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Décisions

CA Paris, Pôle 5 ch. 4, 22 février 2017, n° 14-02772

PARIS

Arrêt

Confirmation

PARTIES

Demandeur :

Hase Poêles Cheminées (SARL)

Défendeur :

Logis Confort Cheminées (SARL)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Luc

Conseillers :

Mme Mouthon Vidilles, M. Thomas

Avocats :

Mes Laguens, Kister, Regnier, Brunet

T. com. Nancy, 4 juill. 2013

4 juillet 2013

Faits et procédure

La société à responsabilité limitée Hase Poêles Cheminées a pour objet le commerce en gros de poêles-cheminées fabriqués par la société Hase Kaminofenbau GmbH.

La société à responsabilité limitée Logis Confort Cheminée exerce une activité de commercialisation de poêles et cheminées. Elle a été créée en mai 1992 par M. Puechmaurel qui exerçait auparavant la même activité en qualité d'artisan.

Depuis plusieurs années, ces sociétés ont entretenu des relations d'affaires.

Par convention de partenariat du 13 août 2001, la société Hase a confié la distribution des poêles Hase à la société Logis Confort Cheminée pour les départements de la Haute-Garonne (31) et du Tarn (81), sans exclusivité de part et d'autre.

Par lettre recommandée avec accusé de réception du 8 octobre 2010, la société Hase a notifié la rupture des relations commerciales avec effet immédiat en invoquant l'utilisation par la société Logis Confort Cheminée de la charte graphique ainsi qu'une série de photographies de poêles Hase, pour vendre des produits concurrents.

Par exploit du 16 juin 2011, la société Logis Confort Cheminée a assigné la société Hase Poêles Cheminées devant le Tribunal de commerce de Nancy sur le fondement de l'article L. 442-6, I, 5° du Code de commerce aux fins de voir constater la rupture brutale des relations commerciales établies et obtenir le paiement de dommages et intérêts.

Par jugement en date du 4 juillet 2013, le Tribunal de commerce de Nancy a :

- déclaré la société Logis Confort Cheminée fondée en sa demande indemnitaire au titre de la rupture brutale et sans préavis de sa relation commerciale avec la société Hase Poêles Cheminées,

- condamné la société Hase Poêles Cheminées à payer à la société Logis Confort Cheminée la somme de 165 500 euros à titre de dommages et intérêts et celle de 4 577,61 euros au titre des remises de fin d'année de l'année 2010,

- dit que ces sommes porteront intérêts au taux légal à compter de l'assignation et qu'en application des dispositions de l'article 1154 du Code civil, les intérêts échus deviennent eux-mêmes productifs d'intérêts au bout d'un an,

- déclaré la société Logis Confort Cheminée mal fondée sur le surplus de ses demandes, l'en a déboutée,

- condamné la société Hase Poêles Cheminées à payer à la société Logis Confort Cheminée la somme de 3 000 euros en application des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile,

- déclaré la société Hase Poêles Cheminées mal fondée en ses demandes au titre de la concurrence déloyale, l'en a déboutée,

- l'a condamnée aux dépens de présent jugement,

- a autorisé l'exécution provisoire du présent jugement, nonobstant opposition ou appel et sans caution.

Par déclaration du 16 août 2013, la société Hase a interjeté appel de la décision devant la Cour d'appel de Nancy. Par ordonnance du 31 mars 2014, l'appel a été déclaré irrecevable. La société Hase a effectué une nouvelle déclaration le 7 février 2014 devant la Cour d'appel de Paris.

Vu les dernières conclusions déposées et notifiées le 7 mai 2014 par la société Hase Poêles Cheminées, appelante, par lesquelles il est demandé à la cour de:

- déclarer l'appel recevable et bien fondé,

1. Sur la demande de la société Logis Confort Cheminées :

- infirmer le jugement entrepris, statuant à nouveau :

- débouter la société Logis Confort Cheminées de l'intégralité de ses moyens, fins et conclusions sauf à lui reconnaître un droit sur les bonifications de fin d'année 2010 à hauteur de 4 026,40 euros,

- la condamner en tous les frais et dépens de première instance et d'appel dont distraction au profit de Maître Martine Molliard conformément à l'article 699 du Code de procédure civile,

2. Sur la demande reconventionnelle :

- infirmer le jugement entrepris en tant qu'il a débouté la société Hase Poêles Cheminées de ses moyens, fins et prétentions, statuant à nouveau :

Vu les articles 1382 et 1383 du Code civil,

- constater que la société Logis Confort Cheminées s'est rendue coupable de faits de concurrence déloyale,

- ordonner en conséquence la modification du site Internet de la société Logis Confort Cheminées de manière à ce que disparaissent tous éléments appartenant et utilisés par la société Hase Poêles Cheminées, à savoir, marque, slogan (La Magie du Feu), couleur, photographies, le tout sous peine d'une astreinte de 500 euros par jour de retard à compter de l'expiration d'un délai de 10 jours après signification de l'arrêt à intervenir,

- ordonner également la suppression de toute affiche publicitaire utilisant la charte graphique Hase représentant un poêle de la marque Hase et mentionnant la marque Hase ainsi que l'autocollant apposé sur le véhicule de la société Logis Confort Cheminées sous les mêmes conditions de délais et d'astreinte,

- condamner la société Logis Confort Cheminées à payer à la société Hase Poêles Cheminées en réparation du préjudice subi du fait des agissements de concurrence déloyaux une somme de 150 000 euros ou tout autre montant qui sera fixé par la Cour,

- ordonner avant dire droit en tant que besoin une expertise comptable avec mission pour l'expert désigné après avoir pris connaissance de l'ensemble des documents comptables de la société Logis Confort Cheminées de fixer le préjudice subi par la société Hase Poêles Cheminées du fait des agissements de concurrence déloyale,

- réserver à la société Hase Poêles Cheminées la faculté de chiffrer son entier préjudice après dépôt du rapport d'expertise,

- condamner la société Logis Confort Cheminées à payer à la société Hase Poêles Cheminées une somme de 5 000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile,

- condamner la société Logis Confort Cheminées en tous les frais et dépens de première instance et d'appel dont distraction au profit de Maître Martine Molliard conformément à l'article 699 du Code de procédure civile ;

Vu les dernières conclusions déposées et notifiées le 27 juillet 2015 par la société Logis Confort Cheminée, intimée, par lesquelles il est demandé à la cour de :

Vu l'article L. 442-6, I, 5° du Code de commerce,

Vu l'article 1134 du Code civil,

- confirmer le jugement du Tribunal de commerce de Nancy ce qu'il a :

Déclaré la société Logis Confort Cheminée fondée en sa demande d'indemnité au titre de la rupture brutale et sans préavis de sa relation commerciale avec la Hase Poêles Cheminées,

Condamné la société Hase Poêles Cheminées à payer à la Logis Confort Cheminée la somme de 165 500 euros à titre de dommages et intérêts,

condamné la société Hase Poêles Cheminées à payer à la Logis Confort Cheminée la somme de 4 577,61 euros au titre des remises de fin d'année de l'année 2010,

Dit que ces sommes porteront intérêts au taux légal à compter de l'assignation et qu'en application des dispositions de l'article 1154 du Code civil, les intérêts échus deviennent eux-mêmes productifs d'intérêts au bout d'un an,

Déclaré la société Hase Poêles Cheminées mal fondée en ses demandes au titre de concurrence déloyale,

Condamné la société Hase Poêles Cheminées à payer à la société Logis Confort Cheminée la somme de 3 000 euros en application des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens,

- le réformer pour le surplus,

Condamner la société Hase Poêles Cheminées à payer à la société Logis Confort la somme de 158 000 euros à titre de dommages et intérêts supplémentaires dus à la perte d'une partie de son fonds de commerce,

Condamner la société Hase Poêles Cheminées à payer également à titre de dommages et intérêts la somme de 65 239 euros correspondant au montant des stocks existants au moment de la rupture fautive,

- en tout état de cause, condamner la société Hase Poêles Cheminées à payer à la société Logis Confort la somme supplémentaire de 8 000 euros en application des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens ;

Sur ce,

Sur la rupture brutale des relations commerciales établies sur la nécessité d'un délai de préavis

Il est constant que par lettre recommandée avec accusé de réception du 8 octobre 2010, la société Hase a résilié le contrat de partenariat à durée indéterminée conclu le 13 août 2001, avec effet immédiat.

La société Hase soutient que la société Logis Confort a commis des manquements d'une gravité suffisante justifiant la rupture immédiate de la relation commerciale puisqu'elle a utilisé les éléments de marketing et de communication Hase (charte graphique et photographies) ainsi que la marque et sa notoriété pour faire de la publicité sur son site Internet en faveur de fabricants concurrents dont elle commercialisait les produits. Elle se prévaut d'un constat d'huissier établi le 27 juillet 2010 et reproche aux premiers juges de ne pas avoir tenu compte des éléments qui en résultaient. Elle ajoute que ces manquements lui ont été dissimulés et constituent des comportements déloyaux justifiant la rupture avec effet immédiat.

La société Logis Confort Cheminée réplique que la société Hase a, en réalité, décidé de modifier son système de distribution afin de recourir dans la région toulousaine à un distributeur exclusif, en créant le 3 septembre 2010 la société Design & Confort dont elle a confié la gestion à l'ancien responsable du magasin de la société Logis Confort et que pour ce faire, elle a imaginé un motif de rupture totalement fantaisiste dès lors que ce nouveau système de distribution supposait que la société Logis Confort ne puisse plus distribuer ses produits. Elle ajoute que le motif de rupture (utilisation de la charte graphique ou de photographie ainsi que le marketing et la communication de la société Hase) est un prétexte tout à fait fallacieux dans la mesure où cette utilisation a été faite sans que rien ne soit dissimulé à la société Hase, celle-ci étant parfaitement au courant que la société Logis Confort ainsi que ses autres distributeurs utilisaient sa marque. Elle rappelle que le contrat de partenariat imposait au distributeur de faire de la publicité pour les produits de la marque Hase dans la presse locale et sur ses véhicules et que la société Hase avait elle-même fourni les supports permettant de réaliser ces publicités. Elle considère qu'il n'existe aucune faute d'une gravité suffisante justifiant la rupture sans préavis.

L'article L. 442-6, I, 5° du Code de commerce dispose qu'engage sa responsabilité et s'oblige à réparer le préjudice causé, celui qui rompt brutalement une relation commerciale établie, sans préavis tenant compte de la durée de la relation commerciale.

Cet article prévoit in fine que ces dispositions ne font pas obstacle à la faculté de résiliation sans préavis, en cas d'inexécution par l'autre partie de ses obligations contractuelles. Ce dernier alinéa ne précise ni la nature ni le degré de l'inexécution contractuelle autorisant la dispense de préavis. Toutefois, dès lors qu'il instaure une dérogation à l'exigence d'un préavis prévu au premier alinéa, son application nécessite que l'inexécution des obligations contractuelles qu'il vise, présente un caractère de gravité suffisant pour justifier une rupture immédiate eu égard à l'ancienneté des relations des relations commerciales.

La société Hase qui reconnaît qu'aux termes du contrat de partenariat, la société Logis Confort Cheminée n'était tenue d'aucune obligation exclusive de vente et pouvait librement distribuer des produits concurrents, lui fait grief d'avoir favorisé ces derniers en reproduisant de manière délibérée et sans son autorisation, les signes distinctifs Hase (éléments marketing et publicitaires, couleurs, photographies de produits et d'ambiance, marque et slogan) sur son site Internet, ce qui justifierait une résiliation sans préavis de sorte que la rupture ne serait pas brutale. Elle ajoute que si ces photographies n'avaient été utilisées que sur une page dédiée aux produits de la marque Hase, " il n'y aurait évidemment rien eu à dire. Mais ce n'est évidemment pas comme cela que le site a été construit. "

Or, d'une part, il résulte du contrat de partenariat que la société Logis Confort Cheminée était tenue de réaliser la publicité des produits Hase dans la presse locale et sur ses véhicules et qu'à cet effet, la société Hase a mis à sa disposition les signes distinctifs de sa marque (catalogues, dépliants, supports, présentoirs, drapeau, autocollants... etc) lui permettant de réaliser ces publicités et a notamment pris en charge 50 % du coût du flocage des voitures à ses nom et couleurs. Il est établi que pendant de nombreuses années, une photographie des poêles Hase figurait sur les cartes de visites de la société Logis Confort Cheminée et les pages jaunes de l'annuaire téléphonique sans que la société Hase ne formule aucune réclamation.

D'autre part, un site Internet constitue un support de publicité devenu incontournable et le contrat ne comporte aucune exclusion à cet égard de sorte que c'est vainement que la société Hase fait valoir qu'elle n'aurait pas été informée de sa création en 2000. La société Logis Confort Cheminée étant un distributeur multimarques, ce dont la société Hase était parfaitement informée, il ne saurait sérieusement lui être reproché de faire apparaître sur son site Internet l'ensemble des marques et des produits qu'elle distribue et dont elle dresse la liste, en ce compris la marque et les Poêles Cheminées Hase. Une lecture attentive du constat d'huissier qui décrit précisément le site Internet, établit que si la marque Hase est particulièrement valorisée par la mise en valeur d'un poêle Hase (dont la photographie correspond à celle figurant sur les pages jaunes de l'annuaire depuis de nombreuses années), ce dont au demeurant la société Hase ne saurait se plaindre, il n'existe aucun élément susceptible d'entraîner dans l'esprit de l'internaute un risque de confusion entre les divers produits de gamme différente présentés et de l'induire à penser que ces produits appartiennent tous à la même gamme Hase. La société Hase qui n'a pas entendu exiger de la société Logis Confort Cheminées une exclusivité de vente de ses produits, ne saurait sérieusement lui faire grief d'avoir reproduit ses éléments de marketing parmi ceux des autres marques dès lors qu'ils sont bien distincts et ne sont pas susceptibles d'induire la méprise du consommateur sur l'identité des produits proposés. Dans ces conditions, il n'apparaît pas que la société Logis Confort Cheminée ait utilisé de manière déloyale et abusive les signes distinctifs de la marque Hase dont elle avait la disposition en vertu du contrat de partenariat pour favoriser des produits concurrents et capter sa clientèle de sorte que le grief de concurrence déloyale et/ou d'un manquement à l'obligation de loyauté et de sincérité qui s'impose dans l'exécution de tout contrat, n'est pas établi.

Dès lors, faute de justifier l'existence d'un manquement, la société Hase n'est pas fondée à opposer les dispositions prévues in fine à l'article L. 442-6, I, 5° du Code de commerce. La décision des premiers juges sera par conséquent confirmée en ce qu'ils ont considéré que la rupture des relations commerciales établies par la société Hase était brutale.

Sur la durée des relations commerciales

Les parties s'opposent sur la durée de leurs relations commerciales à prendre en compte. La société Logis Confort se prévaut de 22 années de relations commerciales, comme retenu par les premiers juges, en indiquant qu'elle commercialise les produits de la marque Hase depuis sa création en 1992 et que son gérant, M. Puechmaurel, les commercialisait antérieurement à compter de 1988 en qualité d'artisan tandis que la société Hase conteste formellement cette ancienneté, en considérant qu'il n'y a lieu de se référer qu'au seul contrat écrit de partenariat conclu en août 2001. Elle considère que la circonstance que la société Logis Confort ait pu par le passé commercialiser des produits de la marque Hase acquis auprès de tiers est indifférente.

Or, la notion de relation commerciale établie ne saurait été réduite à la seule relation contractuelle écrite. S'appréciant au plan économique, elle doit être retenue, nonobstant l'absence de convention écrite entre les parties, en présence d'un flux d'affaires suivi, stable et habituel et suppose que les parties qui l'invoquent soient identiques ou qu'une transmission des droits encadrant cette relation commerciale entre deux parties s'étant succédées, soit justifiée.

En l'espèce, la société Logis Confort rappelle avoir succédé en 1992 à son gérant qui commercialisait les produits Hase depuis 1988 en qualité d'artisan. La société Hase ne conteste pas ces faits, se contentant d'affirmer qu'il s'agissait d'un approvisionnement auprès de tiers, sans autre explication. La société Logis Confort communique un document à en-tête de la société Hase, intitulé " Distributeurs-Installateurs Hase ", comportant la liste de tous les établissements distribuant ses produits parmi lesquels figure la société Logis Confort Cheminée. Les numéros de téléphone des distributeurs qui y figurent, comportent huit chiffres sans les indicatifs de région. Ce document, non discuté par l'appelante qui relève seulement qu'il n'est pas daté, est nécessairement antérieur à 1996, date de changement des numérotations téléphoniques. En outre, la société Logis Confort Cheminées produit une lettre du 15 novembre 2010 qu'elle a adressée à la société Hase en suite de la notification de la résiliation du contrat, dont les termes n'ont été et ne sont nullement contestés par la société Hase et dans laquelle elle rappelle que son gérant fondateur, M. Puechmaurel, artisan poêlier, a été un des premiers vendeurs et installateurs de poêles à bois de la marque Hase depuis 1980 sur les départements de la Haute-Garonne (Toulouse) et du Tarn (Albi) et qu'il a ensuite exercé cette activité en qualité de gérant de la société Logis Confort Cheminées à compter de sa création en 1992.

En conséquence de ces éléments, il y a donc lieu de confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a estimé que les relations commerciales suivies entre la société Hase et la société Logis Confort Cheminée avaient une durée de 22 ans (1988-2010).

Le délai de préavis suffisant

La finalité du délai de préavis est de permettre au partenaire de prendre ses dispositions pour réorienter ses activités en temps utile ou rechercher de nouveaux clients.

Sa durée, conformément à l'article L. 442-6, I, 5° du Code de commerce, doit être appréciée au moment de la notification de la rupture au regard de l'étendue de la relation commerciale et en référence aux usages du commerce, ainsi qu'au vu des circonstances de l'espèce, telles que la progression du chiffre d'affaires et le secteur concerné.

En l'espèce, il ressort des chiffres communiqués par l'expert-comptable Fiduciaire Occitane de la société Logis Confort Cheminée (pièce n° 28 intimée), non contredits par des documents objectifs de l'appelante, que la part des produits Hase dans son chiffre d'affaires global représentait 10,11 % pour l'exercice clos au 31 mai 2008, 18,70 % pour l'exercice clos au 31 mai 2009 et 31,38 % pour l'exercice clos au 31 mai 2010. Il y a donc lieu de tenir compte de la part croissante de son chiffre d'affaires réalisé avec la société Hase.

Au vu de ces éléments et eu égard à l'ancienneté des relations ayant lié les parties pendant 22 ans, c'est à juste titre que les premiers juges ont considéré que la société Logis Confort Cheminée aurait dû bénéficier d'un préavis d'une année afin de pallier les incidences de la perte de la distribution des produits Hase dont elle disposait.

Sur le préjudice

L'appelante soutient que la société Logis Confort Cheminée ne justifie pas de la réalité de son préjudice qu'elle affirme correspondre à une perte de chance. Elle estime que les premiers juges ont procédé à une inversion de la charge de la preuve en considérant que c'était à la société Hase d'apporter la preuve de sa contestation du préjudice, alors même qu'il appartenait à la société Logis Confort, demanderesse, d'apporter la preuve de son préjudice.

L'intimée réplique que le préjudice doit être calculé en fonction d'un préavis d'une année en considération de la relation commerciale établie depuis 22 ans entre les parties et qu'il y a lieu de retenir la somme de 165 500 euros comme marge qui aurait été générée durant l'année de préavis par la société Logis Confort sur les produits Hase. Elle considère que le tribunal n'a en rien renversé la charge de la preuve car il appartenait à la société Hase, contestant les chiffres qu'elle produit, d'apporter les preuves au soutien de sa contestation.

Il est constant que seul est indemnisable le préjudice découlant de la brutalité de la rupture et non de la rupture elle-même. Il correspond, non pas à une perte de chance mais à une perte certaine de la marge brute que la victime de la rupture pouvait escompter tirer pendant le temps de préavis qui aurait dû lui être accordé, sans qu'il y ait lieu de tenir compte de circonstances postérieures à la rupture.

L'expert-comptable Fiduciaire Occitane a évalué la marge commerciale générée par la société Hase pour les exercices clos au 31 mai des années 2008 à 2010 à respectivement 43 679,19 euros, 31 912,74 euros et 164 431,22 euros (tableaux de synthèse accompagnés de documents comptables tels que les détails des comptes de résultat, les soldes intermédiaires de gestion-production et l'extrait du grand livre de compte). Compte de l'importante progression de cette marge l'année de la rupture du contrat, il y a lieu d'approuver les premiers juges en ce qu'ils ont retenu les résultats de cette seule dernière année d'exercice et ont donc estimé à 165 000 euros la somme que la société Confort Logis Cheminée aurait dû percevoir si un préavis suffisant de 12 mois lui avait été consenti. Le jugement sera également confirmé en ce qu'il a dit que cette somme portera intérêts au taux légal à compter de l'assignation et qu'en application des dispositions de l'article 1154 du Code civil alors applicable, les intérêts échus seront eux-mêmes productifs d'intérêts à l'issue d'une période d'une année.

La société Logis Confort Cheminée sollicite en outre une somme de 158 000 euros au titre de la perte de clientèle transférée au bénéfice de la société Design & Confort du fait de l'attitude dolosive initiée par la société Hase tendant à implanter son ancien directeur de magasin en qualité de distributeur exclusif.

Mais d'une part, le préjudice que peut revendiquer la société Logis Confort Cheminées résulte du seul non-respect du préavis et non de la perte de la clientèle découlant de la rupture des relations contractuelles dès lors qu'il pouvait y être mis fin, sans motif, à condition que la durée du préavis soit respectée. D'autre part, étant rappelé qu'un distributeur est libre de réorganiser son réseau comme il l'entend ainsi que d'embaucher tout salarié utile à son entreprise, en ce compris un ancien salarié de son concurrent libre de tout engagement envers ce dernier, comme tel est le cas en l'espèce, la société Logis Confort Cheminées ne démontre ni même ne caractérise que cette embauche se soit accompagnée de manœuvres déloyales, la seule constatation de l'embauche d'un ancien salarié ne démontrant pas la réalité du comportement déloyal qu'elle impute à l'appelante. Le jugement entrepris sera donc confirmé de ce chef.

Sur les autres demandes en paiement les remises de fin d'année sur les ventes réalisées au titre de l'année 2010

Ni en première instance, ni aux termes de ses dernières écritures en appel, la société Hase ne conteste devoir la somme de 4 577,61 euros à ce titre. Le jugement entrepris sera donc confirmé en ce qu'il l'a condamnée au paiement de cette somme augmentée des intérêts au taux légal à compter de l'assignation outre la capitalisation des intérêts.

La reprise du stock à hauteur de 65 239 euros

La société Logis Confort Cheminée soutient que l'implantation d'un nouveau distributeur exclusif l'empêche pratiquement de commercialiser son stock depuis la rupture et que la société Hase doit être condamnée à le reprendre pour la valeur figurant à l'inventaire.

La société Hase fait valoir que les premiers juges ont rejeté toutes les autres prétentions de la société Logis Confort Cheminée au motif qu'elle ne justifiait d'aucun autre préjudice.

Aucune disposition contractuelle n'oblige la société Hase à reprendre le stock après la rupture, le contrat de partenariat ne comportant aucune disposition à cet égard. Par ailleurs, la société Logis Confort Cheminée n'établit pas avoir été dans l'impossibilité de vendre le stock acquis régulièrement pendant les relations contractuelles. En conséquence, elle sera déboutée de cette demande en paiement.

Sur les demandes reconventionnelles de la société Hase

L'appelante soutient que c'est à tort que le tribunal de commerce a rejeté ses demandes de modification du site Internet et de suppression de toute affiche publicitaire, en estimant que la société Logis Confort s'était conformée à ces demandes, alors même que malgré certaines modifications sur le site Internet, il restait des références explicites à la marque Hase n'ayant pas été supprimées et qu'en 2012, la société Logis Confort continuait à utiliser les affiches avec la charte graphique Hase. Elle revendique une somme de 150 000 euros en réparation du préjudice subi du fait d'actes de concurrence déloyale commis par la société Logis Confort depuis la création du site Internet en 2005. Elle fait observer que le tribunal de commerce n'a pas statué sur la demande en dommages et intérêts qu'elle avait pourtant formulée en première instance. Elle sollicite avant-dire droit une expertise comptable pour évaluer le préjudice qu'elle a subi du fait des actes de concurrence déloyale et qu'il lui soit réservé la faculté de chiffrer son préjudice après dépôt du rapport d'expertise.

La société Logis Confort fait valoir qu'aucun acte de concurrence déloyale ne peut lui être reproché en cours d'exécution du contrat, l'utilisation des signes distinctifs de la société Hase étant non seulement autorisée mais également imposée par le contrat de partenariat. Elle ajoute que dès la rupture, elle n'a pas manqué d'en tirer les conséquences en engageant rapidement les démarches destinées à faire cesser toute utilisation des signes distinctifs de la société Hase et des photographies de ses produits. Elle affirme que les modifications nécessaires ont été effectuées sur son site Internet ainsi que sur les affichages publicitaires situés aux abords de son magasin mais que la société CBS Outdoor, spécialisée dans l'affichage publicitaire, à laquelle elle s'est adressée, a tardé dans la réalisation de sa mission.

Il a été vu ci-dessus que la société Logis Confort Cheminée n'a commis aucun acte de concurrence déloyale en cours d'exécution du contrat de partenariat. Par ailleurs, si du fait de la rupture des relations commerciales, la société Logis Confort Cheminée devait cesser toute référence à la marque Hase, elle justifie avoir entrepris les démarches nécessaires en ce sens, en intervenant tant auprès de la société Linkeo, conceptrice de son Internet, pour faire supprimer toute photographie des poêles Hase ainsi que toute référence à la marque Hase (pièce n° 35) qu'auprès de la société CBS Outdoor (pièce n° 36).Enfin, il apparaît que la photographie du véhicule de la société Logis Confort Cheminée sur lequel figure un autocollant dont la société Hase affirme qu'il représente un de ses poêles, représente en réalité un poêle de la marque Stuv. La société Hase ne rapporte donc pas la preuve d'une manœuvre frauduleuse commise par la société Logis Confort Cheminée en suite de la rupture visant à profiter du nom de la marque aux dépens de la première ni du préjudice subi par elle, et ce, alors même que la société Logis Confort Cheminée a permis à la société Hase d'asseoir sa notoriété dans les départements de Haute Garonne et du Tarn pendant 22 ans. C'est donc à juste titre que les premiers juges ont débouté la société Hase de sa demande d'indemnisation.

Enfin, la société Hase ne justifie pas qu'à ce jour, le site Internet de la société Logis Confort Cheminée comporte des éléments lui appartenant de sorte qu'elle sera déboutée de sa demande en modification du site.

La société Hase qui échoue à démonter l'existence d'actes de concurrence déloyale en cours d'exécution du contrat et postérieurement à la rupture, sera déboutée de l'intégralité de ses demandes reconventionnelles et le jugement confirmé de ce chef.

En définitive, le jugement entrepris sera confirmé en toutes ses dispositions.

Sur les autres demandes

La société Hase qui succombe en appel, en supportera la charge des dépens et devra verser à la société Logis Confort Cheminée la somme supplémentaire de 8 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Par ces motifs : LA COUR, confirme le jugement entrepris en toutes ses dispositions, et y ajoutant, déboute les parties de leurs demandes plus amples ou contraires, condamne la société Hase Poêles Cheminées aux dépens de l'appel, condamne la société Hase Poêles Cheminées à verser à la société Logis Confort Cheminée la somme de 8 000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile.