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Décisions

CA Paris, Pôle 5 ch. 2, 4 novembre 2016, n° 15-23884

PARIS

Arrêt

PARTIES

Demandeur :

CSF (SAS), Carrefour Hypermarchés (SAS)

Défendeur :

Galec (Sté), Luxdis (SAS), Chalondis (SAS), Kervilly (SAS), Caen Distribution (SAS), Rosendael Distribution (SAS), Alençon Distribution (SAS), Hyper Saint Aunes (SAS)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Perrin

Conseillers :

Mmes Nerot, Renard

Avocats :

Mes Guerre, Moreau-Margotin, Olivier, Parleani, Gacouin, Liger, Hallouet, Lugosi, Tisseyre

T. com. Paris, 15e ch., du 9 nov. 2015

9 novembre 2015

A partir du mois de février 2015, les adhérents de la société coopérative à capital variable Galec (Groupement d'achats des centres Leclerc) ont diffusé, au niveau local, par voie de presse, par voie d'affichage en magasin avec un renvoi au site Internet de la SC Galec " www quiestlemoinscher.com " ainsi que sur l'application smartphone dudit site, une publicité comparative mentionnant le niveau indiciel des prix pratiqués par diverses enseignes de la grande distribution et illustrant les écarts au moyen d'un graphique, avec le slogan : " Votre magasin Leclerc est moins cher ".

Entre le 3 et le 21 avril 2015, un spot et une affiche ont été diffusés au niveau national à la télévision, sur Internet et dans la presse quotidienne avec le slogan suivant : " Vous pouvez faire le tour de la France partout où il y a un E. Leclerc, il est le moins cher ".

Ces publicités visant notamment les prix pratiqués au sein des magasins à l'enseigne " Carrefour ", " Carrefour Market " et " Carrefour Drive ", la société Carrefour Hypermarchés SAS et la société CSF SAS (qui exploite les magasins à l'enseigne " Carrefour Market " et gère un réseau de magasins franchisés), estimant que ces publicités comparatives émanant de leurs concurrents présentaient des insuffisances communes les rendant trompeuses pour le consommateur et, par ailleurs, déloyales et dénigrantes à leur endroit, ont d'abord mis en demeure la SC Galec et ses adhérents de faire cesser la diffusion de chacune de ces publicités, en premier lieu par l'intermédiaire des directeurs de leurs magasins puis directement.

Après avoir fait procéder à des mesures de constat, elles ont ensuite assigné à bref délai, dûment autorisées, la SC Galec, ceci par acte du 7 mai 2015, et, par actes séparés, sept magasins à l'enseigne " Leclerc " adhérents au Galec (les sociétés Alençon Distribution, Hyper Saint-Aunés, Luxdis, Chalondis, Kervilly, Caen Distribution et Rosendeal Distribution SDR) aux fins de cessation sous astreinte de ces diverses diffusions et de réparation, en nature et par équivalent, du préjudice qu'elles considèrent avoir subi.

Par jugement contradictoire rendu le 8 novembre 2015, le Tribunal de commerce de Paris a, en substance et sans prononcer l'exécution provisoire, rejeté le moyen d'irrecevabilité présenté par les sociétés Caen Distribution et Alençon Distribution, débouté les requérantes de l'intégralité de leurs prétentions en les condamnant in solidum à verser à chacune des sociétés défenderesses la somme de 10 000 euros par application de l'article 700 du Code de procédure civile et à supporter les dépens, en déboutant la SC Galec du surplus de ses réclamations.

Par dernières conclusions (n° 4) notifiées le 28 septembre 2016, la société par actions simplifiée Carrefour Hypermarchés et la société par actions simplifiée CSF, appelantes, demandent pour l'essentiel à la cour, au visa de l'article 1382 du Code civil (futur article 1240) et des articles L. 121-1, L. 121-8, L. 121-9 et L. 121-12 du Code de la consommation (devenus L. 121-2, L. 122-1, L. 122-2 et L. 122-5), d'infirmer le jugement sauf en ses dispositions rejetant le moyen d'irrecevabilité et :

- de débouter l'ensemble des intimés de l'ensemble de leurs prétentions,

- de considérer qu'en répondant de manière tardive et incomplète à leurs demandes, les intimés (hormis la société Rosendael Distribution) n'ont pas démontré l'exactitude matérielle des énonciations, indications et présentations contenues dans les deux publicités précitées et, notamment, l'exactitude de leurs propres prix,

- de considérer que les huit intimées ont commis des actes de concurrence déloyale à leur préjudice en diffusant des publicités déloyales, trompeuses et dénigrantes sous le titre " votre magasin E. Leclerc moins cher ! ") notamment en ce qu'elles sont fondées sur des critères de comparaison différents (nombre de produits et périodes de relevés différents) et présentées sur une même page sous forme de classement entre les enseignes,

- de considérer que la SC Galec a commis des actes de concurrence déloyale à leur préjudice en diffusant une publicité déloyale, trompeuse et dénigrante sous le titre " vous pouvez faire le tour de la France, partout où il y a un E. Leclerc, il est le moins cher ", notamment en ce qu'elle est fondée sur des critères de comparaison différents (nombre de produits et périodes de relevés différents) et trop générale,

- de prononcer des mesures d'interdiction sous astreinte à l'encontre de ces huit intimées et de publication (par voie de presse et, sous astreinte, sur Internet) ainsi que d'affichage, également sous astreinte, en magasin du " jugement à intervenir ", la cour s'en réservant la liquidation,

- de condamner la SC Galec à leur verser la somme indemnitaire de 2,5 millions d'euros et chacune des sept autres sociétés intimées au paiement de la somme de 100 000 euros en réparation du préjudice résultant de la diffusion de ces publicités, au niveau national (pour le premier) et au niveau local (pour les sept autres sociétés intimées),

- de les condamner enfin " solidairement " à leur verser une somme globale de 30 000 euros en application de l'article 700 du Code de procédure civile et à supporter les entiers dépens.

Par dernières conclusions notifiées le 28 septembre 2016, la société Coopérative à capital variable Galec prie, en substance, la cour, visant les articles L. 121-8 et suivants du Code de la consommation transposant la directive 2006/114 telle qu'interprétée par la Cour de justice de l'Union européenne et l'article 1382 du Code civil, de confirmer le jugement en toutes ses dispositions, de débouter les appelantes de leurs entières prétentions en les condamnant " solidairement " à lui verser la somme de 30 000 euros et à supporter tous les dépens.

Par dernières conclusions séparées, toutes notifiées le 28 septembre 2016 et ayant semblable dispositif, la société par actions simplifiée Caen Distribution, la société par actions simplifiée Chalondis, la société par actions simplifiée Rosendeal Distribution, la société par actions simplifiée Luxdis, demandent pour l'essentiel à la cour, au visa des articles L. 121-8 et suivants du Code de la consommation transposant la directive 2006/114 telle qu'interprétée par la Cour de justice de l'Union européenne et 1382 du Code civil :

- d'infirmer le jugement en ce qu'il a débouté les sociétés Caen Distribution et Rosendeal Distribution de leur demande tendant à voir déclarer irrecevable l'action de la société CSF et de déclarer irrecevable l'action de cette dernière (à l'encontre de chacune de ces quatre concluantes),

- de le confirmer pour le surplus,

- de débouter les appelantes de toutes leurs prétentions en les condamnant " solidairement " à verser (à chacune) la somme de 30 000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile et à supporter tous les dépens.

Par dernières conclusions notifiées le 28 septembre 2016, la société par actions simplifiée Kervilly demande pour l'essentiel à la cour, au visa des articles L. 121-8 et suivants du Code de la consommation transposant la directive 2006/114 telle qu'interprétée par la Cour de justice de l'Union européenne et 1382 du Code civil, de confirmer le jugement, de débouter les appelantes de toutes leurs prétentions en les condamnant " solidairement " à lui verser la somme de 30 000 euros en application de l'article 700 du Code de procédure civile et à supporter les entiers dépens.

Par dernières conclusions notifiées le 26 septembre 2016, la société par actions simplifiée Hyper Saint-Aunès prie la cour, au visa des articles L 121-8 et suivants du Code de la consommation et 1382 du Code civil, de confirmer le jugement, de débouter les appelantes de toutes leurs prétentions et de les condamner " solidairement " à lui verser la somme de 20 000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile.

Par dernières conclusions notifiées le 28 septembre 2016, la société par actions simplifiée Alençon Distribution demande en substance à la cour, au visa de la directive 2006/114/CE, des articles 121-8 et suivants et L. 121-1 du Code de la consommation, 1382 du Code civil, de confirmer le jugement, de débouter les appelantes de toutes leurs prétentions, de les condamner " solidairement " à lui verser deux fois la somme de 10 000 euros, au titre des frais irrépétibles de première instance et ceux d'appel, et à supporter les entiers dépens.

Sur ce,

Sur la recevabilité à agir de la société CSF à l'encontre des sociétés Rosendeal Distribution, Caen Distribution, Luxdis et Chalondis

Considérant que pour voir infirmer la décision des juges consulaires énonçant que la société CSF a intérêt à agir dès lors que les sociétés Rosendeal et Caen Distribution ont effectivement participé à la campagne publicitaire sur le site " quiestlemoinscher.com " au même titre que tous les adhérents, ces deux sociétés, auxquelles s'adjoignent en cause d'appel les sociétés Luxdis et Chalondis, font état d'une publicité comparative les concernant qui ne fut diffusée qu'au niveau local et sans se référer à un quelconque supermarché à l'enseigne " Carrefour Market ", ajoutant que la SC Galec a seule conçu et édité la publicité comparant les prix des magasins E. Leclerc et ceux des supermarchés Carrefour Market ;

Mais considérant qu'à juste titre les appelantes, rappelant la généralité des termes de l'article 2 du statut de la SC Galec, opposent à cette fin de non-recevoir le fait que toute action de communication de la SC Galec bénéficie à l'ensemble de ses adhérents et même lorsqu'elles ne visent pas nommément l'enseigne " Carrefour Market ", les publicités incriminées diffusées localement figurant aux côtés d'autres publicités visant cette enseigne sur l'application mobile du site ;

Que le moyen ne peut prospérer si bien que le jugement doit être confirmé, en y ajoutant les sociétés Luxdis et Chalondis ;

Sur l'obligation de l'annonceur de prouver dans un bref délai l'exactitude matérielle des énonciations, indications et présentations contenues dans la publicité au sens de l'article L. 121-12 du Code de la consommation ;

Considérant qu'au visa de cet article exigeant de l'annonceur qu'il soit en mesure de prouver l'exactitude matérielle de ces différents éléments, les appelantes font valoir qu'il s'agit d'une disposition qui ne se confond pas avec les griefs tirés des conditions de licéité de la publicité comparative et reprochent aux premiers juges d'en avoir jugé autrement en considérant qu'elles contestaient la méthode sans pour autant contester l'exactitude des prix relevés, renversant ainsi, selon elles, la charge de la preuve prévue par ce texte ;

Que la méconnaissance de ces dispositions peut permettre, ajoutent-elles, de sanctionner l'annonceur indépendamment de la question de la licéité de la publicité et qu'elles entendent démontrer, en l'espèce, d'abord, que la communication de ces éléments ne s'est pas faite dans le bref délai requis par ce texte (citant les sociétés Kervilly, Chalondis et Hyper Saint-Aunés et invoquant un délai de réponse d'un mois), ensuite, que les informations communiquées étaient insuffisantes (citant, pour les adhérents, les sociétés Hyper Saint-Aunés, Kervilly, Chalondis, Luxdis, Caen Distribution, Alençon Distribution en affirmant que l'absence de communication des documents sollicités les a empêchées de procéder à des vérifications et reprochant en particulier à la SC Galec, multipliant les réponses incomplètes, de les avoir tardivement renvoyées vers des sites devenus inaccessibles) et enfin que les prix " sorties de caisse " collectés par les magasins et fournis par la SC Galec constituent un élément de preuve contestable ;

Considérant, ceci exposé et s'agissant du respect du bref délai, que les appelantes peuvent, certes, se prévaloir d'un nombre important de correspondances " sur le fondement de l'article L. 121-12 du Code de la consommation " qui ont, notamment, été envoyées aux adhérents par des concurrents locaux (pièces 16 à 59) et, par ailleurs, de mises en demeure adressées le 31 mars 2015 à la SC Galec puis, à la suite de la diffusion de la campagne publicitaire d'ampleur nationale, le 8 avril 2015 avec, en outre, mise en demeure de cesser cette communication, et enfin les 17 et 20 avril 2015 ;

Que s'il est vrai que cet article L. 121-12 fait peser sur l'annonceur la charge de la preuve de l'exactitude matérielle des " énonciations, indications et présentations " contenues dans la publicité et s'il requiert que cette preuve soit administrée " dans un bref délai ", il ressort de la présentation des publicités comparatives incriminées, ainsi que l'indiquait la SC Galec dans sa réponse du 12 avril 2015 et comme le font valoir les sociétés intimées, qu'elles renvoyaient à la consultation du site " quiestlemoinscher.com ", tout comme la publicité diffusée à l'échelle nationale donnant, quant à elle, des précisions sur les dates de relevés de prix, le nombre de produits concernés avec un renvoi clairement exprimé (" plus d'informations et détails des prix ") à ce même site ;

Que la directive 2006/104/CE à la lumière de laquelle doit être interprété le droit national, abrogeant en la codifiant la directive 84/450/CEE, reprend en son article 7 (transposé à l'article L. 121-12 du Code la consommation), en termes identiques, l'article 6 de la première directive et que la juridiction communautaire a été appelée à se prononcer sur l'exigence de vérifiabilité posée par cette première directive (CJUE, 19 septembre 2006, Lidl Belgium GmbH) ;

Qu'ainsi et s'agissant de la preuve à bref délai de l'exactitude matérielle de la comparaison et précision étant donnée (au point 65) que " les objectifs poursuivis par la directive ne permettent pas de considérer que la vérification de l'exactitude des caractéristiques comparées devrait être ouverte plus spécifiquement au consommateur qu'aux autres parties intéressées, notamment les concurrents impliqués dans la comparaison " elle a dit pour droit (au point 73) :

" (...) qu'une caractéristique mentionnée dans une publicité comparative ne satisfait à l'exigence de vérifiabilité posée par cette disposition, lorsque les éléments de comparaison sur lesquels repose la mention de cette caractéristique ne sont pas énumérés dans cette publicité, que si l'annonceur indique, notamment à l'attention des destinataires de ce message, où et comment ceux-ci peuvent prendre aisément connaissance de ces éléments aux fins d'en vérifier ou, s'ils ne disposent pas de la compétence requise à cette fin, d'en faire vérifier l'exactitude ainsi que celle de la caractéristique en cause " ;

Que la mention du site précité permettait aux sociétés appelantes de vérifier sans délai l'exactitude matérielle des données de fait contenues dans les publicités litigieuses, ainsi qu'il leur a d'ailleurs été répondu par les sociétés intimées ; qu'il en va de même pour la société Hyper Saint-Aunès à qui il est reproché d'avoir répondu dans un délai supérieur à un mois alors que le seul courrier concernant la publicité litigieuse proprement dite, relatif à un magasin " Carrefour à Le Crès " ainsi dénommé sur Internet (pièce 10) date du 2 février 2015 et qu'il y a été répondu le 24 février 2015 ;

Que les appelantes ne peuvent donc être suivies lorsqu'elles se prévalent de la méconnaissance de l'obligation de répondre dans un bref délai ;

Qu'elles le peuvent d'autant moins que la SC Galec, éditeur du site dont s'agit, n'a pas manqué de répondre avec précision, dès le 15 avril puis les 20 et 25 avril 2014 aux demandes complémentaires qui lui étaient posées (pièces 67, 69 et 70 des appelantes) sur les zones soumises à comparaison, les produits comparés ou encore le relevé exhaustif des prix, la renvoyant de plus aux liens pertinents du site précité ; qu'à cet égard, la SC Galec rapporte la preuve qu'à la suite de la désactivation des liens "synthèse des comparaisons" et "détails des relevés de prix", le lien url "duels-magasins" qui lui a été transmis est resté actif jusqu'au 7 mai 2015 en établissant qu'il a été régulièrement consulté jusqu'à cette date (pièce 9), ceci contrairement à ce que prétendent les appelantes à la faveur d'une argumentation inopérante ;

Qu'en outre, les sociétés Carrefour ne peuvent valablement se prévaloir du caractère incomplet des informations qui leur ont été communiquées du fait de l'absence d'attestations émanant des personnes ayant pratiqué des relevés de prix dès lors qu'elles ne contestent pas formellement la compétence et le sérieux de ces opérateurs, concédant, au demeurant, qu'elles " ne prétendent pas que le recours à un prestataire indépendant serait nécessaire mais (qu')il est incontestable qu'un tel recours est de nature à rendre plus objective la publicité " (page 22/70 de leurs conclusions) ;

Qu'enfin et s'agissant de la contestation relative aux prix pratiqués par les magasins Leclerc ayant servi aux publicités comparatives en ce qu'ils portent sur des " sorties de caisse ", il y a lieu de considérer que le texte invoqué n'exige de l'annonceur que la preuve de " l'exactitude matérielle " des données contenues dans la publicité dans la mesure où ils sont nécessaires à une vérification, notamment par un concurrent, de la comparaison et de son objectivité ;

Qu'à cet égard la SC Galec, relevant incidemment que les appelantes ne contestent pas l'exactitude des prix ni ne communiquent d'éléments de nature à remettre en cause la réalité des prix relevés, oppose à juste titre aux sociétés Carrefour leur propre production de pièces, plus précisément la pièce 84 intitulée : " méthodologie relative à la publicité " vous pouvez faire le tour de la France, partout où il y a un E. Leclerc, il est le moins le cher " disponible sur le site "quiestlemoinscher.com", outre une attestation de la société Ezee World du 8 juin 2015 (pièce 14/ Galec) pour affirmer que les précisions ainsi données sur la méthodologie suivie ne permettent pas de la critiquer sur le fondement de l'article L 121-12 précité comme le font les sociétés Carrefour qui, arguant de la méconnaissance des prescriptions de cet article placent, à tort, le débat sur la valeur probante des relevés de caisse opérés qui n'établiraient pas, selon elles, la réalité de l'offre ;

Qu'il s'évince de tout ce qui précède que les sociétés Carrefour appelantes échouent en leur démonstration d'une violation, par les sociétés intimées, de l'obligation mise à leur charge par l'article L 121-12 du Code de la consommation ;

Sur le caractère licite de la publicité comparative au sens de l'article L 121-8 du Code de la consommation

Considérant que se prévalant des dispositions de cet article selon lequel :

" Toute publicité qui met en comparaison des biens ou services en identifiant, implicitement ou explicitement, un concurrent ou des biens ou services offerts par un concurrent n'est licite que si : (1) Elle n'est pas trompeuse ou de nature à induire en erreur (2) Elle porte sur des biens ou services répondant aux mêmes besoins ou ayant les mêmes objectifs (3) Elle comporte objectivement une ou plusieurs caractéristiques vérifiables et représentatives des biens ou services, dont le prix peut faire partie. ",

et rappelant qu'il est constant que l'exigence d'objectivité suppose que le consommateur puisse avoir connaissance des caractéristiques propres à justifier les différences de prix, les appelantes entendent démontrer que ne sont objectives ni les publicités diffusées localement ni la publicité diffusée à l'échelle nationale et qu'elles sont, par conséquent, illicites ;

Qu'elles incriminent plus précisément :

- une comparaison portant sur un nombre différent de produits selon les enseignes et singulièrement inférieur pour l'enseigne Carrefour aussi bien dans les publicités-papier que dans celles de l'application smartphone, ceci sans indication relative à l'existence ou non des produits communs aux différentes enseignes, et reprochent au tribunal de s'être contenté de dire que cette variation de nombre tient à leur présence ou leur absence dans les magasins concernés lors des opérations de relevés ; qu'en ce qui concerne la publicité nationale, la comparaison leur apparaît d'autant plus " choquante et incompréhensible " que le nombre de produits vendus en hypermarchés est plus élevé qu'en supermarchés, d'autant plus déloyale qu'il n'existe aucune certitude sur l'existence de produits communs aux différentes enseignes et d'autant plus trompeuse pour le consommateur qu'il sera amené à croire, à tort, que la comparaison a porté sur au minimum 400 produits identiques pour toutes les enseignes,

- une comparaison de prix portant sur des relevés effectués dans des canaux de distribution différents (relevés physiques en magasin ou sur Internet) qui a été manifestement faussée et qui a trompé le consommateur, contrairement à ce qu'a jugé le tribunal,

- une comparaison portant sur des relevés de prix à des périodes différentes, avec des décalages d'un mois, voire deux, qui les conduisent à affirmer que la très grande volatilité des prix dans la grande distribution et de trop grands décalages dans les périodes de relevés de prix ôtent toute pertinence à la publicité comparative, le consommateur n'étant pas en mesure de percevoir ces différences de dates ; ces éléments les amènent à critiquer le tribunal en ce qu'il a considéré, d'une part, que les écarts de dates étaient suffisamment proches pour rendre les comparaisons pertinentes et, d'autre part, que les collectes de prix antérieures ou postérieures chez Leclerc ou chez les concurrents sont sensiblement équivalentes ; elles ajoutent que toutes les enseignes ne sont pas traitées de semblable manière et qu'en outre, la seule existence de relevés à des périodes différentes, permettant un ajustement des prix, peut faire craindre une manipulation des prix sans qu'il soit nécessaire d'en rapporter la preuve, ceci d'autant plus qu'aucune explication n'est donnée aux consommateurs sur les raisons de ces décalages et que la société Leclerc choisit ses dates d'extraction de caisses ; pour ce qui est de la publicité à l'échelle nationale, elles se réfèrent à un article de presse stigmatisant la méthode (la revue " Entrevue " de juillet 2015 sous le titre : " ce que Leclerc ne vous dit pas dans ses pubs ") et développent la même argumentation ;

Qu'elles se prévalent, sur ce point, d'une étude qu'elles ont fait réaliser par l'Institut de sondage IFOP sur l'impact de la publicité Leclerc qui confirme que " Leclerc " apparaît moins cher que tous les concurrents cités (pour 90 % des sondés) et que " Carrefour " apparaît comme plus cher non seulement que Leclerc mais également que chacun des concurrents cités dans cette campagne (pour 81 % des sondés) ;

Qu'elles entendent préciser, pour finir, qu'elles ne cherchent pas à remettre en cause la liberté de l'annonceur dans le choix des paramètres (produits, magasins, etc.) mais à discuter le caractère objectif de la comparaison qui n'est pas fondée sur un traitement identique entre les enseignes concurrentes par rapport à un dénominateur commun, Leclerc, au sein d'une même publicité mais selon une géométrie variable encore plus défavorable pour les enseignes Carrefour et Carrefour Market ;

Considérant, ceci exposé, que pour porter une appréciation sur les divers manquements ainsi incriminés il convient de rappeler à titre liminaire, comme l'a fait la juridiction communautaire (notamment : CJUE, 18 juin 2009, l'Oréal point 67, CJUE, 18 novembre 2010, Lidl SNC points 20 et 21) interprétant l'article 3bis § 1 de la directive 84/450, que les conditions qu'il énumère doivent être interprétées dans le sens le plus favorable à la publicité comparative afin de permettre les publicités comparant objectivement les caractéristiques de biens ou de services, tout en assurant que la publicité comparative ne soit pas utilisée de manière anticoncurrentielle et déloyale ou de manière à porter atteinte aux intérêts du consommateur, ceci du fait que ces conditions visent une mise en balance des différents intérêts susceptibles d'être touchés par l'autorisation de cette publicité, stimulation de la concurrence favorable aux consommateurs et interdiction de pratiques pouvant entraîner une distorsion de concurrence préjudiciable aux concurrents ;

Que, s'agissant d'abord du grief portant sur le nombre de produits inclus dans la comparaison et du fait qu'il se révèle " très inférieur " pour les magasins Carrefour, il est constant que le périmètre de la comparaison relève de la seule responsabilité de l'annonceur et de sa liberté économique et que les sociétés appelantes ne peuvent ignorer que le nombre de produits communs varie nécessairement en fonction des magasins comparés et du mode de collecte (relevés physiques ou Drive), comme le précisent les sociétés intimées ;

Que ces dernières, se prévalant des différences de prix pratiqués par les sociétés Carrefour en magasin et sur Internet - ceci, selon les intimées, à dessein - ont pu, sans méconnaître le texte précité et compte tenu des objectifs poursuivis par cette législation et rappelés ci-dessus, s'attacher aux produits proposés aux consommateurs en rayon ;

Que, sur ce point, la SC Galec qui explicite, au demeurant, clairement sa méthodologie sur le site "quiestmoinscher.com" en indiquant :

" Chaque enquêteur visite un ou plusieurs magasin(s) fixé(s) à l'avance. Chaque enquêteur doit y relever par écrit le prix de chacun des produits de la liste. Si, lors de sa visite, un enquêteur ne trouve pas un produit de la liste, il ne donne bien sûr aucune indication de prix relative à ce produit ",

est, comme les autres intimées, fondée à opposer aux appelantes (qui concentrent l'essentiel de leur argumentation sur le magasin E. Leclerc d'Arçonnay en renvoyant la cour à l'examen de leurs pièces pour les autres adhérents) les réponses techniques apportées par la société FaCE Conseil, dans un document daté du 18 mai 2015, laquelle accompagne son propos de données chiffrées sur les 192 points de vente Carrefour et les 253 Carrefour Market ou Market concernés quant aux périmètres considérés (pièce 8, SC Galec) ;

Qu'eu égard à ces circonstances factuelles, les sociétés appelantes ne sont donc pas fondées à se prévaloir de la prise en considération d'un périmètre de produits comparés qui leur serait défavorable et ferait douter de l'objectivité de la comparaison ou de l'incongruité tenant au fait que le nombre de produits d'autres concurrents vendant des produits en supermarchés est plus important que le nombre de produits vendus en hypermarchés ;

Que, s'agissant ensuite du grief tenant à des comparaisons effectuées selon des canaux de distribution différents, il ne saurait, certes, être porté atteinte à la liberté, revendiquée par les sociétés appelantes, de choisir leur politique commerciale et de pratiquer, en particulier, des prix différents pour les produits qu'elles commercialisent selon qu'ils sont vendus sur Internet ou, à un prix supérieur, en magasin, ceci contrairement aux pratiques d'unification des prix sur ces deux canaux qu'observent la SC Galec et les autres enseignes concernées ;

Qu'il n'en demeure pas moins que les appelantes, n'apportant aucun élément précis susceptible de mettre en cause l'exactitude des données recueillies, ne peuvent être suivies en leur critique des différents modes de collecte de prix opérés, lesquels tiennent compte des pratiques de leurs concurrents, libres, tout comme elles, de choisir leur politique commerciale, et privilégient, lorsqu'ils sont similaires en magasin et sur Internet ainsi que c'est le cas de toutes les enseignes à l'exception de l'enseigne Carrefour, la collecte par extraction sur Internet, d'une plus grande accessibilité ; qu'elles ne peuvent l'être davantage en leur critique du choix de collecter les prix tels qu'elles les proposent aux consommateurs en magasin et qui correspondent donc aux prix réellement payés par ceux-ci ;

Que, s'agissant enfin du grief tenant à des comparaisons de prix réalisées à des périodes différentes, des écarts de dates entre les collectes effectuées entre les différentes enseignes comparées ressortent effectivement des pièces versées aux débats ;

Que, toutefois, en réplique à l'argumentation des sociétés Carrefour qui, ici aussi, concentrent leur argumentation sur le magasin E. Leclerc d'Arçonnay en renvoyant la cour à l'examen de leurs pièces pour les autres adhérents, la société Alençon Distribution qui exploite cet hypermarché à Arçonnay objecte justement que la publicité litigieuse ne vise pas à comparer les différents distributeurs entre eux (comme le font les appelantes en citant les magasins Intermarché ou Super U) mais uniquement les points de vente de telle enseigne avec un magasin à l'enseigne E. Leclerc ;

Que la SC Galec rappelle justement que, comme il a été dit, les conditions de la publicité comparative doivent être appliquées dans les conditions les plus favorables à celle-ci et qu'en l'occurrence, des millions de relevés de prix ont dû être effectués puis traités aux fins de publication et de mise en ligne, avec une difficulté accrue pour l'enseigne Carrefour du fait de la nécessité de recourir aux collectes physiques, ce qui est de nature à influer sur la durée de la collecte des données ;

Que, sans que les appelantes ne fournissent d'éléments techniques contraires, les intimées peuvent se référer à la note technique de la société FaCE Conseils déjà évoquée qui, sur ce point, indique la méthodologie employée, à savoir, d'une manière générale, l'application d'un algorithme permettant de minimiser les écarts de dates ou éliminant les écarts supérieurs à 7 jours ;

Qu'elle précise, s'agissant des faits litigieux, le nombre de prix du Groupe Carrefour qui ont été comparés à ceux des centres Leclerc concurrents localement (soit : 847 993) en démontrant, au moyen de tableaux, que, les écarts de date sont suffisamment proches pour rendre les comparaisons de prix pertinentes (4 jours maximum pour une moyenne de 2,1 jours ou 1,8 jour pour les Carrefour Market) et que les collectes de prix sont effectuées le même jour dans 52 % des cas, dans 56 % des cas pour les magasins Carrefour Market ;

Qu'enfin, en réponse à l'argument des appelantes tenant à un possible ajustement provisoire des prix du fait de relevés de prix postérieurement effectués dans les magasins à l'enseigne Leclerc, que, quelle que soit la date de collecte des prix Leclerc, ceux-ci sont toujours plus bas et que les écarts avec les magasins Carrefour et Carrefour Market y sont sensiblement les mêmes ;

Qu'il résulte de tout ce qui précède qu'à juste titre le tribunal a rejeté ces griefs tendant à voir juger que ne sont pas satisfaites les conditions de licéité de la publicité comparative en cause ;

Sur le caractère trompeur de la publicité comparative au sens de l'article L 121-1 du Code de la consommation

Considérant qu'invoquant les dispositions de cet article selon lequel " 1° Une pratique commerciale est trompeuse si elle est commise dans l'une des circonstances suivantes : (...) 2° Lorsqu'elle repose sur des allégations, indications ou présentations fausses ou de nature à induire en erreur et portant sur l'un ou plusieurs des éléments suivants : (...) c) Le prix ",

les sociétés appelantes qui observent que le tribunal a laissé sans réponse leur moyen, critiquent tour à tour les slogans employés au niveau local puis national ;

Qu'elles estiment que le slogan "votre magasin E. Leclerc moins cher !" qui s'appuie sur des paramètres différents (comportant, de plus, quatre erreurs ou omissions) et qui, dupliqué, le rend général a, comme le montre le sondage IFOP précité, un impact sur la décision d'achat du consommateur plus grand que s'il était fait de manière individuelle, entre la société Leclerc et chacun de ses concurrents, et que le caractère trompeur qu'elles dénoncent tient au fait que la présentation adoptée fait figurer l'enseigne Carrefour comme plus chère non seulement que l'enseigne Leclerc mais également que les autres enseignes ;

Qu'elles soutiennent aussi que le slogan " vous pouvez faire le tour de la France, partout où il y a un E. Leclerc, il est le moins cher " trompe le consommateur par son caractère absolu et systématique, renforcé par la répétition " partout où il y a un E. Leclerc ", d'autant, en particulier, que les comparaisons portent sur des nombres de produits différents et qu'aucune information n'est donnée sur leur représentativité ; qu'elles relèvent également trois mentions erronées dans la synthèse des comparaisons du site "www quiestlemoinscher.com" ;

Considérant, ceci rappelé, que l'article 2 sous b) de la directive 2006/14/CE à la lumière de laquelle doit être interprété le droit national définit la publicité trompeuse comme étant " toute publicité qui, d'une manière quelconque, y compris sa présentation, induit en erreur ou est susceptible d'induire en erreur les personnes auxquelles elle s'adresse ou qu'elle touche et qui, en raison de son caractère trompeur, est susceptible d'affecter leur comportement économique ou qui, pour ces raisons, porte préjudice ou est susceptible de porter préjudice à un concurrent " ;

Qu'il résulte, par ailleurs, de la jurisprudence communautaire (CJCE, 18 novembre 2010, Lidl/Vierzon Distribution, point 56) qu'une publicité comparative peut notamment revêtir un caractère trompeur " s'il est constaté, eu égard à toutes les circonstances pertinentes du cas d'espèce et, notamment, aux indications ou aux omissions dont s'accompagne cette publicité, que la décision d'achat d'un nombre significatif de consommateurs auxquels elle s'adresse est susceptible d'être prise dans la croyance erronée que la sélection de produits opérée par l'annonceur est représentative du niveau général des prix de ces derniers par rapport à celui pratiqué par son concurrent, et que, dès lors, ces consommateurs réaliseront des économies de l'ordre vanté par ladite publicité en effectuant régulièrement leurs achats de biens de consommation courante auprès de l'annonceur plutôt qu'auprès dudit concurrent, ou encore dans la croyance erronée que tous les produits de l'annonceur sont moins chers que ceux de son concurrent " ;

Que, s'agissant en l'espèce des indications ou omissions accompagnant les publicités comparatives en cause dont font état les sociétés appelantes, il résulte de ce qui précède qu'est satisfaite la condition d'objectivité impliquant une comparaison d'une ou plusieurs caractéristiques essentielles, pertinentes, vérifiables et représentatives des produits, dont le prix fait partie ;

Que les intimées font justement valoir que les quelques erreurs relevées - vénielles en regard des milliers de prix relevés dans des milliers de magasins, selon des zones de chalandise tenant compte de l'attraction des points de vente, pour ce qui est du magasin Leclerc de Cannes, ou erronées, pour ce qui est de l'Hyper Saint-Aunès, ou encore inopérantes, s'agissant des synthèses de comparaison qui font l'objet de mises à jour régulières n'autorisent pas les appelantes à affirmer que les publicités en cause apportent une information ou cachent une circonstance qui, si elles avaient été exactes ou connues, auraient été de nature orienter en conséquence la décision d'achat d'un nombre significatif de consommateurs ;

Que, s'agissant de la perception qu'aura le consommateur moyen des produits de consommation courante concernés, normalement informé et raisonnablement attentif, s'il est vrai, comme le souligne la société Hyper Saint-Aunès analysant le sondage IFOP produit par les appelants que les 1 025 individus sondés en avril 2015 en contemplation d'une publicité concernant la ville de Caen, en viennent à déduire que les produits de l'enseigne Leclerc sont moins chers que ceux de ses concurrents et que ceux de l'enseigne Carrefour leur sont supérieurs, il ne permet toutefois pas aux sociétés appelantes, du fait du caractère restrictif et parcellaire des questions posées, de rapporter la preuve d'une possible altération du comportement économique de ce consommateur ;

Qu'en effet et compte tenu des critères d'appréciation sus-évoqués, il ne leur permet pas de prétendre que cette publicité pourrait faire croire à " un nombre significatif de consommateurs " que " la sélection de produits opérée par l'annonceur est représentative du niveau général des prix de ces derniers par rapport celui pratiqué par son concurrent ", ni qu'ils réaliseront " des économies de l'ordre vanté par ladite publicité en effectuant régulièrement leurs achats de biens de consommation courante auprès de l'annonceur plutôt qu'auprès dudit concurrent ", ni encore " que tous les produits de l'annonceur sont moins chers que ceux de son concurrent " ;

Qu'il en résulte que ne peuvent être tenues pour trompeuses les publicités litigieuses, locales et nationale, qui n'ont eu d'autre finalité que d'être des instruments de promotion tendant, dans des conditions dont il n'est pas démontré qu'elles soient fautives, à attirer la clientèle ;

Sur le caractère dénigrant de la publicité comparative au sens de l'article L. 121-9, 2 du Code de la consommation ;

Considérant que se fondant sur ce texte aux termes duquel :

" La publicité comparative ne peut : (...) 2° entraîner le discrédit ou le dénigrement des marques, noms commerciaux, autres signes distinctifs, biens, services, activités ou situation d'un concurrent ",

les sociétés appelantes reprochent au tribunal d'avoir, sans analyse, rejeté leur demande alors, affirment-elles, que le seul fait pour un annonceur de se présenter comme moins cher sur la base d'une publicité déloyale et/ou trompeuse, qui plus est en ajoutant dans leur slogan " partout où il y a un E. Leclerc ", rend la publicité dénigrante ;

Qu'est aussi constitutif de dénigrement lequel se distingue, exposent-elles, du dénigrement sanctionné par l'article 1382 du Code civil en particulier parce qu'il ne requiert pas la démonstration d'une intention malveillante - le classement opéré entre les différentes enseignes qui ne sont pas présentées deux à deux avec l'enseigne Leclerc et fait paraître les enseignes Carrefour plus chères que les concurrents cités ; que se référant à leurs précédents développements, elles ajoutent que cette comparaison est dénuée d'objectivité et trompeuse ;

Qu'elles invoquent, en outre, un article paru dans la revue " Entrevue " selon lequel " Leclerc est très agressif vis-à-vis de ses concurrents" ;

Considérant, ceci rappelé, que dès lors que la publicité comparative a été introduite en droit français afin d'améliorer l'information du consommateur et de stimuler la concurrence, le simple fait de comparer les prix auxquels des produits identiques sont vendus par des concurrents, ce qui a nécessairement pour but et pour effet de porter atteinte aux concurrents et de détourner la clientèle au profit de l'annonceur, n'est pas, en soi, constitutif d'un dénigrement mais tend à assurer la transparence d'un marché soumis à la concurrence ;

Qu'à cet égard, il résulte des enseignements de la juridiction communautaire " que la confrontation des offres concurrentes, notamment en ce qui concerne les prix, relève de la nature même de la publicité comparative. Par conséquent, la comparaison des prix ne peut pas en soi entraîner le discrédit ou le dénigrement d'un concurrent qui pratique des prix plus élevés (...) " (CJUE, 8 avril 2003, Pippig Augenoptik GmbH, point 80) ;

Qu'en l'espèce, il résulte de ce qui précède que la démarche comparative entreprise par la SC Galec et ses adhérents s'est voulue de grande ampleur, ce qui relève de l'exercice de sa liberté économique ; qu'elle lui permet de mettre en avant, sans que rien ne conduise la cour à considérer qu'ils soient tombés dans la critique déraisonnable, leurs atouts en termes de prix ;

Que cette démarche qui ne vise pas précisément l'enseigne Carrefour, laquelle n'apparaît d'ailleurs pas être la plus chère des enseignes de la grande distribution concernées par cette comparaison, repose sur des éléments objectifs et vérifiables dont les sociétés appelantes n'ont pas démontré le caractère trompeur, de sorte que le moyen tiré du caractère dénigrant des publicités en cause ne peut prospérer, ainsi que tranché par les premiers juges ;

Que le jugement qui a débouté les sociétés Carrefour de l'ensemble de leurs demandes, principales et subséquentes, mérite par conséquent confirmation ;

Sur les autres demandes ;

Considérant que l'équité conduit à condamner les sociétés appelantes, tenues in solidum, à verser à chacune des sociétés intimées la somme complémentaire de 10 000 euros en application de l'article 700 du Code de procédure civile ;

Que, succombantes, elles seront déboutées de leur demande de ce dernier chef et supporteront les dépens d'appel ;

Par ces motifs : Confirme le jugement en toutes ses dispositions et, y ajoutant ; Rejette la fin de non-recevoir opposée à la société par actions simplifiée CSF par les sociétés par actions simplifiées Luxdis et Chalondis ; Déboute la société par actions simplifiée Carrefour Hypermarchés et la société par actions simplifiée CSF de leurs entières demandes ; Condamne la société par actions simplifiée Carrefour Hypermarchés et la société par actions simplifiée CSF, tenues in solidum, à verser à chacune des sociétés intimées, à savoir : la société coopérative à capital variable Groupement d'achats des Centres Leclerc (Galec), les sociétés par actions simplifiée Luxdis, Chalondis, Kervilly, Caen Distribution, Rosendael Distribution SRD, Alençon Distribution, Hyper Saint-Aunès, la somme complémentaire de 10 000 euros en application de l'article 700 du Code de procédure civile et à supporter les entiers dépens d'appel avec faculté de recouvrement, conformément aux dispositions de l'article 699 du Code de procédure civile.