CA Paris, Pôle 5 ch. 1, 4 octobre 2016, n° 15-04193
PARIS
Arrêt
Infirmation partielle
PARTIES
Demandeur :
Goyard St-Honoré (SA)
Défendeur :
Fauré Le Page Paris (SAS) , Fauré Le Page Maroquinier (SAS)
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Rajbaut
Conseillers :
Mmes Auroy, Douillet
Avocats :
Mmes Grappotte-Benetreau, Dassonville, Hauser, Hardouin, Guillemin
EXPOSÉ DU LITIGE
La SA Goyard St-Honoré est l'un des plus anciens malletiers français qui conçoit, fabrique et commercialise des malles, des articles de voyage, des articles de maroquinerie et des créations dédiées aux animaux de compagnie, réalisant le plupart de ses modèles dans une toile tissée et enduite, ornée d'un motif à chevrons, créée en 1892 et qu'elle appelle "Goyardine" ;
Cette société est titulaire des marques suivantes :
- marque française figurative n° 1 633 326 reproduisant sur fond noir, des chevrons blancs et jaunes traversés de lignes verticales grises et jaunes, déposée le 20 janvier 1981 pour désigner des produits et services des classes 3, 14, 16, 18, 24, 25 et 34, telle que reproduite ci-dessous :
- marque française semi-figurative n° 3 365 528 reproduisant sur fond noir, des chevrons beige et marron avec "E. Goyard" en beige et "Honoré Paris" en marron, déposée le 16 juin 2005 pour désigner des produits et services des classes 3, 14, 16, 18, 24, 25 et 34, telle que reproduite ci-dessous :
- marque communautaire semi-figurative n° 004 748 729 reproduisant sur fond noir, des chevrons beige et marron avec "E. Goyard" en beige et "Honoré Paris" en marron, déposée le 28 novembre 2005 pour désigner des produits des classes 3 et 18, telle que reproduite ci-dessous :
La SAS Fauré Le Page Paris, immatriculée au RCS depuis le 20 octobre 2009, a pour activité le commerce de détail et d'habillement ;
Cette société a acquis le 28 octobre 2009 la marque française semi-figurative "Fauré Le Page" n° 1 534 660, désignant des produits et services des classes 8, 13, 18 et 25, telle que reproduite ci-dessous
Elle a également déposé le 17 juin 2011 :
- la marque française figurative n° 3 839 811 pour désigner des produits des classes 3, 9, 14, 16, 18, 24 et 25, telle que reproduite ci-dessous :
- la marque française semi-figurative "Fauré Le Page Paris 1717" n° 3 839 809 pour désigner des produits des classes 3, 9, 14, 16, 18, 24 et 25, telle que reproduite ci-dessous :
Cette société a également procédé le 05 décembre 2011, sous priorité de ses marques françaises, au dépôt des marques internationales semi-figurative "Fauré Le Page Paris 1717" n° 1 105 847 et figurative 1 105 848 pour désigner des produits et services des classes 3, 9, 14, 16, 18, 24 et 25, telles que reproduites ci-dessous :
La SAS Fauré Le Page Maroquinier, immatriculée au RCS depuis le 20 juin 2011, a pour activité le commerce de détail de maroquinerie et d'articles de voyage, elle bénéficie depuis le 24 avril 2012 d'une concession de licence de la marque n° 3 839 811 ;
Cette société a ouvert le 15 septembre 2012 une boutique située adresse [...] elle commercialise des produits fabriqués en toile "Fauré Le Page 1717" et a ouvert en juillet 2013 un corner aux Galeries Lafayette de Paris ;
Estimant que ces dépôts et cet usage portaient atteinte à ses droits antérieurs, la SA Goyard St-Honoré a adressé le 21 mars 2012 aux sociétés Fauré Le Page Paris et Fauré Le Page Maroquinerie une mise en demeure puis, autorisée par ordonnance sur requête du 04 octobre 2012, a fait procéder, le 5 octobre 2012, à une saisie-contrefaçon dans le magasin de la SAS Fauré Le Page Maroquinerie ainsi qu'au siège de cette société, avant de faire assigner ces deux sociétés le 26 octobre 2012 devant le tribunal de grande instance de Paris en contrefaçon de marques, en contrefaçon de droits d'auteurs de quatre sacs dénommés "Ambassade", "Comores", "Boeing 30" et "Saint Louis", ainsi qu'en concurrence déloyale et parasitisme ;
Reconventionnellement les sociétés Fauré Le Page Paris et Fauré Le Page Maroquinerie ont présenté des demandes d'annulation de la marque n° 1 633 326 et/ou de déchéance des droits sur les marques n° 1 633 326 et 3 365 528 ;
Par jugement contradictoire du 30 janvier 2015, le tribunal de grande instance de Paris a :
- rejeté la demande d'annulation de la marque n° 1 633 326,
- dit les sociétés Fauré Le Page Paris et Fauré Le Page Maroquinerie irrecevables à agir en déchéance des droits de la SA Goyard St-Honoré sur les marques n° 1 633 326 et 3 365 528 pour les articles pour fumeurs (marque n° 1 633 326) et articles pour fumeurs non en métaux précieux à savoir cendriers, briquets, porte-cigares, porte-cigarettes (marque n° 3 365 528),
- prononcé la déchéance des droits de la SA Goyard St-Honoré sur la marque n° 1 633 326 déposée le 20 janvier 1981, pour l'ensemble des produits et services désignés à l'enregistrement, à l'exception des articles pour fumeurs, à compter du 28 "février" (sic, en réalité décembre) 1996,
- prononcé la déchéance des droits de la SA Goyard St-Honoré sur la marque n° 3 365 528 compter du 18 novembre 2010 pour les produits suivants : "Savons de toilette ; parfums ; eaux de toilette et de Cologne ; huiles essentielles à usage personnel ; cosmétiques ; laits, lotions, émulsions et crèmes à usage cosmétique pour le visage et pour le corps ; crèmes, gels, huiles pour le bain à usage non médical ; déodorants à usage personnel ; préparations pour les cheveux à usage non médical nommément laques, gels, crèmes, baumes, mousses et shampooings. Métaux précieux et leurs alliages (autres qu'à usage dentaire) et produits en ces matières ou en plaqué à savoir bagues (bijouterie), boucles d'oreilles (bijouterie), bracelets (bijouterie), breloques (bijouterie), broches (bijouterie), chaînes (bijouterie), chaînes de montres, colliers (bijouterie), épingles (bijouterie), parures (bijouterie), épingles de parures (bijouterie), anneaux (bijouterie), boucles en métaux précieux, ornements de chapeaux en métaux précieux, écrins en métaux précieux, coffrets à bijoux en métaux précieux ; joaillerie, bijouterie, pierres précieuses, pierres fines, perles (bijouterie) ; bijouterie fantaisie ; horlogerie et instruments chronométriques ; montres, bracelets de montres, montre-bracelet. Papier ; carton ; articles en papier et articles en carton à savoir cartonnages, sacs, sachets, enveloppes, pochettes, pour l'emballage, en papier ; produits de l'imprimerie, à savoir livres, imprimés, journaux, revues, périodiques, magazines, manuels d'orientation, affiches, photographies, matériel d'instruction ou d'enseignement (à l'exception des appareils) ; articles de bureau (à l'exception des meubles) ; instruments à écrire à savoir stylos, stylos bille, stylos mine. Sacs-housses de voyage pour vêtements, sacs à dos, sacs de plage, sacs d'écoliers, cartables, étuis pour clés (maroquinerie), parapluies, parasols, ombrelles, cannes. Tissus à usage textile et produits textiles à savoir linge de bain [à l'exception de l'habillement], linge de maison, linge de lit, linge de table [en matières textiles], linge de toilette, mouchoirs de poche [en matières textiles]. Vêtements (habillement) pour femmes, hommes et enfants à savoir robes, jupes, jupons, jupe-culotte, costumes, pantalons, shorts, bermudas, caleçons, chemises, chemisiers, corsages, tee-shirts, sweatshirts, gilets, vestes, cardigans, pullovers, chandails, parkas, anoraks, manteaux, gabardines, imperméables, fourrures, écharpes, châles, foulards, gants, cravates, ceintures (habillement), chaussettes, bas, collants, sous-vêtements, pyjamas, robes de chambre, maillots de bain, peignoirs de bain ; chaussures (à l'exception des chaussures orthopédiques), à savoir souliers, sandales, bottes, bottines, chaussons, pantoufles ; chapeaux, bérets, casquettes",
- débouté la SA Goyard St-Honoré de ses demandes en contrefaçon de marque, et des demandes subséquentes,
- rejeté les demandes d'annulation des marques de la SAS Fauré Le Page Paris pour réceptivité,
- dit la SA Goyard St-Honoré recevable à agir sur le fondement du droit d'auteur,
- débouté la SA Goyard St-Honoré de ses demandes en contrefaçon de droits d'auteur,
- débouté la SA Goyard St-Honoré de ses demandes fondées sur la concurrence déloyale et le parasitisme,
- débouté les sociétés Fauré Le Page Paris et Fauré Le Page Maroquinier de leurs demandes reconventionnelles en dommages et intérêts pour procédure abusive,
- dit que sa décision une fois définitive sera transmise à l'INPI à l'initiative du greffe ou de la partie la plus diligente, pour transcription sur le Registre national des marques,
- condamné la SA Goyard St-Honoré à payer aux sociétés Fauré Le Page Paris et Fauré Le Page Maroquinier la somme globale de 20 000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile ;
La SA Goyard St-Honoré a interjeté appel de ce jugement le 23 février 2015 ;
Par ses dernières conclusions d'appel n° 4 et en réponse à appel incident, transmises par RPVA le 19 mai 2016, la SA Goyard St-Honoré demande :
- de confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a rejeté les demandes en nullité des opérations de saisie-contrefaçon autorisées par l'ordonnance rendue sur requête le 04 octobre 2012 et de la marque figurative n° 1 633 326, en ce qu'il a déclaré irrecevable la demande en déchéance de ses droits sur les marques n° 1 622 326 et 3 365 526 pour les articles pour fumeurs et articles pour fumeurs non en métaux précieux à savoir cendriers, briquets, porte-cigares, porte-cigarettes et en ce qu'il a jugé que ses modèles "Ambassade", "Comores", "Boeing 30" et "St Louis" sont des œuvres originales bénéficiant de la protection accordée au titre du droit d'auteur,
- de l'infirmer pour le surplus et, statuant à nouveau :
- de dire que les marques n° 3 839 811 et 1 105 848 des sociétés Fauré Le Page Paris portent atteinte aux droits de marque antérieurs dont elle dispose sur les signes n° 1 633 326, 3 365 528 et 004 748 729,
- de dire que la "Toile Fauré Le Page 1717" sur laquelle sont reproduites les marques n° 3 839 811 et 1 105 848 de la SAS Fauré Le Page Paris constitue une contrefaçon de ses marques n° 1 633 326, 3 365 528 et 004 748 729,
- de déclarer les sociétés Fauré Le Page Paris et Fauré Le Page Maroquinier irrecevables à agir en déchéance pour les produits suivants :
- pour la marque n° 1 633 326 : "objets en métaux précieux ou en plaqué, articles en carton, articles en cuir et imitation du cuir non compris dans d'autres classes que la classe 18, peaux, laisses pour animaux, articles textiles non compris dans d'autres classes que la classe 24",
- pour la marque n° 3 365 528 : "crèmes, gels, huiles pour le bain à usage non médical ; déodorants à usage personnel ; laits, lotions, émulsions et crèmes à usage cosmétique pour le visage et pour le corps ; préparations pour les cheveux à usage non médical nommément laques, gels, crèmes, baumes, mousses et shampooings ; eaux de toilette et de Cologne ; Métaux précieux et leurs alliages (autres qu'à usage dentaire) et produits en ces matières ou en plaqué à savoir bagues (bijouterie), boucles d'oreilles (bijouterie), bracelets (bijouterie), breloques (bijouterie), broches (bijouterie), chaînes (bijouterie), chaînes de montres, colliers (bijouterie), épingles (bijouterie), parures (bijouterie), épingles de parures (bijouterie), anneaux (bijouterie), boucles en métaux précieux, ornements de chapeaux en métaux précieux ; bijouterie fantaisie ; pierres fines, perles (bijouterie) ; articles en papier et articles en carton à savoir : cartonnages, sacs, sachets, enveloppes, pochettes, pour l'emballage, en papier ; matériel d'instruction ou d'enseignement (à l'exception des appareils) ; photographies, revues, stylos, stylos bille, stylos mine ; manuels d'orientation, articles de bureau (à l'exception des meubles) ; sacs-housses de voyage pour vêtements ; coffrets destinés à contenir des articles de toilette dits " vanity-cases ", sacs à dos, sacs d'écoliers, pochettes, ombrelles, mouchoirs
de poche [en matières textiles], linge de toilette ; robes, jupes, jupons, jupe-culotte, costumes, pantalons, shorts, bermudas, caleçons, chemises, chemisiers, corsages, tee-shirts, sweatshirts, gilets, vestes, cardigans, pullovers, chandails, parkas, anoraks, manteaux, gabardines, imperméables, écharpes, châles, bas, collants, pyjamas, robes de chambre, maillots de bain, peignoirs de bain souliers, sandales, bottes, bottines, pantoufles ; chapeaux, bérets, casquettes",
- pour la marque n° 004 748 729 : "eaux de toilette et de Cologne; laits, lotions, émulsions et crèmes à usage cosmétique pour le visage et pour le corps; crèmes, gels, huiles pour le bain à usage non médical; déodorants à usage personnel; préparations pour les cheveux à usage non médical nommément laques, gels, crèmes, baumes, mousses et shampooings ; sacs-housses de voyage pour vêtements, malles, valises, coffrets destinés à contenir des articles de toilette dits "'vanity-cases'", sacs à dos, sacs d'écoliers, pochettes, articles de maroquinerie notamment portefeuilles, porte-monnaie non en métaux précieux, ombrelles",
- de dire que ses marques n° 004 748 729, 1 633 326 et 3 365 528 sont exploitées sérieusement pour les produits visés à leurs enregistrements respectifs,
- de dire que les sacs "Vaillant", "Cabas vertical poignée", "Goupille 36" et "Daily Battle" des sociétés Fauré Le Page Paris et Fauré Le Page Maroquinier constituent respectivement des contrefaçons de ses modèles "Ambassade", "Comores", "Boieng 30" et " St Louis",
- de dire que la communication des sociétés Fauré Le Page Paris et Fauré Le Page Maroquinier sur une date de création remontant à 1717 est fallacieuse et constitue un acte de concurrence déloyale,
- de dire que les marques n° 3 839 811, 1 105 848, 3 839 809 et 1 105 847 sont réceptives du fait que leur graphisme et leur appellation au sein des registres de marque contiennent le terme "1717" laissant ainsi croire au public que les sociétés Fauré Le Page Paris et Fauré Le Page Maroquinier existeraient depuis 1717 alors que celles-ci n'ont été créées qu'en 2009,
- de dire qu'en commercialisant des articles reproduisant les siens, en développant la même gamme de produits et en les faisant fabriquer dans une qualité moindre et à des prix inférieurs, les sociétés Fauré Le Page Paris et Fauré Le Page Maroquinier ont commis des actes de concurrence déloyale visant à détourner à leur profit une partie de sa clientèle,
- de dire qu'en reprenant les codes identitaires de ses comptoirs de vente et en s'établissant à proximité immédiate de son comptoir historique, les sociétés Fauré Le Page Paris et Fauré Le Page Maroquinier ont commis des actes de concurrence déloyale visant à détourner une partie de sa clientèle,
- de débouter en conséquence les sociétés Fauré Le Page Paris et Fauré Le Page Maroquinier de leurs demandes en déchéance de ses marques n° 004 748 729, 1 633 326 et 3 365 528,
- de prononcer la nullité des marques n° 3 839 811 et 1 105 848,
- d'ordonner la transmission de la décision à intervenir à l'INPI et à l'OMPI,
- d'interdire aux sociétés Fauré Le Page Paris et Fauré Le Page Maroquinier dans les huit jours à compter de la signification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 10 000 euros par infraction constatée, de poursuivre la fabrication et la commercialisation d'articles confectionnés en "Toile Fauré Le Page 1717" contrefaisant ses marques n° 585 467, 3 365 528 et 004 748 729,
- de condamner les sociétés Fauré Le Page Paris et Fauré Le Page Maroquinier, à leurs frais, à retirer tous les produits fabriqués en "Toile Fauré Le Page 1717" des circuits commerciaux, à les lui remettre et ce, en vue d'une destruction sous contrôle d'huissier aux frais avancés par les sociétés Fauré Le Page Paris et Fauré Le Page Maroquinier,
- de condamner solidairement les sociétés Fauré Le Page Paris et Fauré Le Page Maroquinier à lui verser la somme forfaitaire de 150.000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation de son préjudice moral et des conséquences économiques négatives subies du fait de la contrefaçon de ses marques enregistrées,
- d'interdire aux sociétés Fauré Le Page Paris et Fauré Le Page Maroquinier dans les huit jours à compter de la signification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 10.000 euros par infraction constatée, de poursuivre la fabrication et la commercialisation des sacs "Vaillant", "Cabas vertical poignée", "Goupille 36" et "Daily Battle" contrefaisant ses modèles "Ambassade", "Comores", "Boeing 30" et "St Louis",
- de condamner solidairement les sociétés Fauré Le Page Paris et Fauré Le Page Maroquinier à lui verser la somme forfaitaire de 150 000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation de l'atteinte à ses droits d'auteur et au préjudice moral subis du fait de la contrefaçon des modèles "Ambassade", "Comores", "Boeing 30" et "St Louis",
- de condamner les sociétés Fauré Le Page Paris et Fauré Le Page Maroquinier, à leurs frais, à retirer tous les articles fabriqués contrefaisant ses modèles "Ambassade", "Comores", "Boeing 30" et "St Louis" des circuits commerciaux, à les lui remettre et ce, en vue d'une destruction sous contrôle d'huissier aux frais avancés des sociétés Fauré Le Page Paris et Fauré Le Page Maroquinier,
- de prononcer la nullité des marques n° 3 839 811, 1 105 848, 3 839 809 et 1 105 847 en raison de leur caractère déceptif,
- d'ordonner la transmission de la décision à intervenir à l'INPI et à l'OMPI,
- de condamner solidairement les sociétés Fauré Le Page Paris et Fauré Le Page Maroquinier à lui verser la somme de 100.000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice subi du fait des actes de concurrence déloyale,
- d'interdire aux sociétés Fauré Le Page Paris et Fauré Le Page Maroquinier dans les huit jours à compter de la signification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 100 000 euros par infraction constatée, d'utiliser les codes identitaires de ses comptoirs de vente pour la commercialisation de leurs produits,
- d'ordonner aux sociétés Fauré Le Page Paris et Fauré Le Page Maroquinier dans les huit jours à compter de la signification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 10 000 euros par jour de retard, de modifier substantiellement les aménagements de son corner ouvert au mois de juillet 2013 au sein du grand magasin Coupole des Galeries Lafayette, afin qu'ils ne ressemblent plus à ceux de ses comptoirs de vente,
- d'ordonner aux sociétés Fauré Le Page Paris et Fauré Le Page Maroquinier dans les huit jours à compter de la signification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 10 000 euros par infraction constatée de cesser d'utiliser le jaune Pantone (référence Pantone 1235c) pour la commercialisation de leurs sacs,
- d'ordonner aux sociétés Fauré Le Page Paris et Fauré Le Page Maroquinier ans les huit jours à compter de la signification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 10 000 euros par infraction constatée de supprimer toute référence à la date de 1717, notamment dans tous leurs points de vente et supports de communication,
- d'interdire aux sociétés Fauré Le Page Paris et Fauré Le Page Maroquinier dans les huit jours à compter de la signification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 10 000 euros par infraction constatée de communiquer sur une date de création des dites sociétés qui serait autre que celles de 2009 et 2011,
- de débouter les sociétés Fauré Le Page Paris et Fauré Le Page Maroquinier de toutes leurs demandes, fins et conclusions comme irrecevables et mal fondées,
- d'ordonner, aux frais des sociétés Fauré Le Page Paris et Fauré Le Page Maroquinier, la publication d'un communiqué en police noire "arial" taille 16 sur fond blanc, pendant quatre mois en première page du site <www.faurelepage.com> et de leur page Facebook(r), ainsi que dans un numéro de trois magazines de mode nationaux (Madame Figaro, Vogue, Le Journal du Textile), dans la limite de 25.000 euros HT pour chacune des publications aux frais avancés des sociétés Fauré Le Page Paris et Fauré Le Page Maroquinier contre présentation de facture, résumant l'arrêt à intervenir comme suit :
"Par arrêt en date du ... la Cour d'appel de Paris a condamné les sociétés FLP Paris SAS et FLP Maroquinier SAS pour :
- contrefaçon des marques de la société Goyard St-Honoré SA ;
- contrefaçon des droits d'auteur portant sur les créations originales de sacs Ambassade, Comores, Boeing 30 et Saint Louis de la société Goyard St-Honoré SA ;
- pour des actes de concurrence déloyale du fait d'une communication sur une date historique d'existence fallacieuse (1717 au lieu de 2009), de la commercialisation d'articles reproduisant ceux de la Maison Goyard dans une qualité moindre et à des prix inférieurs, du développement d'une même gamme de produits, et de la reprise des aménagements intérieurs de ses comptoirs de vente et l'installation de la première boutique FLP à proximité immédiate du comptoir de vente Goyard situé au adresse [...], 75001 Paris."
Et ce, au plus tard, dans les huit jours de la décision à intervenir sous astreinte de 10 000 euros par jour de retard,
- de condamner solidairement les sociétés Fauré Le Page Paris et Fauré Le Page Maroquinier à lui verser la somme de 165 000 euros sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens, au procès-verbal de saisie-contrefaçon du 5 octobre 2012 et au constat d'huissier en date du 17 octobre 2013 ;
- Par leurs dernières conclusions en réplique et d'appel incident n° 3, transmises par RPVA le 8 avril 2016, les sociétés Fauré Le Page Paris et Fauré Le Page Maroquinier demandent :
- de confirmer le jugement entrepris sauf en ce qu'il les a déboutées de leur demande en nullité de la marque n° 1 633 326, les a déclarées irrecevables à agir en déchéance à l'encontre des produits de la classe 34 des marques n° 1 633 326 et 3 365 528 de la SA Goyard St-Honoré, a déclaré recevable la SA Goyard St-Honoré à agir en contrefaçon de droits d'auteur sur les modèles de sacs "Ambassade", "Comores", "Boeing 30" et "Saint Louis", a jugé ces modèles de sacs protégeables par le droit d'auteur et les a déboutées de leurs demandes reconventionnelles et, statuant à nouveau :
- de débouter la SA Goyard St-Honoré de l'ensemble de ses demandes,
- de prononcer la nullité de la marque n° 1 633 326 pour absence de caractère distinctif,
- à titre subsidiaire, de prononcer la déchéance de la totalité des droits de la SA Goyard St-Honoré sur la marque n° 1 633 326 à compter du 28 décembre 1996 pour l'ensemble des produits désignés,
- de prononcer la déchéance des droits de la SA Goyard St-Honoré sur la marque n° 3 365 528 à compter du 18 novembre 2010 et sur la marque n° 4 748 729 à compter du 11 juin 2014 pour les produits suivants : " Savons de toilette ; parfums ; eaux de toilette et de Cologne ; huiles essentielles à usage personnel ; cosmétiques ; laits, lotions, émulsions et crèmes à usage cosmétique pour le visage et pour le corps ; crèmes, gels, huiles pour le bain à usage non médical ; déodorants à usage personnel ; préparations pour les cheveux à usage non médical nommément laques, gels, crèmes, baumes, mousses et shampooings. Métaux précieux et leurs alliages (autres qu'à usage dentaire) et produits en ces matières ou en plaqué à savoir bagues (bijouterie), boucles d'oreilles (bijouterie), bracelets (bijouterie), breloques (bijouterie), broches (bijouterie), chaînes (bijouterie), chaînes de montres, colliers (bijouterie), épingles (bijouterie), parures (bijouterie), épingles de parures (bijouterie), anneaux (bijouterie), boucles en métaux précieux, ornements de chapeaux en métaux précieux, écrins en métaux précieux, coffrets à bijoux en métaux précieux ; joaillerie, bijouterie, pierres précieuses, pierres fines, perles (bijouterie) ; bijouterie fantaisie ; horlogerie et instruments chronométriques ; montres, bracelets de montres, montres bracelets. Papier ; carton ; articles en papier et articles en carton à savoir : cartonnages, sacs, sachets, enveloppes, pochettes, pour l'emballage, en papier ; produits de l'imprimerie, à savoir livres, imprimés, journaux, revues, périodiques, magazines, manuels d'orientation, affiches, photographies, matériel d'instruction ou d'enseignement (à l'exception des appareils) ; articles de bureau (à l'exception des meubles) ; instruments à écrire à savoir stylos, stylos bille, stylos mine. Sacs-housses de voyage pour vêtements, sacs à dos, sacs de plage, sacs d'écoliers, cartables, étuis pour clés (maroquinerie), parapluies, parasols, ombrelles, cannes. Tissus à usage textile et produits textiles à savoir linge de bain [à l'exception de l'habillement], linge de maison, linge de lit, linge de table [en matières textiles], linge de toilette, mouchoirs de poche [en matières textiles]. Vêtements (habillement) pour femmes, hommes et enfants à savoir robes, jupes, jupons, jupe-culotte, costumes, pantalons, shorts, bermudas, caleçons, chemises, chemisiers, corsages, tee-shirts, sweatshirts, gilets, vestes, cardigans, pullovers, chandails, parkas, anoraks, manteaux, gabardines, imperméables, fourrures, écharpes, châles, foulards, gants, cravates, ceintures (habillement), chaussettes, bas, collants, sous-vêtements, pyjamas, robes de chambre, maillots de bain, peignoirs de bain ; chaussures (à l'exception des chaussures orthopédiques), à savoir souliers, sandales, bottes, bottines, chaussons, pantoufles ; chapeaux, bérets, casquettes. Articles pour fumeurs non en métaux précieux à savoir cendriers, briquets, porte-cigares, porte-cigarettes ",
- de dire que le "jugement" (sic) à intervenir sera transmis sur réquisition à l'INPI pour inscription au Registre national des marques,
- de dire que les marques n° 3 839 811 et 1 105 848 de la SAS Fauré Le Page Paris ne constituent pas la contrefaçon par imitation des marques n° 1 633 326, 3 365 528 et 4 748 729,
- de dire que la SA Goyard St-Honoré ne justifie pas de sa qualité d'auteur des modèles de sacs "Ambassade", "Comores", "Boeing 30" et "Saint Louis" et la déclarer irrecevable à agir en contrefaçon de droits d'auteur de ces modèles, que ces modèles ne sont pas protégeables par le droit d'auteur,
- de dire en tout état de cause que les sacs "Cabas vertical poignée", "Daily battle", "Goupille" et "Vaillant" ne contrefont pas les sacs "Ambassade", "Comores", "Boeing 30" et "Saint Louis",
- de dire qu'elles n'ont pas commis d'actes de concurrence déloyale et parasitaire au préjudice de la SA Goyard St-Honoré,
- de débouter la SA Goyard St-Honoré de l'ensemble de ses demandes indemnitaires tant au titre de la contrefaçon qu'au titre de la concurrence déloyale et/ou parasitaire ainsi que de ses demandes d'interdiction, de destruction, de retrait des circuits commerciaux et de publication,
- de condamner la SA Goyard St-Honoré à leur verser la somme de 60.000 euros au titre de la procédure abusive,
- d'ordonner la publication de l'arrêt à intervenir dans cinq journaux ou revues, à leur choix et aux frais de la SA Goyard St-Honoré, à raison de 5.000 euros par insertion et ce, au besoin à titre de dommages et intérêts complémentaires,
- d'ordonner l'inscription par extraits de l'arrêt à intervenir sur la page d'accueil du site Internet <www.goyard.com> en lettres noires sur fond blanc de type Arial de taille 14 et ce, pendant une durée de six mois à compter de la signification du "jugement" (sic) à intervenir, sous astreinte de 500 euros par jour de retard,
- de condamner la SA Goyard St-Honoré à leur verser la somme de 170.000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens ;
L'ordonnance de clôture a été rendue le 14 juin 2016 ;
Motifs de l'arrêt :
Considérant que, pour un exposé complet des faits de la cause et de la procédure, il est expressément renvoyé au jugement déféré et aux écritures des parties ;
I : Sur la demande en annulation de la marque n° 1 633 326 :
Considérant que les sociétés Fauré Le Page Paris et Fauré Le Page Maroquinier (ci-après les sociétés Fauré Le Page) soutiennent que le motif dit "Goyardine" existe depuis la nuit des temps et n'a rien d'original et ne saurait donc constituer le Code identitaire des produits qu'elle commercialise ;
Qu'elles affirment ainsi que la marque 1 633 326 est dépourvue de caractère distinctif car elle est perçue par la public pertinent comme une représentation d'un détail du produit, plutôt que comme une indication de son origine commerciale ;
Considérant que la SA Goyard St-Honoré réplique que le motif dit "Goyardine" est distinctif et n'est pas décoratif ;
Considérant qu'il sera rappelé que le droit des marques étant un droit d'occupation, rien ne s'oppose à ce qu'un signe exempt d'originalité ou de nouveauté soit déposé à titre de marque, dès lors que ce signe est arbitraire au regard des produits ou services qu'il est appelé à désigner, et qu'il est, en conséquence, susceptible de permettre au consommateur d'identifier l'origine de ces produits ou services ;
Considérant qu'il résulte des dispositions des articles L. 711-2 et L. 714-3 du Code de la propriété intellectuelle qu'est déclaré nul l'enregistrement d'une marque dépourvue de caractère distinctif dès lors que "les signes ou dénominations (...), dans le langage courant ou professionnel, sont exclusivement la désignation nécessaire, générique ou usuelle du produit ou du service" ;
Qu'est ainsi dépourvu de caractère distinctif le signe qui, par lui-même, n'assure pas la fonction essentielle de la marque, à savoir indiquer l'origine d'un produit ou service et le distinguer des produits ou services d'autres provenances ;
Considérant que c'est à juste titre que les premiers juges ont relevé que la SA Goyard St-Honoré n'avait pas déposé à titre de marque un chevron quelconque, mais un signe figuratif particulier, tel que décrit plus haut, apte à exercer la fonction d'indication d'origine de la marque pour les produits et services désignés à son enregistrement, à savoir : "Savons ; parfumerie, huiles essentielles, cosmétiques, lotions pour les cheveux ; dentifrices. Métaux précieux et leurs alliages et objets en ces matières ou en plaqué. Papier et articles en papier, carton et articles en carton, articles de bureau. Cuir et imitations du cuir, articles en ces matières non compris dans d'autres classes ; peaux ; malles et valises ; parapluies, parasols et cannes. Sellerie. Tissus ; couvertures de lit et de table ; articles textiles non compris dans d'autres classes. Vêtements, chaussures, chapellerie. Articles pour fumeurs. Laisses et colliers pour animaux" ;
Considérant en conséquence que la marque 1 633 326 est suffisamment distinctive et que le jugement entrepris sera confirmé en ce qu'il a rejeté la demande d'annulation de cette marque ;
II : Sur les demandes en déchéance des marques n° 1 633 326, 3 365 528 et 004 748 729 :
La recevabilité à agir :
Considérant que les sociétés Fauré Le Page soutiennent que c'est l'intégralité des produits désignés par les marques 1 633 326, 3 365 528 et 004 748 729 qui leur sont opposés, de sorte qu'elles sont parfaitement recevables à en solliciter reconventionnellement et totalement la déchéance ;
Qu'elles font valoir que si en cause d'appel la SA Goyard St-Honoré ne leur oppose plus qu'une partie des produits désignés, elles ont néanmoins un intérêt à agir dès lors qu'il est justifié d'une entrave à leur activité économique, caractérisée lorsque cette activité se situe dans un secteur proche des produits et services visés par la marque ;
Qu'elles soutiennent donc que compte tenu de l'identité d'activité économique des parties, elles ont un intérêt légitime à solliciter la déchéance des droits de la SA Goyard St-Honoré pour l'intégralité des produits visés, regroupant le coeur même de l'activité de toute maison de luxe ;
Considérant que la SA Goyard St-Honoré réplique qu'une demande reconventionnelle en déchéance qui s'étendrait à une marque qui n'est pas opposée dans le cadre de l'action en contrefaçon n'est pas recevable et qu'en l'espèce elle n'oppose aux sociétés Fauré Le Page que certains produits désignés par les marques 1 633 326 et 3 365 528 et que ces sociétés doivent donc être déclarées irrecevables à agir en déchéance pour les produits qui ne leur sont pas opposés ;
Considérant que l'article L. 714-5, 3e alinéa du Code de la propriété intellectuelle dispose que "la déchéance peut être demandée en justice par toute personne intéressée" ; que si elle est demandée à titre reconventionnel en réponse à une action en contrefaçon de marque, cette demande, pour être recevable, doit se rattacher aux prétentions originaires par un lien suffisant en application des dispositions de l'article 70 du Code de procédure civile ;
Considérant en conséquence que les sociétés Fauré Le Page ne sont recevables à agir en déchéance que pour les produits qui leur sont opposés dans le cadre de l'action principale en contrefaçon dans les dernières conclusions de la SA Goyard St-Honoré, à savoir :
- Pour la marque 1 633 326 : "Savons ; parfumerie, huiles essentielles, cosmétiques, lotions pour les cheveux ; dentifrices. Métaux précieux et leurs alliages. Papier et articles en papier, carton, articles de bureau. Cuir et imitations du cuir ; malles et valises ; parapluies, parasols et cannes. Sellerie. Tissus ; couvertures de lit et de table. Vêtements, chaussures, chapellerie. Colliers pour animaux",
- Pour la marque 3 365 528 : "Savons de toilette ; parfums ; huiles essentielles à usage personnel ; cosmétiques. Métaux précieux et leurs alliages, chaînes de montres, écrins en métaux précieux, coffrets à bijoux en métaux précieux ; joaillerie, bijouterie, pierres précieuses ; horlogerie et instruments chronométriques ; montres, bracelets de montres, montres bracelets. Papier ; carton ; produits de l'imprimerie, à savoir livres, imprimés, journaux, périodiques, magazines, affiches, photographies ; instruments à écrire. Produits en cuir et imitations du cuir à savoir : sacs et trousses de voyage, sacs à main, sacs de plage, mallettes, trousses de voyage (maroquinerie), porte-documents, serviettes, cartables, articles de maroquinerie notamment portefeuilles, porte-monnaie non en métaux précieux, étuis pour clés (maroquinerie), porte-cartes (portefeuille) ; parapluies, parasols, cannes. Tissus à usage textile et produits textiles à savoir linge de bain [à l'exception de l'habillement], linge de maison, linge de lit, linge de table [en matières textiles]. Vêtements (habillement) pour femmes, hommes et enfants à savoir chemises, fourrures, foulards, gants, cravates, ceintures (habillement), chaussettes, sous-vêtements ; chaussures (à l'exception des chaussures orthopédiques), chaussons", - Pour la marque 004 748 729 : "Savons de toilette; parfums ; huiles essentielles à usage personnel ; cosmétiques. Produits en cuir et imitations du cuir à savoir : sacs et trousses de voyage, malles, valises, sacs à main, sacs de plage, mallettes, trousses de voyage (maroquinerie), porte-documents, serviettes, cartables, articles de maroquinerie notamment portefeuilles, porte-monnaie, étuis pour clés (maroquinerie), porte-cartes (portefeuille); parapluies, parasols, cannes" ;
Considérant en conséquence que le jugement entrepris sera infirmé en ce qu'il a limité l'irrecevabilité à agir en déchéance pour les articles pour fumeurs (marque n° 1 633 326) et les articles pour fumeurs non en métaux précieux à savoir cendriers, briquets, porte-cigares, porte-cigarettes (marque n° 3 365 528) et que, statuant à nouveau de ce chef, les sociétés Fauré Le Page seront déclarées irrecevables à agir en déchéance des droits de la SA Goyard St-Honoré pour les produits suivants :
- Pour la marque 1 633 326 : "objets en métaux précieux et leurs alliages ou en plaqué, articles en carton, articles en cuir et imitations du cuir non compris dans d'autres classes que la 18, peaux, laisses, articles textiles non compris dans d'autres classes que la 24",
- Pour la marque 3 365 528 : "crèmes, gels, huiles pour le bain à usage non médical ; déodorants à usage personnel ; laits, lotions, émulsions et crèmes à usage cosmétique pour le visage et pour le corps ; préparations pour les cheveux à usage non médical nommément laques, gels, crèmes, baumes, mousses et shampooings ; eaux de toilette et de Cologne ; Métaux précieux et leurs alliages (autres qu'à usage dentaire) et produits en ces matières ou en plaqué à savoir bagues (bijouterie), boucles d'oreilles (bijouterie), bracelets (bijouterie), breloques (bijouterie), broches (bijouterie), chaînes (bijouterie), chaînes de montres, colliers (bijouterie), épingles (bijouterie), parures (bijouterie), épingles de parures (bijouterie), anneaux (bijouterie), boucles en métaux précieux, ornements de chapeaux en métaux précieux ; bijouterie fantaisie ;pierres fines, perles (bijouterie) ; articles en papier et articles en carton à savoir : cartonnages, sacs, sachets, enveloppes, pochettes, pour l'emballage, en papier ; matériel d'instruction ou d'enseignement (à l'exception des appareils) ; photographies, revues, stylos, stylos bille, stylos mine ; manuels d'orientation, articles de bureau (à l'exception des meubles) ; sacs-housses de voyage pour vêtements ; coffrets destinés à contenir des articles de toilette dits " vanity-cases ", sacs à dos, sacs d'écoliers, pochettes, ombrelles, mouchoirs de poche [en matières textiles], linge de toilette ; robes, jupes, jupons, jupe-culotte, costumes, pantalons, shorts, bermudas, caleçons, chemises, chemisiers, corsages, tee-shirts, sweatshirts, gilets, vestes, cardigans, pullovers, chandails, parkas, anoraks, manteaux, gabardines, imperméables, écharpes, châles, bas, collants, pyjamas, robes de chambre, maillots de bain, peignoirs de bain ; souliers, sandales, bottes, bottines, pantoufles ; chapeaux, bérets, casquettes ",
- Pour la marque 004 748 729 : "eaux de toilette et de Cologne; laits, lotions, émulsions et crèmes à usage cosmétique pour le visage et pour le corps; crèmes, gels, huiles pour le bain à usage non médical; déodorants à usage personnel; préparations pour les cheveux à usage non médical nommément laques, gels, crèmes, baumes, mousses et shampooings ; sacs-housses de voyage pour vêtements, malles, valises, coffrets destinés à contenir des articles de toilette dits "'vanity-cases'", sacs à dos, sacs d'écoliers, pochettes, articles de maroquinerie notamment portefeuilles, porte-monnaie non en métaux précieux, ombrelles" ;
Le fond :
Considérant que les sociétés Fauré Le Page affirment qu'il n'est rapporté aucune preuve d'usage de la marque n° 1 633 326 pour aucun des produits visés au dépôt, précisant que les marques n° 3 365 528 et 004 748 729 sont différentes ;
Qu'elles ajoutent que la seule fourniture d'un service d'entretien ou de réparation ne suffit pas à justifier de l'utilisation de la marque conformément à sa fonction essentielle ;
Qu'elles demandent de prononcer la déchéance de cette marque à compter du 28 décembre 1996 ;
Qu'en ce qui concerne les marques n° 3 365 528 et 004 748 729 elles affirment que la preuve d'usage pour un produit appartenant à une sous-catégorie ne peut étendre son effet à d'autres sous-catégories distinctes et a fortiori, à la catégorie générale et qu'en l'espèce les chiffres d'exploitation sont insignifiants, d'autant plus que la plupart concernent une commercialisation à l'étranger et qu'il n'est pas rapportée la preuve d'une exploitation sérieuse de ces marques ;
Qu'elles demandent de prononcer la déchéance de ces marques à compter du 18 novembre 2010 pour la marque n° 3 365 528 et du 11 juin 2014 pour la marque n° 004 748 729 ;
Considérant que la SA Goyard St-Honoré réplique que le caractère sérieux de l'usage ne dépend pas du volume des ventes réalisées et que la marque n° 1 633 326 est bien exploitée sous une forme légèrement modifiée tout en gardant les mêmes caractéristiques, aux côtés des marques n° 3 365 528 et 004 748 729 ;
Qu'elle ajoute que la nature de ses produits est à prendre en compte dans l'appréciation de l'usage sérieux de ses marques, s'agissant d'artisanat de luxe, parfois réalisé sur commande uniquement, impliquant de faibles volumes de production ;
Qu'elle précise que même si des articles ne sont plus présents dans le commerce, la marque peut quand même faire l'objet d'un usage sérieux si son titulaire vend sous cette marque des pièces détachées, des accessoires ou fournit un service après-vente se rapportant aux produits commercialisés sous cette marque et qu'en l'espèce elle fournit un service de réparation pour tous les articles vintage vendus en toile jacquard sous la marque n° 1 633 326 ;
La marque n° 1 633 326 :
Considérant qu'il est constant que la marque purement figurative n° 1 633 326, représentant le motif de la toile dite "Goyardine" n'est pas exploitée en tant que telle pour les produits concernés, à savoir : "Savons ; parfumerie, huiles essentielles, cosmétiques, lotions pour les cheveux ; dentifrices. Métaux précieux et leurs alliages. Papier et articles en papier, carton, articles de bureau. Cuir et imitations du cuir ; malles et valises ; parapluies, parasols et cannes. Sellerie. Tissus ; couvertures de lit et de table. Vêtements, chaussures, chapellerie. Colliers pour animaux", seuls le signe enregistré comme marque sous les numéros 3 365 528 et 004 748 729 faisant l'objet d'une exploitation ;
Considérant que l'article 10, paragraphe 2, sous a) de la directive (CE) n° 89/104 du Conseil, du 21 décembre 1988, rapprochant les législations des États membres sur les marques, dispose qu'est considéré comme un usage sérieux pour les produits ou les services pour lesquels elle est enregistrée, "l'usage de la marque sous une forme qui diffère par des éléments n'altérant pas son caractère distinctif dans la forme sous laquelle celle-ci a été enregistrée" ;
Considérant que la Cour de justice de l'Union européenne a dit pour droit dans son arrêt Rintisch du 25 octobre 2012 que cet article doit être interprété en ce sens qu'il ne s'oppose pas à ce que le titulaire d'une marque enregistrée puisse, aux fins d'établir l'usage de celle-ci au sens de cette disposition, se prévaloir de son utilisation dans une forme qui diffère de celle sous laquelle cette marque a été enregistrée sans que les différences entre ces deux formes altèrent le caractère distinctif de cette marque, et ce nonobstant le fait que cette forme différente est elle-même enregistrée en tant que marque ;
Considérant qu'il s'ensuit que l'article 15 du règlement (CE) n° 207/2009 du Conseil du 26 février 2009 sur la marque communautaire et l'article L. 714-5 du Code de la propriété intellectuelle exigent seulement pour justifier d'un usage sérieux que la marque exploitée ne diffère des marques enregistrées que par des éléments n'en altérant pas le caractère distinctif, peu important que la marque modifiée ait été elle-même enregistrée ;
Mais considérant que, comme l'ont relevé à juste titre les premiers juges, la marque n° 1 633 326 qui est exclusivement figurative, reproduisant sur fond noir, des chevrons blancs et jaunes formant des lignes continues, traversés de lignes verticales grises et jaunes, se distingue nettement des marques n° 3 365 528 et 004 748 729 qui sont semi-figuratives, comportant des chevrons beige et marron formant des lignes en pointillé, traversés de lignes verticales marron, les textes "E. Goyard" et "Honoré Paris" étant apposés à intervalles réguliers à la place des lignes verticales ou des chevrons ;
Qu'il apparaît ainsi que la marque ainsi exploitée diffère de la marque n° 1 633 326 telle qu'enregistrée, par des éléments (en particulier les textes) qui en altèrent le caractère distinctif exclusivement lié au motif de toile dit "Goyardine" ;
Que le jugement entrepris sera néanmoins partiellement infirmé en ce qu'il a prononcé la déchéance des droits de la SA Goyard St-Honoré sur la marque n° 1 633 326 sur l'ensemble des produits et services désignés à l'enregistrement à l'exception des articles pour fumeurs et que, statuant à nouveau de ce chef, la SA Goyard St-Honoré sera déchue de ses droits sur la marque n° 1 633 326 à compter du 28 décembre 1996 pour les produits suivants : "Savons ; parfumerie, huiles essentielles, cosmétiques, lotions pour les cheveux ; dentifrices. Métaux précieux et leurs alliages. Papier et articles en papier, carton, articles de bureau. Cuir et imitations du cuir ; malles et valises ; parapluies, parasols et cannes. Sellerie. Tissus ; couvertures de lit et de table. Vêtements, chaussures, chapellerie. Colliers pour animaux" ;
Les marques n° 3 365 528 et 004 748 729 :
Considérant que l'examen de l'exploitation sérieuse de ces deux marques semi-figuratives semblables porte donc sur les produits suivants :
- pour les deux marques : "Savons de toilette ; parfums ; huiles essentielles à usage personnel ; cosmétiques. Produits en cuir et imitations du cuir à savoir : sacs et trousses de voyage, sacs à main, sacs de plage, mallettes, trousses de voyage (maroquinerie), porte-documents, serviettes, cartables, articles de maroquinerie notamment portefeuilles, porte-monnaie non en métaux précieux, étuis pour clés (maroquinerie), porte-cartes (portefeuille) ; parapluies, parasols, cannes",
- pour la seule marque n° 3 365 528 : "Métaux précieux et leurs alliages, chaînes de montres, écrins en métaux précieux, coffrets à bijoux en métaux précieux ; joaillerie, bijouterie, pierres précieuses ; horlogerie et instruments chronométriques ; montres, bracelets de montres, montres bracelets. Papier ; carton ; produits de l'imprimerie, à savoir livres, imprimés, journaux, périodiques, magazines, affiches, photographies ; instruments à écrire. Tissus à usage textile et produits textiles à savoir linge de bain [à l'exception de l'habillement], linge de maison, linge de lit, linge de table [en matières textiles]. Vêtements (habillement) pour femmes, hommes et enfants à savoir chemises, fourrures, foulards, gants, cravates, ceintures (habillement), chaussettes, sous-vêtements ; chaussures (à l'exception des chaussures orthopédiques), chaussons",
- pour la seule marque n° 004 748 729 : "malles, valises" ;
Considérant qu'il ressort des éléments de la cause que ces marques sont bien exploitées de façon sérieuse pour les produits suivants : "Produits en cuir et imitations du cuir à savoir : sacs et trousses de voyage, sacs à main, malles, valises, mallettes, trousses de voyage (maroquinerie), porte-documents, serviettes, articles de maroquinerie notamment portefeuilles, porte-monnaie non en métaux précieux, porte-cartes (portefeuille)", étant relevé que les sociétés Fauré Le Page ne demandent pas la déchéance pour ces produits ;
Considérant qu'il n'est pas justifié d'une exploitation sérieuse pour les "sacs de plage, cartables, étuis pour clés (maroquinerie)", et qu'il n'est pas possible d'arguer d'un usage de la marque pour des produits similaires tels que les "sacs et trousses de voyage", l'usage sérieux d'une marque supposant l'utilisation de celle-ci sur le marché pour désigner les produits ou services visés au dépôt, et non des produits ou services similaires ;
Considérant qu'en ce qui concerne les "parapluies, parasols, cannes" il n'est produit que neuf tickets d'achat dont six datent de 2012 et 2013, postérieurement à la genèse du présent litige (la première mise en demeure datant du 21 mars 2012), à une période où le propriétaire de la marque a pu avoir connaissance de l'éventualité d'une demande de déchéance au sens du 4ème alinéa de l'article L. 714-5 du Code de la propriété intellectuelle ;
Que les seules preuves d'achat de trois parapluies sur la seule année 2011 sont insuffisantes, même pour des produits de luxe, à rapporter la preuve d'un usage sérieux pour ces produits ;
Considérant qu'en ce qui concerne les "Papier ; carton ; produits de l'imprimerie, à savoir livres, imprimés, journaux, périodiques, magazines, affiches, photographies ; instruments à écrire", il n'est fait état par la SA Goyard St-Honoré que de la commercialisation de couvertures pour bloc-notes et agenda et de carnets d'adresses avec ces marques en filigrane mais que comme il l'a été rappelé plus haut, l'usage sérieux d'une marque suppose l'utilisation de celle-ci pour désigner les produits visés au dépôt, et non comme en l'espèce, des produits similaires ;
Considérant qu'en ce qui concerne les "Savons de toilette ; parfums ; huiles essentielles à usage personnel ; cosmétiques", il n'est fait état que de la commercialisation d'une "malle à nez" conçue pour les parfumeurs et contenant tous les échantillons nécessaires à la conception de parfums et d'un nécessaire de toilette contenant un réceptacle à savon ;
Qu'il sera relevé qu'il n'est versé aux débats en pièces 67 et 68 de la SA Goyard St-Honoré, que les photographies non datées de ces deux produits, ce qui ne saurait constituer une preuve d'exploitation sérieuse de la marque, d'autant plus qu'il s'agit en outre, comme précédemment, de produits qui ne sont même pas similaires à ceux visés au dépôt ;
Qu'en outre la pièce 69 n'est constituée que de trois photographies relatives à des préparatifs sur le lancement futur d'un parfum, sans qu'aucun élément ne permette de savoir si la marque y sera représentée, ce qui ne justifie pas d'un usage sérieux de la marque pendant la période de référence ;
Considérant qu'en ce qui concerne les "Métaux précieux et leurs alliages, chaînes de montres, écrins
en métaux précieux, coffrets à bijoux en métaux précieux ; joaillerie, bijouterie, pierres précieuses ; horlogerie et instruments chronométriques ; montres, bracelets de montres, montre-bracelet", les pièces versées aux débats (n° 70-1, 70-2, 70-3, 97, 101, 71, 72, 64, 73, 74) ne justifient à chaque fois que d'un achat unique (la pièce 74, non datée, ne démontrant même aucun achat) dont certains sont d'ailleurs postérieurs à l'engagement de la présente procédure (pièces 64, 70-1 et 72), que pour la pièce 97, 10 factures ou tickets d'achat sont également postérieurs à l'engagement de la procédure et les produits qui y sont photographiés ne comportent aucune référence permettant de confirmer que les 5 autres tickets d'achat concernent bien ces produits ;
Qu'ainsi il n'est produit que 4 preuves de commercialisation limitées à l'année 2011, ce qui, même pour des produits de luxe, est insuffisant pour justifier d'un usage sérieux des marques en cause pour désigner ces produits ;
Considérant qu'en ce qui concerne les "Vêtements (habillement) pour femmes, hommes et enfants à savoir chemises, fourrures, foulards, gants, cravates, ceintures (habillement), chaussettes, sous-vêtements ; chaussures (à l'exception des chaussures orthopédiques), chaussons", il est produit aux débats les photographies de foulards et d'une étole sur lesquels ne figurent pas l'une ou l'autre marque n° 3 365 528 et 004 748 729 (pièces 75, 76, 92 et 93), de deux ceintures dont seuls deux achats sont antérieurs à la genèse de l'affaire (pièce 95) et de gants avec 11 preuves d'achat dont seulement 5 sont antérieures à la genèse de l'affaire ;
Qu'ainsi il n'est produit que 7 preuves de commercialisation limitées à l'année 2011, ce qui, même pour des produits de luxe, est insuffisant pour justifier d'un usage sérieux des marques en cause pour désigner ces produits ;
Considérant enfin qu'en ce qui concerne les "Tissus à usage textile et produits textiles à savoir linge de bain [à l'exception de l'habillement], linge de maison, linge de lit, linge de table [en matières textiles]", il n'est produit en pièce 79 que 4 photographies de morceaux de tissus sans aucune date ni mention de commercialisation, de telle sorte qu'il n'est pas davantage justifié d'un usage sérieux des marques en cause pour désigner ces produits ;
Considérant dès lors que le jugement entrepris sera partiellement infirmé en ce qu'il a prononcé la déchéance des droits de la SA Goyard St-Honoré sur la marque n° 3 365 528 à compter du 18 novembre 2010 sur un ensemble de produits désignés à son enregistrement et que statuant à nouveau de ce chef, la déchéance des droits de la SA Goyard St-Honoré sur cette marque sera prononcée pour les produits suivants : "sacs de plage, cartables, étuis pour clés (maroquinerie), parapluies, parasols, cannes, papier ; carton ; produits de l'imprimerie, à savoir livres, imprimés, journaux, périodiques, magazines, affiches, photographies ; instruments à écrire, savons de toilette ; parfums ; huiles essentielles à usage personnel ; cosmétiques, métaux précieux et leurs alliages, chaînes de montres, écrins en métaux précieux, coffrets à bijoux en métaux précieux ; joaillerie, bijouterie, pierres précieuses ; horlogerie et instruments chronométriques ; montres, bracelets de montres, montre-bracelet, Vêtements (habillement) pour femmes, hommes et enfants à savoir chemises, fourrures, foulards, gants, cravates, ceintures (habillement), chaussettes, sous-vêtements ; chaussures (à l'exception des chaussures orthopédiques), chaussons, Tissus à usage textile et produits textiles à savoir linge de bain [à l'exception de l'habillement], linge de maison, linge de lit, linge de table [en matières textiles]" ;
Qu'y ajoutant, il sera également prononcé la déchéance des droits de la SA Goyard St-Honoré sur la marque n° 004 748 729 à compter du 11 juin 2014 pour les produits suivants : "sacs de plage, cartables, étuis pour clés (maroquinerie), parapluies, parasols, cannes, savons de toilette ; parfums ; huiles essentielles à usage personnel ; cosmétiques" ;
III : Sur l'action en contrefaçon de marques :
Considérant que les sociétés Fauré Le Page ne reprennent pas devant la cour leur demande en annulation des opérations de saisie-contrefaçon pratiquées le 05 octobre 2012, de telle sorte que le jugement entrepris sera confirmé par adoption de ses motifs pertinents et exacts en ce qu'il a rejeté cette demande en annulation ;
Considérant que la SA Goyard St-Honoré soutient que les dépôts de marques réalisés par la SAS Fauré Le Page Paris et concédés sous licence à la SAS Fauré Le Page Maroquinier contrefont pas imitation ses marques n° 1 633 326, 3 365 528 et 004 748 729 en ce qu'elles créent une confusion auprès du public en raison de la très grande similarité des signes en litige et de l'identité des produits et services désignés ;
Qu'elle fait ainsi valoir que la toile "Fauré Le Page 1717" reprend les caractéristiques d motif distinctif de la "Goyardine", lui conférant une impression visuelle d'ensemble quasi-identique, reprenant notamment la répétition de l'élément verbal dans la cadence du motif de la toile ;
Qu'elle expose avoir fait réaliser un sondage dont il ressort que le risque de confusion entre les graphismes existe à un niveau élevé, plus d'un français sur deux trouvant les deux graphismes très ressemblants et un sur quatre les trouvant très ressemblants, le public croyant pour une large part que ses produits et ceux des sociétés Fauré Le Page proviennent de la même entreprise ;
Qu'elle ajoute que la confusion des marques en litige est également avérée auprès du public ressort de blogs spécialisés du monde de la mode ;
Qu'elle en conclut que les sociétés Fauré Le Page se sont livrées à des actes de contrefaçon de ses marques par imitation, lui causant un préjudice dont elle est en droit de demander réparation ;
Considérant que les sociétés Fauré Le Page répliquent que les marques doivent être comparées telles que déposées et que la SA Goyard St-Honoré s'est livrée à une comparaison tronquée des marques en présence en attribuant à leurs propres marques quatre supposées caractéristiques de la "Goyardine" (graphisme réalisé en 4 tons, ce qui est inexact, impression de superposition de cubes alors qu'il ne s'agit que de chevrons, un aspect tridimensionnel aussi large que haut, une répartition en cadence des éléments verbaux) ;
Qu'elles ajoutent que le sondage produit par la SA Goyard St-Honoré n'est pas pertinent car il n'a pas pris en considération la catégorie de personnes visée par les produits en cause (relevant du secteur du luxe où l'achat n'est déclenché qu'après une réflexion attentive sur ces produits en se focalisant sur la recherche de la marque) ;
Qu'elles font valoir que sur le plan visuel les signes en cause ne présentent pas la même structure, que sur le plan phonétique les dénominations "E Goyard Honoré Paris" et "Fauré Le Page Paris 1717" ne présentent aucune ressemblance si ce n'est le terme "Paris" totalement descriptif et que sur le plan conceptuel, aucune similarité n'existe entre les signes ;
Considérant ceci exposé, qu'il sera en premier lieu rappelé que du fait du prononcé de la déchéance des droits de la SA Goyard St-Honoré sur la marque n° 1 633 326 pour les produits et services qu'elle oppose, à une date antérieure à celle de l'usage qu'elle reproche aux sociétés Fauré Le Page, l'examen de la contrefaçon ne se fera qu'au regard des marques n° 3 365 528 et 004 748 729 ;
Considérant que les marques arguées de contrefaçon sont les marques françaises n° 3 839 811 (concédée en licence à la SAS Fauré Le Page Maroquinerie le 24 avril 2012) et internationale identique n° 1 105 848 déposées par la SAS Fauré Le Page Paris respectivement les 17 juin 2011 et 05 décembre 2011 telles que décrites plus haut ;
Considérant que ces marques n'étant pas la reproduction à l'identique des marques n° 3 365 528 et 004 748 729, il convient de rechercher s'il n'existe pas, entre elles, un risque de confusion (qui comprend le risque d'association), lequel doit être apprécié globalement en se fondant sur l'impression d'ensemble produite par les deux marques au regard de leurs éléments dominants et distinctifs et en tenant compte de tous les facteurs pertinents du cas d'espèce ;
Que la comparaison doit s'effectuer avec les marques premières telles que déposées ;
Considérant que les marques n° 3 839 811 et 1 105 848 ont notamment été déposées pour désigner en classe 18 les produits suivants : "Cuir et imitations du cuir, malles et valises ; sacs de voyage, trousses de voyage, sacs à mains, portefeuilles, porte-monnaie, porte-cartes (portefeuilles), mallettes, cartables, serviettes (maroquinerie)" qui sont identiques et/ou similaires aux produits des marques n° 3 365 528 et 004 748 729 opposés par la SA Goyard St-Honoré ;
Considérant que visuellement, au-delà d'une démonstration laborieuse de la SA Goyard St-Honoré aux pages 17 à 20 de ses conclusions tendant à soutenir, à l'aide de surlignages en couleur purement arbitraires, que le motif reproduit aux marques n° 3 839 811 et 1 105 848 serait constitué d'une superposition de cubes comme le graphisme de la "Goyardine" et ferait apparaître la forme d'un "Y" évocatrice d'un chevron, il apparaît à l'examen objectif des signes en cause, auquel s'est livré la cour, que, comme l'ont très justement relevé les premiers juges, les marques secondes, arguées de contrefaçon, sont constituées à l'évidence d'un motif arrondi, en forme d'écailles, avec des stries sous forme de traits continus, dans différents sens, les dénominations "Fauré Le Page" et "Paris 1717" s'incrustant à intervalles réguliers dans le signe, de façon arrondie sans qu'on puisse y distinguer la moindre forme en "Y", alors que les marques premières sont constituées d'une intersection de lignes verticales et obliques, en pointillé, formant des "Y", la mention "E Goyard Honoré Paris" s'incrustant dans le motif, pour épouser la forme du "Y", l'ensemble évoquant des chevrons entrelacés ;
Considérant que phonétiquement, les signes n'ont en commun que le terme "Paris" purement descriptif, les signes premiers alias [...] se prononcent "Fauré Le Page Paris 1717" ;
Considérant que conceptuellement, si un faible degré de similitude entre les signes peut être compensé par un degré de similitude élevé entre les produits ou les services désignés, encore faut-il qu'il puisse exister un risque de confusion entre les signes ;
Considérant que sur ce point la SA Goyard St-Honoré produit les résultats d'un sondage d'opinion (pièce 81 de son dossier) que les premiers juges ont à juste titre considéré comme non significatif dans la mesure où l'enquête a porté non seulement sur les marques mais essentiellement sur des modèles de sacs, présentés ensemble pour que les personnes sondées puissent juger de l'effet de gamme ;
Qu'en outre le public pertinent pour ces produits de luxe, hauts de gamme, n'est pas le consommateur moyen mais un amateur fortuné et éclairé qui ne procédera à un achat qu'après un examen approfondi des produits en cause, particulièrement attaché à la marque ;
Qu'il est significatif de relever, à la lecture de ce sondage d'opinion, qu'en vision rapprochée des deux graphismes, ce qui correspond au comportement du public pertinent, seulement 22 % des sondés trouvent ces graphiques ressemblants alors que 51 % ne leur trouvent aucune ressemblance ;
Qu'enfin les extraits de blogs versés aux débats en pièces 39 à 43, 52 et 99 ne sont pas davantage pertinents, outre que l'identité des intervenants sur ces blogs est inconnue, il apparaît qu'aucun d'eux n'affirme avoir confondu les deux marques, certains se livrant seulement à une comparaison entre les produits non seulement de ces deux marques mais également d'autres marques de luxe telles que Louis Vuitton, Moreau, Moynat, etc ;
Considérant dès lors qu'en l'état des importantes différences visuelles, phonétiques et conceptuelles entre les signes en cause pris dans leur ensemble, le consommateur moyennement attentif ne sera pas amené à croire que les signes contestés seraient la déclinaison ou l'adaptation des marques antérieures et qu'il n'existe donc pas de risque de confusion entre les signes en cause ;
Considérant en conséquence que le jugement entrepris sera confirmé en ce qu'il a débouté la SA Goyard St-Honoré de ses demandes en contrefaçon de marques et de ses demandes subséquentes ;
IV : Sur la demande en annulation des marques n° 3 839 811, 1 105 848, 3 839 809 et 1 105 847 pour déceptivité :
Considérant que la SA Goyard St-Honoré reprend devant la cour sa demande en annulation des marques n° 3 839 811, 1 105 848, 3 839 809 et 1 105 847 pour réceptivité au motif que le terme "1717" qui y figure laisse croire au public que la date de création des sociétés Fauré Le Page remonterait à 1717 puisque cette date est associée à la dénomination "Fauré Le Page" alors que ces deux sociétés ont été créées respectivement en 2009 et 2011 ;
Considérant que les sociétés Fauré Le Page répliquent que la Maison Fauré Le Page a été créée en 1716 et est vieille de 300 ans, une différence de date d'un an ne revêtant pas à l'égard du public une importance particulière ; qu'elles affirment pouvoir légitimement se prévaloir de l'histoire, des titres, du prestige et de l'année de création de la Maison Fauré Le Page, l'universalité du patrimoine de celle-ci ayant été transmise en 1992 au profit de la SARL Saillard Paris, de telle sorte que la SAS Fauré Le Page Paris est bien devenue le légitime successeur de la Maison Fauré Le Page ;
Qu'elles font ainsi valoir que l'insertion de la date "1717" au sein de leurs marques ne trompe en rien le consommateur, laissant tout au plus véhiculer le message selon lequel les origines de la marque "Fauré Le Page" remontent au début du XVIIIe siècle, ce qui est totalement exact ;
Considérant ceci exposé, que l'article L. 711-3, sous c) du Code de la propriété intellectuelle dispose que "ne peut être adopté comme marque ou élément de marque un signe (.) de nature à tromper le public, notamment sur la nature, la qualité ou la provenance géographique du produit ou du service"
Que ce texte, transposition en droit interne de l'article 3, § 1er, sous g) de la directive 89/104CEE du Conseil, du 21 décembre 1988, doit être interprété à la lumière de celle-ci et de la jurisprudence de la Cour de justice de l'Union européenne qui, dans son arrêt Elizabeth Florence Emanuel du 30 mars 2006, a précisé que le caractère trompeur suppose que la marque crée un risque de confusion "dans l'esprit d'un consommateur moyen", à condition toutefois "que l'on puisse retenir l'existence d'une tromperie effective ou d'un risque suffisamment grave de tromperie du consommateur" (point 47 de l'arrêt) ;
Considérant qu'en l'espèce il est constant que la Maison Fauré Le Page a été créée en 1716 et qu'elle a toujours eu une activité de maroquinerie liée à son activité principale, à l'origine, d'armurier (ceintures, bretelles, sacs à gibiers, laisses, boîtes à fusil) ; que cette maison s'est transformée en société anonyme en 1925 (pièce 172 des sociétés Fauré Le Page) avant d'être dissoute le 27 novembre 1992 et de faire l'objet d'un transfert universel de son patrimoine à son associé unique, la SARL Saillard Paris (pièce 3), laquelle a déposé le 5 juin 1989 la marque "Fauré Le Page" n° 1 534 660 ;
Que cette société, souhaitant cesser ses activités, a cédé cette marque le 28 octobre 2009 (pièce 4) à la SAS Fauré Le Page Paris créée à cette fin le 20 octobre de la même année ; qu'ainsi la SAS Fauré Le Page peut légitimement apparaître comme le successeur de la Maison Fauré Le Page ;
Qu'il apparaît ainsi que la mention "1717" figurant sur les marques n° 3 839 809 et 1 105 847 accolée au terme "Paris" sous la séquence "Fauré Le Page", en plus petits caractères d'imprimerie, ainsi que sur les marques n° 3 839 811 et 1 105 848, ne sera pas nécessairement interprétée par le public pertinent comme une référence à la date de création de la SAS Fauré Le Page mais plus certainement comme se référant à l'époque de la création de la maison éponyme dont elle est le successeur, la différence d'une année n'étant pas significative ;
Qu'il n'est donc démontré aucune tromperie effective du consommateur, ni même un risque suffisamment grave de tromperie au sens de la jurisprudence communautaire, de telle sorte que le jugement entrepris sera confirmé en ce qu'il a rejeté les demandes d'annulation des marques n° 3 839 811, 1 105 848, 3 839 809 et 1 105 847 pour réceptivité ;
V : Sur l'action en contrefaçon de droits d'auteur :
Considérant que la SA Goyard St-Honoré expose avoir conçu et réalisé plusieurs créations en "Goyardine", notamment les sacs "Ambassade" (créé en 2000), "Comores" (créé en 2002), "Boeing 30" (créé en 2008) et "Saint Louis" (créé en 2001) ;
Qu'elle indique être investie des droits d'auteur sur ces œuvres et les commercialiser sous son nom, bénéficiant ainsi de la présomption de titularité des droits de propriété intellectuelle sur ces sacs ;
Qu'elle affirme que ces sacs sont originaux en raison de la combinaison d'un matériau particulier (toile enduite possédant des motifs répétés et originaux), de caractéristiques particulières, d'une forme générale et de proportions leur conférant une physionomie qui leur est propre et identitaire de la Maison Goyard, les distinguant des autres modèles du même genre et exprimant la personnalité de leur auteur ;
Qu'elle soutient que les sacs des sociétés Fauré Le Page reprennent les caractéristiques originales de ses créations, leur conférant une impression visuelle d'ensemble quasi-identique, ce que confirme le sondage réalisé à sa demande où une majorité de Français considère que les sacs sont fortement, voire très fortement ressemblants ;
Qu'elle en conclut que les sociétés Fauré Le Page se livrent à des actes de contrefaçon de droit d'auteur lui causant un préjudice dont elle est en droit d'obtenir réparation ;
Considérant que les sociétés Fauré Le Page répliquent que la SA Goyard St-Honoré doit être déclarée irrecevable en ses demandes dès lors qu'elle ne justifie ni l'existence de ses droits, ni des circonstances de leur création ;
Qu'elles font valoir que l'auteur des modèles revendiqués n'est autre que Mr Jean-Michel Signoles et que la SA Goyard St-Honoré ne produit aucun élément de nature à prouver que celui-ci lui aurait cédé ses droits ;
Qu'à titre subsidiaire, si la SA Goyard St-Honoré devait être déclarée recevable à agir en contrefaçon de droit d'auteur sur les sacs revendiqués, elles affirment que ces modèles sont dépourvus d'originalité et ne sont pas éligibles à la protection au titre du droit d'auteur ;
Qu'elles soutiennent que ces sacs font partie du fonds commun de la maroquinerie, s'inspirant très largement du domaine public, versant aux débats des "antériorités" de nature à détruire la prétendue originalité des modèles de sacs opposés ;
Qu'en ce qui concerne le grief de contrefaçon, elles exposent que les ressemblances pouvant exister entre les modèles de sacs litigieux tiennent au fait qu'ils appartiennent au même genre et qu'ils empruntent leurs composants au domaine public ;
Qu'elles en concluent au débouté de l'ensemble des demandes de la SA Goyard St-Honoré ;
Considérant ceci exposé, qu'en l'absence de revendication de la part des auteurs, fussent-ils identifiés, l'exploitation de l'œuvre par une personne morale sous son nom fait présumer, à l'égard des tiers recherchés pour contrefaçon, que cette personne morale est titulaire sur l'œuvre, qu'elle soit collective ou non, du droit de propriété incorporelle de l'auteur ;
Qu'en l'espèce il est constant que la SA Goyard St-Honoré commercialise les sacs revendiqués depuis leur création, soit respectivement entre les années 2000 et 2008 et qu'en l'absence de revendication de son auteur, cette société est, à l'égard des sociétés Fauré Le Page, présumée être titulaire des droits patrimoniaux d'auteur sur ces œuvres ;
Qu'ainsi la SA Goyard St-Honoré est bien recevable à agir en contrefaçon de droit d'auteur sur ces sacs, le jugement entrepris étant confirmé en ce qu'il a dit la SA Goyard St-Honoré recevable à agir sur le fondement du droit d'auteur ;
Considérant, sur le fond, qu'en ce qui concerne l'originalité des modèles de sacs "Comores", "Saint Louis", "Boeing 30" et "Ambassade", la cour se réfère expressément à l'analyse qu'en ont fait les premiers juges aux pages 18 à 21 du jugement entrepris, notamment en ce qui concerne les caractéristiques revendiquées par la SA Goyard St-Honoré quant à leur originalité ;
Que c'est par des motifs pertinents et exacts que la cour adopte, que le jugement entrepris a dit que l'unique originalité des sacs "Comores", "Ambassade" et "Saint Louis", tient à ce qu'ils sont réalisés dans la toile dite "Goyardine" dont l'originalité des motifs, reproduisant les marques n° 3 365 528 et 004 748 729, n'est pas quant à elle contestée ;
Qu'en effet pour le sac "Comores", il est produit aux débats des photographies de modèles de sacs Louis Vuitton remontant à 1991 et 1998 présentant déjà des caractéristiques identiques à celles revendiquées quant à la forme concave des côtés et aux anses en cuir de forme cylindrique prolongées de boucles "cavalier" de forme sensiblement rectangulaire, les autres caractéristiques (caractère réglable des boucles) ayant une finalité pratique ;
Que pour le sac "Saint Louis", il est produit diverses pièces remontant aux années quatre-vingt-dix présentant déjà des caractéristiques identiques à celles revendiquées quant à la forme hexagonale du cabas avec des anses fines en cuir et à la présence d'une pochette attachée à une lanière, de finalité essentiellement fonctionnelle, leur combinaison étant banale ;
Que pour le sac "Ambassade", il est également produit diverses pièces démontrant que sa forme générale était connu dès les années trente et qu'un sac Samsonite commercialisé en 1985 présentait déjà des caractéristiques identiques à celles revendiquées quant à la présence d'anses en cuir de forme cylindrique prolongées de boucles de forme sensiblement rectangulaire situées au bord de la partie supérieure du sac, avec une fermeture zippée et une bandoulière ;
Considérant qu'en ce qui concerne le sac "Boeing 30" l'originalité et l'apport créatif dans sa réalisation résident également, outre l'emploi de la toile "Goyardine", dans la présence, sur les côtés de la fermeture zippée, de deux larges bandes de cuir de forme particulière, qui ne répondent à aucune finalité pratique autre que purement esthétique ; qu'en revanche les autres caractéristiques revendiquées ne révèlent aucune originalité quant à l'existence d'anses en cuir cylindrique, prolongées de boucles avec une fermeture zippée large et apparente, prolongée sur les côtés afin qu'elle puisse se rabattre et y être fixée (modèles identiques commercialisés depuis les années quatre-vingt-dix), les autres caractéristiques (réglage en hauteur des anses) ne répondant qu'à une finalité pratique ;
Considérant que si la contrefaçon s'apprécie par les ressemblances et non les différences, les ressemblances peuvent s'expliquer par des emprunts communs au domaine public, par le caractère fonctionnel de certains éléments, par les règles de l'art ou par le genre ;
Considérant qu'il convient donc de dégager les éléments caractérisant l'originalité des différents sacs, tels qu'analysés plus haut, sans tenir compte des éléments qui relèvent par leur nature du domaine public, de leur caractère fonctionnel ou de la reprise d'un genre ;
Considérant que c'est ainsi que, par des motifs pertinents et exacts que la cour adopte, le jugement entrepris a dit que pour la contrefaçon des sacs "Comores", "Saint Louis" et "Ambassade", la toile utilisée par les sociétés Fauré Le Page pour les sacs "Cabas Vertical", "Daily Battle" et "Vaillant" ne constitue pas l'imitation de la toile "Goyardine", seul élément caractéristique de l'originalité des sacs revendiqués ;
Que pour la contrefaçon du sac "Boeing 30" la toile utilisée par les sociétés Fauré Le Page pour le sac "Goupille" ne constitue pas davantage l'imitation de la toile "Goyardine" et que les autres éléments caractéristiques de l'originalité de ce sac (larges bandes de cuir jouxtant la fermeture) ne sont pas reproduits sur le sac argué de contrefaçon ;
Qu'il apparaît donc que les seules ressemblances entre ces sacs ne procèdent que de la reprise d'éléments du domaine public, qui ne sont pas protégeables, de telle sorte que la contrefaçon n'est pas constituée ;
Considérant en conséquence que le jugement entrepris sera confirmé en ce qu'il a débouté la SA Goyard St-Honoré de ses demandes en contrefaçon de droits d'auteur ;
VI : Sur l'action en concurrence déloyale et parasitaire :
Considérant que la SA Goyard St-Honoré affirme que la création des sociétés Fauré Le Page est intervenue dans un contexte où des sociétés se présentant comme historiques, sont nouvellement créées et ressuscitent des enseignes de luxe afin de profiter du regain d'intérêt que témoigne le public pour les créations à base de toile enduite de malletiers français renommés, espérant ainsi concurrencer ou se mettre dans le sillage des maisons de luxe n'ayant jamais cessé d'exister depuis leur création ;
Qu'elle soutient que les sociétés Fauré Le Page se livrent à une pratique commerciale trompeuse, constitutive d'un acte de concurrence déloyale, en communiquant auprès du public une date de création erronée et trompeuse, le fonds de commerce de la Maison Fauré Le Page appartenant à la société Saillard alors que les sociétés Fauré Le Page n'ont été créées respectivement qu'en 2009 et 2011 et n'ont aucun lien avec la Maison Fauré Le Page, armurier, créée en 1716 ;
Qu'elle précise que cette pratique commerciale trompeuse vise à tromper le public en s'inventant une histoire et un prestige pour ces sociétés en alias [...] parisienne excellant dans de nombreux métiers d'art, notamment la maroquinerie ;
Qu'elle fait valoir que ce comportement déloyal permet aux sociétés Fauré Le Page d'économiser plusieurs millions d'euros d'investissements et porte atteinte à l'image de marque des maisons historiques du secteur, notamment à la Maison Goyard, ce qui a pour conséquence d'amoindrir la valeur patrimoniale des titres, des médailles, des récompenses, du caractère historique d'un fonds de commerce vieux de plusieurs siècles ;
Qu'elle ajoute que les articles de presse communiqués par les sociétés Fauré Le Page sont constitutifs de publicités déguisées, pratique prohibée par l'article L. 121-1-1, 11° du Code de la consommation (désormais article L. 121-4, 11°) ;
Qu'elle soutient également que les dépôts par les sociétés Fauré Le Page de marques réceptives sont également constitutifs d'actes de concurrence déloyale ;
Qu'elle invoque en outre la volonté des sociétés Fauré Le Page de créer un effet de gamme en reproduisant plusieurs modèles de sacs de sa collection en choisissant délibérément ses produits phares, faisant également état de la mauvaise qualité et des prix inférieurs des produits des sociétés Fauré Le Page ;
Qu'elle critique également le suivisme des sociétés Fauré Le Page qui se sont placées dans son sillage en adoptant une stratégie visant à suivre ce qu'elle fait (utilisation d'un tissu de couleur jaune particulier pour désigner ses produits), qui reprennent l'aménagement de ses comptoirs de vente et en recherchant une proximité de leurs magasins avec son comptoir de vente historique ;
Considérant que les sociétés Fauré Le Page répliquent qu'on ne voit pas en quoi l'utilisation de la date de 1717 viendrait tromper le consommateur sur le caractère historique de la Maison Fauré Le Page vieille de 300 ans, une différence de date d'un an ne revêtant pas une importance particulière à l'égard du public et que c'est de manière totalement légitime qu'elle bénéficient et communiquent sur l'histoire, le savoir-faire et le prestige associés à la marque "Fauré Le Page" dont elles sont les détentrices exclusives ;
Qu'elles ajoutent que la SA Goyard St-Honoré cherche à s'arroger un monopole indu sur le marché dit du "it bag" dont l'origine remonte aux années cinquante ;
Qu'elles contestent les accusations de mauvaise qualité et de vil prix de leurs modèles et qu'en ce qui concerne l'effet de gamme prétendu, elles vont valoir d'une part qu'il n'est pas démontré que les modèles "Ambassade", "Comores", "Boeing 30" et "Saint Louis" seraient des modèles phares de la SA Goyard St-Honoré et d'autre part que ces modèles font partie du fonds commun de la maroquinerie à tel point que nombre de maisons possèdent toutes dans leurs collections ces modèles ;
Qu'elles contestent encore les accusations de suivisme, les éléments listés par la SA Goyard St-Honoré ne constituant pas ses codes identitaires, la réalisation de leur corner résultant d'une démarche parfaitement légitime de leur part ;
Qu'elles contestent enfin tout comportement parasitaire en l'absence de preuve liée aux investissements, le quartier Saint-Honoré de Paris n'étant pas le privilège de la SA Goyard St-Honoré, pas plus que les partenariats entre maisons de luxe et le recours à la couleur jaune ;
Considérant ceci exposé, que les articles L. 121-1 et L. 121-2 du Code de la consommation, dans leur rédaction résultant de la transposition en droit interne de la directive 2005/29/CE du 11 mai 2005, sanctionnent toute pratique commerciale trompeuse (antérieurement dénommée publicité) reposant sur des allégations, des indications ou des présentations fausses ou de nature à induire en erreur portant notamment sur l'identité, les qualités, les aptitudes et les droits du professionnel ;
Considérant qu'il sera rappelé que les marques "Fauré Le Page - Paris 1717" n° 3 839 809 et 1 105 847, tout comme les marques figuratives n° 3 839 811 et 1 105 848, n'ont pas été considérées comme des marques déceptives, frappées de nullité, du fait de la référence à la date de "1717" qui, ainsi qu'il l'a été analysé précédemment dans le cadre de la demande en annulation de ces marques, sera perçue par le public pertinent non pas comme une référence à la date de création des sociétés Fauré Le Page mais plus certainement comme se référant à l'époque de la création en 1716 de la Maison Fauré Le Page (la différence d'une année n'étant pas significative) dont les sociétés Fauré Le Page sont légitimement les successeurs ainsi qu'il l'a été analysé plus haut ;
Que c'est à juste titre que les premiers juges ont relevé que le fait pour les sociétés Fauré Le Page de communiquer sur l'ancienneté de la maison éponyme dont elles ont repris la marque, même en l'absence de cession de fonds, n'est pas en soi illégitime et ne saurait en tout état de cause pas caractériser une pratique trompeuse au sens des articles L. 121-1 et L. 121-2 susvisés, la Maison Fauré Le Page ayant en effet toujours eu une activité de maroquinerie liée à son activité principale d'armurier (ceintures, bretelles, sacs à gibiers, laisses, boîtes à fusil) ; qu'il sera en particulier relevé que cette communication précise bien qu'il s'agit d'une renaissance de la marque "Fauré Le Page" ainsi que cela ressort notamment des articles parus dans les revues "Elle" le 16 novembre 2012 (pièce 25 des sociétés Fauré Le Page) sous le titre "Actes de renaissance. Retour vers le passé ! De Carven à Courrèges en passant par Rodier, les marques cultes d'hier font leur retour en force. Analyse d'un revival chic et choc" ou "Le Point" le 27 septembre 2012 (pièce 26) : "Après Goyard, Moynat ou Moreau, d'anciens malletiers devenus fabricants d'it bags, un nouvel arrivant entre en piste : Fauré Le Page. Ce nom ne vous dit peut-être rien, mais cette maison est l'héritière d'une dynastie d'armuriers depuis près de trois siècles. (.) Fauré Le Page n'a jamais vraiment cessé son activité, mais, rachetée par des passionnés, la griffe dépose les armes pour se muer en maroquinier de luxe" ;
Considérant que si l'article L. 121-4, 11° du Code de la consommation dispose que sont également réputées trompeuses, au sens de l'article L. 121-2, les pratiques commerciales qui ont pour objet "d'utiliser un contenu rédactionnel dans les médias pour faire la promotion d'un produit ou d'un service alors que le professionnel a financé celle-ci lui-même, sans l'indiquer clairement dans le contenu ou à l'aide d'images ou de sons clairement identifiables par le consommateur", il apparaît que la SA Goyard St-Honoré ne justifie pas autrement que par ses propres affirmations que les articles de presse versés aux débats ne seraient que des publicités déguisées financées par les sociétés Fauré Le Page ;
Qu'en effet l'agence Favori n'est autre que le bureau de presse choisi par les sociétés Fauré Le Page pour assurer leur communication auprès des médias, sans qu'il soit démontré que cette agence serait l'auteur des articles parus dans la presse ;
Considérant qu'en ce qui concerne le prétendu effet de gamme, il n'est nullement démontré que les quatre modèles de sacs "Ambassade", "Comores", "Boeing 30" et "Saint Louis", qui sont les seuls invoqués par la SA Goyard St-Honoré, seraient les modèles "phares" de cette société alors qu'il n'est pas contesté qu'elle commercialise dans sa toile "Goyardine" de nombreux autres modèles et que le fait pour les sociétés Fauré Le Page de commercialiser, elles aussi parmi d'autres, quatre modèles ne faisant que reprendre des éléments du domaine public, n'est pas susceptible de créer un effet de gamme constitutif d'un acte de concurrence déloyale ;
Considérant qu'en ce qui concerne les prix inférieurs des produits commercialisés par les sociétés Fauré Le Page, il sera rappelé que le fait de commercialiser ses produits à un prix inférieur à celui de ses concurrents n'est pas en lui-même fautif dès lors qu'il ne s'agit pas d'un vil prix ou d'un prix à perte, ce qui n'est pas le cas en l'espèce, dans la mesure où le prix de vente des sacs des sociétés Fauré Le Page va de 530 euros pour le modèle "Daily Battle" à 1 490 euros pour le modèle "Vaillant" ;
Qu'en ce qui concerne la prétendue mauvaise qualité des produits commercialisés par les sociétés Fauré Le Page, il apparaît qu'elles utilisent deux types de toile, une forte composée de 50 % coton et 50 % polyester et une toile légère composée de 100 % coton, ces toiles étant ensuite enduites pour faire disparaître le grain de la toile avant des les imprimer au cadre à la lyonnaise (technique remontant au milieu du XIXe siècle) puis de les vernir ;
Que la doublure des sacs n'est pas entièrement synthétique puisqu'elle est composée de coton à 87 % et de polyuréthanne à 17 % et qu'il n'est au demeurant pas indiqué par la SA Goyard St-Honoré en quoi ces doublures seraient de ce seul fait de "mauvaise qualité" (titre du chapitre 3.4 de ses conclusions en page 85) ;
Qu'en ce qui concerne les critiques portées par la SA Goyard St-Honoré sur la moindre qualité des finitions (coutures intérieures qualifiées d'approximatives, fermetures à glissières risquant d'accrocher la toile, etc), force est de constater que celle-ci n'en justifie pas autrement que par ses seules affirmations péremptoires en pages 85 et 86 de ses conclusions, alors que par ailleurs il ressort des commentaires de consommateurs sur le blog spécialisé "purseblog.com" (au demeurant expressément qualifié par la SA Goyard St-Honoré en pages 18 et 19 de ses conclusions de "plus grande communauté d'amateurs de mode au monde" ayant "une influence réelle sur les ventes" et étant "un interlocuteur incontournable des marques de mode'), que la qualité de ses propres modèles est parfois sévèrement critiquée (pièces 420 et 421 des sociétés Fauré Le Page) ;
Considérant qu'en ce qui concerne l'accusation de suivisme, la SA Goyard St-Honoré admet elle-même "qu'il soit fréquent que des partenariats entre des sociétés existent dans le monde du luxe" (page 87 de ses conclusions) et qu'on ne voit pas en quoi le fait, pour les sociétés Fauré Le Page de répondre en 2015 à une commande de la Monnaie de Paris pour réaliser une malle destinée à accueillir une pièce en or d'un kilogramme de cet établissement serait constitutif d'un acte de concurrence déloyale parce que la SA Goyard St-Honoré a réalisé, avec cet établissement, l'année précédente une commande similaire, sauf à vouloir revendiquer un monopole sur ce type de partenariat ;
Que de même la SA Goyard St-Honoré ne saurait revendiquer un monopole sur la couleur jaune (référence Pantone 1235c) pour distinguer ces produits, cette couleur étant largement utilisée dans l'univers des produits de luxe, renvoyant notamment à la couleur jaune de l'or, ainsi qu'en justifient les sociétés Fauré Le Page qui reproduisent en pages 156 à 158 de leurs conclusions de nombreuses photographies émanant d'autres maisons de luxe ;
Considérant qu'en ce qui concerne le grief de reprise des aménagements des comptoirs de vente de la Maison Goyard destinés, selon celle-ci, à "rappeler l'ambiance feutrée, raffinée et non ostentatoire qui règne dans le comptoir de vente historique <adresse>) pour transporter le client dans l'atmosphère chaleureuse de ce comptoir tel qu'il était [au] début du XIXe siècle" (page 88 de ses conclusions), il sera relevé que les éléments listés comme constituant son Code identitaire en page 88 de ses conclusions (nom de l'enseigne en lettres dorées sur fond noir en partie haute, mention de l'activité, au demeurant inexacte, de "malletier depuis 1853", utilisation de couleurs chaudes, de chêne ciré foncé et de moulures, présentation des modèles dans des vitrines centrales à hauteur de hanches cerclées de métal dans une couleur chaude, de faible hauteur et surmontant des meubles pleins en chêne ciré) ne sont nullement repris dans les différents magasins de cette maison ;
Qu'il apparaît ainsi au vu des photographies reproduites par les sociétés Fauré Le Page en pages 123 à 130 de leurs conclusions, que les enseignes de plusieurs des boutiques de la SA Goyard St-Honoré ne reprennent pas le nom de la maison en lettres dorées sur fond noir (ton sur ton avec lettres gravées, lettres dorées en relief sur fond gris clair, lettres rétroéclairées, lettres noires sur fond doré, etc) ;
Que chacun des magasins de la Maison Goyard a une identité différente, ne reprenant pas forcément les caractéristiques propres à son "comptoir de vente historique", quant à la mention "malletier depuis 1853", à l'usage de couleurs chaudes et à la présence de vitrines centrales peu hautes surmontant des meubles pleins en chêne ciré ; que bien au contraire lorsque la boutique s'insère en tant que corner dans un grand magasin, tel que Le Printemps, elle reprend le style de ce magasin (pièce 305 des sociétés Fauré Le Page) ;
Qu'enfin, et d'une façon plus générale, l'utilisation de couleurs chaudes, de moulures ou de matériaux tels que le chêne ciré foncé est propre aux devantures de boutiques anciennes (en particulier à Paris) cherchant ainsi à donner une image de tradition, de raffinement et d'authenticité, ainsi qu'il en est justifié par les photographies reproduites en pages 134 à 141 des sociétés Fauré Le Page ;
Considérant que de ce fait il n'apparaît pas que les sociétés Fauré Le Page auraient cherché à reproduire, dans leurs propres boutiques, ce que la SA Goyard St-Honoré considère, à tort, comme les éléments de son Code identitaire alors surtout que les photographies anciennes des boutiques de la Maison Fauré Le Page au XIXe et au début du XXe siècle montrent que celle-ci recourait déjà à l'utilisation d'enseignes composées de lettres dorées sur fond noir et de moulures, ainsi qu'à l'alliance, courante chez les armuriers, du bois et de l'acier (pièce 211 des sociétés Fauré Le Page) ;
Considérant qu'en ce qui concerne la proximité du magasin de la SAS Fauré Le Page Maroquinier ouvert à Paris le 15 septembre 2012 <adress>, à exactement 262 mètres du "comptoir de vente historique" de la Maison Goyard <adresse>, ce seul fait ne saurait en lui-même constituer un acte fautif de concurrence déloyale, la SA Goyard St-Honoré ne pouvant revendiquer un monopole d'installation dans le quartier Saint-Honoré de Paris alors surtout que ce quartier est reconnu comme celui des boutiques et des hôtels de luxe de la capitale et qu'il a été le lieu historique de l'implantation de la Maison Le Page depuis le XVIIIe siècle ;
Considérant en conséquence que le jugement entrepris sera confirmé en ce qu'il a débouté la SA Goyard St-Honoré de ses demandes fondées sur la concurrence déloyale et le parasitisme ;
VII : Sur les autres demandes :
Considérant que les sociétés Fauré Le Page reprennent devant la cour leur demande en dommages et intérêts pour procédure abusive contre la SA Goyard St-Honoré à laquelle elles reprochent d'avoir engagé la présente action dans le seul but de leur nuire au moment même du lancement de leur première boutique et qu'en interjetant appel du jugement, elle prolonge artificiellement la procédure aux seules fins d'entraver le développement de leur activité, ce qui constitue selon elles un abus du droit d'ester en justice ;
Considérant que la SA Goyard St-Honoré affirme avoir fait valoir ses droits légitimes en justice et avoir exercé son droit d'appel comme tout justiciable ;
Considérant que le fait de succomber à une action en justice n'est pas en lui-même constitutif d'une faute susceptible d'engager la responsabilité civile de son auteur, qu'en effet tout justiciable peut se méprendre sur la portée de ses droits et qu'il n'est pas démontré que la SA Goyard St-Honoré aurait abusé de son droit d'ester en justice, ni d'user des voies de recours prévues par la loi ;
Qu'en conséquence le jugement entrepris sera confirmé en ce qu'il a débouté les sociétés Fauré Le Page de leurs demandes reconventionnelles en dommages et intérêts pour procédure abusive et qu'y ajoutant, elles seront également déboutées de leurs demandes à ce titre pour appel abusif ;
Considérant qu'il s'ensuit que les sociétés Fauré Le Page ne pourront qu'être déboutées de leurs demandes de publication judiciaire du présent arrêt à titre de mesure réparatrice complémentaire ;
Considérant de même que dans la mesure où la SA Goyard St-Honoré est déboutée de ses demandes en contrefaçon et en concurrence déloyale et parasitaire, elle ne peut qu'être déboutée de ses demandes de publication judiciaire d'un communiqué à titre de mesure réparatrice complémentaire ;
Considérant qu'il est équitable d'allouer aux sociétés Fauré Le Page globalement la somme complémentaire de 30 000 euros au titre des frais par elles exposés en cause d'appel et non compris dans les dépens, le jugement entrepris étant par ailleurs confirmé en ce qu'il a statué sur les frais irrépétibles de première instance ;
Considérant que la SA Goyard St-Honoré sera pour sa part, déboutée de sa demande en paiement au titre de l'article 700 du Code de procédure civile ;
Considérant que la SA Goyard St-Honoré, partie perdante en l'essentiel de son appel, sera condamnée au paiement des dépens d'appel, le jugement entrepris étant par ailleurs confirmé en ce qu'il a statué sur la charge des dépens de la procédure de première instance ;
Par ces motifs : LA COUR, statuant publiquement et contradictoirement ; Infirme le jugement entrepris en ce qu'il a limité l'irrecevabilité à agir en déchéance des droits de la SA Goyard St-Honoré sur ses marques n° 1 633 326 et 3 365 528 pour les articles pour fumeurs (marque n° 1 633 326) et les articles pour fumeurs non en métaux précieux à savoir cendriers, briquets, porte-cigares, porte-cigarettes (marque n° 3 365 528) et, statuant à nouveau de ce chef et y ajoutant : Déclare les sociétés Fauré Le Page irrecevables à agir en déchéance des droits de la SA Goyard St-Honoré pour les produits suivants : - Pour la marque 1 633 326 : "objets en métaux précieux et leurs alliages ou en plaqué, articles en carton, articles en cuir et imitations du cuir non compris dans d'autres classes que la 18, peaux, laisses, articles textiles non compris dans d'autres classes que la 24", - Pour la marque 3 365 528 : "crèmes, gels, huiles pour le bain à usage non médical ; déodorants à usage personnel ; laits, lotions, émulsions et crèmes à usage cosmétique pour le visage et pour le corps ; préparations pour les cheveux à usage non médical nommément laques, gels, crèmes, baumes, mousses et shampooings ; eaux de toilette et de Cologne ; Métaux précieux et leurs alliages (autres qu'à usage dentaire) et produits en ces matières ou en plaqué à savoir bagues (bijouterie), boucles d'oreilles (bijouterie), bracelets (bijouterie), breloques (bijouterie), broches (bijouterie), chaînes (bijouterie), chaînes de montres, colliers (bijouterie), épingles (bijouterie), parures (bijouterie), épingles de parures (bijouterie), anneaux (bijouterie), boucles en métaux précieux, ornements de chapeaux en métaux précieux ; bijouterie fantaisie ;pierres fines, perles (bijouterie) ; articles en papier et articles en carton à savoir : cartonnages, sacs, sachets, enveloppes, pochettes, pour l'emballage, en papier ; matériel d'instruction ou d'enseignement (à l'exception des appareils) ; photographies, revues, stylos, stylos bille, stylos mine ; manuels d'orientation, articles de bureau (à l'exception des meubles) ; sacs-housses de voyage pour vêtements ; coffrets destinés à contenir des articles de toilette dits " vanity-cases ", sacs à dos, sacs d'écoliers, pochettes, ombrelles, mouchoirs de poche [en matières textiles], linge de toilette ; robes, jupes, jupons, jupe-culotte, costumes, pantalons, shorts, bermudas, caleçons, chemises, chemisiers, corsages, tee-shirts, sweatshirts, gilets, vestes, cardigans, pullovers, chandails, parkas, anoraks, manteaux, gabardines, imperméables, écharpes, châles, bas, collants, pyjamas, robes de chambre, maillots de bain, peignoirs de bain souliers, sandales, bottes, bottines, pantoufles ; chapeaux, bérets, casquettes ", - Pour la marque 004 748 729 : "eaux de toilette et de Cologne; laits, lotions, émulsions et crèmes à usage cosmétique pour le visage et pour le corps; crèmes, gels, huiles pour le bain à usage non médical; déodorants à usage personnel; préparations pour les cheveux à usage non médical nommément laques, gels, crèmes, baumes, mousses et shampooings ; sacs-housses de voyage pour vêtements, malles, valises, coffrets destinés à contenir des articles de toilette dits "'vanity-cases'", sacs à dos, sacs d'écoliers, pochettes, articles de maroquinerie notamment portefeuilles, porte-monnaie non en métaux précieux, ombrelles" ; Infirme le jugement entrepris en ce qu'il a prononcé la déchéance des droits de la SA Goyard St-Honoré sur la marque n° 1 633 326 sur l'ensemble des produits et services désignés à l'enregistrement à l'exception des articles pour fumeurs et, statuant à nouveau de ce chef : Prononce la déchéance des droits de la SA Goyard St-Honoré sur la marque n° 1 633 326 à compter du 28 décembre 1996 pour les produits suivants : "Savons ; parfumerie, huiles essentielles, cosmétiques, lotions pour les cheveux ; dentifrices. Métaux précieux et leurs alliages. Papier et articles en papier, carton, articles de bureau. Cuir et imitations du cuir ; malles et valises ; parapluies, parasols et cannes. Sellerie. Tissus ; couvertures de lit et de table. Vêtements, chaussures, chapellerie. Colliers pour animaux" ; Infirme le jugement entrepris en ce qu'il a prononcé la déchéance des droits de la SA Goyard St-Honoré sur la marque n° 3 365 528 sur un ensemble de produits désignés à son enregistrement et, statuant à nouveau de ce chef : Prononce la déchéance des droits de la SA Goyard St-Honoré sur la marque n° 3 365 528 à compter du 18 novembre 2010 pour les produits suivants : "sacs de plage, cartables, étuis pour clés (maroquinerie), parapluies, parasols, cannes, papier ; carton ; produits de l'imprimerie, à savoir livres, imprimés, journaux, périodiques, magazines, affiches, photographies ; instruments à écrire, savons de toilette ; parfums ; huiles essentielles à usage personnel ; cosmétiques, métaux précieux et leurs alliages, chaînes de montres, écrins en métaux précieux, coffrets à bijoux en métaux précieux ; joaillerie, bijouterie, pierres précieuses ; horlogerie et instruments chronométriques ; montres, bracelets de montres, montre-bracelet, Vêtements (habillement) pour femmes, hommes et enfants à savoir chemises, fourrures, foulards, gants, cravates, ceintures (habillement), chaussettes, sous-vêtements ; chaussures (à l'exception des chaussures orthopédiques), chaussons, Tissus à usage textile et produits textiles à savoir linge de bain [à l'exception de l'habillement], linge de maison, linge de lit, linge de table [en matières textiles]" ; Y ajoutant : Prononce la déchéance des droits de la SA Goyard St-Honoré sur la marque n° 004 748 729 à compter du 11 juin 2014 pour les produits suivants : "sacs de plage, cartables, étuis pour clés (maroquinerie), parapluies, parasols, cannes, savons de toilette ; parfums ; huiles essentielles à usage personnel ; cosmétiques" ; Dit que le présent arrêt sera transmis par le greffe, à la requête de la partie la plus diligente, au directeur général de l'INPI pour transcription au Registre national des marques ; Confirme pour le surplus le jugement entrepris ; Y ajoutant : Déboute les sociétés Fauré Le Page de leur demande reconventionnelle en dommages et intérêts pour appel abusif ; Déboute les sociétés Fauré Le Page de leur demande de publication judiciaire du présent arrêt ; Déboute la SA Goyard St-Honoré de sa demande de publication judiciaire d'un communiqué ; Condamne la SA Goyard St-Honoré à payer aux sociétés Fauré Le Page la somme complémentaire globale de trente mille euros (30 000 euros) au titre des frais exposés en cause d'appel et non compris dans les dépens ; Déboute la SA Goyard St-Honoré de sa demande en paiement au titre de l'article 700 du Code de procédure civile ; Condamne la SA Goyard St-Honoré aux dépens de la procédure d'appel, lesquels seront recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du Code de procédure civile.