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Décisions

CA Rennes, 3e ch. com., 3 janvier 2017, n° 14-07773

RENNES

Arrêt

PARTIES

Demandeur :

Euroviande Service (SA), Techni Desoss (SAS), Technique Service Formation (SAS), Groupe E.V.S. (SA)

Défendeur :

Presta Breizh (SAS)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Calloch

Conseillers :

Mmes André, Jeannesson

CA Rennes n° 14-07773

3 janvier 2017

Exposé du litige

La SAS Presta Breizh, immatriculée au registre du commerce et des sociétés de Rennes depuis le 5 janvier 1993, exerce, en sous-traitance, l'activité de travail à façon de désossage, parage et conditionnement de tous produits carnés sur les sites industriels des abattoirs où sont mises à sa disposition des lignes de production. La SA Euroviande service (la société Euroviande), immatriculée au registre du commerce et des sociétés le 31 octobre 1989, et la SAS Techni Desoss, immatriculée le 8 février 2008, sociétés dont les actions sont détenues par la SA holding Groupe EVS, exercent une activité identique dans les mêmes conditions tandis que la SAS Technique Service Formation (la société TSF), autre filiale de la société Groupe EVS, assume une activité de formation aux métiers de la viande et de la boucherie équivalente à celle exercée par la société PFP Formation, filiale comme la société Presta Breizh, de la SARL 2A2F.

A partir de 1996, les actionnaires du Groupe EVS ont pris des participations au capital de la société Presta Breizh mais la fusion projetée n'ayant pas abouti, un protocole d'accord a été signé le 26 avril 1999, lequel comportait à la charge de chacune des sociétés une clause de non-concurrence dont les effets sont venus à expiration le 26 avril 2003.

Les sociétés du Groupe EVS employaient, au 1er janvier 2012, 1 113 salariés sur plus de 50 sites industriels. La société Presta Breizh employait, au 31 août 2012, 272 salariés.

Se plaignant chacune de la perte d'un chantier au profit de la société Presta Breizh, les sociétés Euroviande et Techni Desoss, auxquelles se sont jointes les sociétés TSF et Groupe EVS, ont, le 30 juillet 2012, obtenu du président du Tribunal de commerce de Rennes une ordonnance sur requête les autorisant à faire pratiquer par huissier diverses saisies de pièces (registre du personnel, contrats de travail et bulletins de salaires de tout le personnel embauché depuis février 2012, contrats conclus avec les agences d'intérim, contrats commerciaux et factures avec les entrepreneurs principaux Elivia et Socopa viandes, tous éléments relatifs à la formation, plan de prévention et tous documents 'en lien direct' avec elles...) au sein des sociétés Presta Breizh et PFP, cette mesure étant réalisée le 27 août 2012. Elles ont ensuite assigné, le 15 janvier 2014, la seule société Presta Breizh devant le tribunal de commerce de Rennes aux fins de faire sanctionner des actes de concurrence déloyale commis par elle qui seraient responsables de la perte des deux chantiers.

Le 18 septembre 2014, le tribunal de commerce de Rennes les a déboutées de leurs demandes et les a condamnées au paiement de la somme de 10 000 euros sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile.

Les sociétés Euroviande, Techni Desoss, TSF et Groupe EVS (les sociétés EVS) ont relevé appel de ce jugement, demandant à la cour de :

- confirmer le jugement du 18 septembre 2014 en ce qu'i1 les a déclarées recevables et bien fondées en leurs demandes à l'encontre de la société Presta Breizh ;

- réformer le jugement sur les autres points, statuer à nouveau et en conséquence :

constater que la société Presta Breizh a procédé à un débauchage déloyal des salariés des sociétés Techni Desoss et Euroviande Service ;

constater que la société Presta Breizh a pratiqué une politique de prix abusivement bas au détriment des sociétés Techni Desoss et Euroviande Service ;

constater que la société Presta Breizh s'est rendue auteure d'espionnage commercial à leur égard ;

constater que ces agissements avaient pour but de détourner la clientèle des sociétés Techni Desoss et Euroviande Service :

dire que ces agissements constituent des actes de concurrence déloyale commis à leur préjudice ;

constater le préjudice subi par elles et leur désorganisation consécutive.

En conséquence,

1°) condamner la société Presta Breizh à payer à la société Euroviande Service la somme de 343 641 euros se décomposant comme suit :

- la somme de 132 677 euros à titre de dommages et intérêts au titre de la perte de marge liée au chantier Elivia au Lion d'Angers ;

- la somme de 25 048 euros à titre de dommages et intérêts au titre de la perte des investissements de formation réalisés auprès des salariés débauchés ;

- la somme de 35 916 euros à titre de dommages et intérêts au titre des frais inhérents au changement d'affectation des salariés du site Elivia au Lion d'Angers ;

- la somme de 100 000 euros au titre de la perte de chance de continuer ses relations avec la société Elivia sur le site du Lion d'Angers ;

- la somme de 50 000 euro en réparation de son préjudice moral ;

2°) condamner la société Presta Breizh à payer à la société Techni Desoss la somme de 252 130,03 euros se décomposant comme suit :

- la somme de 155 916 euros à titre de dommages et intérêts au titre de la perte de marge liée au chantier Socopa à la Roche sur Yon ;

- la somme de 46 214 03 euros à titre de dommages et intérêts au titre de la perte des investissements de formation réalisés auprès des salariés débauchés ;

- la somme de 50 000 euros en réparation de son préjudice moral ;

3°) condamner la société Presta Breizh à payer aux sociétés Groupe E.V.S. et T.S.F. la somme à chacune de 50 000 euros au titre du préjudice distinct qu'elles ont subi du fait de ses actes de concurrence déloyale ;

- ordonner la publication du jugement à intervenir, aux frais de la défenderesse, pendant un mois dans la revue " Les marchés hebdo " :

- ordonner à la société Presta Breizh la restitution de l'ensemble des documents appréhendés leur appartenant et ce, sous astreinte de 3000 euros par infraction caractérisée ;

- ordonner à la société Presta Breizh la destruction de toutes copies de ces mêmes pièces, sur quelque support que ce soit et ce, sous astreinte de 3000 euros par infraction caractérisée ;

- ordonner à la société Presta Breizh la destruction de tous plagiats de ces mêmes pièces, et ce, sous astreinte de 3000 euros par infraction caractérisée ;

- rejeter toutes demandes reconventionnelles comme injustes et mal fondées, notamment rejeter la demande de Presta Breizh au titre de dommages et intérêts pour procédure abusive ;

- condamner la société Presta Breizh à leur payer la somme de 15 000 euros à chacune au titre de l'article 700 du Code de procédure civile.

En réponse, la société Presta Breizh demande à la Cour :

Vu les articles 1382 et 1383 du Code civil, l'article L. 420-5 du Code de commerce, les articles 31 et 32 du Code de procédure civile ;

In limine litis

1) Sur l'irrecevabilité des demandes

- constater que la société E.V.S. se fonde sur des éléments de preuve saisis dans l'ordinateur de M. Patrice B. ;

- constater que M. Patrice B. n'était pas salarié de la société Presta Breizh au jour de la saisie de ces éléments pas davantage qu'à la date de délivrance de l'acte introduisant l'instance ;

En conséquence,

- constater que les pièces suivantes ont été saisies sur l'ordinateur de ce dernier :

- pièce adverse 14 : Captures d'écran (constat du 27.08.2012) (66 pages),

- pièce adverse 19 : Fichier " business plan 2006/2010 du Groupe E.V.S ",

- pièce adverse 20 : Fichier " suivi de formation et budget TSF ",

- pièce adverse 21 : Fichier " document unique ",

- pièce adverse 22 : Fichier " suivi des risques ",

- pièce adverse 23 : Fichier " socopatdevs " comprenant tarif Techni Desoss/Socopa et fiche technique Technidesoss " client Mc Key ",

- pièce adverse 24-1 : Fichier " programmation CP " à en-tête Euroviande Service

- pièce adverse 24-2 : Fichier " programmation CP " à en-tête Cofco,

- pièce adverse 24-3 : Fichier " programmation CP " à en-tête Presta Breizh,

- pièce adverse 24-4 : Fichier " programmation CP " à en-tête P.F.P.,

- pièce adverse 25 : Fichier " CHSCT dernière version 3ème trim 2005 "

- pièce adverse 26 : Fichier " projet François "

- pièce adverse 27 : Mail de M. B. à Mme C. du 15.03.2011 (en pj : simulation)

- pièce adverse 28 : Mail de M. B. du 28.03.2011 à M. G. et M. A. contenant :

* 28-1 un fichier " primes presta "

* 28-2 un fichier " objectif PAE presta "

* 28-3 un fichier CODIR

- pièce adverse 29 : mail de M. B. à Mme C. du 13.05.2011 avec copie à Messieurs A. et G. (en pj : simulation EVS)

En conséquence, dire que la société Presta Breizh n'a pas qualité pour défendre en justice sur des moyens de preuve appartenant à un tiers à l'instance ;

En conséquence, recevoir la société Presta Breizh en son appel incident du jugement rendu par le tribunal de commerce de Rennes en ce qu'il a jugé recevable les demandes formulées par les sociétés du groupe EVS ;

Déclarer la société EVS irrecevable en ses demandes, fins et conclusions et en conséquence, l'en débouter ;

Subsidiairement sur le fond,

Constater que :

• la preuve de faits de débauchage massif de salariés n'est pas rapportée ;

• la preuve de faits d'espionnage industriel n'est pas rapportée ;

• l'existence de prix abusivement bas relève des relations entre un commerçant ou un professionnel et un consommateur :

Constater en tout état de cause que les prix pratiqués par la société Presta Breizh sont similaires à ceux pratiqués par les sociétés du groupe EVS ;

En conséquence, dire que la preuve de l'existence de faits constitutifs de concurrence déloyale n'est pas rapportée et confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a débouté les sociétés du groupe EVS de l'intégralité de leurs demandes, fins et prétentions ;

Puis, à titre reconventionnel, réformer le jugement entrepris en ce qu'il a débouté la société Presta Breizh de ses demandes formulées à titre reconventionnel ;

Recevoir la SAS Presta Breizh en sa demande reconventionnelle et après l'y avoir déclarée bien fondée,

Constater que la procédure dirigée à son encontre est empreinte d'un caractère parfaitement abusif,

En conséquence, condamner les sociétés du groupe EVS à lui verser la somme de 100 000 euros à titre de dommages-intérêts en réparation du préjudice subi,

Ordonner la restitution des pièces saisies en vertu de la procédure de l'ordonnance sur requête,

Faire interdiction à la société EVS d'exploiter ces pièces de quelque manière que ce soit et sous astreinte de 500 euros par infraction constatée,

Ordonner la publication de décision à intervenir dans tel hebdomadaire qu'il lui plaira de déterminer

Condamner les sociétés du Groupe EVS à lui verser la somme de 25 000 euros par application des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile.

Pour un plus ample exposé des faits, de la procédure ainsi que des prétentions et moyens des parties, la Cour se réfère aux énonciations de la décision attaquée ainsi qu'aux dernières conclusions déposées pour l'appelant le 17 avril 2015 et pour l'intimée le 20 février 2015.

A l'audience, les parties ont été invitées à s'expliquer sur la recevabilité de la demande fondée sur l'article L. 420-5 du Code de commerce au regard :

- des dispositions de l'article L.420-7 issu de l'ordonnance n° 2004-1173 du 4 novembre 2004, selon lequel " Sans préjudice des articles L. 420-6, L. 462-8, L. 463-1 à L. 463-4, L. 463-6, L. 463-7 et L. 464-1 à L. 464-8, les litiges relatifs à l'application des règles contenues dans les articles L. 420-1 à L. 420-5 ainsi que dans les articles 81 et 82 du traité instituant la Communauté européenne [art. 101 et 102 TFUE] et ceux dans lesquels ces dispositions sont invoquées sont attribués, selon le cas et sous réserve des règles de partage de compétences entre les ordres de juridiction, aux juridictions civiles ou commerciales dont le siège et le ressort sont fixés par décret en Conseil d'État. Ce décret détermine également le siège et le ressort de la ou des cours d'appel appelées à connaître des décisions rendues par ces juridictions. "

- et des dispositions de l'article R. 420-5 du Code de commerce qui énonce que " Pour l'application de la deuxième phrase de l'article L. 420-7, la Cour d'appel de Paris est compétente. "

Ces dispositions étant entrées en vigueur le 1er avril 2011 avant l'assignation introductive de la présente procédure.

Par note en délibéré adressée à la cour le 11 novembre 2016, les sociétés appelantes ont déclaré abandonner le moyen tiré de l'article L. 420-5 du Code de commerce et font valoir que la fin de non-recevoir ayant disparu, il n'y a pas lieu de déclarer leur recours irrecevable s'agissant des autres moyens soulevés.

EXPOSÉ DES MOTIFS

Sur la recevabilité de l'appel au regard du moyen soulevé d'office par la cour

Les sociétés EVS fondent leur demande sur l'article 1382 du Code civil et ont renoncé à se prévaloir du moyen tiré de l'article L. 420-5 du Code de commerce, ce moyen étant dissociable du surplus de leur argumentation. Leur appel devient dès lors recevable.

Sur la recevabilité des demandes

Il n'est pas discuté que les pièces recensées dans le dispositif des conclusions de l'intimée proviennent de l'ordinateur portable mis à la disposition de M. Patrice B. qui n'était plus salarié de la SAS Presta Breizh depuis le 1er avril 2012 mais était devenu salarié de la société holding 2A2F et exerçait la gestion de la société PFP, ces deux sociétés n'étant pas concernées par le présent litige.

Mais contrairement à ce qui est soutenu, ceci n'entraîne pas un défaut de qualité de la société Presta Breizh à se défendre en justice, ni une irrecevabilité des demandes formées à son encontre. Rien n'empêche en effet une partie d'invoquer, à titre d'éléments de preuve du bien-fondé de ses prétentions, des pièces obtenues de tiers à la procédure.

En réalité, la société Presta Breizh met en cause la force probante de ces pièces en ce qui concerne les actes de concurrence déloyale qui lui sont reprochés, ce qu'il appartient à la juridiction d'apprécier. Mais en toute hypothèse, ceci ne rend pas irrecevables les demandes présentées à son encontre.

Les sociétés appelantes demandent quant à elles la confirmation du jugement du 18 septembre 2014 en ce qu'il les a déclarées non seulement recevables et encore bien fondées en leurs demandes à l'encontre de la société Presta Breizh. Cependant leur appel n'est recevable que parce que le jugement a rejeté leurs demandes de sorte qu'elles n'ont pu se méprendre sur l'erreur matérielle contenue dans ce chef du dispositif du jugement critiqué.

Sur le fond

L'action des sociétés EVS a été suscitée par la perte de deux contrats de sous-traitance au profit de la société Presta Breizh, à savoir :

- en novembre 2011, un contrat de sous-traitance confié par la société Elivia au Lion d'Angers jusqu'alors détenu par la société Euroviande ;

- en mai 2012, un contrat de sous-traitance confié par la société Socopa Viandes à la Roche sur Yon jusqu'alors détenu par la société Techni Desoss.

Bien qu'ayant elles-mêmes notamment en 2006 (Charal) et 2008 (société Monique R.) obtenu des contrats de sous-traitance au détriment de la société Presta Breizh et qu'elles ne produisent pas la lettre de résiliation des deux contrats perdus, les sociétés EVS ont soutenu que la perte de marché subie ne pouvait s'expliquer que par des actes de concurrence déloyale de leur concurrent. Cependant la société Euroviande a, dès le mois d'avril 2014, récupéré le contrat afférent au chantier Socopa de la Roche sur Yon ainsi que nombre de salariés attachés à ce chantier.

Ceci n'empêche pas les sociétés EVS de réclamer un préjudice pour perte de chance de continuer à entretenir des relations commerciales avec la société Elivia outre, chacune, un préjudice moral 'pour perte d'image'. Elles demandent également la perte de leurs investissements de formation pour 16 salariés y compris pour un salarié qui n'a pas été employé par la société Presta Breizh (F. non inclus dans la pièce 47 et pour lequel il est réclamé par ailleurs une indemnisation correspondant à ses frais de déplacement) ainsi que pour les salariés qui travaillent à nouveau à leur profit (B., B., F., O., C., G., B.) ou pourront être réembauchés par elle à La Roche sur Yon (R., L. et L. s'ils sont toujours en activité). Pour justifier de leur préjudice, les sociétés EVS produisent des justificatifs afférents à la formation de M. H. en 2007 dont elles ont pu tirer profit pendant plus de quatre ans et de M. C. dont elles peuvent à nouveau tirer profit, étant fait remarquer qu'hormis M. D., les autres salariés travaillant au Lion d'Angers inclus dans la liste figurant page 44 de leurs conclusions ont été employés par elles pendant une durée de quatre ans et demi à huit ans et six mois, de sorte que le coût de formation invoqué, à supposer qu'il excède leurs obligations légales, avait en tout état de cause déjà été largement amorti.

Après abandon du grief portant sur la pratique de prix abusivement bas, les faits de concurrence déloyale reprochés à la société Presta Breizh qui seront successivement examinés consistent dans :

- le recours excessif à une main d'œuvre intérimaire ;

- le débauchage des salariés des sociétés Euroviande et Techni Desoss ;

- l'allégation de l'existence d'un espionnage commercial imputable à la société Presta Breizh.

A) Sur le grief de recours excessif à une main d'œuvre intérimaire

Les sociétés appelantes font valoir que la saisie du registre du personnel et du contrat passé avec la société d'intérim EBC Interim SRL leur ont permis de constater que leur concurrent avait recours à une main d'œuvre intérimaire d'origine roumaine dans des conditions selon elles irrégulières.

Mais elles procèdent par simples affirmations sans démontrer que l'emploi de main d'œuvre intérimaire, fût-elle originaire d'un autre pays de l'Union européenne, serait illégal.

Au demeurant, la fausseté des affirmations de la société Techni Desoss, se plaignant de " dumping social " au motif qu'elle payait elle-même sa main d'œuvre intérimaire au prix horaire de 21 euros pour un pareur et 23 euros pour un désosseur, est démontrée par les pièces contraires versées aux débats par la société Presta Breizh. En effet, celle-ci prouve que la société Techni Desoss emploie des techniciens bouchers intérimaires N1 E2 pour un prix horaire de 17,63 euros (y compris pour M. A. technicien boucher non aspirant) ou de 19,06 euros. Pour se justifier, la société Techni Desoss soutient qu'il s'agissait de débutants, ce qui n'est pas établi par les contrats en cause, et que ce salaire serait complété par des primes " éventuelles " mais rien ne prouve qu'elle octroyait des avantages supérieurs à ceux imposés par la législation aux usagers de salariés intérimaires.

Contrairement à ce qui est soutenu également, la société Presta Breizh était titulaire, pendant la période en cause, du label social édité par le Bureau Veritas (pièce 97), cet élément étant en tout état de cause indifférent à la solution du litige.

L'existence d'actes de concurrence déloyale de ce chef n'est dès lors pas établie.

B) Sur le grief de débauchage

Les sociétés Euroviande et Techi Desoss se plaignent d'un débauchage massif et sélectif de leur personnel.

Mais le caractère sélectif du déplacement des salariés de l'un vers l'autre employeur n'est pas démontré sauf à considérer que par sélectif, il est fait allusion à la circonstance que la plupart des agents de production concernés travaillaient déjà sur le site lorsque le contrat de sous-traitance correspondant a été résilié. En effet, ce déplacement concernait pour l'essentiel des ouvriers ayant une ancienneté très variable et pour certains très faible (5 mois pour M. H., 8 mois pour M. B.), l'ancienneté moyenne de 7,1 ans s'expliquant seulement par l'embauche du cadre T. (17,8 ans) après une rupture de contrat de travail négociée comportant renonciation à la clause de non-concurrence ainsi que de quelques ouvriers plus âgés tels que L. (18,1 ans) venant d'un autre site de production, de G. (18,7 ans) revenu depuis chez Euroviande ou de L. (11,5 ans).

Le caractère massif du déplacement déploré ne résulte pas davantage des pièces produites puisque selon la pièce 47 des sociétés appelantes, il concernerait 26 salariés dont un seul agent de maîtrise et un seul cadre alors que leur effectif total s'élevait au 1er janvier 2012 à 1 113 salariés.

Au demeurant s'agissant de cette liste de 26 salariés, il sera relevé que :

le premier, qui avait travaillé pour les sociétés EVS pendant à peine plus d'un an sur le site de Bressuire, avait été licencié par elles le 7 décembre 2011, rien n'établissant que la société Presta Breizh qui l'a employé en octobre et décembre 2011 ait connu ce précédent engagement, étant fait remarquer qu'aucun lien n'existe en tout état de cause entre cette embauche et la perte des deux contrats de sous-traitance ;

l'unique cadre concerné a bénéficié d'une convention de rupture négociée avec abandon délibéré de la clause de non-concurrence ;

l'agent de maîtrise Roux a démissionné le 21 mai 2012 mais n'a été embauché par la société Presta Breizh que le 12 août suivant de sorte que son attestation selon laquelle les deux événements n'étaient pas liés est parfaitement crédible (pièce 69) ;

M. B., travaillant au profit des sociétés appelantes sur le site de Cholet depuis août 2011 (soit 8 mois), affirme de manière plausible avoir voulu se rapprocher de son domicile, raison de sa candidature chez la société Presta Breizh qui recrutait au Lyon d'Angers ;

M. K., employé à Vitré, à 200 kilomètres de son domicile, s'était vu refuser par la société Euroviande une affectation sur le site du Lion d'Angers, raison de sa démission à l'expiration de sa période d'engagement consécutive à la formation reçue (pièce 73) ;

M. G. employé par Euroviande à Vitré a été animé de la même motivation (pièce 74) ;

tel est également le cas de M. L., employé sur le site Charal de Cholet ;

M. H. était quant à lui employé à Mondeville comme pareur depuis moins de 5 mois au moment de sa démission qui ne peut s'expliquer que par la même motivation.

Dès lors, le grief ne pourrait au mieux concerner que 18 des salariés répertoriés par les sociétés appelantes, soit 11 salariés de la société Techni Desoss et 7 salariés de la société Euroviande.

Mais il est établi que ce déplacement est la conséquence du transfert des deux contrats de sous-traitance et non sa cause. Ainsi à la suite du changement de prestataire sur le site Socopa de la Roche sur Yon, dix employés de production ont démissionné pour continuer à exercer leur profession sur le même site. Ceci est le cas au mois de mai 2012 de MM B. B., L., R., F., B., G. et B. et au mois de juin 2012 de MM O., C. et B. A. M. G. a quant à lui démissionné au mois de septembre 2012 pour intégrer la société Presta Breizh au mois d'octobre suivant. Le même phénomène s'est produit sur le site Elivia du Lion d'Angers lorsque la société Presta Breizh a succédé à la société Euroviande dans l'exécution du contrat de sous-traitance sur ce site.

Tous ces salariés étaient libres de tout engagement envers leur précédent employeur de sorte que leur démission n'était pas fautive, auraient-ils eu des avantages supérieurs chez leur nouvel employeur, ce qui reste à démontrer mais ne serait en tout état de cause que l'expression de la liberté du travail.

La société Presta Breizh démontre que la démission des salariés exerçant sur le site de l'entrepreneur principal est usuelle en cas de changement de sous-traitant, les salariés étant attachés au lieu de production plutôt qu'au titulaire du contrat.

C'est ainsi qu'après la perte, par la société Presta Breizh, du chantier Socopa en litige, MM F., B., B., O., C., G. et B. ont immédiatement donné leur démission pour travailler au profit du nouveau prestataire, la société Euroviande. La société Presta Breizh affirme sans être utilement démentie que tel est également le cas de M. G., L. et R. outre d'autres salariés qui n'avaient pas été au préalable employés par les sociétés appelantes, au total quinze de ses salariés employés sur le site de La Roche sur Yon l'ayant quittée pour la plupart au mois de février 2014.

La société Presta Breizh, qui justifie qu'elle a eu recours à des annonces pour recruter son personnel, établit également que les approches directes des salariés concernés, à supposer qu'elles soient établies, ne lui sont pas propres, les appelants n'ayant pas craint d'attirer son personnel en recourant au besoin au dénigrement. A cet égard, les pièces produites y compris les photographies prises dans un lieu ouvert au public sont recevables nonobstant l'argumentation des sociétés EVS qui n'en tirent d'ailleurs pas de conséquence.

Le déplacement de personnel déploré n'a pas eu une importance suffisante pour désorganiser les sociétés Euroviande et Techni Dessos qui ne soutiennent pas qu'elles auraient pu offrir aux employés concernés, après la perte de leur contrat, des conditions de travail identiques à celles qui étaient auparavant les leurs, se plaignant au contraire d'avoir souffert d'un préjudice résultant de l'alourdissement du coût de déplacement des salariés qui leur sont restés fidèles.

Aucun acte de concurrence déloyale n'est dès lors démontré de ce chef, ni aucun préjudice lié à ce déplacement, compte tenu des observations déjà faites supra s'agissant du coût de formation de ce personnel.

C) L'allégation de l'existence d'un espionnage commercial imputable à la société Presta Breizh

Le terme " espionnage " est tendancieux en ce qu'il sous-entend que la société Presta Breizh a déployé des manœuvres positives afin de se procurer des informations confidentielles sur les deux sociétés concurrentes de nature à créer une concurrence déloyale.

Or il est seulement reproché à la société Presta Breizh d'avoir pu avoir accès à certains documents détenus par, M. B., ancien salarié des sociétés EVS, après l'avoir embauché le 1er décembre 2010, cette embauche n'étant en elle-même pas critiquable puisque M. B. n'était plus salarié de l'une ou l'autre des sociétés appelantes depuis son licenciement économique par la société Techni Desoss survenu trois ans et 9 mois plus tôt le 13 avril 2007, étant rappelé que la clause de non-concurrence qui lui avait été imposée n'était plus en vigueur au moment de cette embauche.

Il n'est pas inutile de rappeler que M. B. a été salarié de la société Euroviande :

du 27 février 1987 au 31 juillet 1992 en qualité de technicien boucher,

du 1er août 1992 au 31 décembre 1996 en qualité de chef de fil,

du 1er janvier 1997 au 4 août 2001 en qualité de responsable de secteur,

et qu'après avoir démissionné en raison d'une divergence de point de vue avec M. Sébastien C., actuel président de la société Techni Desoss et administrateur d'Euroviande, il a été embauché par la société Techni Desoss :

du 16 octobre 2001 au 31 décembre 2002 en qualité de responsable de secteur,

du 1er janvier 2003 au 26 février 2004 en qualité de directeur technique,

du 27 février 2004 au 13 avril 2007 en qualité de directeur d'exploitation, période pendant laquelle il lui a été un temps proposé de participer à une augmentation de capital de la société Euroviande.

Après son licenciement pour motif économique, il a successivement travaillé pour la société Codéviande, puis pour la société Cofco, avant d'être embauché à l'expiration de la validité de sa clause de non-concurrence par la société Presta Breizh en qualité de responsable commercial, puis par la société holding 2A2F en qualité de directeur général à compter du 1er mars 2011.

Pour fonder son grief " d'espionnage commercial ", les sociétés EVS invoquent uniquement les documents, tous antérieurs à son licenciement de la société Techni Desoss, trouvés sur l'ordinateur utilisé par M. B. en faisant valoir que ce matériel avait été mis à sa disposition par son nouvel employeur. Mais le fait qu'un cadre ait enregistré sur son ordinateur professionnel des documents réalisés par lui-même ou à l'élaboration desquels il avait participé à l'occasion de ses anciennes fonctions, ne signifie pas que son nouvel employeur se les soit appropriés et en ait tiré profit.

En l'occurrence, les constatations du tribunal de commerce sont pertinentes en ce qu'elles relèvent la banalité des documents en cause et leur obsolescence. Il sera ajouté que ni leur caractère confidentiel, ni le fait qu'ils exprimeraient un savoir-faire propre aux sociétés en cause ne sont davantage démontrés.

En premier lieu, certains des quelques documents sélectionnés par les sociétés appelantes comme significatifs portent l'entête de la société Cofco (pièce 24-2) ou de la société Codéviandes, ou encore de la société PFP, de sorte que l'on comprend mal en quoi ils caractériseraient une faute commise par la société Presta Breizh.

En second lieu, de nombreux autres documents, présentés comme caractérisant une faute, ne sont que des trames vierges sur lesquelles à supposer même qu'elles en soient le concepteur, ce qui n'est pas démontré, les sociétés EVS ne démontrent pas être titulaires d'un droit de propriété intellectuelle, s'agissant de documents sans originalité, ne portant pas l'empreinte de la personnalité de leur auteur.

En troisième lieu, la similitude invoquée entre certains documents ne peut résulter de l'influence de M. B.. Ainsi la société Euroviande soutient que le contrat de sous-traitance conclu par la société Presta Breizh avec la société Elivia serait la copie conforme du contrat qu'elle avait elle-même conclu avec la société Soviba, son prédécesseur, en 1999. Mais d'une part, ceci n'est pas exact, les clauses des contrats contenant des dispositions différentes. D'autre part, la société Presta Breizh démontre qu'elle utilise une trame contractuelle type, non exempte de fautes d'orthographe, élaborée bien avant l'arrivée de M. B. ainsi que le prouve par exemple le contrat signé avec la société Monique R. le 1er juin 1999 (pièce 38), de sorte que s'il existe une parenté entre les contrats des deux groupes, elle ne peut s'expliquer que par l'identité de leur activité et le rapprochement survenu entre eux entre 1996 et 1999.

En quatrième lieu, les documents relatifs aux fichiers " suivis des risques ", " suivis de formation ", " programmation de congés payés "... ne contiennent aucune information confidentielle, ni ne traduisent aucun savoir-faire particulier. Il n'est pas anormal que M. B. qui a acquis son expérience professionnelle en créant ou utilisant ces documents les aient conservés comme trames ou modèles possibles de ses taches à venir, sans que les sociétés, même éventuellement conceptrices de certains d'entre eux, puissent revendiquer une quelconque exclusivité.

Rien ne lui interdisait non plus de conserver un business plan devenu obsolète qui lui avait été personnellement adressé, lequel était au demeurant dépourvu de tout intérêt pour la société Presta Breizh.

En toute hypothèse, rien n'établit que la société Presta Breizh, qui exerçait déjà son activité depuis janvier 1993, ait modifié son organisation, sa stratégie commerciale ou ses documents commerciaux après l'embauche de M. B. et ait tiré un quelconque profit de ces documents, à supposer même qu'ils aient été portés à sa connaissance, ce qui n'est pas établi, les quelques mails invoqués à cet effet démontrant seulement que M. B. a repris pour son analyse de l'activité de son nouvel employeur un schéma de raisonnement déjà utilisé au profit de l'ancien, ce qui ne caractérise pas une appropriation illicite d'un savoir-faire.

De même, la cour ne peut que relever que les tarifs des différentes sociétés n'avaient rien de confidentiel puisque pour justifier du bien-fondé de leur requête aux fins de constat du 25 juillet 2012, les sociétés EVS se sont prévalues des tarifs pratiqués par la société Presta Breizh et de ses factures qu'elles avaient obtenues de la société cliente.

Enfin les documents relatifs aux actions de formation ne présentaient pas davantage d'utilité pour la société Presta Breizh qui ne mettait pas en œuvre de telles actions.

Les griefs articulés par les sociétés appelantes qui ont pu elles aussi avoir un accès libre et incontrôlé à l'intégralité des documents et méthodes de travail de leur adversaire ne sont dès lors pas fondés.

En tout état de cause, aucune relation de causalité n'est établie entre les faits reprochés et la perte, en partie au moins provisoire, de deux contrats de sous-traitance laquelle n'est que la conséquence du jeu normal de la concurrence.

Le jugement critiqué sera en conséquence intégralement confirmé sauf à rectifier la formulation impropre du premier chef du dispositif.

Sur les demandes reconventionnelles de la société Presta Breizh

La société Presta Breizh demande l'indemnisation à concurrence de 100 000 euros du préjudice qu'elle soutient avoir subi du fait de la procédure abusive diligentée à son encontre.

Elle fait valoir :

- que la saisie opérée sans procédure contradictoire a abouti à la récolte de 467 pièces dont seule une vingtaine a été utilisée par ses adversaires,

- que ces pièces ont été saisies sur l'ordinateur utilisé par un tiers, M. B. était devenu salarié de la société 2A2F au moment de la mesure d'investigation,

- que M. B. n'est pas partie à la procédure, pas plus que la société PFP,

- que les sociétés Presta Breizh et EVS ont, par le passé, eu des liens capitalistiques et qu'elles ont dès lors échangé des méthodes commerciales ou de ressources humaines aboutissant à l'édition de documents similaires,

- qu'une clause de non-concurrence avait été formalisée entre ces deux sociétés et qu'elle est venue à expiration depuis 2003, leur permettant de se prévaloir des documents établis antérieurement de façon conjointe et de manière libre,

- que M. Patrice B. a exercé pendant plus de 20 ans au profit du Groupe EVS et qu'il a été sollicité afin d'intégrer le capital social de cette société, ce qui expliquait sa détention du business plan,

- qu'à plusieurs reprises, les sociétés du Groupe EVS ont menacé M. B. d'agir contre lui au titre de la violation d'un engagement de non-concurrence de manière non justifiée,

- que les sociétés du Groupe EVS exercent sur plus de 50 sites sur le territoire national et emploient plus de 1 200 salariés,

- que les sociétés du Groupe EVS ne produisent pas aux débats les lettres de résiliation des contrats qui les liaient avec les clients Socopa et Elivia,

- que les salariés anciennement employés par les sociétés du Groupe EVS qui ne sont liés par aucune clause de non-concurrence, ont attesté qu'ils avaient démissionné librement,

- que depuis lors, certains d'entre eux ont été repris par les sociétés du Groupe EVS pour réintégrer le chantier de la Socopa,

- que la preuve est rapportée que des salariés du Groupe EVS ont débauché des salariés de Presta Breizh tandis que celle-ci était toujours sous contrat avec la Socopa,

- que les grilles de tarification des sociétés du Groupe EVS ne sont pas produites aux débats mais que la comparaison des prestations faites tant par EVS que par Presta Breizh aboutissent à des tarifs supérieurs pour Presta Breizh à hauteur de 1,83 %,

- que la détermination des primes des salariés du Groupe EVS a été sanctionnée par le tribunal de grande instance d'Angers,

- que manifestement des domiciliations artificielles sont utilisées pour certains des salariés du groupe EVS aboutissant à une distorsion de concurrence dans la mesure où une entreprise respectant la réglementation n'est pas sujette au même montant de charges sociales et patronales,

- que les documents saisis sur l'ordinateur de M. Patrice B. sont pour la plupart empreints de la plus grande banalité et datent de plus de six ans avant la délivrance de l'acte introductif d'instance,

- que seuls 20 salariés ont démissionné librement du chantier de la Socopa et d'Elivia sur un effectif global de plus de 1 200 salariés.

Hormis le grief portant sur les prix respectifs pratiqués par les sociétés concurrentes qui n'a pas été examiné, la cour a pu, à l'étude des pièces produites, constater que ces assertions étaient pour l'essentiel exactes. En tout état de cause, il n'apparaît pas que la société attaquée ait adopté, dans la conduite de sa politique commerciale ou sociale, un comportement différent de celui lui-même adopté par les sociétés EVS de nature à lui conférer un avantage concurrentiel à leur détriment.

Il ressort en revanche de l'ensemble des pièces produites que cette procédure s'inscrit, d'une part, dans une stratégie d'intimidation et de harcèlement dirigée contre M. B. et, d'autre part, dans le refus d'admettre le jeu normal de la concurrence.

L'appel diligenté par les sociétés EVS malgré la décision sérieusement motivée des premiers juges alors que les pièces produites par leur adversaire ne leur permettaient plus de soutenir de bonne foi leurs arguments initiaux et que le préjudice prétendument subi, qui n'était pas illégitime, n'était plus que résiduel, traduit leur volonté de s'opposer au jeu normal de la concurrence en profitant abusivement de leur puissance économique à l'encontre d'un concurrent plus faible, y compris en usant de manœuvres de dénigrement à son encontre.

La demande d'indemnisation d'une procédure qui a duré plus de quatre ans pendant lequels la société Presta Breizh a été menacée de demandes pécuniaires déraisonnables au regard de l'importance du litige et de la faiblesse des marges déplorée par les appelantes elles-mêmes justifient l'octroi d'une indemnité de 30 000 euros.

En revanche, la société Presta Breizh n'est pas recevable à revendiquer les pièces contenues dans l'ordinateur de M. B. dès lors qu'elle soutient que celles-ci ne lui appartenaient pas et y étaient conservées à son insu. Ne précisant pas quelles sont ses propres pièces dont elle demande la restitution, sa demande de ce chef ne sera pas accueillie. Il sera en revanche fait interdiction aux sociétés EVS d'utiliser ces pièces, obtenues dans un but strictement circonscrit, dans leurs relations avec des tiers au présent litige ou pour toute autre procédure.

La publication du présent arrêt n'est pas justifiée par les circonstances de la cause.

PAR CES MOTIFS, LA COUR :

Donne acte aux sociétés Euroviande service SA, Techni Desoss SAS, Technique Service Formation SAS et Groupe E.V.S. SA de l'abandon de leur moyen fondé sur la violation de l'article L.420-5 du Code de commerce ;

Confirme le jugement rendu le 18 septembre 2014 par le tribunal de commerce de Rennes sauf à rectifier l'erreur matérielle contenue dans le premier chef du dispositif de la façon suivante :

" Dit que les demandes des sociétés TSF, EVS, TECHNI DESOSS et EUROVIANDE Service sont recevables ";

Y ajoutant

Condamne solidairement les sociétés Euroviande service SA, Techni Desoss SAS, Technique Service Formation SAS et Groupe E.V.S. SA à payer à la société Presta Breizh SAS une indemnité de 30 000 euros ;

Condamne solidairement les sociétés Euroviande service SA, Techni desoss SAS, Technique Service Formation SAS et Groupe E.V.S. SA à payer à la société Presta Breizh SAS une somme supplémentaire de 10 000 euros sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile ;

Fait interdiction aux sociétés Euroviande service SA, Techni Desoss SAS, Technique Service Formation SAS et Groupe E.V.S. SA à faire usage des pièces saisies en exécution de l'ordonnance rendue le 30 juillet 2012 par le président du tribunal de commerce de Rennes dans leurs relations avec les tiers au présent litige ou dans le cadre de procédures étrangères aux parties sous peine d'engager leur responsabilité à l'égard de la société Presta Breizh ;

Rejette toute autre demande plus ample ou contraire ;

Condamne solidairement les sociétés Euroviande service SA, Techni Desoss SAS, Technique Service Formation SAS et Groupe E.V.S. SA aux dépens de la procédure d'appel.