CA Rennes, 2e ch., 2 décembre 2016, n° 13-07732
RENNES
Arrêt
Infirmation partielle
PARTIES
Demandeur :
Roger Hamon (SAS)
Défendeur :
General Motors France (SAS)
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Christien
Conseillers :
Mmes Le Potier, Dotte-Charvy
Avocats :
Mes Lhermitte, Bellaiche, Menou Lespagnol, Renaudin, Gaftarnik
EXPOSÉ DU LITIGE
Le 5 juillet 2007, M. X a fait l'acquisition auprès de la société Roger Hamon, concessionnaire Opel à Lannion, d'un véhicule neuf, modèle Opel Zafira, avec une garantie de 24 mois, pour le prix de 25 046 euros avant déduction de la reprise d'un véhicule super 5 pour 3 836 euros et M. X a réglé la somme de 21 210 euros.
En janvier 2008, après avoir parcouru 11 205 km avec le véhicule, M. X l'a rapporté au garage Hamon en signalant l'allumage du voyant moteur, et il a été procédé au remplacement de la vanne EGR.
La même panne s'étant plusieurs fois reproduite, l'assureur de M. X a missionné un expert qui a conclu que le véhicule était affecté d'un vice.
M. X a obtenu, par ordonnance de référé du 29 juin 2010, l'organisation d'une expertise du véhicule.
Se prévalant des conclusions du rapport d'expertise déposé le 27 octobre 2010, M. X, par actes des 13 et 20 juillet 2011, a assigné la société Roger Hamon et la société General Motors France devant le Tribunal de grande instance de Saint-Brieuc, au visa des articles 1641, 1645 et suivants du Code civil, aux fins d'obtenir le prononcé de la résolution de la vente du véhicule Opel Zafira du 10 juillet 2007 pour vice caché, et la condamnation in solidum de la société General Motors et du garage Opel Hamon à la restitution du prix, soit la somme de 23 400 euros et au paiement de la somme de 3 500 euros au titre du préjudice de jouissance subi.
La société Hamon a sollicité la condamnation de la société General Motors à la garantir de l'ensemble des condamnations qui pourraient être mises à sa charge en faisant valoir que le vice affectant le véhicule constituait un vice de fabrication auquel il ne pouvait être remédié que par une action de rattrapage dépendant du seul constructeur.
La société General Motors s'est opposée aux demandes en soutenant que M. X ne rapportait pas la preuve d'un vice caché affectant le véhicule.
Par jugement du 10 septembre 2013, le Tribunal de grande instance de Saint-Brieuc a:
- prononcé la résolution de la vente,
- condamné la société Garage Roger Hamon à restituer à M. X la somme perçue au titre du prix de vente soit 21 210 euros outre les intérêts au taux légal a compter du prononcé du jugement,
- dit que M. X devra restituer à la société Roger Hamon le véhicule Opel Zafira Enjoy 1,9 CDTI immatriculé 6006 XR 22 contre le paiement de la somme ci-dessus,
- condamné la société Garage Roger Hamon à payer à M. X la somme de 200 euros de dommages et intérêts au titre de son préjudice de jouissance,
- condamné la société General Motors aux entiers dépens, en ce compris les frais d'expertise judiciaire,
- condamné la société General Motors à payer à M. X la somme de 3 000 euros et à la société Roger Hamon la somme de 2 000 euros en application de l'article 700 du Code de procédure civile,
- débouté les parties de leurs demandes plus amples ou contraires,
- ordonné l'exécution provisoire.
Par déclaration du 29 octobre 2013, la société Roger Hamon a formé appel de cette décision, et par ses dernières conclusions du 28 mai 2014, elle demande à la cour de :
- infirmer le jugement entrepris en ce qu'il l'a déboutée de sa demande de garantie dirigée contre le constructeur,
Statuant à nouveau,
- prononcer la résolution judiciaire de la vente intervenue entre elle et la société General Motors France ;
- condamner la société General Motors France à lui restituer le prix de vente perçu soit la somme de 20 642,45 euros,
- condamner la société General Motors France à la relever et garantir des condamnations mises à sa charge,
- confirmer le jugement en ce qu'il a débouté Monsieur W. de sa demande de restitution de la somme de 3 836 euros,
En tout état de cause,
- condamner tout succombant à lui verser la somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile, outre les entiers dépens.
Par ses dernières conclusions du 28 juillet 2014, M. X demande à la cour de :
Vu les dispositions des articles 1641 et suivants du Code civil,
- confirmer le jugement déféré en ce qu'il a :
- prononcé la résolution de la vente du véhicule Opel Zafira,
- condamné la SAS Roger Hamon à lui restituer la somme perçue au titre du prix de vente, soit 21 210 euros outre les intérêts au taux légal à compter du prononcé du présent jugement,
- dit qu'il devra restituer à la société Roger Hamon le véhicule Opel Zafira Enjoy, immatriculé 6006 XR 22 contre le paiement de la somme ci-dessus,
- condamné la société Roger Hamon à lui payer la somme de 200 euros de dommages et intérêts au titre de son préjudice de jouissance,
- condamné la société General Motors aux entiers dépens, en ce compris les frais d'expertise judiciaire,
- condamné la société General Motors à lui payer la somme de 3 000 euros et à la société Roger Hamon la somme de 2 000 euros par application des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile,
Le recevant en son appel incident,
- infirmer le jugement déféré en ce qu'il a :
- rejeté sa demande tendant à voir condamner la société Roger Hamon au paiement de la somme de 3 836 euros correspondant au prix de reprise de son véhicule Renault Super 5 lors de l'achat du véhicule Opel Zafira le 5 juillet 2007,
- condamné la société Roger Hamon au paiement de la somme de 3 836 euros laquelle produira intérêts au taux légal à compter du jugement prononçant la résolution de la vente,
- débouter la même de toutes demandes d'appel,
Y ajoutant,
- condamner la société Roger Hamon au paiement de la somme de 4 000 euros par application des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile et aux entiers dépens d'appel.
Selon ses uniques conclusions du 28 mars 2014, la société General Motors France demande à la cour, infirmant le jugement entrepris et statuant à nouveau, de :
Vu les articles 1641 et suivants du Code civil,
- dire que M. X ne rapporte pas la preuve d'un vice caché qui affecterait son véhicule,
- le débouter de l'intégralité de ses demandes à ce titre,
Subsidiairement,
- dire et juger que M. X ne rapporte pas la preuve du préjudice qu'il allègue,
- le débouter en conséquence de l'intégralité de ses demandes,
- débouter la société Roger Hamon de son appel en garantie contre elle en raison du défaut de conseil lors de l'achat du véhicule litigieux par M. X,
- condamner tout succombant à lui payer la somme de 1 000 euros sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile et aux entiers dépens de première instance et d'appel.
Motifs
Sur les demandes de M. X
Il résulte du rapport d'expertise judiciaire que de janvier 2008 à juillet 2010, le véhicule a connu neuf allumages du voyant inspection moteur, que la vanne EGR a été changée par le garage Hamon à cinq reprises et que le logiciel de gestion moteur a été reprogrammé sans résultat.
L'expert judiciaire a constaté que le système de dépollution du véhicule Zafira n'est pas suffisamment stable, que l'encrassement excessif causant l'allumage du voyant est vraisemblablement lié à une mauvaise stratégie du calculateur, et que cette faiblesse d'origine n'était pas décelable par l'acquéreur profane au jour de la vente.
Ainsi que l'a retenu le premier juge c'est à tort que la société General Motors se prévaut de l'absence de vice rédhibitoire en tirant argument de ce que l'expert a constaté qu'au moment de l'expertise le véhicule fonctionnait bien, alors que l'expert prévoyait également le renouvellement des allumages moteur tant que l'utilisation se fera sur de petits parcours en soulignant que ce dysfonctionnement ne relève ni de l'utilisateur ni du garage Hamon, mais exclusivement du constructeur.
De plus, M. X justifie que la vanne EGR a dû être de nouveau changée en février 2011 et en décembre 2011 et que des incidents d'allumage du témoin moteur sont intervenus en 2012.
Au sujet du comportement de M. X, l'expert a souligné qu'il est un profane méticuleux qui a rigoureusement respecté les consignes d'entretien et auquel ne peut être reprochée une mauvaise utilisation du véhicule, et particulièrement pas son usage pour de courts parcours.
Et, les nombreux dysfonctionnements du véhicule ayant nécessité de multiples réparations et immobilisations, et engendré le souci constant de subir à nouveau une panne ont considérablement altéré son usage et sa jouissance.
Il est donc établi que le véhicule vendu par la société Roger Hamon à M. X était atteint au moment de la vente d'un défaut caché qui a tellement diminué son usage, que M. X ne l'aurait pas acquis s'il les avait connus.
Il y a lieu de confirmer le jugement qui a prononcé la résolution de la vente.
Le bon de commande du véhicule Opel Zafira signé le 5 juillet 2007 par M. X et la société Roger Hamon mentionne que le prix de vente du véhicule et de ses accessoires est de 25 046 euros TTC et que déduction faite de la reprise du véhicule Super 5 pour un montant de 3 836 euros le solde à payer par M. X est de 21 210 euros.
Ainsi, le prix de 25 046 euros a été payé par M. X au moyen de la remise d'un véhicule dont la valeur a été contractuellement fixée à 3 836 euros et d'un règlement de 21 210 euros
En conséquence de la résolution de la vente, M. X doit se faire restituer l'intégralité du prix du véhicule par lui payé, soit la somme de 25 046 euros peu important que la société Roger Hamon ait destiné le véhicule repris à la destruction ou que la valeur du véhicule repris portée au contrat ait correspondu à un geste commercial.
Il y a lieu, infirmant le jugement sur le montant de la restitution, de condamner la société Roger Hamon à restituer à M. X la somme de 25 046 euros cette somme produisant intérêts au taux légal à compter du jugement, conformément à la demande de ce dernier.
Par application de l'article 1645 du Code civil, la société Roger Hamon, vendeur professionnel, est également tenue à l'égard de son acheteur à des dommages et intérêts en réparation des gênes et désagréments que lui ont causé les fréquentes réparations et immobilisations de son véhicule.
Il y a lieu, faisant droit à la demande M. X, de confirmer le jugement qui lui a alloué à ce titre la somme de 200 euros.
Sur les demandes de Roger Hamon à l'égard de la société General Motors
La société Roger Hamon sollicite d'une part, le prononcé de la résolution de la vente intervenue entre elle et la société General Motors France et la condamnation de la société General Motors France à lui restituer le prix de vente reçu, soit la somme de 20 642,45 euros et, d'autre part, la condamnation de la même à la garantir des condamnations mises à sa charge à l'égard de M. X
À l'inverse de ce qu'a retenu le premier juge, dans ses rapports avec le constructeur du véhicule qui lui a vendu celui-ci, le concessionnaire n'est pas présumé avoir connu les vices affectant le véhicule par lui revendu à M. X
Le vice de fabrication affectant le véhicule litigieux engage la garantie du constructeur à l'encontre de la société Roger Hamon, et la société General Motors, tenue à cette garantie est mal fondée à demander à être exonérée en reprochant à son distributeur d'avoir manqué à son obligation de conseil à l'égard de M. X
La société Roger Hamon est fondée à solliciter la résolution de la vente intervenue entre elle et la société General Motors France, et par voie de conséquence, la condamnation de la société General Motors France à lui restituer le prix de vente par elle payée, soit la somme de 20 642,45 euros.
Mais, la société Roger Hamon ne peut obtenir la garantie de General Motors de sa condamnation à restituer le prix de vente reçue par elle de M. X (25 046 euro), la restitution par elle de ce prix à M.W. étant du fait de la résolution de la vente entre eux, la contrepartie de la remise du véhicule et ne constituant pas un préjudice indemnisable par son propre vendeur, le constructeur.
En revanche, la société General Motors sera condamnée à garantir la société Roger Hamon de la condamnation à dommages et intérêts pour 200 euros en réparation du préjudice de jouissance subi par M. X du fait du défaut de fabrication affectant le véhicule vendu au garagiste par la société General Motors ainsi que des condamnations au titre des dépens et des frais irrépétibles.
Sur les dépens et l'article 700 du Code de procédure civile
Les dispositions du jugement relatives à la charge des dépens et à l'application de l'article 700 du Code de procédure civile étaient justifiées et seront confirmées.
Les dépens d'appel seront mis à la charge de la société General Motors et de la société Roger Hamon et au titre des frais irrépétibles d'appel, la société Roger Hamon devra payer à M. X la somme de 2 000 euros et la société General Motors devra payer à la société Roger Hamon la somme de 2 000 euros.
Par ces motifs : Confirme le jugement rendu le 10 septembre 2013 par le tribunal de grande instance de Saint-Brieuc en ce qu'il a : - prononcé la résolution de la vente intervenue entre la société Roger Hamon et M. X, - dit que M. X devra restituer à la société Roger Hamon le véhicule Opel Zafira Enjoy 1,9 CDTI immatriculé 6006 XR 22 contre le paiement de la somme ci-dessus, - condamné la société Garage Roger Hamon à payer à M. X la somme de 200 euros de dommages et intérêts, - condamné la société General Motors aux entiers dépens, en ce compris les frais d'expertise judiciaire, - condamné la société General Motors à payer à M. X la somme de 3 000 euros et à la société Roger Hamon la somme de 2 000 euros en application de l'article 700 du Code de procédure civile, Infirme le jugement pour le surplus et statuant à nouveau, Condamne la société Roger Hamon à restituer à M. X la somme de 25 046 euros reçue au titre du prix de vente, outre les intérêts au taux légal à compter de la date du jugement ; Prononce la résolution de la vente intervenue entre la société Roger Hamon et la société General Motors France ; Condamne la société General Motors France à restituer à la société Roger Hamon la somme de 20 642,45 euros reçue au titre du prix de vente perçu ; Condamne la société General Motors France à garantir la société Roger Hamon de sa condamnation à payer à M. X la somme de 200 euros de dommages et intérêts ainsi que des condamnations aux dépens d'appel et au titre des frais irrépétibles ; Condamne la société Roger Hamon à payer à M. X la somme de 2 000 euros au titre des frais irrépétibles d'appel ; Condamne la société General Motors France à payer à la société Roger Hamon la somme de 2 000 euros au titre des frais irrépétibles d'appel ; Condamne la société General Motors France et la société Roger Hamon aux dépens d'appel.