontairement poursuivi l'exécution du contrat après le 31 mars 2010, jusqu'au 2 juillet 2010, afin de permettre à la société Compagnie d'Affrètement et de Transport d'assurer une transition avec ses nouveaux prestataires, n'a pas eu pour effet de renouveler automatiquement le contrat pour une nouvelle période d'une année ; qu'il résulte des courriels échangés le 8 juin 2010 entre la société Compagnie d'Affrètement et de Transport et la société Groupe Scutum que cette dernière a expressément donné son accord pour prolonger les prestations de télésurveillance jusqu'au 30 juin 2010 ;

Considérant que l'application des stipulations de l'article 2.4 C de la partie 3 du contrat du 11 mai 2006, dérogatoires à l'article 3.2 de la partie 2, a été écartée par les parties ; qu'en conséquence, malgré la poursuite des relations d'affaires entre les parties jusqu'au 2 juillet 2010, le contrat n'a pas fait l'objet d'une reconduction tacite, l'appelante n'était pas tenue à un préavis contractuel, ni au paiement d'une indemnité contractuelle de rupture anticipée ; que le jugement doit être infirmé en ses dispositions ayant condamné la société Compagnie d'Affrètement et de Transport à verser à la société Groupe Scutum la somme de 119 925 euros, à titre d'indemnité contractuelle de rupture du contrat du 11 mai 2006 ;

Sur la rupture brutale de relations commerciales établies

Considérant que la société Groupe Scutum expose, à titre subsidiaire, que la résiliation anticipée du contrat par la société Compagnie d'Affrètement et de Transport est constitutive d'une rupture brutale de relations commerciales établies ; que l'appelante n'a respecté aucun délai de prévenance raisonnable pour lui signifier la fin des relations contractuelles ; que le délai raisonnable était de 6 mois et qu'il doit lui être alloué à titre de dommages et intérêts la somme de 34 034 euros correspondant à la perte de marge brute pendant cette période de 6 mois ;

Considérant que la société Compagnie d'Affrètement et de Transport répond que la demande incidente de l'intimée est mal fondée ; qu'elle n'a pas tenté d'obtenir des conditions commerciales avantageuses sous la menace d'une rupture des relations commerciales, l'intimée ne justifie d'ailleurs d'aucune menace ; que les relations entre les parties n'ont pas été rompues brutalement, le contrat ayant pris fin à son terme, sans qu'il soit nécessaire de prévoir de préavis, ni de notification particulière ; que la rupture n'était ni imprévisible, ni soudaine, ni violente ;

Considérant que le domaine d'application l'article L. 442-6, I, 5° du Code de commerce est limité aux cas où la relation commerciale entre les parties revêtait avant la rupture un caractère suivi, stable et habituel et où la partie victime de l'interruption pouvait raisonnablement anticiper pour l'avenir une certaine continuité du flux d'affaire avec son partenaire commercial ;

Considérant qu'en l'espèce, le contrat du 11 mai 2006 et l'avenant du 13 décembre 2007 prévoyaient expressément un terme extinctif au contrat et excluaient une possibilité de renouvellement par tacite reconduction du contrat ; que la poursuite volontaire, d'un commun accord, du contrat durant trois mois après son terme est insuffisante à établir que l'intimée pouvait raisonnablement croire que le contrat allait se poursuivre dans l'avenir, alors que dès le 24 mars 2010, l'appelante lui avait écrit pour lui signifier sa volonté de mettre un terme au contrat à son terme ; que la société Groupe Scutum doit être déboutée de ses demandes fondées sur les dispositions de l'article L. 442-6, I, 5° du Code de commerce ;

Considérant que l'intimée se prévaut également des dispositions de l'article L. 442-6, I, 4° du Code de commerce ; que toutefois aucune pièce ne corrobore ses affirmations selon lesquelles la société Compagnie d'Affrètement et de Transport aurait tenté de négocier de nouvelles conditions tarifaires et ne lui aurait fait connaître sa volonté de résilier rétroactivement le contrat que pour obtenir de meilleures conditions financières ; que la société Groupe Scutum doit être déboutée de ses demandes fondées sur les dispositions de l'article L. 442-6, I, 4° du Code de commerce ;

Sur la restitution du dépôt de garantie

Considérant que la société Groupe Scutum expose qu'elle a remboursé à la société Compagnie d'Affrètement et de Transport les sommes de 14 865 euros HT et de 4 949,27 euros HT, soit 5 919,33 euros TTC, en remboursement du dépôt de garantie, d'un montant de 28 190 euros HT, soit 33 715,24 euros TTC, qui lui a été versé par l'appelante en application de l'article 5.2.1 du chapitre 2 du contrat ; que le reliquat du dépôt de garantie restant entre ses mains est de 8 375,73 euros ; que, compte tenu de la particulière mauvaise foi de l'appelante, la somme de 8 375,73 euros doit lui rester acquise à titre d'indemnité ;

Considérant que la société Compagnie d'Affrètement et de Transport soutient que la société Groupe Scutum reste lui devoir la somme de 33 715,24 euros TTC, qu'elle lui a versé à titre de dépôt de garantie ; que l'intimée ne rapporte pas la preuve d'avoir remboursé la somme de 14 865 euros, la seule signature de l'avenant étant insuffisante à valoir reconnaissance du paiement contesté ; que les pièces produites par l'appelante pour justifier du paiement de la somme de 5 919,33 euros TTC ne sont pas probantes ;

Mais considérant que la société Groupe Scutum ne produit aucun document justifiant qu'elle a exécuté l'article 5 de l'avenant du 13 décembre 2007, aux termes duquel elle devait restituer à l'appelante la somme de 14 865 euros HT ; qu'en revanche l'intimée rapporte la preuve du paiement à l'appelante de la somme de 5 919,33 euros, par la production d'un relevé bancaire BNP faisant apparaître le débit d'un chèque 0001179 d'un montant de 5 919,33 euros, le 2 février 2008, et d'un extrait de compte CAT retraçant le débit du chèque 0001179 émis le 19 décembre 2007, à titre de restitution du dépôt de garantie, et déposé le 25 janvier 2008 à la BNP ;

Considérant que la société Groupe Scutum reste redevable envers la société Compagnie d'Affrètement et de Transport de la somme de 27 795,91 euros au titre du dépôt de garantie que l'intimée, qui invoque sans en justifier la mauvaise foi de l'appelante pour sollicité que le reliquat lui reste acquis, doit être débouté de sa demande ; que le jugement doit être infirmé seulement en ce qu'il a fixé à la somme de 33 715,24 euros le montant de la restitution due par l'intimée au titre du dépôt de garantie ;

Sur la demande de dommages et intérêts de la société Groupe Scutum

Considérant que la société Groupe Scutum sollicite la condamnation de la société Compagnie d'Affrètement et de Transport à lui verser la somme de 50 000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation des préjudices financiers qu'elle a subi du fait de la mauvaise foi de l'appelante dans la gestion de la fin des relations contractuelles, en l'informant de la résiliation du contrat postérieurement à son échéance, ce qui l'a empêchée de chercher de nouveaux marchés et lui a causé un manque à gagner ;

Considérant que la société Compagnie d'Affrètement et de Transport répond que la fin des relations contractuelles a été notifiée à l'intimée le 24 mars 2010, soit avant le terme du contrat et que la demande de dommages et intérêts fait double emploi avec les demandes formées par l'intimée au titre de l'indemnité de rupture contractuelle et, subsidiairement, au titre de la rupture brutale des relations commerciales établies ;

Mais considérant que le contrat du 11 mai 2006 comportait un terme extinctif au 31 mars 2010 ; que par courrier du 24 mars 2010 l'appelante a fait connaître à l'intimée son attention de ne pas poursuivre le contrat au-delà de son terme ; que l'erreur involontaire de date figurant dans le courrier du 24 mars 2010 a été rectifiée par courrier du 1er avril 2010 ; que la société Groupe Scutum, qui ne rapporte pas la preuve de la mauvaise foi reprochée à la société Compagnie d'Affrètement et de Transport doit être débouté de sa demande de paiement de dommages et intérêts ; que le jugement doit être confirmé de ce chef ;

Sur la demande de dommages et intérêts de la société Compagnie d'Affrètement et de Transport

Considérant que la société Compagnie d'Affrètement et de Transport sollicite la condamnation de la société Groupe Scutum à lui verser la somme de 20.000 euros à titre de dommages et intérêts en raison de la mauvaise foi de l'intimée, qui a exercé un recours en justice abusif afin de monnayer la fin des relations contractuelles ;

Mais considérant que la société Compagnie d'Affrètement et de Transport, qui ne démontre pas que la société Groupe Scutum ait abusé de son droit d'agir en justice, doit être déboutée de sa demande de dommages et intérêts ; que le jugement doit être confirmé de ce chef ;

Par ces motifs : LA COUR : Confirme le jugement, sauf en ses dispositions ayant condamné la SA Compagnie d'Affrètement et de Transport à verser à la SAS Groupe Scutum la somme de 15 094,86 euros TTC au titre des prestations impayées nettes du dépôt de garantie et la somme de 119 925 euros, à titre d'indemnité contractuelle de rupture du contrat du 11 mai 2006. Et statuant à nouveau, dans cette limite, Déboute la SAS Groupe Scutum de sa demande au titre de l'indemnité contractuelle de rupture du contrat du 11 mai 2006, Dit que le présent arrêt emporte obligation pour la SAS Groupe Scutum de procéder au remboursement des sommes reçues de la SA Compagnie d'Affrètement et de Transport, au titre de l'indemnité contractuelle de rupture en exécution du jugement partiellement infirmé, Condamne la SA Compagnie d'Affrètement et de Transport à verser à la SAS Groupe Scutum la somme de 48 810,10 euros au titre de la prestation de télésurveillance du deuxième trimestre 2010, Condamne la SAS Groupe Scutum à verser à la SA Compagnie d'Affrètement et de Transport la somme de 27 795, 91 euros à titre de restitution du reliquat du dépôt de garantie, Et y ajoutant, Condamne la SAS Groupe Scutum à verser à la SA Compagnie d'Affrètement et de Transport la somme de 7 000 euros sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile ; Condamne la SAS Groupe Scutum aux dépens d'appel, qui pourront être recouvré en application de l'article 699 du Code de procédure civile.