CJUE, 1re ch., 26 janvier 2017, n° C-611/13 P
COUR DE JUSTICE DE L’UNION EUROPEENNE
Arrêt
PARTIES
Demandeur :
Hansa Metallwerke AG, Hansa Nederland BV, Hansa Italiana Srl, Hansa Belgium, Hansa Austria GmbH
Défendeur :
Commission européenne, Conseil de l'Union européenne
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Tizzano
Avocat général :
M. Wathelet
Juges :
Mme Berger, MM. Levits, Rodin (rapporteur), Biltgen
Avocats :
Mes Cappellari, Hellmann, Malz
LA COUR (première chambre),
1 Par leur pourvoi, Hansa Metallwerke AG, Hansa Nederland BV, Hansa Italiana Srl, Hansa Belgium, Hansa Austria GmbH demandent l'annulation de l'arrêt du Tribunal de l'Union européenne du 16 septembre 2013, Hansa Metallwerke e.a./Commission (T 375/10, non publié, ci-après l'" arrêt attaqué ", EU:T:2013:475), par lequel celui-ci a rejeté leur recours tendant à l'annulation partielle de la décision C (2010) 4185 final de la Commission, du 23 juin 2010, relative à une procédure d'application de l'article 101 TFUE et de l'article 53 de l'accord EEE (affaire COMP/39092 - Installations sanitaires pour salles de bains) (ci-après la " décision litigieuse ") et, à titre subsidiaire, à la réduction du montant de l'amende infligée aux requérantes dans cette décision.
Le cadre juridique
Le règlement (CE) n° 1/2003
2 Le règlement (CE) n° 1/2003 du Conseil, du 16 décembre 2002, relatif à la mise en œuvre des règles de concurrence prévues aux articles [81] et [82 CE] (JO 2003, L 1, p. 1), prévoit, à son article 23, paragraphes 2 et 3 :
" 2. La Commission peut, par voie de décision, infliger des amendes aux entreprises et associations d'entreprises lorsque, de propos délibéré ou par négligence :
a) elles commettent une infraction aux dispositions de l'article [81] ou [82 CE] [...]
[...]
Pour chaque entreprise et association d'entreprises participant à l'infraction, l'amende n'excède pas 10 % de son chiffre d'affaires total réalisé au cours de l'exercice social précédent.
[...]
3. Pour déterminer le montant de l'amende, il y a lieu de prendre en considération, outre la gravité de l'infraction, la durée de celle-ci. "
Les lignes directrices de 2006
3 Les lignes directrices pour le calcul des amendes infligées en application de l'article 23, paragraphe 2, sous a), du règlement n° 1/2003 (JO 2006, C 210, p. 2, ci-après les " lignes directrices de 2006 "), indiquent, à leur point 2, que, en ce qui concerne la détermination des amendes, " la Commission doit prendre en considération la durée et la gravité de l'infraction " et que " l'amende infligée ne doit pas excéder les limites indiquées à l'article 23, paragraphe 2, deuxième et troisième alinéas, du [règlement n° 1/2003] ".
4 Le point 37 des lignes directrices de 2006 énonce :
" Bien que les présentes Lignes directrices exposent la méthodologie générale pour la fixation d'amendes, les particularités d'une affaire donnée ou la nécessité d'atteindre un niveau dissuasif dans une affaire particulière peuvent justifier que la Commission s'écarte de cette méthodologie ou des limites fixées au point 21. "
Les antécédents du litige et la décision litigieuse
5 Les antécédents du litige ont été exposés aux points 1 à 34 de l'arrêt attaqué et peuvent être résumés comme suit.
6 Les requérantes sont des fabricants d'articles de robinetterie.
7 Le 15 juillet 2004, Masco Corp. et ses filiales, parmi lesquelles Hansgrohe AG qui fabrique des articles de robinetterie et Hüppe GmbH qui fabrique des enceintes de douche, ont informé la Commission de l'existence d'une entente dans le secteur des installations sanitaires pour salles de bains et ont demandé à bénéficier de l'immunité d'amendes au titre de la communication de la Commission sur l'immunité d'amendes et la réduction de leur montant dans les affaires portant sur des ententes (JO 2002, C 45, p. 3, ci après la " communication de 2002 sur la coopération ") ou, à défaut, d'une réduction du montant des amendes susceptibles d'être prononcées contre elles.
8 Les 9 et 10 novembre 2004, la Commission a procédé à des inspections inopinées dans les locaux de plusieurs sociétés et associations nationales professionnelles opérant dans le secteur des installations sanitaires pour salles de bains. Ayant adressé, entre le 15 novembre 2005 et le 16 mai 2006, des demandes de renseignements auxdites sociétés et associations, y compris aux requérantes, la Commission a, le 26 mars 2007, adopté une communication des griefs, laquelle a également été notifiée à ces dernières.
9 À la suite d'une audition tenue du 12 au 14 novembre 2007, de l'envoi, le 9 juillet 2009 d'une lettre d'exposé des faits et de demandes d'informations supplémentaires adressées par la suite notamment aux requérantes, la Commission a, le 23 juin 2010, adopté la décision litigieuse par laquelle elle a constaté l'existence d'une infraction à l'article 101, paragraphe 1, TFUE et à l'article 53 de l'accord sur l'Espace économique européen, du 2 mai 1992 (JO 1994, L 1, p. 3), dans le secteur des installations sanitaires pour salles de bains. Cette infraction, à laquelle 17 entreprises auraient participé, se serait déroulée au cours de différentes périodes comprises entre le 16 octobre 1992 et le 9 novembre 2004 et aurait pris la forme d'un ensemble d'accords anticoncurrentiels ou de pratiques concertées sur les territoires belge, allemand, français, italien, néerlandais et autrichien. Les produits concernés par l'entente seraient les installations sanitaires pour salles de bains appartenant à l'un des trois sous-groupes de produits suivants : les articles de robinetterie, les enceintes de douche et leurs accessoires ainsi que les articles en céramique.
10 S'agissant de la participation des requérantes à l'infraction constatée, premièrement, la Commission a fait état de ce que, bien qu'étant principalement des fabricants d'articles de robinetterie pendant la durée de l'infraction, celles-ci avaient néanmoins eu connaissance des différentes gammes de produits faisant l'objet de l'infraction, compte tenu de leur participation aux réunions collusoires de divers organismes de coordination dont elles étaient membres. Deuxièmement, en ce qui concerne la portée géographique de l'entente, la Commission a considéré que les requérantes avaient participé à des réunions dans cinq des six États membres dans lesquels une infraction a été constatée jusqu'en 2002, à savoir en Belgique, en Allemagne, en Italie, aux Pays-Bas et en Autriche. S'agissant de la France, la Commission a reconnu que, nonobstant l'existence d'une infraction à partir de l'année 2002, les requérantes ont cessé de participer à l'association nationale professionnelle concernée au cours de cette année-là. Toutefois, au regard de plusieurs éléments d'information et de preuve, elle a considéré que les requérantes auraient raisonnablement pu se douter que les pratiques anticoncurrentielles qui caractérisaient l'infraction relevée produisaient des effets sur le territoire français. Partant, la Commission a conclu que les requérantes ne pouvaient ignorer la portée générale et les principales caractéristiques de l'infraction en cause.
11 Pour ces motifs, la Commission a infligé, à l'article 2, premier alinéa, point 5, de la décision litigieuse, des amendes d'un montant total de 14 758 220 euros aux requérantes.
12 Aux fins du calcul de ces amendes, la Commission s'est fondée sur les lignes directrices de 2006.
La procédure devant le Tribunal et l'arrêt attaqué
13 Par requête déposée au greffe du Tribunal le 8 septembre 2010, les requérantes ont formé un recours en annulation contre la décision litigieuse devant le Tribunal en invoquant six moyens. Le premier moyen était pris d'une erreur de droit et d'appréciation quant au montant maximal de l'amende infligée en vertu de l'article 23, paragraphe 2, deuxième alinéa, du règlement n° 1/2003, le deuxième, d'une violation du principe de protection de la confiance légitime, le troisième, d'une violation de l'article 23, paragraphe 2, de ce règlement, lu en combinaison avec la communication de 2002 sur la coopération, résultant de l'erreur commise dans le calcul du montant de l'amende, le quatrième, d'une violation du principe de non-rétroactivité, le cinquième, d'une violation du principe de légalité des peines qui résulterait de l'article 23, paragraphe 2, dudit règlement et, le sixième, d'une violation des principes de légalité de l'action administrative et de sécurité juridique.
14 À titre subsidiaire, les requérantes demandaient la réduction du montant de l'amende infligée.
15 Par l'arrêt attaqué, le Tribunal a rejeté le recours dans son ensemble.
Les conclusions des parties
16 Les requérantes demandent à la Cour :
- d'annuler l'arrêt attaqué ;
- d'annuler la décision litigieuse, pour autant qu'elle concerne les requérantes ;
- à titre subsidiaire, de réduire le montant de l'amende ;
- de condamner la Commission aux dépens, et
- à titre encore plus subsidiaire, d'annuler l'arrêt attaqué et de renvoyer l'affaire devant le Tribunal pour qu'il statue.
17 La Commission demande à la Cour :
- de rejeter le pourvoi ;
- à titre subsidiaire, en cas d'annulation partielle de l'arrêt, de rejeter le recours, et
- de condamner les requérantes aux dépens.
Sur le pourvoi
18 Au soutien de leur pourvoi, les requérantes soulèvent trois moyens. Le premier moyen est tiré de ce que le Tribunal a violé le principe de l'individualisation des peines et des sanctions. Le deuxième moyen est tiré d'une violation de l'obligation de motivation. Le troisième moyen est tiré d'une violation du principe de protection de la confiance légitime.
Sur le premier moyen, relatif à une violation du principe de l'individualisation des peines
Argumentation des parties
19 Par leur premier moyen, les requérantes font valoir que le Tribunal a, notamment au point 87 de l'arrêt attaqué, violé le principe de l'individualisation des peines.
20 En effet, dans la décision litigieuse, la Commission aurait commis une erreur de droit dans l'exercice du pouvoir qui lui est conféré par l'article 23, paragraphe 2, du règlement n° 1/2003 pour la fixation du montant des amendes, en faisant application des lignes directrices de 2006 pour déterminer le montant de l'amende qui a été infligée aux requérantes.
21 Or, la méthode générale de calcul définie par ces lignes directrices conduirait, dans une situation telle que celle en cause, à ce que le plafond de 10 % prévu à l'article 23, paragraphe 2, du règlement n° 1/2003 soit régulièrement dépassé, en particulier pour les entreprises " mono-produit " non diversifiées. L'application de cette méthode aboutirait donc à ce que les critères de durée et de gravité des infractions commises par ces entreprises, auxquels renvoie l'article 23, paragraphe 3, du règlement n° 1/2003, ne soient pas pris en compte de façon appropriée. Ainsi, l'application desdites lignes directrices porterait atteinte, davantage encore que les lignes directrices pour le calcul des amendes infligées en application de l'article 15, paragraphe 2, du règlement n° 17 et de l'article 65, paragraphe 5, [CA] (JO 1998, C 9, p. 3, ci-après les " lignes directrices de 1998 "), au principe de l'individualisation des peines.
22 Les requérantes soutiennent que, en vertu de l'article 31 du règlement n° 1/2003, le Tribunal dispose d'une compétence de pleine juridiction qui l'habilite, notamment, à substituer son appréciation à celle de la Commission et, ainsi, à supprimer, à réduire ou à majorer l'amende infligée par cette dernière. Il ressortirait, en outre, de l'arrêt du 16 juin 2011, Putters International/Commission (T 211/08, EU:T:2011:289), ainsi que de la décision de la Commission du 28 mars 2012, relative à une procédure d'application de l'article 101 TFUE et de l'article 53 de l'accord EEE (affaire COMP/39.452 - Quincaillerie pour fenêtres et portes-fenêtres) (ci-après la " décision du 28 mars 2012 "), que, lorsque la Commission a commis une erreur dans l'exercice de son pouvoir de fixation du montant de l'amende, le Tribunal serait lui-même tenu, dans le cadre de sa compétence de pleine juridiction, de procéder à une évaluation autonome de l'amende, fondée sur les circonstances particulières du cas d'espèce.
23 Or, au point 87 de l'arrêt attaqué, le Tribunal aurait omis de procéder à une telle évaluation et se serait borné à renvoyer, à tort, à la jurisprudence relative à la compatibilité des lignes directrices de 1998 avec le principe de l'individualisation des peines, en estimant que celle ci valait également, d'une manière identique, en ce qui concerne l'application des lignes directrices de 2006.
24 La Commission considère que ce moyen est irrecevable et, en tout état de cause, non fondé.
Appréciation de la Cour
25 Par leur premier moyen, les requérantes font grief, en substance, au Tribunal d'avoir violé, au point 87 de l'arrêt attaqué, le droit de l'Union, notamment le principe de l'individualisation des peines, en omettant de procéder à une évaluation autonome de l'amende et en considérant que le plafond de 10 % du chiffre d'affaires prévu à l'article 23, paragraphe 2, du règlement n° 1/2003 ainsi que la jurisprudence de la Cour relative à ce plafond, élaborée dans le cadre des lignes directrices de 1998, s'appliquaient pour la détermination des amendes infligées sous l'empire des lignes directrices de 2006. Le Tribunal aurait ainsi méconnu que l'application de ces dernières lignes directrices a pour effet, d'une part, que la gravité et la durée des infractions ne seraient pas suffisamment prises en considération lors du calcul de l'amende et, d'autre part, que le plafond de 10 % serait régulièrement dépassé dans le cas des entreprises " mono-produit " non diversifiées.
26 Il convient de constater que, ce faisant, le Tribunal n'a commis aucune erreur de droit.
27 En effet, ainsi que le Tribunal l'a correctement relevé au point 87 de l'arrêt attaqué, il ressort d'une jurisprudence constante de la Cour que le fait que, en raison de l'application du plafond de 10 % du chiffre d'affaires visé à l'article 23, paragraphe 2, deuxième alinéa, du règlement n° 1/2003, certains facteurs tels que la gravité et la durée de l'infraction ne se répercutent pas de façon effective sur le montant de l'amende infligée n'est qu'une simple conséquence de l'application de cette limite supérieure audit montant final (voir, notamment, arrêts du 28 juin 2005, Dansk Rørindustri e.a./Commission, C 189/02 P, C 202/02 P, C 205/02 P à C 208/02 P et C 213/02 P, EU:C:2005:408, point 279, ainsi que du 12 juillet 2012, Cetarsa/Commission, C 181/11 P, non publié, EU:C:2012:455, point 81).
28 En effet, ladite limite supérieure vise à éviter que soient infligées des amendes dont il est prévisible que les entreprises, au vu de leur taille, telle que déterminée par leur chiffre d'affaires global, fût-ce de façon approximative et imparfaite, ne seront pas en mesure de s'acquitter (arrêts du 28 juin 2005, Dansk Rørindustri e.a./Commission, C 189/02 P, C 202/02 P, C 205/02 P à C 208/02 P et C 213/02 P, EU:C:2005:408, point 280, ainsi que du 12 juillet 2012, Cetarsa/Commission, C 181/11 P, non publié, EU:C:2012:455, point 82).
29 Il s'agit donc d'une limite, uniformément applicable à toutes les entreprises et articulée en fonction de la taille de chacune d'elles, visant à éviter des amendes d'un niveau excessif et disproportionné. La même limite supérieure a ainsi un objectif distinct et autonome par rapport à celui des critères de gravité et de durée de l'infraction (arrêts du 28 juin 2005, Dansk Rørindustri e.a./Commission, C 189/02 P, C 202/02 P, C 205/02 P à C 208/02 P et C 213/02 P, EU:C:2005:408, points 281 et 282, ainsi que du 12 juillet 2012, Cetarsa/Commission, C 181/11 P, non publié, EU:C:2012:455, point 83).
30 Il s'ensuit que tant les arguments tirés de la prise en compte insuffisante de la gravité et de la durée des infractions, due à l'application de la limite maximale prévue à l'article 23, paragraphe 2, du règlement n° 1/2003 que ceux tirés de ce que ladite limite serait, en raison des lignes directrices de 2006 et contrairement à ce qui se produisait sous l'empire des lignes directrices de 1998, régulièrement dépassée dans le cas des entreprises " mono-produit " non diversifiées doivent être rejetés comme non fondés.
31 En effet, à supposer même que, lors du calcul des amendes à prononcer contre les entreprises offrant peu de produits, les montants intermédiaires excèdent plus fréquemment la limite maximale prévue à l'article 23, paragraphe 2, du règlement n° 1/2003 lorsqu'il est fait application des lignes directrices de 2006 par la Commission que sous l'empire des lignes directrices de 1998, une telle circonstance ne saurait remettre en cause la légalité de l'application de cette limite à laquelle la Cour s'est référée, s'agissant tant des amendes prononcées sous l'empire des premières lignes directrices que des secondes.
32 Il ne saurait, dès lors, être reproché au Tribunal d'avoir, au point 87 de l'arrêt attaqué, entériné l'appréciation effectuée par la Commission quant au montant de l'amende infligée aux requérantes, qui était fondée sur les lignes directrices de 2006, sans procéder à une évaluation autonome de cette amende.
33 Il résulte de ce qui précède que le premier moyen du pourvoi doit être rejeté.
Sur le deuxième moyen, relatif à l'obligation de motivation
Argumentation des parties
34 Par leur deuxième moyen, les requérantes font valoir que les développements du Tribunal relatifs au principe de l'individualisation des peines sont entachés d'un défaut de motivation. Bien que, aux points 80 et suivants, notamment au point 87, de l'arrêt attaqué, le Tribunal ait examiné certains arguments des requérantes relatifs à cette question, il n'aurait pas évoqué ceux tirés de l'arrêt du 16 juin 2011, Putters International/Commission (T 211/08, EU:T:2011:289), et notamment des considérations figurant au point 75 de cet arrêt, malgré l'importance donnée à ces derniers arguments par les requérantes. De même, l'arrêt attaqué ne se référerait pas aux motifs pertinents de la décision du 28 mars 2012, de telle sorte que le Tribunal ne se serait pas prononcé sur ces points.
35 La Commission rétorque que le Tribunal était uniquement tenu de détailler les motifs essentiels de sa décision, et non pas de se référer à un obiter dictum d'un arrêt déterminé ou à une décision ultérieure de la Commission.
Appréciation de la Cour
36 Il convient de rappeler que, conformément à une jurisprudence constante de la Cour, l'obligation de motivation qui incombe au Tribunal n'impose pas à celui-ci de fournir un exposé qui suivrait, de manière exhaustive et un par un, tous les raisonnements articulés par les parties au litige, de sorte que la motivation peut être implicite à condition qu'elle permette aux intéressés de connaître les raisons pour lesquelles le Tribunal n'a pas fait droit à leurs arguments et à la Cour de disposer des éléments suffisants pour exercer son contrôle (voir en ce sens, notamment, arrêts du 7 janvier 2004, Aalborg Portland e.a./Commission, C 204/00 P, C 205/00 P, C 211/00 P, C 213/00 P, C 217/00 P et C 219/00 P, EU:C:2004:6, point 372, ainsi que du 9 septembre 2008, FIAMM e.a./Conseil et Commission, C 120/06 P et C 121/06 P, EU:C:2008:476, point 96).
37 En particulier, l'obligation de motiver ses arrêts ne saurait en principe s'étendre jusqu'à imposer au Tribunal qu'il justifie la solution retenue dans une affaire par rapport à celle retenue dans une autre affaire déterminée dont il a été saisi ou, encore moins, par rapport à une décision prise par la Commission dans une autre affaire (voir, en ce sens, arrêt du 11 juillet 2013, Team Relocations e.a./Commission, C 444/11 P, non publié, EU:C:2013:464, point 66, ainsi que ordonnance du 4 septembre 2014, Metropolis Inmobiliarias y Restauraciones/OHMI, C 509/13 P, non publiée, EU:C:2014:2173, point 51).
38 Par conséquent, dès lors que le Tribunal a, dans l'arrêt attaqué, clairement exposé les motifs pour lesquels il rejetait l'argumentation des requérantes, tirée de la violation du principe de l'individualisation des peines, il convient de rejeter le deuxième moyen comme étant non fondé.
Sur le troisième moyen, relatif à une violation du principe de la protection de la confiance légitime
Argumentation des parties
39 Par leur troisième moyen, les requérantes invoquent une violation du principe de la protection de la confiance légitime.
40 À cet égard, les requérantes font valoir, notamment, que, ainsi qu'il ressort du point 104 de l'arrêt attaqué, il est constant que la Commission a violé à plusieurs reprises les règles procédurales en communiquant à d'autres entreprises des secrets d'affaires les concernant. Or, aux points 102 à 119 de cet arrêt, le Tribunal aurait apprécié, de manière très formelle, le respect par la Commission du principe de la protection de la confiance légitime en méconnaissant le caractère essentiel de la confiance accordée par les requérantes aux services de la Commission dans le cadre de la mise en œuvre de la communication de 2002 sur la coopération.
41 Les entreprises qui coopèrent devraient pouvoir se fier aux assurances de la Commission lorsque celles-ci sont données d'une manière concordante par des agents responsables de l'équipe chargée de l'affaire. Considérer, ainsi que l'a fait le Tribunal au point 115 de l'arrêt attaqué, que de telles assurances n'instaurent pas une telle confiance légitime au motif qu'elles n'émanent pas du service compétent irait, selon les requérantes, à l'encontre de l'objectif d'intérêt général de poursuivre les infractions et violerait le principe de protection de la confiance légitime.
42 Selon la Commission, ce moyen doit être rejeté comme étant non fondé.
Appréciation de la Cour
43 Il importe de relever que, aux points 110 à 116 de l'arrêt attaqué, le Tribunal a examiné si la Commission avait violé le principe de la protection de la confiance légitime en n'accordant pas aux requérantes une réduction du montant de l'amende qui leur a été infligée.
44 À cet égard, le Tribunal a, à juste titre, souligné, au point 111 de l'arrêt attaqué, qu'il découle d'une jurisprudence constante de la Cour que le droit de réclamer la protection de la confiance légitime suppose la réunion de trois conditions cumulatives, dont celle selon laquelle des assurances précises, inconditionnelles et concordantes doivent avoir été fournies par l'administration de l'Union européenne [voir, en ce sens, arrêts du 18 juillet 2007, AER/Karatzoglou, C 213/06 P, EU:C:2007:453, point 33, et du 16 décembre 2008, Masdar (UK)/Commission, C 47/07 P, EU:C:2008:726, point 81]. Puis, aux points 113 à 116 de l'arrêt attaqué, le Tribunal a considéré que, en l'occurrence, ces trois conditions n'étaient pas réunies.
45 Or, dans la mesure où l'argumentation soulevée par les requérantes vise, en particulier, le point 115 de l'arrêt attaqué, relatif à l'absence d'autorisation des agents ou des services de la Commission concernés à formuler de telles assurances, il suffit de constater que ledit point présente, en tout état de cause, un caractère surabondant et que cette argumentation n'est donc pas susceptible d'entraîner l'annulation de l'arrêt attaqué.
46 Il convient, dès lors, d'écarter le troisième moyen comme étant inopérant.
47 Aucun des moyens invoqués par les requérantes n'ayant été accueilli, il y a lieu de rejeter le pourvoi dans son intégralité.
Sur les dépens
48 Aux termes de l'article 184, paragraphe 2, du règlement de procédure de la Cour, lorsque le pourvoi n'est pas fondé, la Cour statue sur les dépens.
49 Aux termes de l'article 138, paragraphe 1, de ce règlement, rendu applicable à la procédure de pourvoi en vertu de l'article 184, paragraphe 1, de celui-ci, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens s'il est conclu en ce sens. Les requérantes ayant succombé en leurs moyens et la Commission ayant conclu à la condamnation de celles-ci aux dépens, il y a lieu de les condamner aux dépens afférents au présent pourvoi.
Par ces motifs, la Cour (première chambre) déclare et arrête :
1) Le pourvoi est rejeté.
2) Hansa Metallwerke AG, Hansa Nederland BV, Hansa Italiana Srl, Hansa Belgium et Hansa Austria GmbH sont condamnées aux dépens.