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Décisions

Cass. 1re civ., 25 janvier 2017, n° 15-24.216

COUR DE CASSATION

Arrêt

Rejet

PARTIES

Demandeur :

Lamat (Consorts)

Défendeur :

CNP assurances (SA)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Batut

Rapporteur :

M. Vitse

Avocats :

SCP Lyon-Caen, Thiriez, Me Ricard

Toulouse, 2e ch. sect. 1, du 8 avr. 2015

8 avril 2015

LA COUR : - Sur le moyen unique : - Attendu, selon l'arrêt attaqué (Toulouse, 8 avril 2015), que, les 21 juin 2003 et 24 avril 2004, M. et Mme Lamat ont souscrit deux crédits immobiliers ; qu'ils ont adhéré à une assurance de groupe souscrite par le prêteur auprès de la société CNP assurances (l'assureur), chacun des concours financiers étant garanti contre le risque "décès/invalidité permanente et absolue (IPA)" ; que M. Lamat a cessé, pour des raisons médicales, toute activité professionnelle à compter de l'année 2005 ; qu'ayant vainement sollicité le bénéfice de la garantie IPA auprès de l'assureur, M. et Mme Lamat l'ont assigné en exécution de cette garantie et en paiement de dommages-intérêts ;

Attendu que M. et Mme Lamat font grief à l'arrêt de rejeter leurs demandes, alors, selon le moyen : 1°) que l'exigence de transparence des clauses contractuelles, posée par l'article 4, paragraphe 2, de la directive 93/13/CEE du Conseil, du 5 avril 1993 concernant les clauses abusives, ne saurait être réduite au seul caractère compréhensible sur les plans formel et grammatical de celles-ci ; qu'en décidant qu'il n'y a pas lieu à interpréter l'article 2 des conditions générales contractuelles qui stipule que " l'état d'invalidité permanente et absolue (IPA) est réalisé lorsque les trois conditions suivantes sont remplies simultanément : - survenir en cours d'assurance et avant le 65e anniversaire ; - mettre l'assuré dans l'impossibilité totale et définitive de se livrer au moindre travail pouvant lui procurer gain ou profit ; - l'obliger, en outre, à recourir, pendant toute son existence à l'assistance permanente d'une tierce personne pour accomplir les actes ordinaires de la vie (se déplacer, se laver, s'habiller, s'alimenter) " au seul motif que la clause est claire et précise en application de l'article 1134 du Code civil, la cour d'appel n'a pas mis la Cour de cassation en mesure d'exercer son contrôle et a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 133-2 du Code de la consommation, tel qu'il doit être interprété à la lumière de l'article 4, paragraphe 2, de la directive 93/13/CEE du Conseil, du 5 avril 1993 concernant les clauses abusives ; 2°) qu'en vertu de l'article 5 de la directive 93/13, si le libellé d'une clause contractuelle n'est pas clair, l'interprétation la plus favorable au consommateur prévaut ; que la clause du contrat d'assurance garantissant le risque IPA stipule que " l'état d'invalidité permanente et absolue (IPA) est réalisé lorsque les trois conditions suivantes sont remplies simultanément : - survenir en cours d'assurance et avant le 65e anniversaire ; - mettre l'assuré dans l'impossibilité totale et définitive de se livrer au moindre travail pouvant lui procurer gain ou profit ; - l'obliger, en outre, à recourir, pendant toute son existence à l'assistance permanente d'une tierce personne pour accomplir les actes ordinaires de la vie (se déplacer, se laver, s'habiller, s'alimenter) " ; que l'expression " l'obliger, en outre, à recourir, pendant toute son existence à l'assistance permanente d'une tierce personne pour accomplir les actes ordinaires de la vie " est ambiguë en ce qu'elle ne permet pas de déterminer avec certitude la date de réalisation du risque d'invalidité permanente absolue des pathologies évolutives ; qu'en s'abstenant de rechercher, ainsi qu'il lui était demandé, si M. Lamat, dont l'état d'invalidité a été diagnostiqué en 2005, qui a été classé en invalide de 2e catégorie le 31 juillet 2007, a vu son taux d'invalidité élevé à 80 % par jugement du 17 novembre 2009, puis a été classé en invalide de 3e catégorie le 27 juillet 2012 et a été reconnu invalide jusqu'au 27 mars 2015 par M. Arbus, médecin tiers expert, n'était pas dans une situation d'invalidité absolue depuis de nombreuses années, la cour d'appel a privé son arrêt de base légale au regard de l'article L. 133-2 du Code de la consommation, tel qu'il doit être interprété à la lumière de l'article 5 de la directive 93/13/CEE du Conseil, du 5 avril 1993 concernant les clauses abusives ; 3°) que toute définition ou exclusion de garantie devant être libellée en termes clairs et précis pour garantir une parfaite information de l'assuré, les clauses doivent avoir un contenu parfaitement déterminé et ne pas conduire à vider la garantie de sa substance ; qu'en s'abstenant de rechercher, ainsi qu'il le lui était demandé, si le fait pour l'assureur d'exiger la preuve du caractère définitif de l'invalidité subie par l'assuré alors qu'il est considéré comme invalide depuis dix ans, y compris par l'assureur en qualité d'employeur, et ce pour la même pathologie ne privait pas d'effet cette garantie, dès lors que la constatation du caractère définitif est impossible à prouver compte tenu du caractère évolutif des pathologies mentales anxio-dépressives, la cour d'appel a privé son arrêt de base légale au regard de l'article 1134 du code civil, ensemble l'article L. 133-2 du Code de de la consommation ; 4 °) qu'en vertu de l'article L. 132-1, alinéa 1er, du Code de la consommation, dans les contrats conclus entre professionnels et non-professionnels, sont abusives les clauses qui ont pour objet ou pour effet de créer, au détriment du non-professionnel ou du consommateur, un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au contrat ; que, selon l'alinéa 7 du même article, l'appréciation du caractère abusif des clauses au sens du premier alinéa ne porte ni sur la définition de l'objet principal du contrat ni sur l'adéquation du prix ou de la rémunération au bien vendu ou au service offert pour autant que les clauses soient rédigées de façon claire et compréhensible ; que, dans leurs conclusions d'appel, M. et Mme Lamat agissant tant en leur nom personnel qu'ès qualités de représentants légaux de leur fille mineure Mélody, avaient soutenu que la clause définissant l'invalidité permanente absolue n'est pas rédigée de façon claire et compréhensible, à la différence de la clause du contrat le liant à la compagnie Generali qui stipule, d'une part, qu' " un assuré est considéré en état d'invalidité permanente et totale lorsqu'à la suite d'un accident ou d'une maladie, il est dans l'obligation absolue et présumée définitive d'avoir recours à l'assistance d'une tierce personne pour effectuer les actes ordinaires de la vie " et, d'autre part, que " l'invalidité permanente et totale est réputée consolidée ... si elle est consécutive à une maladie : à l'expiration d'un délai de deux ans de durée continue de l'invalidité permanente et totale à partir du jour où la preuve de celle-ci est apportée à Generali assurances vie ... " ; qu'en s'abstenant de rechercher, comme il lui était demandé, si comparée à cette clause, la clause stipulée par l'assureur définissant l'état d'invalidité permanente et absolue cette clause est rédigée de manière claire et compréhensible, la cour d'appel a derechef privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 132-1, alinéa 1er, du Code de la consommation, tel qu'il doit être interprété à la lumière de l'article 5 de la directive 93/13/CEE du Conseil, du 5 avril 1993 concernant les clauses abusives ; 5°) qu'en vertu de l'article L. 132-1, alinéa 1er, du Code de la consommation, dans les contrats conclus entre professionnels et non-professionnels, sont abusives les clauses qui ont pour objet ou pour effet de créer, au détriment du non-professionnel ou du consommateur, un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au contrat ; que, selon l'alinéa 7 du même article, l'appréciation du caractère abusif des clauses au sens du premier alinéa ne porte ni sur la définition de l'objet principal du contrat ni sur l'adéquation du prix ou de la rémunération au bien vendu ou au service offert pour autant que les clauses soient rédigées de façon claire et compréhensible ; que, dans leurs conclusions d'appel, M. et Mme Lamat agissant tant en leur nom personnel qu'ès qualités de représentants légaux de leur fille mineure Mélody, avaient soutenu que M. Lamat avait été placé en invalidité 2e catégorie le 31 juillet 2007 et en invalidité de 3e catégorie le 27 juillet 2012 ; qu'en s'abstenant de rechercher si, compte tenu de l'information qui lui a été donnée lors de la souscription du contrat d'assurance, il pouvait connaître l'existence de la différence existant entre la notion d'invalidité au sens du droit de la sécurité sociale et celle d'invalidité permanente absolue au sens du contrat d'assurance, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 132-1, alinéa 1 er, du Code de la consommation, tel qu'il doit être interprété à la lumière de l'article 4, paragraphe 2, de la directive 93/13/CEE du Conseil, du 5 avril 1993 concernant les clauses abusives ; 6°) que constitue une clause abusive la clause qui génère un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au détriment du consommateur ou du non-professionnel ; que tel est le cas de la clause d'un contrat d'assurance conclu afin de protéger le consommateur des conséquences résultant de son impossibilité à faire face aux mensualités de ses prêts, de subordonner la mise en œuvre de la garantie invalidité permanente absolue à la démonstration non seulement de l'impossibilité totale et définitive de l'assuré de se livrer au moindre travail pouvant lui procurer gain ou profit, mais aussi de l'obliger, en outre, à recourir, pendant toute son existence à l'assistance permanente d'une tierce personne pour accomplir les actes ordinaires de la vie (se déplacer, se laver, s'habiller, s'alimenter) ; qu'en refusant de consacrer le caractère abusif d'une telle clause, la cour d'appel a violé l'article L. 132-1 du Code de la consommation, tel qu'il doit être interprété à la lumière de l'article 4, paragraphe 2, de la directive 93/13/CEE du Conseil, du 5 avril 1993 concernant les clauses abusives ; 7°) que, dans leurs conclusions d'appel, M. et Mme Lamat agissant tant en leur nom personnel qu'ès qualités de représentants légaux de leur fille mineure Mélody, ont soutenu que la clause stipulant que " l'état d'invalidité permanente et absolue (IPA) est réalisé lorsque les trois conditions suivantes sont remplies simultanément : - survenir en cours d'assurance et avant le 65e anniversaire ; - mettre l'assuré dans l'impossibilité totale et définitive de se livrer au moindre travail pouvant lui procurer gain ou profit ; - l'obliger, en outre, à recourir, pendant toute son existence à l'assistance permanente d'une tierce personne pour accomplir les actes ordinaires de la vie (se déplacer, se laver, s'habiller, s'alimenter) " ; que l'expression " l'obliger, en outre, à recourir, pendant toute son existence à l'assistance permanente d'une tierce personne pour accomplir les actes ordinaires de la vie " a un caractère léonin ; qu'en s'abstenant de répondre à ce moyen, la cour d'appel n'a pas satisfait aux exigences de l'article 455 du Code de procédure civile ;

Mais attendu, d'abord, qu'ayant retenu, au regard des critères précis et intelligibles de l'octroi de la garantie prévue par la clause litigieuse, que celle-ci était claire et compréhensible, la cour d'appel, qui a recherché si le fait pour l'assureur d'exiger la preuve du caractère définitif de l'invalidité subie par l'assuré ne privait pas d'effet la garantie précitée, et qui n'était pas tenue de suivre les parties dans le détail de leur argumentation, a légalement justifié sa décision d'exclure toute interprétation de cette clause ;

Attendu, ensuite, que celle-ci définissait l'objet principal du contrat et ne pouvait donc, étant claire et compréhensible, donner lieu à une appréciation de son caractère abusif, conformément à l'article L. 132-1, alinéa 7, du Code de la consommation, devenu L. 212-1, alinéa 3, du même code en vertu de l'ordonnance n° 2016-301 du 14 mars 2016 ; d'où il suit que le moyen, irrecevable en ses cinquième et septième branches, comme étant nouveau et mélangé de fait, ne peut être accueilli pour le surplus ;

Par ces motifs : rejette le pourvoi.