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Décisions

Cass. com., 1 mars 2017, n° 15-12.482

COUR DE CASSATION

Arrêt

Cassation

PARTIES

Demandeur :

Steinmetz

Défendeur :

Cafpi (SA)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Mouillard

Rapporteur :

Mme Laporte

Avocats :

SCP Lyon-Caen, Thiriez, SCP Masse-Dessen, Thouvenin, Coudray

T. com. Evry, 3e ch., du 19 déc. 2012

19 décembre 2012

LA COUR : - Joint les pourvois n° 15-12.482 et 15-13.061, qui attaquent le même arrêt ; - Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. Steinmetz, qui était l'agent commercial de la société Cafpi, a conclu avec elle un contrat de travail d'attaché administratif puis démissionné de cette fonction ; que se prévalant d'une baisse unilatérale du taux de ses commissions par la société Cafpi, M. Steinmetz a rompu le contrat d'agence commerciale ; que sur l'action en requalification de ce contrat en contrat de travail qu'il a engagée, une cour d'appel, sur contredit de compétence, a renvoyé les parties devant un conseil de prud'hommes au titre du contrat d'attaché administratif mais a refusé de requalifier le contrat d'agence commerciale en contrat de travail et a renvoyé les parties devant un tribunal de commerce pour statuer sur ses autres demandes de commissions et d'indemnités de préavis et de rupture ; que la société Cafpi a formé une demande reconventionnelle en paiement de dommages-intérêts pour violation par M. Steinmetz de la clause de non-concurrence stipulée dans le contrat d'agence commerciale ;

Sur le quatrième moyen du pourvoi n° 15-13.061 : - Attendu que la société Cafpi fait grief à l'arrêt de rejeter sa demande reconventionnelle alors, selon le moyen, que l'article L. 134-14 du Code de commerce qui prévoit que la clause de non-concurrence pouvant être stipulée dans le contrat d'agent commercial " doit être établie par écrit et concerner le secteur géographique et, le cas échéant, le groupe de personnes confié à l'agent commercial ainsi que le type de biens ou services pour lequel il exerce la représentation aux termes du contrats " n'exige pas à peine de nullité la mention dans la clause elle-même du secteur géographique visé ; qu'en déclarant non applicable la clause de non-concurrence insérée dans le contrat de M. Steinmetz au seul motif que n'y figurait pas l'indication actualisée du secteur géographique précis où exerçait son activité ce dernier sans rechercher, ainsi qu'elle y était invitée, si le secteur géographique concerné n'était pas facilement déterminable puisqu'il s'agissait du secteur de Saint-Etienne où M. Steinmetz exerçait son activité depuis 2005, qui était en outre expressément mentionné sur les bordereaux de commissionnement de l'intéressé, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 134-14 du Code du commerce ;

Mais attendu que l'arrêt constate que le contrat d'agence commerciale stipule que M. Steinmetz exerce son activité dans un secteur géographique déterminé ; qu'il relève que, si lors de sa conclusion, l'agent exerçait son activité dans le secteur de Saint-Etienne, son secteur a été ensuite modifié à trois reprises sans qu'aucun avenant n'ait pris en considération ce changement de sorte que la clause litigieuse ne peut recevoir application faute de délimiter le secteur géographique actualisé confié à M. Steinmetz ; qu'en l'état de ces constatations et appréciations souveraines, la cour d'appel a légalement justifié sa décision ; que le moyen n'est pas fondé ;

Sur le premier moyen, pris en sa première branche, du pourvoi n° 15-12.482, le premier moyen, le deuxième moyen, pris en ses première et troisième branches, et le troisième moyen, pris en sa quatrième branche, du pourvoi n° 15-13.061, réunis : - Attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce moyen, qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;

Mais sur le deuxième moyen, pris en sa deuxième branche, du pourvoi n° 15-13.061 : - Vu les articles 2224 et 2241 du Code civil ; - Attendu que pour écarter les conclusions de la société Cafpi qui invoquaient la prescription et dire n'y avoir lieu de réintégrer la somme de 74 462,60 euros dans la base de calcul des commissions de M. Steinmetz pour les années 2005 à 2009, qui correspond à la taxe sur la valeur ajoutée afférente à cette période, et condamner la société Cafpi à payer à celui-ci la somme de 7 446 euros à ce titre, l'arrêt retient que la lettre adressée le 4 janvier 2010 par M. Steinmetz à la société Cafpi par laquelle il reprochait à la mandante de lui avoir imposé un nouveau mode de calcul de sa rémunération constituant un acte interruptif, sa demande de rappels de commissions formée le 21 mai 2014 n'est pas prescrite ;

Qu'en statuant ainsi, alors que cette simple lettre de réclamation concernant l'exécution du contrat, qui ne constituait pas une demande en justice, n'était pas une cause d'interruption de la prescription de l'action en paiement de commissions engagée par M. Steinmetz plus de cinq ans après qu'il ait connu les faits lui permettant de l'exercer, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;

Sur le troisième moyen, pris en sa première branche, du pourvoi n° 15-13.061 : - Vu l'obligation pour le juge de ne pas dénaturer l'écrit qui lui est soumis ; - Attendu que pour condamner la société Cafpi à payer à M. Steinmetz la somme de 4 682,12 euros à titre d'indemnité de cessation de contrat, l'arrêt retient que l'intéressé a adressé le 4 janvier 2010 à la mandante une lettre lui faisant clairement connaître qu'il entendait faire valoir ses droits tant au titre de sa situation de salarié que de celle d'agent commercial, ce qui comprenait donc son droit à indemnité compensatrice, de sorte qu'il n'est pas déchu de ce droit ;

Qu'en statuant ainsi, alors que cette lettre, dans laquelle M. Steinmetz se bornait à prendre acte de la rupture des relations de travail, à reprocher à la société Cafpi d'avoir modifié ses conditions de rémunération et à indiquer qu'il demanderait réparation devant les juridictions compétentes, ne valait pas notification à la société Cafpi de son intention, non équivoque, de réclamer l'indemnité qui lui était due au titre de la rupture du contrat d'agence commerciale, la cour d'appel, qui en a méconnu les termes clairs et précis, a violé le principe susvisé ;

Par ces motifs, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs : Casse et annule, mais seulement en ce qu'il dit avoir lieu de réintégrer la somme de 74 462,60 euros dans la base de calcul des commissions de M. Steinmetz pour les années 2005 à 2009, condamne la société Cafpi à payer à M. Steinmetz la somme de 7 446 euros au titre de la réintégration de la taxe sur la valeur ajoutée et celle de 4 682,12 euros au titre de l'indemnité compensatrice de rupture, et statue sur l'article 700 du Code de procédure civile ainsi que sur les dépens, l'arrêt rendu le 16 octobre 2014, entre les parties, par la Cour d'appel de Paris ; remet, en conséquence, sur ces points, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la Cour d'appel de Paris, autrement composée.