CA Versailles, 12e ch. sect. 2, 21 février 2017, n° 15-00794
VERSAILLES
Arrêt
PARTIES
Demandeur :
Foncia Franchise (SAS), Foncia Groupe (SAS)
Défendeur :
CBM Méditerranée (SARL), Cardon (ès qual.)
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
Mme Meslin
Conseillers :
Mme Guillou, M. Ardisson
Avocats :
Mes Ricard, Gouache, Buquet-Roussel, Emanuelli
Vu l'appel déclaré le 28 janvier 2015 par la société par action simplifiée Foncia Franchise (société Foncia Franchise), contre le jugement prononcé le 18 décembre 2014 par le Tribunal de commerce de Nanterre, dans l'affaire qui l'oppose à la société à responsabilité limitée CBM Méditerranée (société CBM Méditerranée), d'une part et à Mme Bénédicte X, d'autre part ;
Vu l'appel déclaré le 24 février 2015 par Mme Bénédicte X ainsi que par la société CBM Méditerranée contre la même décision, intimant à la cause la société Foncia Franchise et la société par actions simplifiée Foncia Groupe (société Foncia Groupe) ;
Vu le jugement entrepris ;
Vu, enregistrées par ordre chronologique, les ultimes écritures notifiées par le réseau privé virtuel des avocats et présentées le :
- 31 mai 2016 par la société CBM Méditerranée et Me Didier Cardon, ès qualités de mandataire judiciaire, ainsi que par Mme Bénédicte X, intimées à titre principal et appelantes à titre incident,
- 6 juin 2016 par la société Foncia Franchise, appelante à titre principal et intimée à titre incident ainsi que par la société Foncia Groupe, intimée ;
Vu l'ensemble des actes de procédure ainsi que les éléments et pièces transmises par les parties.
Sur ce,
LA COUR se réfère au jugement entrepris pour un plus ample exposé des faits, de la procédure et des prétentions initiales de chaque partie. Il suffit, en synthèse, de rappeler les éléments constants suivants, tirés des écritures d'appel.
1. Données analytiques, factuelles et procédurales, du litige
Le Groupe Foncia, fondé en 1972 sous l'enseigne Franco-Suisse Gestion, qui le 31 décembre 2006, comprenait 300 agences et 116 cabinets pour 5 500 collaborateurs, a à cette période, souhaité créer une structure sous franchise dédiée à l'animation d'un réseau d'agences pour améliorer son maillage territorial et ainsi, favoriser sa croissance interne. La société Foncia Groupe qui ne disposait que d'un réseau de succursales a donc le 30 août 2006, créé la société Foncia Franchise, filiale à 100 % et tête du réseau des franchisés. Près d'une centaine de franchisés ont intégré ce réseau.
Après avoir travaillé au sein d'une agence intégrée située à Cannes durant plusieurs années en qualité de consultant immobilier et financier, Mme Bénédicte X s'est vue proposer la création et la direction d'une nouvelle agence Foncia située à Mandelieu. Elle y a exercé les fonctions de directrice de 2004 à 2009 et, en raison de ses performances, a obtenu courant 2007 le Foncia d'Or qui en interne, est la plus haute distinction en franchise.
Elle a ensuite par acte sous signatures privées du 7 septembre 2009, signé ès qualités de future gérante et au nom de la société CBM Méditerranée en formation à l'issue de pourparlers, un contrat de franchise d'une durée de cinq ans, renouvelable par tacite reconduction, lui permettant d'exercer <localité>, les activités de transaction et de location immobilière sous l'enseigne Foncia à l'exclusion des activités de gestion locative et de syndic. Elle a donc le 18 septembre suivant, souscrit un emprunt de 107 625 euros remboursable au taux de 3,9 % pour l'achat du droit au bail du local d'exercice de son activité et a ouvert les portes de son agence le 1er novembre 2009.
La société CBM Méditerranée et Mme Bénédicte X qui avaient exprimé de nombreuses doléances auprès du franchiseur ont, le 20 juin 2013, reçu de ce dernier, notification du non-renouvellement du contrat de franchise précité à son terme contractuel fixé au 6 septembre 2014, de manière concomitante à la signification du non-renouvellement du contrat à d'autres franchisés représentant 50 % du réseau.
Estimant que la société Foncia Franchise avait, avec la complicité active de la société Foncia Groupe, manqué à ses obligations de franchiseur durant l'exécution du contrat, la société CBM Méditerranée ainsi que son associée et gérante, Mme Bénédicte X, dûment autorisées à cette fin, les ont assignées à jour fixe le 5 mai 2014 devant le Tribunal de commerce de Nanterre aux fins de les entendre, au visa des anciens articles 1134, 1147 et 1149 ainsi que 1382 du Code civil devenus les articles 1103, 1104, 1193, 1231-1 et 1231-2 ainsi que 1240 du Code civil, condamner in solidum en indemnisation de leurs préjudices, corrélatifs à l'exécution fautive du contrat de franchise.
Ils ont ensuite, réitéré et complété leurs demandes, sous la récapitulation suivante:
- constater que la société Foncia Franchise n'a pas respecté ses engagements contractuels concernant la synergie des "trois métiers connexes" de l'immobilier et qu'elle n'a jamais mis Mme X et la société CBM Méditerranée en mesure d'accéder aux métiers de la gestion locative et de copropriété,
- constater que la société Foncia Franchise n'a pas respecté ses engagements contractuels concernant la synergie "inter-agences",
- constater que la société Foncia Franchise a institué un système discriminatoire au profit des agences intégrées de Cannes et des alentours détenues par la société Foncia Groupe, au détriment de l'agence de la société CBM Méditerranée,
- constater que la société Foncia Franchise n'a pas mis à jour son savoir-faire, en n'adressant ni à Mme X, ni à aucun autre franchisé, aucune note de références postérieurement au mois de janvier 2011, en n'actualisant pas ces dernières et en s'abstenant de faire évoluer l'offre logicielle Totalimmo dans un sens permettant de favoriser la synergie inter-agences et de garantir les droits des franchisés sur les lots remis en gestion à la société Foncia Groupe,
- constater que les sociétés Foncia Franchise et Foncia Groupe se sont montrées particulièrement déloyales en organisant des campagnes publicitaires financées par les redevances de communication versées par les franchisés, en s'abstenant de faire référence aux agences franchisées et notamment celle de la société CBM Méditerranée de Mme X sur son secteur,
- constater que les sociétés Foncia Franchise et Foncia Groupe se sont montrées particulièrement déloyales en excluant sciemment les agences franchisées de la rubrique "Vendre" du site Internet de l'enseigne, pour ne mentionner que les seuls agences intégrées
- constater que la société Foncia Franchise a méconnu son obligation d'assistance en s'abstenant d'assurer le suivi de l'exploitation de l'agence de la société de Mme X et des autres franchisés et en s'abstenant de développer le logiciel Totalimmo nécessaire à la gestion de l'activité quotidienne des agences,
- constater qu'elle a méconnu son obligation de promotion et d'animation du réseau de franchise en réalisant des campagnes publicitaires financées par les franchisées qui n'ont profité qu'aux agences intégrées détenues par la société Foncia Groupe et en s'abstenant de tenir une convention annuelle des franchisés comme c'est le cas pour les intégrés, de tenir ses engagements en termes de coaching, d'apporter une assistance juridique de la qualité de celle fournie aux agences intégrées, d'assurer des séances régulières de formation comme c'est le cas pour les intégrés etc,
- constater que la décision de non-renouvellement de 43 franchisés, soit plus de la moitié du réseau de franchise prise par la société Foncia Franchise au mois de juin 2013 (le 20 juin 2013 pour la demanderesse) corrobore l'abandon progressif du réseau de franchise par le franchiseur,
- constater que cet abandon progressif s'inscrit dans le cadre d'une décision politique de la société Foncia Groupe qui a créé le réseau de franchise Foncia dans le seul but d'accéder à de nouveaux territoires sur lesquels elle ne pouvait pas implanter des succursales, faute de disposer d'une trésorerie suffisante, ce en faisant financer l'ouverture de nouvelles agences par les nouveaux franchisés,
- constater que le non-renouvellement du contrat de franchise conclu par Madame X pour sa société CBM Méditerranée, comme c'est le cas pour les 42 autres franchisés non-renouvelés, a été décidé conjointement par les sociétés Foncia Franchise et Foncia Groupe dans le but de récupérer sans frais la clientèle, les prospects et les affaires créées par Madame X et les 42 autres franchisés sur leurs territoires respectifs,
- constater que le non-renouvellement du contrat de franchise de la société CBM Méditerranée et de 42 autres franchisés traduit une désaffection manifeste et progressive du franchiseur pour son réseau de franchise au profit d'une exploitation directe, via ses agences intégrées, circonstance que la cour d'appel de Paris qualifie de fautive, dire et juger que la société Foncia Franchise a abusé de son droit au non-renouvellement du contrat de franchise de la société CBM Méditerranée,
- dire et juger que la clause de non-réaffiliation stipulée dans les contrats de franchise est dépourvue de validité et privée de tout effet aux motifs que Foncia Franchise n'a pas transmis un savoir-faire effectif, mais simplement un savoir-faire d'une consistance limitée dès lors qu'il a été quasi intégralement employé pour favoriser le développement des agences intégrées et n'a pas été réactualisé, d'une part que ladite clause n'est pas nécessaire à la protection du savoir-faire de Foncia Franchise qui est d'ores et déjà protégée par les dispositions de l'article 18 du contrat de franchise, d'autre part et que rien n'empêche le franchiseur d'implanter une nouvelle agence Foncia sur le territoire initialement concédé,
- déclarer sans effet à l'égard de la société CBM Méditerranée et de Madame X, la clause de non-réaffiliation stipulée dans le contrat de franchise du 9 septembre 2009,
- condamner in solidum la société Foncia Franchise et la société Foncia Groupe à payer à la société CBM Méditerranée,
- 16 897, 80 euros correspondant au montant du droit d'entrée et des redevances indûment versées sans réelle contrepartie,
- 25 000 euros à titre de dommages intérêts pour atteinte à sa réputation commerciale,
- 210 637,60 euros à titre de dommages-intérêts pour la captation des ventes et mandats sur son territoire et à défaut la somme de 143 149,31 euros,
- 215 260,50 euros à titre de dommages intérêts au titre du manque à gagner lié à l'absence de synergie réseau pour la vente et à défaut la somme de 146 292,40 euros,
- 154 848,54 euros à titre de dommages intérêts au titre du manque à gagner lié à l'absence de synergie réseau pour la location et à défaut la somme de 105 235,07 euros,
- 31 134 euros à titre de dommages-intérêts correspondant au manque à gagner en termes de rémunération sur la gestion locative,
- 12 195,38 euros à titre de dommages intérêts correspondant au manque à gagner en termes de rémunération sur les honoraires de transaction et de location des lots de gestion apportés à Foncia,
- 30 000 euros au titre de la perte de chance de conclure le contrat de franchise avec une autre enseigne qui lui aurait permis d'exploiter et de développer son agences en bénéficiant de la double synergie métier et inter-cabinets,
- enjoindre aux sociétés Foncia Franchise et Foncia Groupe de respecter scrupuleusement les termes et l'esprit des dispositions contractuelles et des notes de référence pendant toute la durée du contrat restant à courir,
- condamner in solidum la société Foncia Franchise et la société Foncia Groupe à payer à Madame X les sommes de :
- 35 000 euros à titre de dommages intérêts au titre de l'atteinte à sa réputation professionnelle,
- 25 000 euros à titre de dommages intérêts au titre du préjudice moral subi,
- enjoindre à la société Foncia Franchise de restituer à la société CBM Méditerranée au terme du contrat de franchise, les données personnelles intégrales qu'elle a entré dans le logiciel Totalimmo au cours de l'exécution du contrat, sous une forme et sur un support qui en permette l'exploitation exhaustive immédiate, ce sous astreinte de 100 euros par jour de retard à compter du 8e jour suivant le terme du contrat,
- ordonner l'exécution provisoire du jugement à intervenir,
- condamner in solidum la société Foncia Franchise et Foncia Groupe à payer à la société CBM Méditerranée la somme de 8 000 euros au titre des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile,
- condamner la société Foncia Franchise et Foncia Groupe aux entiers dépens de l'instance.
Par jugement du 18 décembre 2014, le Tribunal de commerce de Nanterre a tranché le litige en ces termes :
- dit la SARL CBM Méditerranée et Madame Bénédicte X recevables en leurs demandes dirigées à l'encontre de la SAS Foncia Franchise,
- dit que la SAS Foncia Franchise n'a pas commis d'abus dans l'exercice de son droit de non-renouvellement du contrat de franchise de la SARL CBM Méditerranée,
- déclare la clause de non-réaffiliation dépourvue de validité et sans effet à l'égard de la SARL CBM Méditerranée et Madame Bénédicte X,
- condamne la SAS Foncia Franchise à payer à la SARL CBM Méditerranée, la somme forfaitaire de 12 000 euros à titre de dommages et intérêts pour le droit d'entrée et les redevances indûment versées sans réelle contrepartie, déboutant pour le surplus,
- déboute la SARL CBM Méditerranée de sa demande au titre de l'atteinte à sa réputation commerciale,
- condamne la SAS Foncia Franchise à payer à la SARL CBM Méditerranée la somme forfaitaire de 100 000 euros en réparation de son préjudice subi au titre de sa perte de chance de réaliser les ventes des biens situés sur son territoire d'intervention, déboutant pour le surplus
- déboute la SARL CBM Méditerranée de sa demande de dommages et intérêts formée au titre du manque à gagner lié à l'absence de synergie réseau pour la vente
- déboute la SARL CBM Méditerranée de sa demande de dommages et intérêts formée au titre du manque à gagner lié à l'absence de synergie réseau pour la location
- déboute la SARL CBM Méditerranée de sa demande au titre de la perte de chance d'accéder au métier de la gestion locative
- déboute la SARL CBM Méditerranée de sa demande de dommages et intérêts au titre du manque à gagner en termes de rémunération sur les honoraires de transaction et de locations des lots de gestion apportés à Foncia
- déboute la SARL CBM Méditerranée de sa demande au titre de la perte de chance de conclure le contrat de franchise avec une autre enseigne
- déboute Madame Bénédicte X de ses demandes formées au titre de l'atteinte à sa réputation professionnelle
- condamne la SAS Foncia Franchise à payer à Mme Bénédicte X la somme forfaitaire de 10 000 euros en réparation de son préjudice moral, déboutant pour le surplus
- ordonne l'exécution provisoire de la décision relative à la clause de non-réaffiliation mais dit n'y avoir lieu à l'ordonner pour ce qui concerne les autres décisions du présent jugement
- condamne la SARL Foncia Franchise à payer à la SARL CBM Méditerranée la somme de 3 000 euros au titre des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile
- reçoit les parties en leurs demandes plus amples ou contraires, les dit mal fondées, les en déboute
- met les dépens à la charge de la SAS Foncia Franchise.
Pour statuer ainsi, les premiers juges ont rappelé, qu'il est établi qu'il n'existe aucun droit au renouvellement d'un contrat à durée déterminée tel que celui souscrit entre les parties et que l'abus de ce droit de non-renouvellement est constitué par l'intention de nuire. Ils ont retenu que, dans les circonstances de cette espèce, le caractère abusif de l'exercice par la société Foncia Franchise de son droit au non-renouvellement ne peut se déduire des manquements ou de la mauvaise foi et déloyauté dans l'exécution du contrat allégués par la société CBM Méditerranée et Mme Bénédicte X et ont encore précisé, que les parties demanderesses ne rapportaient pas la preuve leur incombant, que la société Foncia Franchise avait trompé leur confiance dans l'exercice de ce droit en leur laissant penser que le contrat se poursuivrait au-delà de son terme. Ils ont ajouté, que l'annonce du non-renouvellement massif de 43 contrats de franchise révélait la volonté de la société Foncia Franchise, filiale de la société Foncia Groupe, de se désengager du réseau créé au bénéfice de l'exploitation directe des succursales de cette dernière et qu'ainsi, le franchiseur ne pouvait se prévaloir de la clause de non-réaffiliation envers la société CBM Méditerranée sans infliger à celle-ci une peine disproportionnée à ses intérêts légitimes. Ils ont déclaré cette clause de non-réaffiliation dépourvue de validité et sans effet envers les parties requérantes puis ont statué sur chaque chef de préjudice allégué en considération des éléments de preuve apportés.
La société Foncia Franchise a déclaré appel de cette décision. La société CBM Méditerranée et son associée et gérante, Mme Bénédicte X, ont ensuite également déclaré appel en intimant à la cause la société Foncia Groupe. Les affaires ont été jointes le 2 juillet 2015. La clôture de l'instruction de l'affaire a été ordonnée le 28 juin 2016 et l'affaire a été renvoyée à l'audience tenue en formation collégiale du 10 octobre suivant pour y être plaidée.
Par arrêt avant-dire-droit du 24 janvier 2017, la cour a ordonné la réouverture des débats à l'audience du 7 février suivant tenue en formation de juge rapporteur à l'effet de permettre aux parties intimées, sous peine de radiation éventuelle de cette affaire du rang des affaires en cours, de préciser la situation juridique exacte de la société à responsabilité limitée CBM Méditerranée (redressement judiciaire ou liquidation judiciaire.) à la date des débats et le cas échéant, de régulariser d'ultimes écritures tenant compte de cet aspect du litige soumis à la cour.
Selon l'extrait K Bis du 24 janvier 2017, la société CBM Méditerranée apparaît bien être en redressement judiciaire, Maître Didier Cardon étant son mandataire judiciaire.
A l'audience du 7 février 2017, l'affaire a été mise en délibéré à la date de ce jour.
2. Dispositifs des conclusions des parties
Vu les articles 455 et 954 du Code de procédure civile ;
La société Foncia Franchise et la société Foncia Groupe demande qu'il plaise à la cour de :
- vu les articles 1134, 1147, 1149 et 1184 du Code civil,
- vu l'article 1382 du Code civil,
- vu l'article 2224 du Code civil,
- vu l'article L. 110-4 du Code de commerce,
- vu l'article 122 du Code de procédure civile,
- vu l'article 515 du Code de procédure civile,
- confirmer le jugement du Tribunal de commerce de Nanterre du 18 décembre 2014 en ce qu'il a :
- dit que la SAS Foncia Franchise n'a pas commis d'abus dans l'exercice de son droit de non-renouvellement,
- débouté la SARL CBM Méditerranée de sa demande relative à l'atteinte à sa réputation commerciale,
- débouté la SARL CBM Méditerranée de sa demande relative au manque à gagner lié à l'absence de synergie réseau pour la vente,
- débouté la SARL CBM Méditerranée de sa demande relative au manque à gagner lié à l'absence de synergie réseau pour la location,
- débouté la SARL CBM Méditerranée de sa demande relative à la perte de chance d'accéder au métier de la gestion locative,
- débouté la SARL CBM Méditerranée de sa demande relative au manque à gagner en termes de rémunération sur les honoraires de transaction et de location des lots de gestion apportés à Foncia,
- débouté la SARL CBM Méditerranée de sa demande relative à la perte de conclure le contrat de franchise avec une autre enseigne,
- débouté Madame X de sa demande relative à l'atteinte à sa réputation professionnelle,
- réformer le jugement du Tribunal de commerce de Nanterre du 18 décembre 2014,
- et statuant à nouveau,
- dire et juger que la clause de non-affiliation est valide,
- constater que la SAS Foncia Franchise a exécuté son obligation d'assistance,
- constater que la société CBM Méditerranée a été indemnisée de l'absence d'assistance initiale alléguée,
- constater que la SARL CBM Méditerranée a bénéficié des contreparties des redevances,
- constater que la SARL CBM Méditerranée ne démontre pas la violation de la note de référence FR-Transpac 01/16 du 23 juillet 2009,
- constater que le Tribunal de commerce de Nanterre a méconnu le principe du contradictoire,
- constater que la société Foncia Franchise n'a commis aucune faute en notifiant le non-renouvellement du contrat de franchise 18 mois avant le terme du contrat,
- constater que la SARL CBM Méditerranée n'a pas réglé les redevances dues à la société Foncia Franchise pour un montant de 12 836 euros,
- en conséquence,
- autoriser la société Foncia Franchise à produire au passif de la société CBM Méditerranée la somme de 12 836 euros au titre des prestations fournies à la société CBM Méditerranée,
- débouter M. Didier Cardon agissant ès qualité de liquidateur judiciaire de la SARL CBM Méditerranée de sa demande relative à la nullité de la clause de non-affiliation,
- débouter Me Didier Cardon agissant ès qualité de liquidateur judiciaire de la SARL CBM Méditerranée de sa demande relative au droit d'entrée et aux redevances indûment versées sans réelle contrepartie,
- débouter Me Didier Cardon agissant ès qualité de liquidateur judiciaire de la SARL CBM Méditerranée de sa demande relative à la captation des ventes et des mandats sur son territoire,
- débouter Mme X de sa demande relative à son préjudice moral,
- condamner solidairement Me Didier Cardon agissant ès qualité de liquidateur judiciaire de la SARL CBM Méditerranée et Madame X à payer aux sociétés Foncia Franchise et Foncia Groupe la somme de 15 000 euros chacune au titre de l'article 700 du Code de procédure civile outre les entiers dépens,
- condamner solidairement Me Didier Cardon agissant ès qualité de liquidateur judiciaire de la SARL CBM Méditerranée et Madame X aux entiers dépens de l'instance.
Mme Bénédicte X, la société CBM Méditerranéenne et Me Didier Cardon, ès qualités, prient la cour de:
- vu les articles 1134, 1147, 1149 et 1184 du Code civil,
- vu l'article 1382 du Code civil,
- recevoir les appelantes en leur appel et les dire bien fondées,
- dire et juger les sociétés Foncia et Foncia Franchise irrecevables et subsidiairement mal fondées en toutes leurs demandes, fins et conclusions,
- confirmer la décision entreprise en ce qu'elle a reconnu le principe d'un préjudice pour CBM Méditerranée résultant de l'inexécution fautive par Foncia Franchise du contrat de franchise, lié particulièrement à un défaut d'assistance, mais la réformer de ce chef sur son montant,
- confirmer la décision entreprise en ce qu'elle a reconnu le principe du préjudice moral de Mme X, mais la réformer de ce chef sur son montant
- la confirmer en ce qu'elle a écarté toutes demandes de condamnation des sociétés Foncia et Foncia Franchise
- la confirmer derechef en ce qui concerne la condamnation de Foncia Franchise à payer à CBM Méditerranée 3 000 euros à titre de remboursement des frais irrépétibles, ainsi qu'aux entiers dépens.
- la confirmer enfin en ce qu'elle a annulé la clause de non-réaffiliation.
- la réformer pour le surplus
- statuant à nouveau,
- dire et juger que la société Foncia Franchise n'a pas respecté ses différentes obligations contractuelles (en termes d'assistance y compris juridique, de mise à jour du savoir-faire, d'organisation générale de la synergie, de défense des droits des franchisés, de promotion d'animation, d'amélioration des outils informatiques, de coaching, d'approvisionnement etc.)
- dire et juger qu'elle a institué un système discriminatoire au profit des agences intégrées en général détenues par la société Foncia Groupe et de Cannes et des alentours en particulier, au détriment de l'agence de la société CBM Méditerranée
- dire et juger que les sociétés Foncia Franchise et Foncia Groupe se sont montrées particulièrement déloyales dans le cadre de l'exécution du contrat de franchise
- dire et juger que la décision de non-renouvellement de 43 Franchisés, prise par la société Foncia Franchise au mois de juin 2013 (le 20 juin 2013 pour la demanderesse), au profit d'entités intégrées, corrobore l'abandon progressif du réseau de franchise par le Franchiseur et constitue un abus de la faculté de ne pas renouveler le contrat.
- dire et juger que le non-renouvellement du contrat de franchise conclu par Mme X pour CBM Méditerranée, ayant été décidé conjointement par les sociétés Foncia Franchise et Foncia Groupe, leur responsabilité commune est engagée.
- en conséquence,
- condamner in solidum la société Foncia Franchise et la société Foncia Groupe à payer :
- à la société CBM Méditerranée :
- 20 000 euros correspondant au montant du droit d'entrée et des redevances indûment versés sans réelle contrepartie.
- 25 000 euros à titre de dommages-intérêts pour atteinte à sa réputation commerciale.
- 210 637, 60 euros à titre de dommages-intérêts au titre de la perte d'honoraires liée aux ventes réalisées par les agences intégrées sur le territoire contractuel de l'agence CBM Méditerranée.
- 215 262, 50 à titre de dommages-intérêts au titre du manque à gagner lié à l'absence de synergie réseau pour la vente.
- 52 193, 28 euros à titre de dommages-intérêts au titre du manque à gagner lié à l'absence de synergie réseau pour la location.
- 31 134 euros à titre de dommages-intérêts correspondant au manque à gagner en termes de rémunération sur la gestion locative.
- 30 000 euros au titre de la perte de chance de conclure le contrat de franchise avec une autre enseigne qui lui aurait permis d'exploiter et de développer son agence en bénéficiant de la double synergie métier et inter-cabinets.
- condamner in solidum la société Foncia Franchise et la société Foncia Groupe à payer à Madame X les sommes de :
- 35 000 euros à titre de dommages intérêts au titre de l'atteinte à sa réputation professionnelle.
- 50 000 euros à titre de dommages intérêts au titre du préjudice moral subi.
- à titre subsidiaire : condamner les intimées à verser à CBM Méditerranée :
- 143 149, 31 euros à titre de dommages-intérêts au titre de la perte d'honoraires liée aux ventes réalisées et mandats captés par les agences intégrées sur son territoire contractuel.
- 146 292, 40 euros à titre de dommages intérêts au titre du manque à gagner lié à l'absence de synergie réseau pour la vente
- 56 542,72 euros à titre de dommages intérêts au titre du manque à gagner lié à l'absence de synergie réseau pour la location.
- en toute hypothèse
- condamner in solidum la société Foncia Franchise et Foncia Groupe à payer à la société CBM Méditerranée et à Mme X la somme de 7 500 euros chacune au titre des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile
- condamner la société Foncia Franchise et Foncia Groupe aux entiers dépens de l'instance qui seront recouvrés par Maître Buquet-Roussel, avocat, conformément aux dispositions de l'article 699 du Code de procédure civile.
LA COUR renvoie à chacune de ces écritures pour une synthèse argumentative de la position de chaque partie, dont l'essentiel sera développé dans les motifs de cet arrêt.
Cela étant exposé,
Vu l'extrait K Bis de la société CBM Méditerranée du 24 janvier 2017 ;
La cour est saisie d'une part, sur appel principal, de la question de la validité de la clause de non-ré affiliation insérée à l'article 24 du contrat de franchise dont s'agit et d'autre part, sur appel incident, du mérite d'une demande d'indemnisation de préjudices, prétendument subis tant par la société franchisée (société CBM Méditerranée) qu'à titre personnel par sa gérante (Mme Bénédicte X), imputant à un franchiseur (société Foncia Franchise) avec lequel celle-là a souscrit un contrat de franchise pour l'exploitation d'une agence sous enseigne Foncia sise <adresse> et dédiée à l'exercice d'une activité de transaction-location immobilière, le non-respect de nombre de ses obligations contractuelles durant l'exécution du contrat et partant, un abus dans l'exercice de son droit de non-renouvellement de ce dernier et d'autre part, au visa de l'ancien article 1382 du Code civil devenu article 1240 du même Code instituant le principe de la responsabilité extra-contractuelle, du bien-fondé de l'allégation de faute imputée à la société Foncia Groupe qualifiée par la société franchisée et son gérant, de véritable structure décisionnaire du Groupe Foncia, ayant prétendument assisté la société franchisée dans la commission des manquements contractuels constitutifs de cet abus.
Sur le mérite de l'appel principal
La clause de non-réaffiliation litigieuse, insérée au dernier alinéa de l'article 24 du contrat de franchise applicable entre les parties, s'énonce comme suit : "Pendant une année à compter du retrait de toutes les spécificités du concept Foncia, le Franchisé et le foncié ne pourront directement ou indirectement s'affilier, adhérer ou participer d'une manière quelconque à un groupement ayant une activité proche ou similaire à celle de Foncia pour exploiter ladite activité dans les locaux faisant l'objet des présentes stipulations contractuelles".
Les sociétés Foncia Franchise et Foncia Groupe objectent au soutien de leur demande de réformation de ce chef de disposition du jugement entrepris d'une part, que la validité d'une clause ne pouvant dépendre d'un événement postérieur à la formation du contrat puisque la nullité est la sanction judiciaire des conditions de formation d'un acte juridique, le Tribunal de commerce de Nanterre s'est pour la prononcer, nécessairement fondé à tort sur le non-renouvellement massif des contrats de franchise intervenu ultérieurement et d'autre part, que les conditions de validité d'une telle clause post-contractuelle sont quoi qu'il en soit, parfaitement réunies. Elle souligne que cette clause qui n'a pas pour effet d'interdire à l'ancien franchisé toute activité d'agence immobilière mais tend simplement à le contraindre à ne pas adhérer pendant un an à un nouveau réseau ou à déplacer le siège de son activité en cas d'adhésion à un autre réseau, poursuit un intérêt légitime dès lors que le savoir-faire dévoilé, constituant une valeur économique indépendante du réseau de franchise, nécessite toujours d'être protégé. Elles ajoutent qu'au demeurant, toute demande tendant à voir constater la nullité de cette clause est frappée de prescription puisque, exercée au-delà du délai de 5 ans.
Les parties intimées ne répondent pas précisément à cette prétention sauf à observer en p. 32 de leurs écritures, que la mauvaise foi et la déloyauté du franchiseur dans l'exécution du contrat de franchise doivent priver cette clause contractuelle d'effet.
La clause contractuelle d'affiliation qui ne peut être justifiée que par la protection des avantages concurrentiels offerts par le réseau, est censée protéger celui-ci, notamment contre la divulgation d'un savoir-faire ou des droits de propriété industrielle lui appartenant, ou encore préserver l'image de marque de ce réseau.
En l'espèce, la clause incriminée, limitée dans le temps et dans l'espace, apparaît être parfaitement légitime puisque, contrairement à ce qu'ont estimé les premiers juges, le réseau qu'elle vise à protéger concerne non seulement, les équipes franchisées mais également, les succursales et les cabinets indépendants de l'enseigne.
Le jugement entrepris sera donc infirmé de ce chef puisqu'il sera établi infra que la mauvaise foi du franchiseur n'est pas caractérisée.
Sur le grief d'exercice abusif par le franchiseur de son droit au non-renouvellement du contrat consenti à la société CBM Méditerranée
Cette société assistée de son mandataire judiciaire ès qualités ainsi que Mme Bénédicte X, cette dernière agissant au visa de l'ancien article 1382 du Code civil devenu 1240 dudit Code, arguent d'un exercice abusif du droit au non-renouvellement du contrat de franchise et imputent ainsi à faute de leurs adversaires, plusieurs manquements au devoir de loyauté contractuelle pour cause de discriminations commises à l'encontre de la société franchisée dès le début du contrat.
Elles expliquent que :
- en créant cette activité de franchise, le Groupe Foncia entendait en réalité uniquement accroître sa croissance interne sans financer l'installation de nouvelles agences, avec la perspective de récupérer, à bon compte et à court terme, les cabinets franchisés qui par surcroît devaient se concentrer sur la transaction, les demandes concernant la gestion locative ou la gestion de copropriétés restant réservées au Groupe Foncia lui-même ;
- si ce franchiseur a recruté à grande échelle, en promettant aux futurs franchisés et partant, à la société CBM Méditerranée, l'accès aux trois métiers de l'immobilier (vente-location, gestion locative, gestion de copropriété) ainsi qu'en témoignent les plaquettes de présentation qu'elle leur a remis, vantant, la synergie unique de ces métiers, l'absence de différence de traitement entre les agences intégrées (succursales) et les agences franchisées, la transmission d'un savoir-faire unique au réseau et la possibilité d'effectuer des opérations de gestion locative et/ou de copropriété sans apport financier, la centaine de franchisés ayant intégré le dit réseau, ont rapidement découvert une réalité différente ne laissant pas augurer du développement auquel ils pouvaient légitimement s'attendre, au regard de ce qui leur avait été explicitement promis;
- les premiers franchisés n'ont par ailleurs pas eu, la possibilité d'accéder à la gestion de la copropriété et tous, ont très rapidement perdu la possibilité d'accéder à l'activité de gestion locative alors que ces activités de syndic et de gestion, permettent à une agence de sécuriser son chiffre d'affaires et de valoriser son fonds de commerce, les activités de vente et de location étant en effet naturellement tributaires du marché et donc, aléatoires ;
- alors que les franchisés déploraient déjà l'absence de synergie des métiers et bien souvent, l'absence de synergie du réseau avec les agences intégrés, le non-renouvellement en bloc courant juin 2013, de 43 contrats de franchise conclus avec les agences les plus rentables a été annoncé, et les agences intégrées sont intervenues de plus en plus systématiquement sur les territoires réservés aux franchisés ;
- il s'infère de ces diverses circonstances que la société Foncia Franchise n'a en réalité, jamais eu l'intention de se comporter en véritable franchiseur et a simplement cherché à faire bénéficier les succursales et à travers celles-ci, la société Foncia Groupe, des courants d'affaires et de la clientèle créés par le travail consciencieux et les investissements effectués pendant plusieurs années au moyen d'une véritable "expropriation" des franchisés dont la société CBM Méditerranée ;
- les causes de cette expropriation sont à rechercher dans l'attitude du franchiseur au cours du contrat litigieux ainsi que dans les circonstances ayant précédé la notification du non-renouvellement ;
- la disparition du réseau Foncia est maintenant programmée à très brève échéance ;
- quoi qu'il en soit, les conséquences du non-renouvellement sont catastrophiques pour eux.
La société Foncia Franchise conteste avoir agi abusivement en décidant, à l'occasion de la réorganisation de son réseau de distribution, de ne pas renouveler nombre de contrats de franchise consentis à des professionnels de l'immobilier et notamment, celui la liant à la société CBM Méditerranée. La société Foncia Groupe observe quant à elle, ne pas pouvoir répondre de prétendues fautes de sa filiale dès lors qu'il n'est nullement établi qu'elle a, de quelle que manière que ce soit, aidé celle-ci à méconnaître ses obligations contractuelles envers cette société franchisée.
Le franchiseur relève que le contentieux l'opposant à la société CBM Méditerranée repose d'évidence, sur l'appréciation opportuniste, extensive et contraire aux règles posées par le droit de la concurrence, de sa protection territoriale par ce franchisé.
Il précise encore, que les premiers juges ont fait une juste application des règles de droit applicables en la matière puisqu'il est de principe, que le franchiseur a le droit de ne pas renouveler le contrat à l'arrivée du terme et que le contrôle de l'abus dans l'exercice de ce droit est, quels que soient les motifs ou l'absence de motifs donnés à l'appui de la rupture, limité à la brusquerie de celle-ci et à la croyance erronée du franchisé dans le renouvellement de son contrat et puisqu'en fait, les formes de la clause de dénonciation convenue ont été respectées. Il dément toute préparation voilée, par le jeu d'une discrimination effective entre ses succursales et les agences franchisées, d'un démantèlement brutal du réseau des franchisés, dans le seul but de satisfaire les intérêts des actionnaires du Groupe Foncia appartenant à deux fonds d'investissements.
Vu les anciens articles 1134, 1147 et 1184 du Code civil devenus les articles 1103, 1104, 1193, 1231-1, 1217, 1221, 1227 et 1228 dudit Code ainsi que 1382 du Code civil devenu article 1240 ;
La situation de tout franchisé est par nature précaire en ce sens, que le franchiseur a le droit de ne pas renouveler le contrat consenti sans avoir à motiver son refus dès lors, qu'il respecte de manière effective le délai de préavis contractuel et quoi qu'il en soit, un délai de préavis raisonnable et en ce sens également, que le franchisé indépendant n'a pas en fin de contrat, droit à une indemnité de clientèle.
En l'espèce, le délai de préavis contractuel de 6 mois apparaît avoir été parfaitement respecté, la société Foncia Franchise ayant en effet fait part de sa volonté de non-renouvellement plus de 14 mois avant le terme fixé.
Il est par ailleurs, dans la nature d'un réseau de franchise, de permettre au franchiseur de multiplier les établissements de la marque et d'en établir un maillage serré, sans qu'il ait à en trouver le financement. Le contrat de franchise est aussi par essence, un contrat de collaboration et de coopération pour la réalisation d'un but commun, ce but ne pouvant être que la création, la fidélisation ainsi que le développement de la clientèle. Toute création, développement ou animation d'un réseau de franchise, implique que le franchiseur s'engage à permettre la réussite commerciale de chaque franchisé tandis que, au-delà même des obligations spécifiées dans le contrat de liant à son partenaire, le franchiseur doit respecter et apporter les éléments inhérents à toute relation de cette nature et partant, une marque à titre d'enseigne, un savoir-faire ainsi qu'une assistance permanente. Cette dernière obligation s'analyse cependant en une obligation de moyens et suppose ainsi que le franchisé ait fait connaître des besoins précis.
Le fait, que la décision de non-renouvellement notifiée à la société CBM Méditerranée ait été concomitante à celles intervenues à destination de nombre de membres du même réseau et concerne 55 % du réseau franchisé Foncia outre 70 % de son chiffre d'affaires, ne saurait à lui seul, établir que la société Foncia Franchise s'est employée à utiliser les capacités financières du franchisé à l'unique fin de développer le maillage du territoire et d'assurer la profitabilité de ses succursales intéressées au détriment de ce franchisé et qu'elle a ainsi, exercé son activité de franchiseur de manière égoïste, sans rechercher le succès du réseau de franchise et partant, celui de l'agence CBM Méditerranée.
En l'espèce, le franchisé, qui ne sollicite pas au vu des infractions graves dont il se prévaut, la résiliation judiciaire du contrat litigieux aux torts du franchiseur, reproche en réalité à ce dernier, d'avoir par une approche délibérément discriminatoire et en favorisant avec outrance l'activité des sociétés dites succursalistes, adopté dès le début des relations contractuelles puis en cours de contrat, un comportement déloyal ayant pris la forme de nombreux manquements contractuels dont l'accumulation est révélatrice d'une intention de nuire ainsi que soutenu explicitement en p. 31 de ses écritures in fine ("les développements liés aux circonstances de la conclusion puis de l'exécution du contrat de franchise par la société Foncia Franchise démontrent que cette dernière a méconnu l'obligation de bonne foi pesant sur elle et a adopté à l'égard de ses franchisés en général, et de Madame X et de sa société en particulier, un comportement singulièrement déloyal qui confère un caractère particulièrement abusif au non-renouvellement du contrat de franchise") puis en p. 34 ("les multiples manquements de Foncia Franchise précédemment exposés, qui traduisent une désaffection évidente du franchiseur pour son réseau de franchisés, caractérisent à l'envi un tel abus (dans l'exercice du droit de non-renouvellement) " ; "ce constat (de désintérêt du franchiseur pour son réseau de franchisés), associé aux multiples manquements du [dit] franchisé (...) conduit à conférer un caractère abusif au non-renouvellement des contrats de franchise par la société Foncia Franchise et du contrat de franchise conclu avec la société de Madame X en particulier"), en cohérence avec les énonciations de la page 11 " Estimant que Foncia Franchise avait été défaillante dans l'exécution du contrat de franchise, avec la complicité active de Foncia Franchise, que par ailleurs le non-renouvellement du contrat était fautif, et que l'ensemble leur causait d'importants préjudices, les concluants, parallèlement à 21 autres franchisés, assignaient lesdites sociétés à bref délai devant le Tribunal de commerce de Nanterre (...)" (souligné par la cour).
Une simple déloyauté contractuelle dans l'exécution du contrat, à supposer qu'elle soit établie, ne peut ainsi s'analyser de manière intrinsèque en une intention de nuire susceptible de faire dégénérer le droit de non-renouvellement du contrat de franchise en abus sauf, à ruiner toute portée à ce droit qui ne se concevrait alors que comme un droit soumis à la bonne exécution par le franchiseur, de ses obligations contractuelles.
Quoi qu'il en soit, aucun des arguments avancés visant à établir la matérialité de fautes délibérées que la société Foncia Franchise aurait, directement et personnellement, commis au préjudice de la société CBM Méditerranée et partant de son associée et gérante, ne se trouve en l'espèce étayé de preuves suffisantes, précises, concrètes, sérieuses et convaincantes, d'une volonté intentionnelle de porter atteinte à la liberté d'action de cette société franchisée, commerçant indépendant. Les seuls éléments justifiés par les parties réclamantes se rapportent ainsi à des difficultés ponctuelles d'exécution du contrat litigieux exprimées sous la forme de doléances très générales et ayant principalement trait à, l'absence de synergie "métiers" et de synergie inter-agences ainsi qu'à la mise en place d'un système discriminatoire au sein du réseau, à l'absence de mise à jour du savoir-faire, à une relative inefficience du logiciel Totalimmo ou encore, à l'absence d'assistance des franchisés et de promotion et d'animation du réseau de franchise. Ils sont trop épars pour traduire ensemble, une stratégie délibérée de nuire du franchiseur et sont, pour la majorité d'entre eux, totalement inopérants sur le plan probatoire ou directement en contradiction avec d'autres éléments du dossier produits par la société CBM Méditerranée et Mme Bénédicte X elles-mêmes.
Alors que celles-ci soutiennent ainsi que le franchiseur ne les a pas assistés pour l'ouverture de l'agence litigieuse et ne leur a fourni aucun conseil, la copie de la lettre produite par elles en cote 10, adressée le 20 janvier 2010 au franchiseur, illustre l'équilibre délicat existant entre assistance et "flicage" d'une société relevant certes d'un réseau mais indépendante et établit par ailleurs, la réalité d'une assistance de la franchisée, au demeurant ancienne salariée de Foncia durant 10 ans, tant avant la signature du contrat de franchise que dès "fin novembre 2009" et donc, quelques semaines après l'ouverture. La société Foncia Franchise a enfin manifesté sa bonne volonté en répondant le 4 mars 2010 sous la plume de son représentant : "Je peux comprendre que vous n'ayez pas été satisfaits de notre assistance au démarrage. /Par conséquent, vous voudrez bien enregistrer que nous vous exonérons d'un trimestre de redevances sur l'année 2010. Il n'y aura donc pas de prélèvements effectués au cours des mois d'avril, mai et juin 2010. /Pour ce qui concerne de l'ensemble des reproches que vous portez à l'encontre de certains cabinets intégrés, sachez que la Direction Générale de Foncia met tout en œuvre pour que cessent de tels agissements " voir cote 12.
Ayant déjà été indemnisée en raison de l'insuffisance de l'assistance de son franchiseur à l'ouverture de son agence, en bénéficiant d'une exonération de huit mois de redevances sur l'année 2010, la société franchisée ne peut être déclarée fondée à obtenir une nouvelle indemnisation à ce titre, faute de pouvoir justifier d'un préjudice distinct de celui ayant déjà été réparé.
La société CBM Méditerranée ne saurait être davantage suivie dans sa réclamation tendant à voir consacrer la faute du franchiseur à qui elle fait grief de ne pas lui avoir permis d'accéder au métier de la gestion locative alors que ce dernier n'a pas été choisi lors de la signature du contrat et, qu'aucun élément ou circonstance du dossier n'établit que la promesse de cet accès était certaine ni que l'autorisation du franchiseur, nécessaire au vu des stipulations contractuelles (voir article 4) était acquise. Aucun élément du dossier, nonobstant la présentation très générale de la plaquette de présentation de l'enseigne Foncia remise au franchisé, ne permet au demeurant de soutenir que la société Foncia Franchise a entretenu la société CBM Méditerranée, dans l'illusion que la demande d'autorisation de ce complément d'activité n'était qu'une formalité ni que l'opportunité de permettre l'accès du franchisé à cette activité, se soit dans la réalité, présentée au franchiseur.
Le franchisé ne rapporte pas non plus la preuve que faute d'avoir disposé d'un logiciel suffisamment performant intitulé Totalimmo, répondant aux exigences de l'enseigne pour l'exploitation de son agence, il est aujourd'hui fondé à imputer ainsi à faute du franchiseur, un manquement à son obligation d'assistance ou de mise à disposition du savoir-faire Foncia lui ayant occasionné un préjudice spécifique. Il est en effet constant que la société CBM Méditerranée a signé un contrat de prestation de service informatique avec la société tierce Seiitra, éditeur du logiciel Totalimmo et filiale à 100 % de la société Foncia Groupe et elle ne justifie pas s'être, durant l'exécution de ce contrat, plainte auprès de cette société tierce de dysfonctionnements précis, auxquels il n'aurait pas été remédié - voir cote 27.
La société CBM Méditerranée et sa gérante font encore vainement reproche au franchiseur de ne pas avoir mis à jour son savoir-faire en expliquant que celui-ci relevait de l'essence des relations contractuelles. Elles observent ne plus avoir reçu aucune note de référence au-delà de celle-du 28 janvier 2011 et affirment que le franchiseur s'est par ailleurs abstenu de faire évoluer l'offre logicielle Totalimmo dans un sens permettant de favoriser la synergie inter-agences et de garantir les droits de franchisés sur les lots remis en gestion à la société Foncia Groupe. Outre qu'il a été répondu sur ce dernier grief, au paragraphe précédent des motifs du présent arrêt, il peut être rappelé que le sérieux d'un réseau de franchise ne se mesure pas à la fréquence des mises à jour de son savoir-faire mais à la qualité de ce dernier et que quoi qu'il en soit, dans les circonstances de cette espèce, le franchiseur apparaît avoir procédé à une actualisation régulière à destination de l'ensemble du réseau et partant, envers la société CBM Méditerranée grâce à la mise en place d'opérations de communication (voir cotes 30, 39 et 41), de mise à disposition et d'actualisation du dispositif Foncia Premium (voir cotes 24, 35 et 50 et encore), de l'organisation de séminaires et de conventions du réseau (voir cotes 38, 45 et 48 et encore 79 à 82 outre), la formation initiale du franchisé et de son personnel - voir cote 106. La société Foncia Franchise justifie ainsi que la société CBM Méditerranée a pu, pendant la durée d'exécution du contrat, bénéficier d'une transmission régulière du savoir-faire de l'enseigne, en ayant participé à la réunion du cercle dirigeant du 20 juin 2013 (voir document en cote 66) et à l'opération "40 ans Franchise Foncia" (voir cotes 39 et 77).
La société Foncia Franchise répond aussi par des documents idoines, aux griefs avancés par ses adversaires au demeurant sans preuve concrète de défaut d'assistance permanente et justifie ainsi, avoir développé la synergie inter-agences sans discrimination particulière entre l'agence franchisée et les agences intégrées du même territoire ne serait-ce que par la mise à disposition du logiciel Totalimmo tendant à permettre la mise en œuvre de la synergie inter-agences, avoir organisé des conventions annuelles - voir cotes 38 et 48, avoir veillé à la mise à disposition d'animateurs réseau pour assister la société CBM Méditerranée (voir cote 110) comme à une assistance juridique régulière (voir cotes 103-105, 120-124).
La société CBM Méditerranée n'établit pas enfin, que le franchiseur a enfreint ses obligations contractuelles en raison d'atteintes précises qui auraient été portées par des agences intégrées ou par d'autres franchisés à son exclusivité territoriale et qu'elles lui auraient révélées en cours de contrat sans obtenir aucune assistance. Le contrat litigieux accorde en effet à la société franchisée, une exclusivité territoriale d'enseigne limitée à l'interdiction de la création ou de l'acquisition, pour la durée des relations contractuelles, de cabinets immobiliers sous l'enseigne Foncia par le franchiseur ou par des tiers au contrat mais ne limite aucune vente passive de sorte, que la société CBM Méditerranée pouvait prendre des mandats en dehors de son territoire tandis que le franchiseur, comme les succursales sous enseigne Foncia, pouvaient réaliser sur le territoire de la société CBM Méditerranée des ventes passives. De ces points de vue, il n'est ni allégué ni établi que des agences intégrées sous l'enseigne Foncia se sont implantées sur le territoire concédé, lors de l'exécution des relations contractuelles avec la société CBM Méditerranée ni que les ventes invoquées comme ayant enfreint la loi contractuelle aient été des ventes actives.
Il suit de tout ce qui précède, que le jugement entrepris doit être confirmé en ce qu'il a écarté tout abus de la société Foncia Franchise dans l'exercice de son droit de non-renouvellement puisqu'aucune circonstance ou élément porté aux débats ne permet de considérer que la société Foncia Franchise a réellement entretenu la société CBM Méditerranée dans l'illusion que le renouvellement du contrat qui lui avait été consenti était acquis. Il ressort ainsi du contrat signé entre les parties que la clause 22 précise in fine : "le contrat se renouvellera par tacite reconduction par période de cinq ans, sauf notification d'une volonté de résiliation par l'une ou l'autre des parties, par lettre recommandée avec accusé de réception, six mois au moins avant chaque terme (...)".
La société CBM Méditerranée ne contestant par ailleurs pas, avoir utilisé la marque Foncia au cours de l'exécution du contrat et ayant déjà été indemnisée pour l'insuffisance de l'assistance initiale, n'est pas davantage fondée à obtenir la restitution du droit d'entrée pour défaut de contrepartie, ce chef de demande pouvant au demeurant, ainsi que le fait remarquer le franchisé, s'analyser en une demande de nullité pour défaut de cause ne disant pas son nom et partant, frappée de prescription.
Sur l'ensemble de ces constatations et pour ces raisons, le grief d'abus sera écarté et la société CBM Méditerranée ainsi que Mme Bénédicte X déboutées de leurs demandes respectives d'indemnisation de préjudices.
Sur les demandes formées contre la société Foncia Groupe
Aucune faute contractuelle n'étant retenue à l'encontre de la société Foncia Franchise, la demande formée contre la société Foncia Groupe à qui il est reproché d'en avoir facilité la commission devient sans objet, et sera écartée.
Sur les dépens
Vu les articles 696 et 699 du Code de procédure civile ;
La société CBM Méditerranée et Maître Didier Cardon ès qualités de mandataire judiciaire à la procédure de redressement judiciaire ouverte au nom de cette société ainsi que Mme Bénédicte X seront in solidum condamnés aux entiers dépens de première instance et d'appel avec cette précision que les dépens supportés par la société CBM Méditerranée et Maître Didier Cardon ès qualités seront recouvrés comme en matière de procédure collective et avec, pour ceux d'appel, faculté de recouvrement direct en faveur des avocats qui peuvent y prétendre.
Par ces motifs : LA COUR, Statuant en audience publique et par arrêt contradictoire, Confirme le jugement entrepris en toutes ses dispositions sauf en ce qu'il a déclaré la clause de non-réaffiliation sans effet et sans portée à l'égard de la société à responsabilité limitée CBM Méditerranée et en ce qu'il a condamné la société par actions simplifiée Foncia Franchise à payer à la société à responsabilité limitée CBM Méditerranée, la somme forfaitaire de douze mille euros (12 000 euros) à titre de dommages et intérêts pour le droit d'entrée et les redevances indûment versées sans réelle contrepartie outre, la somme forfaitaire de cent mille euros (100 000 euros) en réparation de son préjudice subi au titre de sa perte de chance de réaliser les ventes des biens situés sur son territoire d'intervention et à payer à Mme Bénédicte X la somme forfaitaire de dix mille euros (10 000 euros) en réparation de son préjudice moral et encore en ce qu'il a condamné la société par actions simplifiée Foncia Franchise à payer à la société à responsabilité CBM Méditerranée une indemnité de trois mille euros (3 000 euros) à titre de frais irrépétibles ainsi qu'au paiement des entiers dépens. Statuant de nouveau, du seul chef des dispositions réformées. Et y ajoutant : Déboute la société à responsabilité limitée CBM Méditerranée et Maître Didier Cardon ès qualités de mandataire judiciaire au redressement judiciaire de cette société ainsi que Mme Bénédicte X de l'ensemble de leurs demandes. Condamne in solidum la société à responsabilité limitée CBM Méditerranée et Maître Didier Cardon ès qualités de mandataire judiciaire au redressement judiciaire de cette société ainsi que Mme Bénédicte X aux entiers dépens de première instance et d'appel, avec cette précision que les dépens supportés par la société à responsabilité limitée CBM Méditerranée et Maître Didier Cardon ès qualités seront recouvrés comme en matière de procédure collective et avec, pour ceux d'appel, faculté de recouvrement direct en faveur des avocats qui peuvent y prétendre. Déboute les parties de leurs demandes plus amples ou contraires.