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Décisions

CA Paris, Pôle 5 ch. 1, 7 mars 2017, n° 15-10150

PARIS

Arrêt

PARTIES

Demandeur :

Gugustar France (SARL), Alain Bellor (SARL), Tournesol (SARL)

Défendeur :

La Coque de Nacre (SAS), Shanghai Jiacheng Importe & Export Trade (Sté)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Rajbaut

Conseillers :

M. Peyron, Mme Douillet

Avocats :

Mes Baechz, Demard, Legrand

TGI Paris, du 27 mars 2015

27 mars 2015

La société La Coque de Nacre, créée en 1954, a pour activité la création, la fabrication et le négoce de bijoux. Elle indique qu'elle est titulaire de droits d'auteur sur un pendentif représentant un chaton (référence S 1859), ayant fait l'objet d'un dépôt sous enveloppe SOLEAU, le 27 novembre 2009, sous le n° 366746 161 109, ouverte par huissier suivant procès-verbal de constat du 29 novembre 2012, bijou qu'elle commercialise sous son nom, en version argent sous les références 170740 et 145070 et en version plaqué or sous la référence 2707400.

La société Alain Bellor est spécialisée dans le commerce de détail de bijoux et de montres et exploite, à cette fin, un site internet www.vente-secret.com. Elle a déposé en 2007 le nom de domaine gugustar.com.montres. Elle a été un client de la société La Coque de Nacre

La société Gugustar France (ci-après, la société Gugustar), créée le 1er avril 2011, qui a le même gérant que la société Alain Bellor, a pour activité l'achat et la vente en gros des mêmes produits que la société Alain Bellor.

Ayant découvert que la société Gugustar présentait un catalogue général 2013/2014 comprenant un grand nombre de bijoux prêtant, selon elle, à confusion avec ceux qu'elle commercialise, parmi lesquels figurait le pendentif susvisé représentant un chaton, et que ces mêmes produits étaient offerts à la vente sur le site marchand gugustar.com, sur lequel la société de droit chinois Shangai Jiacheng Import & Export Trade Co, Ltd, (ci-après, la société Shangai Jiacheng) apparaissait comme le fabricant, la société La Coque de Nacre a fait procéder, le 26 septembre 2012, à un procès-verbal de constat du catalogue Gugustar puis, le 2 octobre 2012, à un procès-verbal de constat sur internet, puis, les 16 octobre et 12 décembre 2012, à un procès-verbal de mise sous scellés d'échantillons de produits livrés, dont une partie, également mise sous scellé, a été adressée au laboratoire d'analyse Cetehor qui a conclu à une épaisseur de la couche d'alliage d'or inférieure à 1,5 µm et à l'absence de poinçon.

C'est dans ces conditions, que la société La Coque de Nacre, par acte d'huissier du 30 janvier 2013, a fait assigner devant le tribunal de grande instance de Paris, les sociétés Alain Bellor,

Gugustar et Shanghai Jiacheng en contrefaçon de droits d'auteur, concurrence déloyale et parasitisme.

Par acte d'huissier du 2 avril 2014, la société La Coque de Nacre, indiquant avoir été informée que la société Gugustar avait été placée en liquidation, et que Mr Billy Z avait été désigné en qualité de liquidateur amiable, a assigné ce dernier en intervention forcée.

Les deux procédures ont été jointes.

Dans un jugement du 27 mars 2015, le TGI a notamment :

- dit n'y avoir lieu à mise hors de cause des sociétés Alain Bellor, Gugustar et Shanghai Jiacheng, - rejeté les demandes au titre de la contrefaçon de droit d'auteur,

- dit qu'en commercialisant et en offrant à la vente des bijoux identiques ou similaires à ceux de la société Coque De Nacre, en grandes quantités, dans le catalogue Gugustar 2013/2014, ainsi que sur les sites internets gugustar.com et gugustar.en.alibaba.com, les sociétés Alain Bellor, Gugustar et Shanghai Jiacheng ont commis des actes de concurrence déloyale et de parasitisme au préjudice de la société La Coque de Nacre,

- interdit aux sociétés Alain Bellor, Gugustar et Shanghai Jiacheng la poursuite de ces agissements, et ce, sous astreinte de 350 euros par infraction constatée à l'expiration d'un délai d'un mois à compter de la signification du présent jugement,

- dit que le tribunal restait compétent pour la liquidation des astreintes,

- condamné in solidum les sociétés Alain Bellor, Gugustar et Shanghai Jiacheng à verser à la société La Coque de Nacre une somme de 50 000 euros au titre du préjudice résultant des actes de concurrence déloyale et parasitisme,

- ordonné la publication du jugement dans trois périodiques au choix de la société La Coque de Nacre et aux frais des sociétés Alain Bellor, Gugustar et Shanghai Jiacheng dans la limite de 3 500 euros H.T. par publication,

- rejeté le surplus des demandes,

- condamné in solidum les sociétés Alain Bellor, Gugustar et Shanghai Jiacheng aux dépens et au paiement à la société La Coque de Nacre de la somme de 5 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, outre les frais des constats d'huissier des 26 septembre, 2 octobre, 16 octobre, 29 novembre et 12 décembre 2012.

Le 20 mai 2015, la société Alain Bellor, la société Gugustar et Mr Z , le liquidateur amiable de cette dernière, ont interjeté appel de ce jugement.

Par exploit du 22 décembre 2015, la société La Coque de Nacre a assigné en intervention forcée la société Tournesol, dont le gérant est également Mr Z , le tribunal ayant retenu dans son jugement que le site internet www.gugustar.com était, au jour du jugement, exploité par cette société.

Dans leurs dernières conclusions, numérotées 2, transmises le 28 juin 2016, les appelants, poursuivant l'infirmation du jugement si ce n'est en ce qu'il a rejeté les demandes fondées sur la contrefaçon de droits d'auteur, demandent à la cour :

- de constater que la preuve de l'implication des sociétés Alain Bellor et Gugustar dans les faits reprochés n'est pas rapportée et, en conséquence, de prononcer leur mise hors de cause,

- de débouter la société La Coque de Nacre de toutes ses demandes, comme étant irrecevables et à tout le moins mal fondées,

- de la condamner à verser à la société Alain Bellor la somme de 150 000 euros en réparation de son préjudice,

- de la condamner à verser à chacune des sociétés Alain Bellor et Gugustar une somme de 15 000 euros pour procédure abusive,

- de la condamner à verser aux sociétés Alain Bellor et Gugustar la somme globale de 20 000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

Dans ses dernières conclusions, numérotées 3, transmises le 13 mai 2016, la société La Coque de Nacre, intimée et appelante incidente, demande à la cour :

- de confirmer le jugement en ce qu'il a,

- dit n'y avoir lieu à mise hors de cause des sociétés Alain Bellor, Gugustar et Shanghai Jiacheng,

- dit qu'en commercialisant et en offrant à la vente des bijoux identiques ou similaires à ceux de la société Coque De Nacre, en grandes quantités, dans le catalogue Gugustar 2013/2014, ainsi que sur les sites internet gugustar.com et gugustar.en.alibaba.com, les sociétés Alain Bellor, Gugustar et Shanghai Jiacheng ont commis des actes de concurrence déloyale et de parasitisme à son préjudice,

- interdit aux sociétés Alain Bellor, Gugustar et Shanghai Jiacheng la poursuite de ces agissements, sous astreinte de 350 euros par infraction constatée à l'expiration d'un délai d'un mois à compter de la signification du jugement,

- condamné in solidum les sociétés Alain Bellor, Gugustar et Shanghai Jiacheng à réparer le préjudice ayant résulté des actes de concurrence déloyale et de parasitisme,

- ordonné la publication du jugement dans trois périodiques au choix de la société La Coque de Nacre et aux frais des sociétés Alain Bellor, Gugustar et Shanghai Jiacheng dans la limite de 3 500 euros H.T. par publication,

- condamné in solidum les sociétés Alain Bellor, Gugustar et Shanghai Jiacheng aux dépens de première instance et au paiement d'une somme de 5 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, outre les frais de constat d'huissier des 26 septembre, 2 octobre, 16 octobre, 29 novembre et 12 décembre 2012,

- d'infirmer le jugement pour le surplus et de,

- déclarer les sociétés Alain Bellor et Gugustar, prise en la personne de son liquidateur amiable, Mr Z , ès qualités, irrecevables et en tout cas mal fondés en toutes leurs demandes et les en débouter,

- déclarer la société Tournesol irrecevable et en tout cas mal fondée en toutes ses demandes et l'en débouter ;

- la déclarer recevable et bien fondée en sa demande d'intervention forcée à l'encontre de la société Tournesol ;

- juger que les sociétés Alain Bellor, Gugustar, celle-ci prise en la personne de son liquidateur amiable ès qualités, Tournesol et Shanghai Jiacheng se sont rendues coupables à son préjudice de contrefaçon de droits d'auteur sur le pendentif représentant un chaton (référence S1859), ayant fait l'objet d'un dépôt sous enveloppe Soleau le 27 novembre 2009 sous le n° 366746 161109,

- de les condamner in solidum à lui verser la somme de 75 000 euros à titre de dommages et intérêts, du chef de contrefaçon,

- de juger que Mr Z , ès qualités de liquidateur amiable de la société Gugustar, et la société Tournesol sont coupables des faits de concurrence déloyale et parasitaire retenus à l'encontre des sociétés Alain Bellor, Gugustar et Shanghai Jiacheng , résultant de l'offre à la vente et de la vente au moyen de références inversées d'une gamme de produits identiques ou similaires à ceux figurant dans le catalogue général La Coque de Nacre Bijoux CN 2011-2012, non conformes à la réglementation en vigueur, et du détournement de ses investissements,

- de juger que la mesure d'interdiction sous astreinte concernera également Mr Z ès qualités et la société Tournesol, portera sur tous les bijoux identiques ou similaires à ceux figurant dans le catalogue général La Coque de Nacre Bijoux CN 2011-2012 reproduits dans le catalogue Gugustar 2013/2014 (ayant fait l'objet du procès-verbal de constat du 26 septembre 2012) et présentés sur les sites gugustar.com et gugustar.en.alibaba.com (ayant fait l'objet des procès-verbaux de constat des 2 octobre 2012 et 16 novembre 2015) et que l'infraction s'entendra de la fabrication, de l'importation, de l'offre en vente sur tous supports ou de la vente d'un des produits en cause,

- de condamner in solidum les sociétés Alain Bellor, Gugustar, prise en la personne de son liquidateur amiable, Mr Z , ès qualités, Tournesol et Shanghai Jiacheng à lui verser la somme de 300 000 euros à titre de dommages et intérêts, du chef de concurrence déloyale et parasitaire,

- d'ordonner le retrait du marché et la destruction devant huissier, sous son contrôle et aux frais des sociétés Alain Bellor, Gugustar, celle-ci prise en la personne de son liquidateur amiable ès qualités, Tournesol et Shanghai Jiacheng tenus in solidum, de tous les articles contrefaisants et/ou constitutifs de concurrence déloyale et parasitaire, ainsi que des moules servant à leur fabrication, et ce sous astreinte de 1 500 euros par jour de retard à compter de la signification de l'arrêt à intervenir,

- d'ordonner le rappel des circuits commerciaux et la destruction devant huissier, sous le contrôle de la société La Coque de Nacre et aux frais des sociétés Alain Bellor, Gugustar France, celle-ci prise en la personne de son liquidateur amiable ès qualités, Tournesol et Shanghai Jiachengtenus in solidum, de tous les articles contrefaisants et/ou constitutifs de concurrence déloyale et parasitaire, et ce sous astreinte de 1500 euros par jour de retard à compter de la signification de l'arrêt à intervenir,

- de dire la cour se réservera la liquidation des astreintes,

- de dire que les publications judiciaires ordonnées par le tribunal dans son jugement du 27 mars 2015 tiendront compte du présent arrêt,

- d'ordonner également la publication, pendant une durée de 30 jours, de l'arrêt à intervenir in extenso ou par extraits sur la page d'accueil des sites Internet accessibles aux adresses www.gugustar.com, www.gugustar.en.alibaba.com et www.vente-secret.com, au choix de la société La Coque de Nacre et aux frais avancés des sociétés Alain Bellor, Gugustar prise en la personne de son liquidateur amiable, de Mr Z ès qualités, et des sociétés Tournesol et Shanghai Jiachengtenus in solidum, sous astreinte de 5 000 euros par jour de retard à compter de la signification de l'arrêt à intervenir,

- de condamner in solidum les sociétés Shanghai Jiacheng, Alain Bellor, Gugustar prise en la personne de son liquidateur amiable, Tournesol et Mr Z ès qualités, à verser à la société La Coque de Nacre la somme de 20 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.

Dans ses conclusions transmises le 28 juin 2016, la société Tournesol demande à la cour :

- à titre principal, de déclarer irrecevable sa mise en cause en intervention forcée,

- à titre subsidiaire, de prononcer sa mise hors de cause,

- en tout état de cause, de débouter la société La Coque de Nacre de toutes ses demandes, et de la condamner à lui payer,

- 20 000 euros pour procédure abusive,

- 20 000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

La société Shanghai Jiacheng n'a pas constitué avocat.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 11 octobre 2016.

Motifs de la décision

Considérant qu'en application des dispositions de l'article 455 du code de procédure civile, il est expressément renvoyé, pour un exposé exhaustif des prétentions et moyens des parties, aux conclusions écrites qu'elles ont transmises, telles que susvisées ;

Sur la recevabilité de la mise en cause de la société Tournesol en appel ;

Considérant que la société Tournesol conclut à l'irrecevabilité de sa mise en cause en intervention forcée devant la cour par la société La Coque de Nacre, faisant valoir que celle-ci disposait, dès la première instance, de tous les éléments lui permettant de la mettre en cause devant le tribunal, de sorte qu'il n'y a pas d'évolution du litige, au sens de l'article 555 du code de procédure civile ;

Que la société La Coque de Nacre répond qu'elle a toujours soutenu devant le tribunal et qu'elle soutient toujours devant la cour que le site internet www.gugustar.com est édité par la société Shangai Jiacheng et que le tribunal ayant toutefois considéré que ce site était, au jour du jugement, exploité par la société Tournesol, il existe une circonstance de droit, née du jugement, qui modifie les données juridiques du litige et justifie, en cause d'appel, l'intervention forcée de la société Tournesol ; qu'elle ajoute qu'il existe également une circonstance de fait, postérieure au jugement, qui justifie cette intervention forcée dès lors que de nombreux bijoux portant atteinte à ses droits d'auteur et/ou constitutifs de concurrence déloyale et parasitaire étaient encore offerts à la vente et vendus sur le site litigieux en décembre 2015 ;

Considérant qu'aux termes de l'article 554 du code de procédure civile, peuvent intervenir en cause d'appel dès lors qu'elles y ont intérêt les personnes qui n'ont été ni parties, ni représentées en première instance ou qui y ont figuré en une autre qualité ;

Que l'article 555 du même code prévoit que ces mêmes personnes peuvent être appelées devant la cour, même aux fins de condamnation, quand l'évolution du litige implique leur mise en cause ;

Que l'évolution du litige impliquant la mise en cause d'un tiers devant la cour d'appel n'est caractérisée que par la révélation d'une circonstance de fait ou de droit, née du jugement ou postérieure à celui-ci, modifiant les données juridiques du litige ;

Que la notion d'évolution du litige doit être d'interprétation stricte eu égard au principe de double degré de juridiction ;

Qu'en l'espèce, la société La Coque de Nacre indiquait dans ses conclusions de première instance qu'une incertitude existait sur l'identité de la société exploitant le site www.gugustar.com (la société Tournesol serait le nouvel exploitant du site gugustar.com et le propriétaire de l'enseigne commerciale Gugustar (pièces 27A et B)) et produisait devant le tribunal des pièces (captures d'écran des sites www. gugustar.com et www. gugustar.com.uk) sur lesquelles figurait le nom de la société Tournesol ;

Qu'il apparaît ainsi que la société La Coque de Nacre disposait, dès avant le jugement qui a considéré que le site internet www.gugustar.com était désormais exploité par la société Tournesol, des éléments lui permettant de mettre en cause cette société devant le tribunal ;

Que, dans ces conditions, son appel en intervention forcée de la société Tournesol devant la cour sera jugé irrecevable ;

Sur la demande de mise hors de cause des sociétés Alain Bellor et Gugustar ;

Considérant que, comme en première instance, les sociétés Alain Bellor et Gugustar, celle-ci, en appel, en la personne de son liquidateur amiable, demandent leur mise hors de cause, faisant valoir que les pièces produites aux débats ne prouvent pas leur implication dans la commercialisation des produits litigieux et qu'il n'y a lieu de prononcer des condamnation solidaire avec la société Shangai Jiacheng qui apparaît seule sur les pièces produites aux débats par la société La Coque de Nacre ;

Considérant que, comme le tribunal, la cour estime que l'éventuelle responsabilité de ces deux sociétés ne peut être appréciée avant l'examen au fond des faits de contrefaçon et de concurrence déloyale et parasitaire reprochés ; qu'il en est de même des modalités d'une éventuelle condamnation ;

Sur la contrefaçon de droits d'auteur sur le pendentif représentant un chaton (référence S 1859) ;

Sur la titularité des droits d'auteur ;

Considérant que les sociétés appelantes soutiennent que la société La Coque de Nacre ne prouve pas avoir créé le pendentif revendiqué et n'explique pas les conditions de création dudit pendentif ;

Considérant que c'est par des motifs pertinents et exacts, adoptés par la cour, que les premiers juges ont estimé que la société La Coque de Nacre, qui justifiait de ce que le pendentif chaton revendiqué avait fait l'objet d'un dépôt sous enveloppe Soleau le 27 novembre 2009 et démontrait avoir exploité le pendentif de façon paisible et non équivoque, sous son nom, dans ses catalogues 2011 et 2012, dans ses différentes versions, était présumée, en l'absence de revendication du ou des auteur(s) , titulaires des droits patrimoniaux d'auteur sur le pendentif ;

Que le jugement sera confirmé de ce chef ;

Sur l'originalité ;

Considérant que la société La Coque de Nacre soutient que le pendentif chaton revendiqué est original en ce qu'il reflète un effort créatif traduisant la personnalité de son auteur, le bijou en forme de chaton s'affranchissant radicalement du respect des proportions d'un chaton tel qu'existant dans la nature, la représentation du museau et de l'ensemble de la tête étant stylisée et l'expression souriante du visage étant à l'évidence anthropomorphique ;

Qu'elle argue que l'appréciation de l'originalité doit s'effectuer de manière globale, en fonction de l'aspect d'ensemble produit par la combinaison des différents éléments de l''œuvre, et non par l'examen de chacun de ces éléments pris individuellement, et ;

Que le pendentif qu'elle revendique présente une combinaison arbitraire de caractéristiques originales qui le démarque nettement de l'art antérieur ;

Que les appelants soutiennent que c'est à juste raison que le tribunal, après avoir étudié chaque élément du pendentif et pris en compte la combinaison de tous ces éléments, a estimé que le pendentif était dénué d'originalité ;

Considérant que l'article L. 112-1 du code de la propriété intellectuelle protège par le droit d'auteur toutes les 'œuvres de l'esprit, quels qu'en soient le genre, la forme d'expression, le mérite ou la destination, pourvu qu'elles soient des créations originales ; que selon l'article L. 112-2,10 du même code, sont considérées comme 'œuvres de l'esprit les œuvres d'art appliqués ;

Que l'originalité d'une œuvre résulte notamment de partis pris esthétiques et de choix arbitraires qui lui donnent une physionomie propre reflétant l'empreinte de la personnalité de son auteur ;

Que la combinaison d'éléments qui en eux-mêmes ne présentent pas d'originalité ne peut manifester un effort créatif que si elle confère au produit concerné une physionomie propre qui le distingue des autres modèles appartenant au même genre et si elle traduit un parti pris esthétique du créateur, révélant l'empreinte de sa personnalité ;

Considérant que la société La Coque de Nacre expose, en appel, que l'originalité du pendentif résulte de la combinaison de l'ensemble de ses caractéristiques, et notamment :

- les proportions du chaton dont la tête est aussi large et haute que le corps, à l'inverse de ce qui existe dans la nature,

- la posture du chaton et l'expression singulière de son visage stylisé (petites oreilles rondes, sourire et yeux clos bordés de longs cils), qui traduisent un parti pris anthropomorphique ;

Que les proportions du chaton ainsi invoquées se retrouvent cependant sur les "maneki-neko" ("chat qui invite" en japonais) figurant sur les extraits de sites internet produits par les appelants leurs pièces 11, 12, 13, datant respectivement de décembre 2006, avril 2006 et décembre 2008, soit des dates antérieures à la création revendiquée, qui présentent également une tête aussi large et haute que le corps ;

Que la posture du chaton représenté assis, vu de trois-quarts, avec la queue redressée, les deux pattes avant ainsi qu'une patte arrière étant visibles, la tête étant vue de face correspond à une posture que peut adopter un chat dans la réalité et n'est pas révélatrice d'un effort créatif particulier susceptible de traduire l'empreinte de la personnalité de son auteur ;

Que le visage stylisé, avec les oreilles, les yeux et le museau représentés par de simples traits, se retrouve également dans les figures précitées des "maneki-neko";

Que le fait d'avoir représenté le chat dans des proportions qui différent de celles de la reproduction fidèle du véritable animal ou de l'avoir représenté selon un parti pris anthropomorphique avec une expression souriante relève du fonds commun des dessins de chats, notamment, comme l'a justement relevé le tribunal, depuis la création des Aristochats par Walt Disney en 1970 ;

Qu'ainsi, la cour fait sienne l'appréciation des premiers juges qui ont estimé que la combinaison des éléments constituant la création revendiquée ne lui confère pas une physionomie propre ni ne traduit un parti pris esthétique, mais résulte seulement de la mise en œuvre d'un savoir-faire aboutissant à la représentation, dépourvue d'originalité, d'un chat stylisé en position assise ;

Que, dans ces conditions, le pendentif revendiqué ne peut bénéficier de la protection au titre du droit d'auteur ; que le jugement doit être confirmé de ce chef et en ce qu'il a, en conséquence, débouté la société La Coque de Nacre de ses demandes au titre de la contrefaçon de droit d'auteur ;

Sur la concurrence déloyale et parasitaire ;

Considérant que les appelants contestent les actes de concurrence déloyale et parasitaire retenus par le tribunal, faisant valoir i) que la société Alain Bellor a une activité de commerce de détail et n'est donc pas en situation de concurrence avec la société La Coque de Nacre qui est spécialisée dans le commerce de gros, ii) que la société Alain Bellor commercialise des produits authentiques sur son site www.vente-secret.com et est étrangère à la présentation ou à la commercialisation des produits litigieux sur les sites gugustar.com et gugustar.en.alibaba.com ou sur le catalogue Gugustar, iii) qu'il est logique que la société Gugustar, dont le projet était de commercialiser en gros des produits La Coque de Nacre, ait mentionné sur son projet de catalogue des références de produits en relation avec les références de la société La Coque de Nacre, iv) que la société Gugustar n'a jamais commercialisé les produits figurant sur la maquette de catalogue 2013/2014, n'est pas responsable des deux sites internet www.gugustar.com et www.gugustar.en.alibaba.com et n'a rien à voir avec la commercialisation des produits litigieux, v) que les pendentifs chatons en or ne sont pas vendus à un prix inférieur à celui proposé par la société La Coque de Nacre, vi) que la présentation des produits sur le catalogue de la société Gugustar n'entraîne aucun risque de confusion dans l'esprit de la clientèle, vii) que les investissements invoqués par la société La Coque de Nacre ne sont pas justifiés et viii) que le préjudice invoqué n'est pas démontré ;

Que la société La Coque de Nacre soutient que les sociétés Shangai Jiacheng, Alain Bellor et Gugustar se sont rendues coupables de concurrence déloyale et parasitaire, d'abord en fabriquant, en important, en offrant à la vente et en vendant en France une gamme de bijoux, qui constitue le démarquage pur et simple de ceux qu'elle vend de longue date ; qu'elle argue, par ailleurs, que le catalogue Gugustar 2013/2014 présente des similitudes troublantes avec son propre catalogue général 2011/2012, que les bijoux importés par les sociétés Shanghai Jiacheng, Alain Bellor et Gugustar France ne respectent pas la réglementation française en vigueur à plusieurs titres, que la société Alain Bellor offre à la vente et vend au public, par l'intermédiaire du site vente-secret.com dont elle est propriétaire, des bijoux identiques aux siens mais à vils prix (-70%) et que les trois sociétés ont voulu profiter, sans bourse délier, des importants investissements consacrés à la création et à la promotion de ses bijoux ;

Considérant que la concurrence déloyale doit être appréciée au regard du principe de la liberté du commerce qui implique qu'un signe ou un produit qui ne fait pas l'objet de droits de propriété intellectuelle, puisse être librement reproduit, sous certaines conditions tenant à l'absence de faute par la création d'un risque de confusion dans l'esprit de la clientèle sur l'origine du produit, circonstance attentatoire à l'exercice paisible et loyal du commerce ; que l'appréciation de la faute au regard du risque de confusion doit résulter d'une approche concrète et circonstanciée des faits de la cause prenant en compte notamment le caractère plus ou moins servile, systématique ou répétitif de la reproduction ou de l'imitation, l'ancienneté d'usage, l'originalité, la notoriété de la prestation copiée ;

Que les agissements parasitaires constituent entre concurrents l'un des éléments de la concurrence déloyale ;

Qu'ils consistent, pour une personne morale ou physique, à titre lucratif et de façon injustifiée, à s'inspirer ou à copier une valeur économique d'autrui, individualisée et procurant un avantage concurrentiel, fruit d'un savoir-faire, d'un travail intellectuel et d'investissement ;

- Considérant que c'est par des motifs pertinents et exacts, que la cour adopte, que le tribunal a estimé que l'existence de faits de concurrence déloyale et parasitaire était établie et que ces faits étaient imputables aux sociétés Alain Bellor, Gugustar et Shanghai Jiacheng ;

Considérant qu'il sera ajouté que c'est en vain que la société Alain Bellor soutient qu'elle ne se trouve pas en situation de concurrence avec la société La Coque de Nacre, son immatriculation au RCS indiquant qu'elle a pour activité l'achat et la vente en gros, demi-gros et détail, l'importation et l'exportation d'articles de bijouterie ;

Que c'est tout aussi vainement qu'elle prétend qu'elle est étrangère à la présentation ou à la commercialisation des produits litigieux sur les sites gugustar.com et gugustar.en.alibaba.com, dès lors qu'elle a déposé en 2007 le nom de domaine gugustar.com, qu'il est justifié que le site internet gugustar.com a été détenu par elle jusqu'en octobre 2013 et que, comme le tribunal l'a relevé, le procès-verbal de constat du 16 octobre 2012 établit que la commande passée sur le site gugustar.en.alibaba.com a été livrée par la société Alain Bellor, son nom et son adresse étant mentionnées en qualité d'expéditeur ;

Que, par ailleurs, le fait que la société Gugustar ait fait figurer sur son catalogue des références de produits "en relation avec les références" de la société La Coque de Nacre ne peut s'expliquer par ses liens commerciaux avec cette dernière dont elle n'a pas été la cliente, contrairement à la société Alain Bellor ;

Qu'enfin, les appelants font valoir à juste raison qu'il n'est pas démontré que les bijoux litigieux aient été vendus à prix bradés, les extraits du site www.vente-secret.com faisant état de soldes jusqu'à 70 % étant insuffisants à ce titre, alors qu'il ressort par ailleurs des pièces produites par les appelants que le pendentif chaton plaqué or était vendu au prix unitaire de gros de 2,46 euros par la société LA Coque de Nacre, le même prix pratiqué par la société Shanghai Jiacheng étant de 3,30 USD ;

Considérant que le jugement déféré sera confirmé en ce qu'il a retenu que les sociétés Alain Bellor, Gugustar et Shanghai Jiacheng se sont rendues les auteurs d'actes de concurrence déloyale et parasitaire au préjudice de la société La Coque de Nacre ;

Sur les mesures réparatrices ;

Sur la demande indemnitaire ;

Considérant que les premiers juges ont procédé à une exacte appréciation du préjudice résultant pour la société La Coque de Nacre des actes de concurrence déloyale et parasitaire commis à son encontre en lui allouant la somme de 50 000 euros à titre de dommages et intérêts ;

Que les trois sociétés ayant contribué à la commission des actes fautifs, elles seront condamnées in solidum à payer les dommages et intérêts réparateurs ;

Que le jugement sera également confirmé de ce chef ;

Sur les demandes complémentaires d'interdiction, de retrait aux fins de destruction et de publication

Considérant que le sens de la présente décision conduit à confirmer le jugement dans ses dispositions relatives aux mesures d'interdiction et de publication ;

Que la société La Coque de Nacre justifie que les bijoux litigieux étaient encore offerts à la vente sur le site www.gugustar.com postérieurement au jugement (extraits du site internet édités le 14 octobre 2015 ; constat d'huissier du 16 novembre 2015) ; qu'il n'est cependant pas établi que les faits se sont poursuivis au-delà de l'automne 2015 ;

Qu'il y a lieu, par conséquent, de faire droit également, selon les modalités fixées au dispositif, à la demande de la société La Coque de Nacre tendant à ce que la mesure de publication concerne également le site www.vente-secret.com exploité par la société Alain Bellor ;

Que le jugement sera réformé en ce sens ;

Qu'il y a lieu également de faire droit à la demande tendant à ce que la mesure de publication tienne compte du présent arrêt en précisant que le jugement déféré a été confirmé par la Cour d'appel de Paris ;

Que le préjudice étant ainsi suffisamment réparé, il n'y a lieu de faire droit aux mesures de rappel et de destruction des produits ;

Que le jugement sera confirmé sur ce point ;

Sur les demandes relatives à la rupture abusive des relations commerciales et au caractère abusif de la procédure ;

Considérant que c'est par des motifs exacts et pertinents, adoptés par la cour, que le tribunal a rejeté la demande de la société Alain Bellor en dommages et intérêts pour rupture brutale des relations commerciales par la société La Coque de Nacre ;

Que, par ailleurs, le sens de la présente décision conduit à rejeter la demande pour procédure abusive formée par les sociétés Alain Bellor et Gugustar ;

Que l'exercice d'une action en justice constitue, en principe, un droit et ne dégénère en abus pouvant donner naissance à une dette de dommages et intérêts que dans le cas de malice, de mauvaise foi ou d'erreur grossière équipollente au dol ; que l'irrecevabilité de la mise en cause de la société Tournesol par la société La Coque de Nacre devant la cour ne permet pas de caractériser une faute ayant fait dégénérer en abus le droit de cette dernière d'agir en justice, l'intéressée ayant pu légitimement se méprendre sur l'étendue de ses droits ;

Que la demande de la société Tournesol pour procédure abusive sera, par conséquent, rejetée ;

Sur les dépens et les frais non compris dans les dépens ;

Succombant en leur recours, les sociétés Alain Bellor et Gugustar, celle-ci en la personne de son liquidateur amiable ès qualités, seront condamnées aux dépens d'appel et garderont à leur charge les frais non compris dans les dépens qu'elles ont exposés à l'occasion de la présente instance, les dispositions prises sur les dépens et les frais irrépétibles de première instance étant confirmées ;

Que la somme qui doit être mise à la charge des sociétés Alain Bellor et Gugustar, celle-ci en la personne de son liquidateur amiable ès qualités, au titre des frais non compris dans les dépens exposés par la société La Coque de Nacre peut être équitablement fixée à 10 000 euros, cette somme complétant celle allouée en première instance ;

Que l'équité ne commande pas de faire droit à la demande formée par la société Tournesol sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

Par ces motifs, LA COUR, par arrêt rendu par défaut, Déclare irrecevable la mise en cause en intervention forcée devant la cour de la société Tournesol par la société La Coque de Nacre, Confirme le jugement déféré si ce n'est en ce qu'il a rejeté la demande de la société La Coque de Nacre tendant à la publication de la décision sur le site internet www.vente-secret.com, Statuant de nouveau de ce chef et ajoutant, Ordonne la publication du dispositif du jugement déféré sur la page d'accueil du site internet www.vente-secret.com, Dit que les mesures de publication ordonnées pourront faire état de ce que le jugement déféré a été confirmé par la Cour d'appel de Paris ; Déboute la société Tournesol de sa demande pour procédure abusive, Condamne les sociétés Alain Bellor et Gugustar, celle-ci en la personne de son liquidateur amiable ès qualités, aux dépens d'appel et au paiement à la société La Coque de Nacre de la somme de 10 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile, Déboute la société Tournesol de sa demande fondée sur l'article 700 du code de procédure civile.