Cass. soc., 23 novembre 2016, n° 15-21.942
COUR DE CASSATION
Arrêt
Rejet
PARTIES
Demandeur :
Hamurcu
Défendeur :
Total marketing services (SA)
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Frouin
Rapporteur :
M. Flores
Avocat général :
M. Richard de la Tour
Avocats :
SCP Boré, Salve de Bruneton, SCP Piwnica, Molinié
LA COUR : - Sur le moyen unique : - Attendu, selon l'arrêt attaqué (Versailles, 20 mai 2015), rendu sur renvoi après cassation (Soc. 23 octobre 2013, pourvoi n° 11-10.848), que le 20 juin 2000, la société Elf Antar, aux droits de laquelle vient la société Total marketing services (la société), a confié à la société Hamurcu, représentée par son gérant, M. Hamurcu, la location-gérance d'un fonds de commerce d'une station-service ; qu'elle a procédé à la résiliation immédiate du contrat de location-gérance le 4 février 2005 ; que M. Hamurcu a saisi la juridiction prud'homale en revendiquant le bénéfice de l'article L. 7321-2 du Code du travail pour obtenir le paiement de diverses sommes à titre de rappel de salaires, d'indemnités et de dommages-intérêts ; que la cour d'appel de Versailles a, par arrêt du 29 octobre 2010, notamment décidé qu'il y avait lieu de faire application à M. Hamurcu des dispositions de l'article L. 7321-2 du Code du travail et débouté la société Total de sa demande reconventionnelle en paiement d'une somme correspondant au montant de recettes carburants non restituées ; que la Cour de cassation a, par l'arrêt susvisé du 23 octobre 2013, cassé cette décision, mais seulement de ce dernier chef ;
Attendu que le gérant fait grief à l'arrêt de le condamner à payer à la société des sommes en réparation du préjudice causé par ses fautes dans la gestion des recettes de carburants alors, selon le moyen : 1°) que les travailleurs visés à l'article L. 781-1 du Code du travail devenu les articles L. 7321-1 et L. 7321-3 bénéficient de la législation du travail et notamment des dispositions relatives aux relations individuelles de travail ; qu'en déduisant de ces textes que seules les "... dispositions particulières en matière de durée du travail, de santé et sécurité au travail et de responsabilité du gérant de succursale à l'égard des salariés placés sous son autorité (...)", prévues par les articles L. 7321-3 et L. 7321-4 du Code du travail s'appliquaient au gérant de succursale, tandis que "sa responsabilité vis-à-vis de son fournisseur" relevait "du droit commun et non de la législation du travail", la cour d'appel a violé par fausse interprétation les textes susvisés ; 2°) que les dispositions d'ordre public du droit du travail sont applicables aux gérants salariés de succursales, dont la profession consiste essentiellement à recueillir les commandes ou à recevoir des objets à traiter, manutentionner ou transporter, pour le compte d'une seule entreprise industrielle et commerciale, dans un local fourni ou agréé par cette entreprise, et aux conditions et prix qu'elle impose ; que dès lors la responsabilité pécuniaire du gérant salarié de succursale n'est engagée envers l'entreprise fournissant les marchandises distribuées qu'en cas de faute lourde ; qu'en décidant, au contraire, que "le statut de gérant de succursale oblige Monsieur Hamurcu à répondre vis-à-vis de son fournisseur de toute faute dans la gestion du fonds" et en le condamnant à verser à la société Total marketing services une somme de 50 000 euros à titre de dommages et intérêts aux termes de motifs qui ne caractérisent pas sa faute lourde, la cour d'appel a violé le principe d'ordre public selon lequel "la responsabilité pécuniaire d'un salarié à l'égard de son employeur n'est engagée qu'en cas de faute lourde" ;
Mais attendu que le gérant s'étant vu reconnaître, par un chef de dispositif devenu définitif, non pas la qualité de salarié visée par le principe revendiqué, mais l'application des dispositions de l'article L. 7321-2 du Code du travail, l'engagement de sa responsabilité pécuniaire n'était pas soumise à l'exigence de l'existence d'une faute lourde ; que le moyen n'est pas fondé ;
Par ces motifs : rejette le pourvoi.