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Décisions

CA Paris, Pôle 5 ch. 1, 17 janvier 2017, n° 14-21277

PARIS

Arrêt

PARTIES

Demandeur :

Hub (Sasu), QG Loisirs (SARL), Montravers (ès qual.)

Défendeur :

Sport Découverte.fr (SAS)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Auroy

Conseillers :

Mmes Douillet, Schaller

Avocats :

Mes Cohen, Kouchnir Cargill, Bellone, Boccon Gibod, Germain

T. com. Paris, du 30 sept. 2014

30 septembre 2014

La société Sport Découverte.fr, créée en 2003, exerce une activité d'intermédiaire dans le domaine du loisir et des activités sportives, de commercialisation à des groupes et des particuliers, de centrale de réservation par téléphone et Internet. Elle a mis en place un site Internet "Sport-decouverte.com", sur lequel figurent toutes les offres qu'elle commercialise pour l'ensemble des activités référencées.

La société QG Com, créée en 2003 et aux droits de laquelle vient la société Hub, exerce, via son site Internet "4000m.com" une activité d'intermédiaire pour le saut en parachute.

La société QG Loisirs, créée en 2007 et mise en liquidation judiciaire le 6 juin 2012, exerçait, via son site Internet "Guide-sensations.com" des activités d'intermédiaire dans le domaine du loisir et des activités sportives et de vente de coffrets cadeaux sous la marque Doze.

Ces deux dernières sociétés avaient les mêmes gérants.

Par jugement du 10 avril 2008, le Tribunal de commerce de Paris, saisi par la société QC Com, a condamné la société Sport Découverte à payer à cette dernière une somme de 2 000 euros au titre de la contrefaçon - pour avoir utilisé sur son site Internet une photographie dont les droits appartenaient à la partie adverse - et une somme de 58 590 euros au titre de la concurrence déloyale - pour avoir annoncé sur Google un tarif public mensonger pour le saut en parachute, rompant ainsi l'égalité des chances entre les concurrents.

Ce jugement a été confirmé par arrêt du 10 mars 2010 de la Cour d'appel de Paris. Le pourvoi formé contre cette décision par la société Sport Découverte a été déclaré non admis pour absence de moyen sérieux.

Estimant de son côté que les sociétés QG Com et QG Loisirs se livraient à des pratiques déloyales et trompeuses consistant à annoncer sur les moteurs de recherche sur Internet Google et Yahoo des prix très compétitifs ne correspondant pas à ceux trouvés sur leur sites, la société Sport Découverte a fait réaliser sur Internet trois constats d'huissier de justice les 2 et 7 mai 2008, le 19 mars 2010 et le 31 mars 2010. Reprochant également à la société QG Loisirs d'exercer une activité illicite d'agent de tourisme, pour mettre en vente sur son site Internet ainsi qu'en boutique des bons cadeaux Doze constitués de séjours touristiques, notamment sportifs, sans disposer de la licence d'agent de voyages pour le faire, elle lui a adressé deux lettres recommandées avec accusé de réception les 19 mai 2009 et 24 mai 2010 pour la mettre en demeure de respecter puis de justifier du respect de la législation sur les agences de voyage.

Puis, par acte du 27 juillet 2010, la société Sport Découverte.fr a fait assigner les sociétés QG Com et QG Loisirs en concurrence déloyale devant le Tribunal de commerce de Paris.

Par jugement du 30 septembre 2014, le tribunal a :

- condamné la société QG Com à verser à la société Sport Découverte.fr la somme de 17 500 euros à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice subi,

- fixé au passif de la société QG Loisirs représentée par la Selarl Montravers Yang-Ting prise en la personne de Me Marie-Hélène Montravers, ès qualités de liquidateur judiciaire de la société la somme de 17 500 euros au profit de la société Sport Découverte.fr au même titre,

- débouté la société Sport Découverte.fr de sa demande aux titres des dépenses publicitaires et du surplus de sa demande au titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice qu'elle a subi,

- ordonné aux sociétés QG Com et QG Loisirs représentée par la Selarl Montravers Yang-Ting prise en la personne de Me Marie-Hélène Montravers, ès qualités de prendre les mesures nécessaires pour que leurs publicités sur Google et Yahoo coïncident exactement avec les prix qu'elles pratiquent en réalité, et dans le cas où un coût supplémentaire pourrait être demandé, quel qu'en soit le motif, d'en signaler l'existence et la nature dès la publicité faite au niveau de ces sites,

- assorti cette mesure d'une astreinte de 500 euros par infraction constatée et par jour de retard, à compter du 8e jour suivant la réception d'une mise en demeure de la faire disparaître, et pour une période de 90 jours à l'issue de laquelle il sera fait droit à nouveau en cas de non-exécution,

- rejeté la demande de publication de la décision formulée par la société Sport Découverte.fr,

- débouté la société QG Com et la société QG Loisirs représentée par la Selarl Montravers Yang-Ting prise en la personne de Me Marie-Hélène Montravers, ès qualités, qui succombent à l'instance, de leurs autres demandes,

- condamné la societé QG Com à payer à la société Sport Découverte.fr la somme de 7 000 euros en application de l'article 700 du Code de procédure civile et l'a déboutée du surplus de sa demande à l'encontre tant de celle-ci que de la société QG Loisirs représentée par la Selarl Montravers Yang-Ting prise en la personne de Me Marie-Hélène Montravers, ès qualités,

- débouté tes parties de leurs demandes plus amples et contraires,

- ordonné l'exécution provisoire du présent jugement sans constitution de garantie,

- condamné la société QG Com aux dépens de la présente instance, dont ceux à recouvrer par le greffe, liquidés à la somme de 105,84 euros dont 17,42 euros de TVA.

La société Hub, venant aux droits de la société QG Com, a interjeté appel le 22 janvier 2014.

Vu les dernières conclusions numérotées 7 transmises le 8 novembre 2016 par la société Hub, venant aux droits de la société GC Com, qui demande à la cour de :

- infirmer le jugement entrepris au titre de l'ensemble des dispositions la condamnant

- débouter la société Sport Découverte.fr de l'ensemble de ses demandes incidentes (sic),

- condamner la société Sport Découverte.fr à lui payer la somme de 15 000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile,

- condamner la société Sport Découverte.fr aux entiers dépens ;

Vu les dernières conclusions transmises le 18 mai 2015 par la société Montravers Yang-Ting, prise en la personne de Maître Marie-Hélène Montravers, ès qualités, intimée et appelante incidente, qui demande à la cour de :

- confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a :

- débouté la société Sport Découverte.fr de sa demande au titre des dépenses publicitaires,

- rejeté la demande de publication de la décision formulée par la société Sport Découverte.fr,

- infirmer le jugement en ce qu'il a :

- fixé au passif de la société QG Loisirs représentée par la société Montravers Yang-Ting, prise en la personne de Maître Marie-Hélène Montravers, ès qualités de liquidateur judiciaire la somme de 17 500 euros au profit de la société Sport Découverte,

- condamné la société QG Loisirs représentée par la société Montravers Yang-Ting, prise en la personne de Maître Marie-Hélène Montravers, ès qualités, à une amende civile de 90 000 euros (sic),

- l'a déboutée de sa demande sur le fondement de la procédure abusive,

- lui a ordonné de prendre les mesures nécessaires pour faire que ses publicités coïncident exactement avec les prix qu'elle pratique et ce, sous astreinte de 500 euros par infraction constatée et par jour de retard,

- et statuant à nouveau,

- dire et juger que la société QG Loisirs n'a commis aucun acte de concurrence déloyale,

- dire et juger que la société Sport Découverte ne rapporte pas la preuve des préjudices dont elle réclame réparation,

- dire et juger qu'il n'existe aucun lien de causalité entre les faits reprochés à la société QG Loisirs et le préjudice allégué par la société Sport Découverte,

- dire et juger que l'injonction susvisée n'a plus lieu d'être du fait de la liquidation judiciaire de la société QG Loisirs,

En conséquence,

- débouter la société Sport Découverte.fr de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions,

- condamner la société Sport Découverte.fr à lui payer la somme de 25 000 euros au titre de dommages et intérêts pour procédure abusive,

En tout état de cause,

- condamner la société Sport Découverte.fr à lui payer la somme de 20 000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile,

- condamner la société Sport Découverte.fr aux dépens ;

Vu les dernières conclusions numérotées 5 transmises le 5 novembre 2016 par la société Sport Découverte.fr, intimée et appelante incidente, qui demande à la cour de :

- confirmer le jugement entrepris, 2014 sauf en ce qu'il a :

- rejeté sa demande visant à obtenir la condamnation in solidum des défenderesses,

- fixé à 17 500 euros le montant des dommages et intérêts dus par chacune des défenderesses,

- rejeté sa demande portant sur l'activité illicite d'agent de voyage de la société QG Loisirs,

Statuant à nouveau,

- dire et juger que les sociétés QG Com et QG Loisirs sont toutes deux responsables du préjudice qui lui a été causé et devront l'indemniser in solidum,

- dire et juger que la société QG Loisirs a exercé illégalement l'activité d'agent de voyage de mai 2009 à octobre 2010 et lui a causé ainsi un préjudice

En conséquence,

- condamner la société QG Com à lui payer in solidum la somme totale de 556 172 euros au titre de la réparation de son préjudice du fait des actes de concurrence déloyale dont les sociétés QG Com et QG Loisirs sont les auteurs,

- inscrire au passif de la société QG Loisirs la somme totale de 556 172 euros due in solidum au même titre,

- condamner la société QG Com au paiement de la somme de 20 000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile,

- condamner la société QG Com aux entiers dépens tant de première instance que d'appel qui seront recouvrés par la Selarl Grall et associés en application de l'article 699 du Code de procédure civile ;

Vu l'ordonnance de clôture rendue le 8 novembre 2016 ;

Vu les conclusions de procédure transmises les 15 et 22 novembre 2016 par la société Sport Découverte.fr, qui demande à la cour de :

- à titre principal, d'écarter des débats les conclusions signifiées par la société QG Com (en réalité Hub) les 8 et 22 novembre 2016 ainsi que sa pièce n° 49,

- à titre subsidiaire, d'écarter des débats l'ensemble des conclusions et pièces signifiées tant par la société QG Com que par elle-même au mois de novembre 2016, c'est-à-dire, pour la société QG Com, ses conclusions n° 6, 7 et 8 signifiées les 4, 8 et 22 novembre 2016 ainsi que ses pièces n° 44 à 49, pour elle-même, ses conclusions n° 5 signifiées le 5 novembre 2016 ainsi que sa pièce n° 44,

- en tout état de cause, de statuer ainsi que précédemment requis sur les dépens ;

Vu les conclusions numérotées 8 transmises le 21 novembre 2016 par la société Hub, venant aux droits de la société GC Com, qui demande à la cour de débouter la société Sport Découverte.fr de ses demandes de rejet de pièces et conclusions et reprend ses prétentions au fond ;

A l'audience de plaidoiries du 22 novembre 2016, l'incident a été joint au fond.

Motifs de l'arrêt

I Sur l'incident de procédure :

Considérant que s'il était permis à la société Hub, venant aux droits de la société QG Com, de répliquer en tant que de besoin aux dernières conclusions n° 5 de la société Sport Découverte.fr transmises le 5 novembre 2016, elles-mêmes en réplique aux dernières conclusions n° 6 de la société Hub transmises le 4 novembre 2016, avec communication de six nouvelles pièces, force est de constater qu'à l'exception du dispositif, les conclusions n° 7 transmises par elle le jour même de l'ordonnance de clôture reformulent intégralement ses conclusions n° 6 précédentes, rendant ainsi leur comparaison difficile, et comportent en annexe une nouvelle pièce n° 49, communiquée la veille, plaçant la société Sport Découverte.fr dans l'impossibilité de les examiner et d'y apporter une réplique en temps utile ; qu'en procédant de la sorte, la société Hub, a violé les principes de la contradiction et de la loyauté qui constituent des règles essentielles de la procédure ;

Qu'en conséquence, il y a lieu d'écarter des débats les conclusions n° 7 transmises le 8 novembre 2016 par la société Hub ainsi que sa pièce n° 49, de même que ses conclusions n° 8 dans leur partie récapitulative au fond transmises le 21 novembre 2016, de sorte que la cour statue sur ses conclusions n° 6 transmises le 4 novembre 2016, au terme desquelles la société Hub demande à la cour de :

- infirmer le jugement entrepris au titre de l'ensemble des dispositions la condamnant,

- débouter la société Sport Découverte.fr de l'ensemble de ses demandes incidentes (sic),

- condamner la société Sport Découverte.fr à lui payer la somme de 15 000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile,

- condamner la société Sport Découverte.fr aux entiers dépens ;

II- Sur le fond :

Considérant qu'il y a lieu au préalable d'observer que si la société Sport Découverte.fr reproche aux sociétés QG Loisirs et QG Com, aux droits de laquelle vient la société Hub, des actes de concurrence déloyale s'étendant du 2 mai 2008 jusqu'au mois de février 2013 et sollicite leur condamnation in solidum, force est de constater, d'une part, qu'elle ne demande de dommages et intérêts en réparation 1) du gain manqué que sur la base de la baisse de son chiffre d'affaire ventes de stages en 2008 et 2009 et 2) des dépenses publicitaires que pour les années 2008, 2009 et 2010 (jusqu'à l'assignation du 27 juillet 2010), de sorte qu'il n'y a lieu d'examiner la matérialité des faits invoqués que pour la période comprise entre le 2 mai 2008 et le 27 juillet 2010, et, d'autre part, que les faits reprochés aux sociétés QG Loisirs et QG Com sont, certes de même nature, mais aussi distincts, de sorte que leur caractérisation éventuelle ne saurait aboutir à une condamnation in solidum ; qu'il convient donc d'examiner tour à tour les faits reprochés à chacune de ces sociétés ;

A - Sur les faits reprochés à la société QG Loisirs :

* Sur les pratiques commerciales trompeuses :

Considérant que, selon L. 120-1 Code de la consommation :

"Les pratiques commerciales déloyales sont interdites.

Une pratique commerciale est déloyale lorsqu'elle est contraire aux exigences de la diligence professionnelle et qu'elle altère ou est susceptible d'altérer de manière substantielle le comportement économique du consommateur normalement informé et raisonnablement attentif et avisé, à l'égard d'un bien ou d'un service.

Constituent, en particulier, des pratiques commerciales déloyales les pratiques commerciales trompeuses définies aux articles L. 121-2 (...)" ;

Qu'aux termes de L. 121-2 du même code, une pratique commerciale est trompeuse si elle est commise dans l'une des circonstances suivantes :

"2° Lorsqu'elle repose sur des allégations, indications ou présentations fausses ou de nature à induire en erreur et portant sur l'un ou plusieurs des éléments suivants :

a) L'existence, la disponibilité ou la nature du bien ou du service ;

b) Les caractéristiques essentielles du bien ou du service, à savoir : ses qualités substantielles, sa composition, ses accessoires, son origine, sa quantité, son mode et sa date de fabrication, les conditions de son utilisation et son aptitude à l'usage, ses propriétés et les résultats attendus de son utilisation, ainsi que les résultats et les principales caractéristiques des tests et contrôles effectués sur le bien ou le service ;

c) Le prix ou le mode de calcul du prix, le caractère promotionnel du prix et les conditions de vente, de paiement et de livraison du bien ou du service" ;

Considérant qu'à l'appui de ses allégations, la société Sport Découverte.fr verse aux débats des procès-verbaux de constat et des captures d'écran dont la vraisemblance n'est pas sérieusement contestée ; que ceux-ci attestent :

- s'agissant du procès-verbal de constat des 2 et 7 mai 2008 effectué à partir du moteur de recherche Google, qu'après avoir tapé les mots-clefs "saut à l'élastique", il apparaît une annonce et un lien commercial du site Guide-sensations.com indiquant des offres de saut à l'élastique dès 16 euros, alors que le premier prix pour ce type de prestation sur le site correspondant est de 23 euros, soit une différence entre la publicité et le prix de 7 euros,

- s'agissant du procès-verbal de constat du 19 mars 2010, des pratiques similaires sur le même moteur de recherche pour des prestations de "baptême par avion" (annonce dès 34 euros pour un premier prix réel de 39 euros), parapente (annonce dès 45 euros pour un premier prix réel de 50 euros), saut à l'élastique (annonce dès 18 euros pour un premier prix réel de 23 euros), soit une différence entre la publicité et le prix de 5 euros,

- s'agissant du procès-verbal de constat du 31 mars 2010, des pratiques similaires sur le même moteur de recherche pour la prestation baptême hélicoptère (annonce dès 47 euros, pour un premier prix réel de 59 euros, soit une différence de 12 euros),

- s'agissant des captures d'écran du 11 mai 2010, de pratiques similaires sur le même moteur de recherche, pour des prestations de saut à l'élastique (annonce dès 18 euros, pour un premier réel de 23 euros, soit une différence de 5 euros), de baptême planeur (annonce "dès 34 euros" pour un premier prix réel correspondant à une simple initiation de 39 euros, soit une différence de 5 euros), de "baptême hélicoptère" (annonce au prix de 47 euros pour un premier prix réel de 59 euros, soit une différence de 12 euros) et de baptême parapente (annonce dès 45 euros, pour un premier prix réel de 50 euros, soit une différence de 5 euros),

- s'agissant des captures d'écran du 21 mai 2010, cette fois-ci réalisées à partir du moteur de recherche Yahoo, des pratiques similaires pour des prestations de ballades en hélicoptère (annonce dès 47 euros pour un premier prix réel de 59 euros, soit une différence de 12 euros) et de saut en parachute (annonce dès 229 euros pour un premier prix de 265 euros pour un saut de parachute en tandem, soit une différence de 26 euros, et de 309 euros pour du parachute en solitaire, soit une différence de 79 euros),

- s'agissant des captures d'écran du 10 juin 2010, des pratiques similaires sur le moteur de recherche Google, pour des prestations de baptême planeur (annonce dès 34 euros" pour un premier prix réel correspondant à une simple initiation de 39 euros, soit une différence de 5 euros, le véritable baptême étant tarifé au prix minimum de 115 euros, soit une différence de 76 euros) et de saut à l'élastique (annonce dès 18 euros, pour un premier réel de 23 euros, soit une différence de 5 euros) ;

Considérant qu'il n'apparaît pas, contrairement à ce qu'allègue Maître Montravers ès qualités, que les offres faites par la société QG Loisirs dans les annonces commerciales correspondent à des prix de départ dont elle ne justifie pas de la réalité ;

Qu'il n'apparaît pas non plus, contrairement à ce qu'allègue Maître Montravers ès qualités, que les différences constatées entre les prix annoncés et les prix réels sur le site Guide-sensations.com correspondent au coût des assurances obligatoires, dont il n'est justifié, ni de l'existence pour les activités susvisées, ni a fortiori du montant ; que la cour relève que les différences de prix constatées sont variables et que l'article 8.1 des conditions générales de vente invoqué par Maître Montravers ès qualités dans ses écritures, dont il est contesté et non prouvé qu'il était applicable au moment des faits, évoque au demeurant la possibilité de frais supplémentaires "payables sur place", et non au moment de la commande, ce qui contredit ces assertions ;

Que les observations de Maître Montravers sur le caractère inopérant de certaines constatations faites dans les procès-verbaux de constat sont-elles mêmes inopérantes, dès lors que la société Sport Découverte.fr s'appuie sur d'autres constatations, dont il résulte que les offres figurant sur les annonces commerciales de la société QG Loisirs sont à la fois inférieurs aux prix pratiqués par elle et par ceux pratiqués par la société Sport Découverte.fr ;

Qu'il importe peu que certains des prix pratiquées par la société Sport Découverte.fr pour les prestations incriminées soient supérieurs à ceux pratiqués par la société QG Loisirs, les écarts n'étant au demeurant pas toujours significatifs ; qu'en effet, l'indication d'informations erronées sur l'une des caractéristiques essentielles de l'offre - le prix - pour la rendre indûment encore plus attractive vis-à-vis de celle des concurrents, est susceptible d'altérer de manière substantielle le comportement économique du consommateur normalement informé et raisonnablement attentif et avisé, dès lors que celui-ci sera conduit à cliquer sur l'offre apparaissant particulièrement compétitive et qu'une fois capté sur le site "Guide-sensations.com", il ne sera pas nécessairement amené à rechercher sur d'autres sites après avoir été détrompé, alors qu'il a déjà poursuivi très avant sa recherche ;

Qu'il n'importe pas, non plus, que certains des prix pratiqués par la société Sport Découverte soient supérieurs à ceux pratiqués par d'autres sociétés concurrentes, les écarts n'étant au demeurant pas toujours significatifs ;

Que le tribunal a donc à bon droit retenu que les pratiques trompeuses reprochées à la société QG Loisirs étaient constitutifs d'actes de concurrence déloyale au préjudice de la société Sport Découverte.fr ;

Qu'il est inopérant, pour Maître Montravers ès qualités, de solliciter l'infirmation du jugement en ce qu'il la condamne à ce titre à une amende civile de 90 000 euros, dès lors que cette condamnation ne figure pas dans le dispositif du jugement, seul revêtu de l'autorité de la chose jugée ;

* Sur l'activité illicite d'agent de tourisme de la société QG Loisirs :

Considérant que la société QG Loisirs n'étant pas partie à l'instance ayant conduit à l'arrêt rendu le 10 mars 2010 par la Cour d'appel de Paris, Maître Montravers ès qualités n'est pas fondée à soutenir que cette question a déjà été tranchée par cette décision ;

Considérant qu'il résulte de l'article L. 211-1 du Code du tourisme dans rédaction issue de la loi n° 2006-437 du 14 avril 2006 applicable pour la période retenue jusqu'au 25 juillet 2009, que l'exercice de la vente de forfaits touristiques incluant au moins deux prestations suppose la détention d'une licence d'agence de voyage ;

Que selon l'article L. 211-18 du Code du tourisme dans sa rédaction issue de la loi n° 2009-888 du 20 juillet 2009, applicable en l'espèce à compter du 25 juillet 2009, que les éditeurs de coffrets cadeaux constitués de séjours touristiques sans restriction sont tenus d'être immatriculés ;

Que la société QG Loisirs, qui a procédé dès 2009 à l'émission de forfaits touristiques répondant à ces critères, était soumise à ces obligations ;

Qu'il résulte des échanges de lettres et captures d'écran produites, qu'à la suite d'une première mise en demeure de la société Sport Découverte.fr du 19 mai 2009, la société QG Loisirs, qui n'a pas contesté n'avoir pas disposé de licence d'agence de voyage, tout en niant l'exercice d'une activité s'y rapportant, a toutefois modifié son site Internet pour supprimer la possibilité de réserver en ligne des séjours combinant hébergement et sport, ce dont la partie adverse a pris acte ; qu'en dépit d'une seconde mise en demeure du 24 mai 2010, elle ne justifie d'une immatriculation en tant qu'agence de voyage qu'à compter du 5 octobre 2010 ;

Qu'en mettant en vente sur son site guide-sensations.com ainsi qu'en boutique (à la Fnac notamment) des bons cadeaux Doze constitués de séjours touristiques combinant hébergement et sport sans respecter la législation sur les agences de voyage, la société GC Loisirs a commis des actes de concurrence déloyale au détriment de la société Sport Découverte.fr, un tel comportement étant susceptible de détourner indûment la clientèle potentielle de cette dernière ; que le jugement doit être infirmé de ce chef ;

B - Sur les pratiques commerciales trompeuses reprochées à la société QG Com :

Considérant que, pour la période utile retenue, la société Sport Découverte.fr verse aux débats, à l'appui de ses allégations, un procès-verbal de constat et des captures d'écran attestant :

- s'agissant du procès-verbal de constat du 31 mars 2010, effectué à partir du moteur de recherche Google, de l'annonce commerciale d'une prestation de saut en parachute en tandem dès 210 euros, reliée sur le site le site 4000m.com à l'offre libellée comme suit : - Barème 2007 : Forfait 4000m.com - Le saut en tandem à partir de 239 euros,

- s'agissant des captures d'écran du 11 mai 2010 sur le même moteur de recherche, de l'annonce commerciale d'une prestation de "saut en parachute" (sans autre précision) dès 210 euros, reliée sur le site 4000m.com à l'offre libellée comme suit : - Barème 2007 : Forfait 4000m.com - Le saut en tandem à partir de 239 euros ;

Que la société Hub venant aux droits de la société QG Com fait justement observer que l'indication de la mention "Barème 2007" sur une ligne de texte statique sans offre spécifique, pour une recherche effectuée en 2010, ne peut qu'attirer l'attention du consommateur sur le caractère potentiellement obsolète du prix affiché correspondant ; qu'or, alors qu'il apparaît que la page ouverte contient un lien indiquant "voir les tarifs par centre", permettant d'accéder aux prix réels, la société Sport Découverte.fr, à qui il appartient de rapporter la preuve des pratiques trompeuses qu'elle invoque, ne produit pas les pages vers lesquelles renvoie ce lien ;

Qu'il n'y a donc pas lieu d'examiner le caractère probant tant des attestations que du procès-verbal de constat du site archive.com du 29 juillet 2016 faisant état de tarifs réels à 210 euros à la même période produites par la société Hub et contesté par la société Sport Découverte.fr, dès lors que celle-ci échoue à rapporter la preuve qui lui incombe ;

Qu'il convient donc, infirmant le jugement de ce chef, de débouter la société Sport Découverte.fr de ses demandes à l'encontre de la société Hub venant aux droits de la société GC.com ;

C- Sur les mesures de réparation :

Considérant que seule la demande de la société Sport Découverte.fr concernant la société QG Loisirs doit en conséquence être examinée ; que celle-là demande l'inscription au passif de celle-ci la somme totale de 556 172 euros au titre de la réparation de son préjudice du fait des actes de concurrence déloyale dont elle est l'auteur, se décomposant comme suit :

- 350 000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation du gain manqué sur la base de la baisse de son chiffre d'affaire ventes de stages en 2008 et 2009 (perte cumulée de 1 960 000 euros) avec une perte de marge brute cumulée (taux moyen sur les années 2007 à 2008 = 27,5 %) de 540 000 euros ;

- 206 172 euros à titre de dommages et intérêts en réparation de la perte liée aux dépenses publicitaires d'un montant total de 412 344,94 euros pour les années 2008, 2009 et 2010 (jusqu'à l'assignation) ;

Considérant que les pratiques commerciales trompeuses et l'activité illicite d'agent de tourisme commises par la société QG Loisirs ont nécessairement causé un préjudice à ces deux titres à la société Sport Découverte.fr ;

Qu'il convient de ramener à de plus justes proportions sa part de responsabilité dans la baisse du chiffres d'affaires de cette dernière, pour tenir compte, d'une part, de ce que ces faits doivent être circonscrits aux dates où ils ont été constatés - sans notamment que les pratiques commerciales trompeuses puissent être étendus artificiellement à l'année 2009 pour laquelle aucune constatation n'a été opérée, au prétexte incertain qu'ils ont été commis avant et après -, d'autre part, de l'existence d'un très grand nombre d'offres concurrentes de sociétés tierce susceptibles d'attirer la clientèle, et enfin, pour les pratiques commerciales trompeuses, de la circonstance que la croissance corrélative du chiffre d'affaire de la société QG Loisirs en 2008 résulte pour une large part de son référencement au sein de la Fnac, quand la société Sport Découvert.fr n'a qu'une activité sur Internet ; qu'en revanche les difficultés du secteur, qui se sont étendues plus récemment, ne suffisent pas à elles seule à expliquer la chute du chiffre d'affaires de la société Sport Découverte.fr ;

Que la perte liée aux dépenses publicitaires ne saurait être exclue par principe aux motifs que 78 % d'entre elles étant rattachables à Google Adwords, laquelle établit ses factures sur le base du nombre de clics effectués conduisant au site de la société Sport Découverte.fr cliente, l'importance des frais publicitaires serait signe de la bonne santé de l'entreprise, alors que celle-ci dépend aussi du coût que la société Sport Découverte.fr a dû payer à la suite de la mise en concurrence des annonces par Adwords, pour que ses annonces restent en tête de liste ;

Qu'au vu de l'ensemble de ces circonstances, la cour estime à 40 000 euros le montant total du préjudice subi par la société Sport Découverte.fr du fait des actes de concurrence déloyale de la société QG Loisirs ; qu'il convient donc, infirmant le jugement de ce chef, de fixer à la somme de 40 000 euros représentant les dommages et intérêts en réparation de ce préjudice au passif de la société QG Loisirs représentée par la Selarl Montravers Yang-Ting prise en la personne de Me Marie-Hélène Montravers, ès qualités de liquidateur judiciaire ;

Que la société QG Loisirs n'ayant plus d'activité, il convient, infirmant le jugement de ce chef, de rejeter la demande de la société Sport Découverte.fr tendant à lui enjoindre de prendre les mesures nécessaires pour la cessation des faits délictueux ; qu'il convient en revanche, pour le même motif, de confirmer le jugement en ce qu'il a rejeté la demande de publication présentée par la société Sport Découverte.fr ;

Que le jugement n'est pas critiqué en ce qu'il a rejeté la demande reconventionnelle de dommages et intérêts de la société QG Com pour procédure abusive et est justifié en ce qu'il a rejeté la demande reconventionnelle au même titre de la société QG Loisirs, dès lors que celle succombe en ses prétentions ; qu'il doit être confirmé de ces chefs ;

Considérant que le sens de la présente décision commande d'infirmer le jugement en ses dispositions relatives aux frais irrépétibles et aux dépens ; qu'il sera statué de ces chefs tant au titre de la procédure de première instance qu'au titre de la procédure d'appel tel que précisé au dispositif ci-après ;

Par ces motifs : LA COUR, Ecarte des débats les conclusions n° 7 transmises le 8 novembre 2016 par la société Hub ainsi que sa pièce n° 49, de même que ses conclusions n° 8 dans leur partie récapitulative au fond transmises le 21 novembre 2016, Infirme le jugement, sauf en ce qu'il a débouté la société Sport Découverte.fr de sa demande de publication et débouté les sociétés QG Com et QG Loisirs de leurs demandes en dommage et intérêt pour procédure abusive, Le confirme de ces chefs, Statuant à nouveau des chefs infirmés, Dit que la société QG Loisirs a commis des actes de concurrence déloyale consistant en des pratiques commerciales trompeuses et une activité illicite d'agent de tourisme au préjudice de la société Sport Découverte.fr, Fixe à la somme de 40 000 euros représentant les dommages et intérêts en réparation de ce préjudice au passif de la société QG Loisirs représentée par la Selarl Montravers Yang-Ting prise en la personne de Me Marie-Hélène Montravers, ès qualités de liquidateur judiciaire, Rejette la demande de la société Sport Découverte.fr tendant à lui enjoindre de prendre les mesures nécessaires pour la cessation des faits délictueux, Rejette les demandes présentées par la société Sport Découverte.fr à l'encontre de la société Hub venant aux droits de la société GC.com, Vu l'article 700 du Code de procédure civile, rejette les demandes des parties, Condamne Maître Montravers ès qualités aux dépens, Accorde à la Selarl Grall et associés le bénéfice des dispositions de l'article 699 du Code de procédure civile.