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Décisions

Cass. com., 25 janvier 2017, n° 15-14.804

COUR DE CASSATION

Arrêt

Cassation

PARTIES

Demandeur :

Les Editions Neressis (SASU)

Défendeur :

Mixad (SASU), Webmastore (SARLU)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Mouillard

Rapporteur :

Mme Darbois

Avocat général :

Mme Beaudonnet

Avocats :

SCP Gatineau, Fattaccini, SCP Lyon-Caen, Thiriez

Paris, pôle 5, chambre 2, du 16 janv. 20…

16 janvier 2015

LA COUR : - Attendu, selon l'arrêt attaqué, que la société Les Editions Neressis (la société Neressis), qui a pour activité l'édition, depuis 1975, de la revue hebdomadaire " De particulier à particulier " et qui exploite un site internet sous le nom de domaine " www.pap.fr " enregistré le 24 juillet 1996 diffusant les annonces immobilières publiées dans ce journal, est titulaire de la marque verbale française " P.A.P De Particulier à Particulier " no 1 518 035, déposée le 17 mai 1998 pour désigner les produits et services en classes 16, 35 et 41, et de la marque verbale communautaire " PAP " no 06701973, déposée le 18 février 2008 pour désigner les produits et services en classes 16, 35, 38 et 41 ; qu'ayant constaté l'exploitation d'un site internet " papauto.com Petites-Annonces Automobiles " accessible par le nom de domaine " papauto.com " présentant des petites annonces automobiles, elle a assigné la société Webmastore, créatrice et éditrice de ce site, et la société Mixad, qui a pour activité la fourniture d'un service d'hébergement en réseau de sites internet, en contrefaçon de marque et parasitisme ;

Sur le premier moyen : - Attendu que la société Neressis fait grief à l'arrêt de prononcer la mise hors de cause de la société Mixad alors, selon le moyen, que la personne qui fournit à une autre un module au moyen duquel cette dernière commet des actes d'atteinte à des marques renommées, de contrefaçon de marque et de parasitisme, dans le cadre d'un contrat de partenariat commercial en contrepartie duquel elle reçoit une rémunération, doit être tenue responsable des actes d'atteinte, de contrefaçon et de parasitisme ainsi commis ; qu'en l'espèce en prononçant la mise hors de cause de la société Mixad, tout en constatant qu'elle fournissait à la société Webmastore, dans le cadre d'un contrat de partenariat commercial en contrepartie duquel elle percevait une rémunération, un module en marque blanche au moyen duquel la société Neressis faisait valoir qu'avaient été commis des actes d'atteinte à ses marques renommées " P.A.P De Particulier à Particulier " et " PAP ", de contrefaçon de la dernière de ces marques et de parasitisme, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations en violation des articles L. 713-5 du Code de la propriété intellectuelle, 9, § 1, du règlement (CE) no 207/2009 du 26 février 2009 sur la marque communautaire, et 1382 du Code civil ;

Mais attendu qu'ayant relevé que la société Mixad fournissait à ses partenaires un module en marque blanche contenant des petites annonces, à charge pour ses affiliés de créer un site intégrant ce module, et retenu qu'elle n'avait pas fait le choix du titre " papauto ", qu'aucune pièce ne permettait de rattacher le nom de domaine à cette société et qu'il n'était pas démontré qu'elle ait joué un rôle actif dans la sélection des contenus mis en ligne sur le site litigieux, la cour d'appel, qui a rappelé que, pour apprécier la responsabilité en tant que prestataire de cette société, il convenait de s'attacher à la nature des opérations effectivement réalisées, en a exactement déduit que, peu important qu'une rémunération, laquelle est la contrepartie de la création des conditions techniques ayant permis l'usage du signe litigieux, ait été perçue par la société Mixad, la société Neressis ne pouvait pas rechercher la responsabilité de cette dernière ; que le moyen n'est pas fondé ;

Mais sur le deuxième moyen, pris en sa troisième branche : - Vu l'article 9, § 1, sous b) du règlement (CE) no 207/2009 du 26 février 2009 sur la marque communautaire ; - Attendu que pour écarter l'existence d'un risque de confusion entre la marque verbale communautaire " PAP " no 06701973 et les signes incriminés composés du terme " papauto ", l'arrêt retient que, si la présence commune du terme " pap ", constitutif de la marque revendiquée, apparaît par sa position d'attaque comme un facteur de rapprochement, tant visuellement que phonétiquement, entre les signes en cause, cette similitude visuelle et auditive se trouve neutralisée du fait de la faible distinctivité du signe " pap ", susceptible de constituer l'acronyme de nombreuses expressions telles que " pression artérielle pulmonaire ", " Pointe à Pitre", " prêt à porter ", " page avec publicité ", " prêt aidé pour l'accession à la propriété ", et de la perception comme un tout du signe " PapAuto " en toutes ses formes ;

Qu'en statuant ainsi, alors que le caractère distinctif d'une marque s'apprécie par rapport aux produits ou services visés par l'enregistrement, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;

Sur ce moyen, pris en sa quatrième branche : - Vu l'article 9, § 1, sous b) du règlement (CE) no 207/2009 du 26 février 2009 sur la marque communautaire ; - Attendu que pour statuer comme il fait, l'arrêt retient encore qu'en dépit de la similarité ou de la complémentarité des services en cause, il n'est pas démontré qu'en présence des signes opposés comportant en commun le terme " Pap " faiblement distinctif, le consommateur d'attention moyenne risquera de les confondre ou même de les associer en croyant que ceux-ci sont offerts par la même entreprise ou par des entreprises entretenant des liens économiques ;

Qu'en se déterminant ainsi, sans rechercher si la faible similitude entre les signes n'était pas compensée par la similitude ou la complémentarité existant entre les services désignés, la cour d'appel a privé sa décision de base légale ;

Et sur le troisième moyen, pris en sa deuxième branche : - Vu l'article 562 du Code de procédure civile ; - Attendu que les juges du fond ne peuvent aggraver le sort de l'appelant sur son seul appel, en l'absence d'appel incident ;

Attendu qu'infirmant le jugement de ce chef, l'arrêt rejette les demandes formées par la société Neressis au titre des agissements parasitaires imputés à faute à la société Webmastore ;

Qu'en statuant ainsi, alors que la société Neressis avait limité son appel aux autres chefs de la décision et que la condamnation de la société Webmastore au titre du parasitisme, prononcée par les premiers juges, ne faisait pas l'objet d'un appel incident de cette société, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;

Par ces motifs, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs : Casse et Annule, mais seulement en ce qu'il rejette les demandes de la société Les Editions Neressis au titre de la contrefaçon de la marque verbale communautaire " PAP " no 06701973 et du parasitisme formées contre la société Webmastore, et en ce qu'il statue sur les dépens et l'application de l'article 700 du Code de procédure civile dans les rapports entre ces deux sociétés, l'arrêt rendu le 16 janvier 2015, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ; remet, en conséquence, sur ces points, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la Cour d'appel de Paris, autrement composée ; Met hors de cause, sur sa demande, la société Mixad, dont la présence devant la cour d'appel de renvoi n'est plus nécessaire à la solution du litige ; Laisse à la société Les Editions Neressis les dépens afférents au pourvoi formé contre la société Mixad ; Condamne la société Webmastore au surplus des dépens ; Vu l'article 700 du Code de procédure civile, condamne la société Les Editions Neressis à payer à la société Mixad la somme de 3 000 euros et la société Webmastore à payer à la société Les Editions Neressis celle de 3 000 euros ; Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé