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Décisions

ADLC, 6 décembre 2016, n° 16-DCC-201

AUTORITÉ DE LA CONCURRENCE

Décision

relative à la prise de contrôle exclusif de la société Papyrus France Holding par le groupe Inapa

ADLC n° 16-DCC-201

6 décembre 2016

L'Autorité de la concurrence,

Vu le dossier de notification adressé complet au service des concentrations le 2 novembre 2016, relatif à la prise de contrôle exclusif de la société Papyrus France Holding par le groupe Inapa, formalisée par une lettre d'intention en date du 29 juillet 2016 et un projet d'accord de cession en date du 27 octobre 2016 ; Vu le livre IV du code de commerce relatif à la liberté des prix et de la concurrence, et notamment ses articles L. 430-1 à L. 430-7 ; Vu les éléments complémentaires transmis par les parties au cours de l'instruction ;

Adopte la décision suivante :

I. Les entreprises concernées et l'opération

1. Inapa - Investimentos, Participações e Gestaõ, S.A. (ci-après " Inapa ") est la société holding du groupe Inapa, dont le siège social est situé au Protugal. Inapa est active en France par le biais de sa filiale Inapa France SAS, contrôlée à 100 %. Inapa est principalement active dans le secteur de la vente en gros et de la distribution de papier fin aux clients professionnels. Le groupe distribue tous types de papier fin (couché, non couché, autocopiant, autocollant, enveloppes, papier fin, beaux-arts et création), à la fois sous sa propre marque et sous la marque de fabricants. De manière marginale, Inapa exerce également des activités de distribution de fournitures de bureau et d'accessoires d'impression d'une part, de distribution de produits d'emballage d'autre part, et enfin, de distribution de supports dans le secteur de la communication visuelle.

2. Papyrus France Holding SAS, est la filiale française du groupe suédois Papyrus, spécialisé dans le négoce de papier. Papyrus France Holding SAS (ci-après " Papyrus ") a pour activité principale la vente en gros et la distribution de papier fin aux clients professionnels en France. Ses activités de distribution de papier comprennent la distribution de tous types de papier, à travers de marques propres ou sous des marques de fabricants. En complément de son activité de distribution de papier, Papyrus exerce une activité mineure de distribution de fournitures de bureau et d'accessoires d'impression ainsi qu'une activité naissante dans la distribution de support de communication visuelle.

3. L'opération consiste en l'acquisition de 100% du capital et des droits de vote de Papyrus par le groupe Inapa. En ce qu'elle se traduit par la prise de contrôle exclusif de Papyrus par Inapa, l'opération constitue une concentration au sens de l'article L.430-1 du code de commerce.

4. Les entreprises concernées réalisent ensemble un chiffre d'affaires hors taxe total sur le plan mondial de plus de 150 millions d'euros (Inapa : [...] d'euros pour l'exercice clos le 31 décembre 2015 ; Papyrus : [...] d'euros pour le même exercice). Chacune de ces entreprises a réalisé en France un chiffre d'affaires supérieur à 50 millions d'euros (Inapa : [...] d'euros pour l'exercice clos le 31 décembre 2015 ; Papyrus : [...] d'euros pour le même exercice). Compte tenu de ces chiffres d'affaires, l'opération ne relève pas de la compétence de l'Union européenne. En revanche, les seuils de contrôle mentionnés au I de l'article L. 430-2 du code de commerce sont franchis. Cette opération est donc soumise aux dispositions des articles L. 430-3 et suivants du code de commerce relatifs à la concentration économique.

II. Délimitation des marchés pertinents

5. Inapa et Papyrus sont toutes deux actives dans le secteur de la vente en gros et de la distribution de papier fin aux clients professionnels en France, plus précisément de papier graphique, de papier de bureau ainsi que, dans une moindre mesure, de papier beaux-arts et de création. Elles sont également actives dans le secteur de la distribution de supports pour communication visuelles, de produits d'emballage et de fournitures de bureau.

A. LES MARCHÉS DE LA DISTRIBUTION DE PAPIER FIN

6. Le papier fin, qui est fabriqué à partir de pâte chimique ou recyclée, est un papier à usage d'impression ou d'écriture de haute qualité. Le papier fin peut être soit couché sans bois (" coated wood-free " ou "WFC ") ou non couché sans bois (" uncoated wood-free " ou "WFU ").

7. Le papier fin a principalement deux applications : le papier graphique, utilisé par les professionnels de l'imprimerie, et le papier bureau à usage bureautique, catégorie qui inclut le papier autocopiant (également désigné " papier carbone "). Le papier fin, selon qu'il s'agit de papier graphique ou de papier de bureau peut être vendu via différents canaux de distribution : soit directement par les fabricants, soit par les négociants de papier, soit par les producteurs d'équipements de bureau (ci-après " OEM "1) tels que Xerox, soit par les distributeurs de fournitures de bureau (ci-après " OSD "2), tels que Lyreco et Office Depot.

8. La troisième catégorie de papier fin, plus marginale, est celle du papier beaux-arts et de création qui regroupe les papiers spéciaux et les papiers à lettre utilisés notamment pour les créations artistiques.

1. LES MARCHÉS DE PRODUITS

9. La Commission a envisagé diverses segmentations possibles en fonction du type de papier utilisé et du canal de distribution employé.

a) Distinction en fonction du type de papier

10. Dans ses décisions3, la Commission a retenu des marchés de produits distincts pour la distribution de papier graphique, de papier de bureau et de papier beaux-arts et création.

11. Les parties confirment l'existence de marchés de produits distincts pour ces trois catégories de papier dans la mesure où elles s'adressent chacune à des catégories de clients différentes : le papier graphique aux professionnels de l'imprimerie, le papier de bureau aux entreprises et administrations et le papier beaux-arts et création aux créateurs artistiques. S'agissant plus précisément de la distinction entre le papier graphique et le papier de bureau, les parties avancent qu'il n'y a pas de substituabilité entre ces deux types de papier dans la mesure où les tailles de pré-coupe standards (formats de bureau) ne sont pas utilisées par les professionnels de l'imprimerie et, réciproquement, les formats de papier standards pour les clients imprimeurs ne peuvent pas être utilisés par des clients professionnels pour des applications bureautiques (lesquels utilisent principalement les formats A5, A4, A3).

12. Le test de marché confirme également la pertinence de la distinction opérée entre le marché de la distribution de papier graphique d'une part, le marché de la distribution de papier de bureau d'autre part et enfin, le marché de la distribution de papier beaux-arts et de création.

Le papier graphique

13. Le papier graphique est principalement utilisé par l'industrie de l'imprimerie. Il existe une grande variété de papiers graphiques visant à répondre aux attentes spécifiques de clients.

14. A l'instar du papier fin en général, le papier graphique peut être soit couché sans bois (WFC) ou non couché sans bois (WFU). En outre, le papier graphique est vendu sous forme de bobines ou de feuilles.

15. Les parties estiment qu'il n'est pas nécessaire de distinguer, au sein du marché de la distribution de papier graphique, entre le papier graphique couché sans bois et le papier non couché sans bois car, bien que présentant des caractéristiques différentes, notamment en termes de touché, de brillance et d'absorption de l'encre, ces types de papier sont distribués par l'ensemble des opérateurs sur le marché et sont utilisés par le même type de clientèle. En effet, selon elles, du point du vue de l'offre, l'ensemble des fabricants ainsi que des distributeurs de papier graphique proposent les deux types de papier. Du point de vue de la demande, les parties indiquent que, traditionnellement, le papier couché et le papier non couché ne faisaient pas l'objet des mêmes usages. Le papier couché est traditionnellement utilisé pour l'impression de magazines et de catalogues alors que le papier non couché est préféré pour l'impression de livres. Toutefois les deux types de papier peuvent être soumis aux mêmes processus d'impression et les usages traditionnels de chaque type de papier ont progressivement changé puisqu'il est désormais fréquent de voir des magazines ou des catalogues imprimés en papier non couché ou des livres imprimés en papier couché.

16. Les parties considèrent par ailleurs qu'il n'est pas pertinent de distinguer, au sein du marché de la distribution de papier graphique entre, d'une part, le papier graphique vendu en bobines et, d'autre part, le papier graphique vendu en feuilles au motif qu'il existe un degré de substituabilité important entre le papier vendu en bobine et le papier vendu en feuille, la seule différence entre ces deux types de papier étant le format dans lequel le papier est présenté. Du point de vue de l'offre, le format bobines est plus fréquemment distribué par les fabricants alors que les marchands de papier ont une offre étendue de papier feuilles. Toutefois, selon les parties, il n'existe aucune barrière à la distribution de papier en feuilles pour les fabricants compte tenu de la simplicité du mécanisme de découpe et du prix limité des machines dotées d'un système de découpe. Du point de vue de la demande, les parties avancent que le format dans lequel est vendu le papier ne fait pas partie des éléments déterminants guidant le choix des clients qui disposent souvent de leur propre mécanisme de découpe. En outre, si par le passé une différence de prix significative existait entre ces deux formats, aujourd'hui cette différence s'est estompée et les deux formats sont vendus à un prix similaire.

17. Le test de marché tend à confirmer la position des parties selon laquelle il n'est pas nécessaire de segmenter ce marché en fonction des différentes catégories de papier graphique.

18. En tout état de cause, la question de la segmentation du marché de la distribution de papier graphique en fonction des types de papier (papier graphique couché sans bois et papier non couché sans bois ; papier en bobines et papier en feuilles) peut demeurer ouverte en l'espèce, dans la mesure où, quelle que soit la réponse apportée, celle-ci ne modifiera pas les conclusions de l'analyse concurrentielle.

Le papier de bureau

19. Le papier de bureau est un papier standardisé, généralement commercialisé sous un format prédécoupé en ramettes. Il est principalement utilisé pour un usage de bureau.

20. Dans sa décision Antalis/Xerox de 20134, la Commission a identifié un marché distinct pour la distribution de papier autocopiant compte tenu de l'usage spécifique qui en est fait.

21. Les parties considèrent cependant qu'il n'est pas pertinent, en l'espèce, d'identifier un marché distinct pour la distribution de papier autocopiant car la demande pour celui-ci a sensiblement diminué au cours de la dernière décennie, les clients ayant reporté leur demande sur d'autres types de papier et sur des procédés électroniques sans papier. De surcroît, les ventes des parties sur ce segment sont tout à fait minimes.

22. Toutefois, la majorité des répondants au test de marché estime, conformément à la pratique décisionnelle de la Commission, qu'il est pertinent d'identifier un marché distinct de la distribution de papier autocopiant compte tenu de l'usage spécifique qui en est fait.

23. En tout état de cause, la question de l'existence d'un marché distinct de la distribution de papier autocopiant peut demeurer ouverte dans la mesure où la réponse ne modifiera pas les conclusions de l'analyse concurrentielle.

Le papier beaux-arts et de création

24. Le papier beaux-arts et de création représente une troisième catégorie de papier fin qui désigne tous les papiers spéciaux et papiers à lettre créés pour des applications spécifiques de haute précision telles que la création artistique.

25. Cette catégorie de papier ne représente qu'une part relativement faible de l'activité des parties, de telle sorte qu'elles considèrent qu'il n'est pas nécessaire pour l'examen de la présente opération de retenir un marché distinct pour cette activité.

26. En tout état de cause, la question de l'existence d'un marché distinct pour la distribution de papier beaux-arts et de création peut être laissée ouverte dans la mesure où l'opération n'est pas susceptible de soulever des problèmes de concurrence sur ce marché.

27. En conclusion, l'analyse sera menée sur le marché de la distribution de papier graphique, le marché de la distribution de papier de bureau en ce compris le segment du papier autocopiant et enfin, sur le marché de la distribution de papier beaux-arts et création.

b) Distinction selon le canal de distribution

28. S'agissant de la pertinence d'une segmentation des marchés de la distribution de papier fin par canal de distribution, on constate une évolution de la pratique décisionnelle en la matière afin de tenir compte des mutations de ces marchés, de leur structure et de leur dynamique concurrentielle.

Les canaux de distribution du papier graphique

29. Dans sa décision Antalis/MAP de 20075, la Commission a estimé qu'il était pertinent de distinguer le marché de la distribution de papier fin par les fabricants de celui de la distribution de papier fin par les négociants. Néanmoins, dans sa décision Sappi/M-Real de 20086 relative au papier graphique, la Commission a laissé ouverte la définition exacte du marché pertinent relevant qu'" une majorité de répondants au test de marché ont indiqué au cas d'espèce qu'il ne serait pas approprié de définir des marchés séparés en fonction des canaux de distribution "7.

30. Les parties estiment que la délimitation du marché de la distribution du papier graphique devrait inclure à la fois les négociants de papier et les fabricants de papier dans la mesure où les imprimeurs s'approvisionnent déjà directement auprès de ces deux canaux de distribution. Les OEM et les OSD ne sont en revanche pas actifs dans la distribution de papier graphique.

31. La majorité des répondants au test de marché sont d'accord pour retenir l'existence d'un marché de la distribution de papier graphique incluant les négociants et les fabricants. En effet, la plupart des répondants estiment que les négociants et les fabricants proposent des catalogues de produits, des niveaux de services et des prix similaires. En outre, la majeure partie des clients interrogés se dit prête à s'adresser à des fabricants si les négociants venaient à augmenter leurs prix de 5 ou 10 %.

32. En tout état de cause, la question de l'identification, au sein du marché de la distribution de papier graphique, de marchés distincts en fonction des canaux de distribution peut demeurer ouverte en l'espèce dans la mesure où la réponse ne modifiera pas les conclusions de l'analyse concurrentielle.

Les canaux de distribution du papier de bureau

33. Dans sa décision Antalis/Xerox, adoptée en 20138 et relative à la distribution de papier de bureau, la Commission a considéré que les OEM, OSD et les fabricants de papier sont en concurrence avec les négociants de papier pour la distribution de papier de bureau. En effet, la Commission a noté que du point de vue de la demande, les clients considéraient les négociants de papier et les fournisseurs non-négociants comme des alternatives équivalentes et que du point de vue de l'offre, les OEM, les OSD et fabricants étaient parvenus avec le temps à offrir aux clients la même qualité de service que les négociants de papier.

34. Dans cette décision, la Commission a donc considéré que le marché pertinent était le marché de la distribution de papier de bureau sans distinction selon les canaux de distribution.

35. Les parties approuvent la définition de marché retenue par la Commission dans cette décision. Par ailleurs, une majorité de répondants au test de marché considèrent que les OSD et les OEM proposent aux clients un choix de papier de bureau, un niveau de services et des prix similaires aux négociants de papier et ont vocation à s'adresser à la même clientèle. En outre, la majeure partie des clients interrogés se dit prête à s'adresser à des OSD et/ou des OEM si les négociants venaient à augmenter leurs prix de 5 ou 10 %.

36. S'agissant des fabricants, la majorité des répondants au test de marché estime qu'ils proposent un choix de papier et pratiquent des prix similaires aux négociants mais qu'en revanche, ils ne sont pas en mesure de proposer un niveau de services équivalent à celui des négociants et n'ont pas vocation à s'adresser au même type de clientèle, les fabricants ayant principalement pour clients des grands comptes. Cependant la majorité des clients interrogés se dit prête à se reporter vers l'offre de fabricants si les négociants venaient à augmenter leurs prix de 5 à 10 %.

37. En tout état de cause, la grande majorité des répondants est d'accord pour retenir, à l'instar de la pratique décisionnelle européenne et des parties, un marché de la distribution de papier de bureau incluant tous les canaux de distribution, soit les négociants de papier, les fabricants, les OSD et les OEM.

38. Il ressort de l'ensemble de ces éléments que les OSD et les OEM sont en concurrence avec les négociants de papier pour la distribution de papier de bureau. Même s'ils tendent également à démontrer que les fabricants de papier appartiennent au même marché, le degré de certitude est moins élevé, raison pour laquelle la question de l'existence d'un marché distinct de la distribution de papier de bureau par les fabricants peut demeurer ouverte dans la mesure où la réponse ne modifiera pas les conclusions de l'analyse concurrentielle.

39. En conclusion, pour la présente opération, l'analyse sera menée sur (i) le marché de la distribution de papier graphique, comprenant les négociants de papier et les fabricants, (ii) le marché de la distribution de papier de bureau, comprenant les négociants de papier, les OEM, les OSD et les fabricants de papier d'une part, et le marché de la distribution de papier de bureau, comprenant uniquement les négociants de papier, les OEM et les OSD d'autre part, et enfin, (iii) le marché de la distribution de papier beaux-arts et création.

2. LES MARCHÉS GÉOGRAPHIQUES

40. La pratique décisionnelle tant nationale9 qu'européenne10 a considéré que les marchés de la distribution de papier fin aux clients professionnels étaient de dimension au moins nationale, voir plus large. Les parties sont d'accord avec cette position.

41. La majorité des répondants au test de marché considère que les marchés de la distribution de papier graphique, de papier de bureau et de papier autocopiant sont des marchés de dimension nationale.

42. Par conséquent, l'analyse sera menée sur les différents marchés de la distribution de papier fin en France.

B. LE SECTEUR DU SUPPORT POUR COMMUNICATION VISUELLE

43. La communication visuelle peut être réalisée sur des supports divers (tels que les panneaux de publicité extérieurs et intérieurs, les enseignes, les moyens de transport etc.) à l'aide de différents matériaux (papier, canevas, textile et vinyle).

44. En France, les parties sont seulement actives dans la distribution de supports pour communication visuelle. Cela comprend la distribution de textile, canevas, vinyle, plastique, papier et autres types de matériaux sur lesquels la communication visuelle peut être imprimée. Les parties ont également une activité limitée de distribution de consommables d'impression spécifique à la communication visuelle.

45. Il n'existe pas de pratique décisionnelle concernant ce secteur. Les parties proposent de retenir un marché national de la distribution de produits pour l'impression de communication visuelle et précisent que leur activité dans ce secteur est extrêmement limitée.

46. Par conséquent, la question de la définition exacte du marché de la distribution de supports pour la communication visuelle peut être laissée ouverte dans la mesure où la réponse ne sera pas de nature à modifier l'analyse concurrentielle.

C. LE SECTEUR DE LA DISTRIBUTION DE PRODUITS D'EMBALLAGE ET DE FOURNITURES DE BUREAU AUX CLIENTS PROFESSIONNELS

1. LES MARCHÉS DE PRODUITS

47. La pratique décisionnelle a segmenté le secteur des produits d'emballage entre, d'une part, le marché de l'approvisionnement et, d'autre part, le marché de la distribution11.

48. L'Autorité a envisagé de segmenter chaque marché selon le type de produits concerné (cartons, accessoires de palettisation, produits d'entretien et d'hygiène, adhésifs et cerclage etc.).

49. Pour le marché de la distribution des fournitures de bureau, l'Autorité de la concurrence a envisagé une distinction selon le canal de distribution (OSD, vente à distance, distribution en grande surface)12, conformément à la pratique décisionnelle de la Commission13.

50. Les parties n'ont qu'une activité marginale dans le secteur de la distribution de produits d'emballage et de fournitures de bureau.

51. En conséquence, la définition exacte du marché de produits peut demeurer ouverte dans la mesure où l'opération n'est pas susceptible de soulever des problèmes de concurrence sur ce marché et ce, quelle que soit la définition retenue.

2. LES MARCHÉS GÉOGRAPHIQUES

52. La pratique décisionnelle, tant nationale14 qu'européenne15, considère que les marchés de la distribution de produits d'emballage et de fournitures de bureau aux clients professionnels sont de dimension nationale. Les parties sont d'accord avec cette analyse.

53. Au demeurant, la question ne nécessite pas d'être tranchée en l'espèce dans la mesure où, quelle que soit la définition retenue, les conclusions de l'analyse concurrentielle demeureront inchangées.

III. Analyse concurrentielle

54. La présente opération emporte des chevauchements d'activités sur les différents marchés de la distribution de papier fin (A), sur le marché de la distribution de produits de communication audiovisuelle (B) et sur les marchés de la distribution de produits d'emballage et de fournitures de bureau aux clients professionnels (C).

A. LES MARCHÉS DE LA DISTRIBUTION DE PAPIER FIN

1. LE MARCHÉ DE LA DISTRIBUTION DE PAPIER GRAPHIQUE

a) Les positions des parties et de leurs concurrents

55. A l'issue de l'opération, sur le marché de la distribution de papier graphique comprenant les fabricants et les négociants de papier, la part de marché de la nouvelle entité atteindra [10-20]% avec un incrément de [5-10] %. La nouvelle entité continuera de faire face à la concurrence exercée par d'autres négociants de papier, tels qu'Antalis ([10-20] %) et Torraspapel ([5-10] %), ainsi que par des fabricants de papier, en particulier Sappi ([10-20] %) et Lecta ([5-10] %), qui vendent leur papier directement aux clients professionnels.

56. Sur le segment de la distribution de papier graphique en bobines, la part de marché combinée des parties s'élève à [0-5] %, avec un incrément de [0-5] %. Sur le segment de la distribution de papier graphique en feuilles, la nouvelle entité détiendra en revanche une part de marché plus élevée, soit [30-40] % avec un incrément de [10-20] %, mais fera face à la forte concurrence exercée notamment par Antalis ([20-30] %), Sappi ([10-20]%) et Torraspapel ([10-20] %).

57. Enfin, sur les segments de la distribution de papier graphique couché et de papier graphique non couché, la part de marché cumulée des parties de dépassera pas [20-30] %.

58. Il ressort par ailleurs des réponses au test de marché que la demande en papier fin ayant sensiblement baissé au cours des dix dernières années, les secteurs de la production et de la distribution de papier fin sont à ce jour en situation de surcapacité de fabrication et de stockage. La possibilité de réaction des concurrents, quel que soit le segment de marché envisagé n'est donc pas susceptible d'être freinée par des contraintes de capacités de production ou de distribution. La capacité de réaction des concurrents ne devrait pas davantage être contrainte par des coûts de changement de fournisseurs importants pour les clients dans la mesure où les accords commerciaux ont des durées limitées (en général, contrat de gré à gré d'un an), les produits de papier graphique sont relativement homogènes et compatibles avec le matériel d'impression des clients et, enfin, la diversification des sources d'approvisionnement est déjà une pratique courante sur le secteur du papier graphique. En conclusion, il n'existe pas de contraintes de capacité sur le marché du papier graphique.

59. En conclusion, quelle que soit la définition retenue, plus ou moins large, du marché de la distribution de papier graphique, l'opération envisagée n'est pas susceptible de porter atteinte à la concurrence sur ce dernier par le biais d'effets horizontaux.

2. LE MARCHÉ DE LA DISTRIBUTION DE PAPIER BUREAU

a) Les positions des parties et de leurs concurrents

60. A l'issue de l'opération, sur le marché de la distribution de papier de bureau tous canaux de distribution confondus, la part de marché de la nouvelle entité atteindra [20-30] %, avec un incrément de [10-20] %. Cette dernière continuera à faire face à la concurrence d'autres négociants, en particulier Antalis ([10-20] %), d'OEM et d'OSD dont Lyreco ([10-20] %) et Office Dépôt ([10-20] %), et de fabricants qui vendent directement aux clients.

61. Par ailleurs, sur le marché plus restreint de la distribution de papier de bureau par les négociants de papier, les OEM et les OSD (i.e. hors fabricants), la nouvelle entité détiendra une part de marché de [20-30] % et sera confrontée notamment à la concurrence d'Antalis ([20-30] %), Lyreco ([10-20] %) et Office Depot ([10-20] %).

62. Par ailleurs, sur le marché de la distribution de papier autocopiant, la part de marché cumulée des parties s'élève à [5-10] %. Sur ce marché, elle continuera à faire face, notamment, au principal opérateur sur le marché, soit Antalis qui dispose d'une part de marché de [20-30] %.

63. Par conséquent, quelle que soit la segmentation retenue, l'opération envisagée n'est pas susceptible de porter atteinte à la concurrence sur les marchés de la distribution de papier graphique.

3. LE MARCHÉ DE LA DISTRIBUTION DE PAPIER BEAUX-ARTS ET DE CRÉATION

64. Concernant le marché de la distribution de papier beaux-arts et de création, les parties indiquent qu'elles ne disposent pas de données permettant de fournir une estimation fiable des parts de marché des différents opérateurs.

65. En tout état de cause, elles considèrent que la nouvelle entité représentera une part de marché inférieure à [0-5] %. En outre, la nouvelle entité continuera à faire face à la concurrence d'Antalis, qui dispose d'une position de marché importante sur ce segment en raison de son intégration verticale avec le fabricant Arjo Wiggins, qui est le leader mondial de la fabrication de papier à usage spécial et de papier beaux-arts.

66. En conséquence, l'opération n'est pas susceptible de porter atteinte à la concurrence sur le marché de la distribution de papier beaux-arts et de création par le biais d'effets horizontaux.

B. LA DISTRIBUTION DE PRODUITS POUR COMMUNICATION VISUELLE

67. Les parties indiquent ne pas disposer de données précises concernant la taille du marché et les parts de marché respectives des acteurs. Néanmoins, elles estiment que la part de marché de la nouvelle entité sera inférieure à [0-5] %. De plus, cette dernière continuera à faire face à la concurrence des principales entreprises actives dans le secteur de la distribution de supports pour communication visuelle, tels que Spandex, ID Numérique, Antalis, Tiflex et Filmolux.

68. L'opération n'apparaît donc pas de nature à porter atteinte à la concurrence par le biais d'effets horizontaux sur le marché de la distribution de produits pour communication visuelle.

C. LE SECTEUR DES PRODUITS D'EMBALLAGE ET DE FOURNITURES DE BUREAU POUR PROFESSIONNELS

69. Les parties ont une activité de distribution de produits d'emballage et de fournitures de bureau, marginale à leur activité de distribution de papier. Elles ne disposent pas de statistique sur ce secteur mais évaluent la part de marché de la nouvelle entité à [0-5] %. La nouvelle entité fera face à la concurrence d'entreprises actives sur le marché de la distribution de produits d'emballage et fournitures de bureau tels que Raja/Cenpac (environ [30-40] % de part de marché), BBA Emballages (environ [10-20] % de part de marché) et l'Univers de l'Emballage/Filpack (environ [0-5] % de part de marché).

70. Par conséquent, l'opération n'est pas susceptible de porter atteinte à la concurrence par le biais d'effets horizontaux sur le marché de la distribution de produits d'emballage et de fournitures de bureau.

DECIDE

Article unique : L'opération notifiée sous le numéro 16-169 est autorisée.

La présidente,

Isabelle de Silva

NOTES :

1 OEM pour " Original Equipment Manufacturers ".

2 OSD pour " Office Supply Dealers ".

3 Décisions de la Commission COMP/M.4753 du 27 octobre 2007, Antalis/MAP ; COMP/M.5150 du 28 juillet 2008, UMP RUS/ BRIST/ JV ; COMP/M.6947 du 14 août 2013, Antalis/Xerox.

4 Décision de la Commission COMP/M.6947 du 14 août 2013, Antalis/Xerox.

5 Décision de la Commission COMP/M.4753 du 24 octobre 2007, Antalis/MAP.

6 Décision de la Commission COMP/M.5283 du 31 octobre 2008, Sappi/M-Real.

7 Décision COMP/M.5283 précitée, §18 (traduction libre).

8 Décision de la Commission COMP/M.6947 du 14 août 2013, Antalis/Xerox.

9 Décisions de l'Autorité de la concurrence n°09-DCC-26 du 24 juillet 2009 relative à l'acquisition de la société Camif Collectivités par la société Manutan International et n°10-DCC-68 du 9 juillet 2010 relative à la prise de contrôle exclusif de la société Cenpac par le groupe Raja.

10 Décisions de la Commission COMP/M.4753 du 24 octobre 2007, COMP/M.5283 du 31 octobre 2008, Sappi/M-Real et Antalis/MAP ; COMP/M.6947 du 14 août 2013, Antalis/Xerox.

11 Décisions de l'Autorité de la concurrence n°10-DCC-68 du 9 juillet 2010 relative à la prise de contrôle exclusif de la société Cenpac par le groupe Raja et n°09-DCC-26 du 24 juillet 2009 relative à l'acquisition de la société Camif Collectivités par la société Manutan International.

12 Id.

13 Décisions de la Commission du 23 mai 2003, n°COMP/M.3108 - Office Depot/Guilbert et du 14 octobre 2012, n°COMP/M.2965 - Staples/Guilbert.

14 Décisions précitées n°10-DCC-68 et n°09-DCC-26.