Cass. com., 1 mars 2017, n° 15-15.448
COUR DE CASSATION
Arrêt
Cassation
PARTIES
Demandeur :
Laboratoires Léa (SAS), Boutique Léa nature (SARL)
Défendeur :
Najjar (SAS)
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Guérin
Rapporteur :
Mme Le Bras
Avocat général :
Mme Pénichon
Avocats :
SCP Fabiani, Luc-Thaler, Pinatel, Me Bertrand
LA COUR : - Sur le premier moyen, pris en sa troisième branche : - Vu l'article L. 121-1, 2°, b), devenu L. 121-2, 2°, b du Code de la consommation, ensemble l'article 1382, devenu 1240, du Code civil ; - Attendu, selon l'arrêt attaqué, rendu en matière de référé, que la société Laboratoires Léa, spécialisée dans la fabrication et la commercialisation de produits cosmétiques, se fournissait auprès de la société Najjar en savons artisanaux fabriqués à Alep ; que leurs relations commerciales ayant cessé, la société Laboratoires Léa et la société La Boutique Léa Nature appartenant au même groupe (les sociétés Léa) ont commercialisé un savon sous la dénomination "savon tradition Alep" fabriqué en Tunisie ; qu'invoquant un trouble manifestement illicite, la société Najjar a assigné les sociétés Léa pour obtenir notamment des mesures d'interdiction et de destruction sous astreinte ;
Attendu que pour faire interdiction aux sociétés Léa de poursuivre l'offre de vente, notamment par catalogue ou site Internet, la mise dans le commerce du produit sous la dénomination "savon tradition Alep", ordonner le rappel du savon commercialisé sous cette dénomination des circuits commerciaux et son retrait du site Internet [...], ainsi que la destruction des packagings du savon reproduisant la mention "savon tradition Alep", l'arrêt, après avoir relevé que la société Najjar reprochait aux sociétés Léa des actes de concurrence déloyale en raison de pratiques commerciales trompeuses pour le consommateur au sens des dispositions de l'article L. 121-1, 2°, b) du Code de la consommation, constate que l'emballage du "savon tradition Alep" commercialisé par les sociétés Léa présente de très grandes similitudes avec les emballages du savon "Alep", véritable savon d'Alep de la société Najjar, tant par les couleurs, le graphisme et les éléments descriptifs ; qu'il constate encore que le nom Alep figure en gros caractères strictement identiques, de même que l'indication "100 % d'origine naturelle" dans un cadre de couleur et l'indication "Floressance par nature" en caractères semblables, tandis que la mention "Made in Tunisie" ne figure qu'en petits caractères à l'arrière de l'étiquette ; qu'il retient enfin que l'emballage du "savon tradition Alep" des sociétés Léa est manifestement de nature à induire en erreur leurs clients sur l'origine du produit en leur faisant croire que ce savon provient de la ville d'Alep, comme ceux qui leur étaient précédemment vendus ; qu'il en déduit que la confusion ainsi créée dans l'esprit des consommateurs ou des acheteurs éventuels sur l'origine du produit est constitutive de concurrence déloyale à l'égard de la société Najjar, qui commercialise des savons d'Alep réellement fabriqués en Syrie ;
Qu'en se déterminant ainsi, sans vérifier si les éléments qu'elle avait retenus altéraient ou étaient de nature à altérer de manière substantielle le comportement économique du consommateur, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision ;
Par ces motifs, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs : Casse et annule, sauf en ce qu'il déclare l'action recevable et rejette la demande de provision ainsi que les demandes reconventionnelles, l'arrêt rendu le 17 février 2015, entre les parties, par la Cour d'appel de Lyon ; remet, en conséquence, sur les autres points, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la Cour d'appel de Lyon, autrement composée.