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Décisions

Cass. com., 15 mars 2017, n° 15-16.406

COUR DE CASSATION

Arrêt

Cassation

PARTIES

Demandeur :

Holder (SAS)

Défendeur :

Gilarski (Epoux), Groupe Gilarski (SARL), Giblan (EURL), Gilon (EURL), Gimaud (EURL), Cardon (ès qual.), Ezavin (ès qual.) , Chateau Blanc (Sté)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Mouillard

Rapporteur :

Mme Laporte

Avocat général :

Mme Beaudonnet

Avocats :

SCP Piwnica, Molinié, SCP Bénabent, Jéhannin

T. com. Paris, 19e ch., du 26 sept. 2012

26 septembre 2012

LA COUR : - Donne acte à la société Holder du désistement de son pourvoi en ce qu'il est dirigé contre les sociétés Château blanc et Giblan ; - Attendu, selon l'arrêt attaqué, que la société Holder, franchiseur d'un réseau de boulangerie-pâtisseries à l'enseigne Paul, a conclu, le 1er juin 2004, avec la société Ginvest, devenue la société Groupe Gilarski, dirigée par M. Gilarski, un protocole d'accord aux termes duquel elle lui a consenti l'exclusivité des ouvertures de franchises sous cette enseigne dans trois départements du sud de la France en contrepartie d'un engagement de développement prévoyant l'ouverture de dix-huit points de vente en cinq ans ; que la société Groupe Gilarski a ouvert cinq premiers points de vente au travers notamment des sociétés Gilon, dont Mme Gilarski était la gérante, et Gimaud ; qu'à la suite des difficultés rencontrées par celles-ci, la société Holder a résilié le protocole d'accord à effet du 20 août 2006 et n'a pas reconduit les contrats de franchise à leur terme en 2009 ; que la société Gimaud a été mise en liquidation judiciaire, M. Cardon étant nommé liquidateur ; que la société Gilon a été mise sous sauvegarde, M. Ezavin étant nommé commissaire à l'exécution du plan ; que la société Holder a assigné les sociétés Gimaud et Gilon, MM. Cardon et Ezavin, ès qualités, ainsi que M. et Mme Gilarski en réparation du préjudice résultant de l'inexécution du plan de développement ; qu'à titre reconventionnel, la société Gilarski a demandé réparation de son préjudice pour résiliation abusive du protocole d'accord par la société Holder, les sociétés Gilon et Gimaud et leurs mandataires judiciaires, réparation de leurs préjudices pour manquement de celle-ci à son obligation précontractuelle d'information et M. et Mme Gilarski réparation de leur préjudice moral ;

Sur le premier moyen, pris en sa seconde branche : - Attendu que la société Holder fait grief à l'arrêt de dire fautive sa résiliation du protocole d'accord et de la condamner à payer à la société Gilarski la somme de 150 000 euros alors, selon le moyen, que le contrat s'impose aux parties ; que le refus de renégocier ne peut constituer une faute ; qu'en imposant à la société Holder une obligation de renégociation qui n'était pas prévue à la convention, qui prévoyait bien au contraire, en cas de non-réalisation des objectifs, la résiliation de l'accord, la cour d'appel a méconnu la force obligatoire du contrat et le principe d'intangibilité des conventions et violé l'article 1134 du code civil ;

Mais attendu qu'après avoir relevé que le plan de développement convenu ne pouvait être réalisé qu'avec la collaboration étroite et loyale des parties et que l'ouverture de nouveaux magasins sous franchise restait nécessairement associée à la réussite des exploitations, la société Holder, franchiseur, ayant le pouvoir de vérifier les conditions d'implantation à cette fin et de refuser un projet, s'il ne répondait pas à cet objectif, la cour d'appel, sans obliger la société Holder à renégocier le protocole, a pu retenir que la loyauté imposait de négocier, si le protocole d'accord s'avérait difficilement réalisable, et de proposer des conditions acceptables ; que le moyen n'est pas fondé ;

Sur le premier moyen, pris en sa première branche, les deuxième et troisième moyens, pris en leurs six premières branches, le deuxième moyen, pris en sa septième branche, le troisième moyen, pris en ses septième et huitième branches, et le quatrième moyen, réunis : - Attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce moyen, qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;

Mais sur le deuxième moyen, pris en sa huitième branche, et le troisième moyen, pris en sa neuvième branche, rédigés en termes similaires, réunis : - Vu l'article 1382, devenu 1240, du Code civil ; - Attendu que pour condamner la société Holder à payer à la société Gilon et à M. Cardon, ès qualités, certaines sommes à titre de dommages-intérêts pour manquement du franchiseur à son obligation d'information préalable, l'arrêt retient que la première doit être indemnisée de frais d'emprunts et de ceux de sa procédure de sauvegarde, et le second, des pertes, du passif et du coût de la procédure collective de la société Gimaud ;

Qu'en statuant ainsi, alors que le préjudice résultant du manquement à une obligation précontractuelle d'information est constitué par la perte de la chance de ne pas contracter ou de contracter à des conditions plus avantageuses, et non par les pertes subies, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;

Par ces motifs : casse et annule, mais seulement en ce qu’il condamne la société Holder à payer à la société Gilon la somme de 317 265 euros et à M. Cardon, en qualité de liquidateur judiciaire de la société Gimaud, la somme de 1 606 457,41 euros à titre de dommages-intérêts, statue sur l’article 700 du Code de procédure civile et les dépens, l'arrêt rendu le 7 janvier 2015, entre les parties, par la Cour d'appel de Paris ; remet, en conséquence, sur ces points, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la Cour d'appel de Paris, autrement composée.