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Décisions

CA Paris, Pôle 5 ch. 4, 19 avril 2017, n° 15-13790

PARIS

Arrêt

Confirmation

PARTIES

Demandeur :

Le Scaon , Jeanna (SARL) , Soret (ès qual.)

Défendeur :

Gant France (SASU)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Luc

Conseillers :

Mme Mouthon Vidilles, M. Thomas

Avocats :

Mes Bruézière, Leyer, Bourayne, Rousseau

T. com. Paris, du 7 mai 2015

7 mai 2015

FAITS ET PROCÉDURE

La société Jeanna a conclu le 2 février 2011 un contrat de commission-affiliation avec la société Gant France (ci-après Gant), avec effet au 1er mars 2011, pour la commercialisation, à titre exclusif, des produits Gant, pour une durée initiale de trois ans, avec tacite reconduction d'année en année. Ce contrat prévoyait l'ouverture d'une boutique d'une surface de 120 m² située au 25 rue de Siam, à Brest.

Préalablement, le 12 mai 2010, Monsieur Le Scaon, le gérant de la société Jeanna, a signé l'accusé de réception attestant avoir reçu les informations pré-contractuelles dans un document joint comprenant seize pages et trois annexes, y compris le projet de contrat.

Il a créé la société Jeanna le 12 octobre 2010, pour pouvoir signer son bail le 13 octobre 2010. Cette société exploitait deux magasins : d'une part l'activité " Gant " dans des locaux situés 25 rue de Siam à Brest ; d'autre part l'activité " Suite 341 ", dans un local contigü au précédent à la même adresse.

Elle a démarré son activité au mois de mai 2011. Par courrier du 26 juillet 2012, le conseil de la société Jeanna portait à la connaissance de la société Gant France que son activité était " structurellement déficitaire ". Il exposait que le prévisionnel établi par Monsieur Le Scaon sur la base des éléments chiffrés communiqués par les services financiers de la société Gant France et validé par ces mêmes services révélait " une grave erreur d'appréciation sur l'étude du marché brestois ". En effet, le chiffre d'affaires attendu la première année selon le prévisionnel était de 600 000 € TTC. Or le chiffre d'affaires ramené à 12 mois réalisé par la société Jeanna avoisinait 320 000 € TTC, soit une différence de 47 % avec le prévisionnel.

Par lettre recommandée du 26 octobre 2012, la société Jeanna a résilié le contrat de commission-affiliation, en sollicitant que le préavis de six mois initialement prévu au contrat soit ramené à quatre mois, afin que le contrat puisse prendre fin dès le 28 février 2013, soit " après la période des soldes d'hiver ".

Par lettre du 6 novembre 2012, la société Gant a accepté ce délai de préavis réduit, tout en rappelant néanmoins à la société Jeanna que la rupture anticipée de ce contrat lui causait un préjudice de 110 000 € HT, une mise en fabrication ayant en effet été lancée en août 2012 pour la collection printemps/été 2013 à destination de sa boutique. Elle acceptait, à titre commercial et sans aucune reconnaissance de responsabilité, de rembourser à la société Jeanna le droit d'entrée d'un montant de 12 000 euros et de réaliser un chiffrage de reprise partielle des meubles et de la décoration avec une décote. Elle refusait de participer de quelque façon que ce soit à la perte d'exploitation invoquée par la société Jeanna.

Par message électronique du 6 février 2013, la société Jeanna a relancé la société Gant, afin que la livraison de la collection printemps/été 2013 lui soit livrée, lui rappelant à cette occasion que " le contrat, faute d'accord entre nous court, jusqu'au 30 avril 2013, et, doit pleinement s'exécuter jusqu'à son terme ".

Par lettre du 6 février 2013, la société Gant a proposé que le délai de préavis du contrat de commission-affiliation soit prorogé au 31 août 2013, soit après la période des soldes d'été, ce qui a été accepté par la société Jeanna.

Le contrat de commission-affiliation a pris fin le 31 août 2013 et un inventaire contradictoire a été effectué le 2 septembre 2013.

Parallèlement à une procédure en référé dirigée le 9 octobre 2013 contre la société Jeanna et Monsieur Le Scaon, qui a conduit à leur condamnation solidaire par le Tribunal de commerce de Paris par ordonnance du 4 février 2014, à payer à la société Gant France la somme provisionnelle en principal de 33 566,51 € TTC assortie des intérêts de retard au taux légal, en paiement de factures impayées, ceux-ci ont fait délivrer le 15 janvier 2014 à la société Gant France une assignation à jour fixe devant le Tribunal de commerce de Paris.

La société Jeanna a été placée en redressement judiciaire le 1er septembre 2014. La société Gant France a adressé le 1er octobre 2015 sa déclaration de créance. Celle-ci a été contestée le 25 janvier 2016 par le mandataire judiciaire de la société. Par décision du 30 janvier 2017, le juge-commissaire a fait droit à la demande de la société Gant et a ordonné qu'elle soit admise au passif de la société Jeanna pour la somme de 33 566,51 euros à titre nanti et 5 188,65 euros à titre chirographaire.

Par jugement du 7 mai 2015, le Tribunal de commerce de Paris a :

- débouté les parties de toutes demandes,

- condamné in solidum la société Jeanna et Monsieur Le Scaon à payer à la société Gant France la somme de 15 000 € au titre de l'article 700 du Code de procédure civile, déboutant pour le surplus,

- dit n'y avoir lieu à exécution provisoire,

- condamné la société Jeanna et Monsieur Le Scaon in solidum aux entiers dépens.

LA COUR,

Vu l'appel de la société Jeanna et de Monsieur Le Scaon et leurs conclusions en date du 20 janvier 2017 dans lesquelles il est demandé à la cour de :

- prononcer la nullité du contrat et condamner la société Gant France à payer :

* à la société Jeanna la somme de 509 564 € à titre de dommages et intérêts en réparation de son préjudice,

* à Monsieur Le Scaon la somme de 220 000 € en réparation de son préjudice,

Outre les intérêts sur lesdites sommes à compter du jugement à intervenir jusqu'à parfait paiement,

- dire et juger que Monsieur Le Scaon n'est pas caution de la société Jeanna et dire et juger en conséquence que Monsieur Le Scaon n'est pas tenu de payer à la société Gant les termes de la condamnation prononcée à son encontre par le juge des référés et au bénéfice de la société Gant,

- rejeter toute demande plus ample ou contraire,

- condamner la société Gant à payer à la société Jeanna et Monsieur Le Scaon la somme de 15 000 € au titre des frais irrépétibles de l'article 700 du Code de procédure civile ;

La société appelante soutient que la société Gant France a validé son prévisionnel alors qu'elle le savait inexact, lui ayant fourni des chiffres d'affaires d'affiliés de Rennes, Orléans et du Touquet qui étaient inexacts. Elle expose que la société Gant l'a trompée sur la rentabilité de ces magasins, et notamment celui de Paris et de son site pilote.

Vu les conclusions de la société Gant France du 18 janvier 2017, dans lesquelles il est demandé à la cour de :

- confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a débouté la société Jeanna et Monsieur Le Scaon de l'ensemble de leurs demandes, les a condamnés in solidum à payer à la société Gant la somme de 15 000 € au titre de l'article 700 ainsi qu'aux entiers dépens,

- l'infirmer pour le surplus et statuant à nouveau :

- fixer la créance de la société Gant France au passif de la société Jeanna à la somme totale de 296 000 €, répartie comme suit :

* 126 000 € au titre de dommages et intérêts pour résiliation anticipée du contrat,

* 20 000 € au titre de dommages et intérêts pour atteinte à l'image de la marque,

* 150 000 € au titre de la perte de chance de développer le réseau,

- fixer la créance de la société Gant France au passif de la société Jeanna à la somme supplémentaire de 10 000 € au titre de l'article 700 du Code de procédure civile,

- fixer la créance de la société Gant France au passif de la société Jeanna au titre des entiers dépens d'appel dont distraction au profit de Maître Sandrine Rousseau, conformément aux dispositions de l'article 699,

- condamner Monsieur Le Scaon, pris en qualité de caution de la société Jeanna, à payer à la société Gant France les sommes de :

* 126 000 € à titre de dommages et intérêts pour résiliation anticipée du contrat,

* 20 000 € au titre de dommages et intérêts pour atteinte à l'image de la marque,

* 150 000 € au titre de la perte de chance de développer le réseau,

* 10 000 € au titre de l'article 700 du Code de procédure civile,

ainsi qu'aux entiers dépens d'appel dont distraction au profit de Maître Sandrine Rousseau ;

La société Gant France s'oppose aux demandes des appelants et demande à la cour de condamner la société Jeanna à lui verser des dommages-intérêts au titre de la résiliation anticipée du contrat.

Sur ce,

La société Jeanna demande à la cour de prononcer la nullité du contrat signé par les parties en raison d'un vice de son consentement. Elle soutient par ailleurs que la société Gant aurait manqué à son obligation de bonne foi lors de l'exécution du contrat, ce qui justifierait l'octroi de dommages et intérêts.

Sur les obligations pré-contractuelles d'information

L'article L. 330-3 du Code de commerce dispose que " toute personne qui met à la disposition d'une autre personne un nom commercial, une marque ou une enseigne, en exigeant d'elle un engagement d'exclusivité ou de quasi-exclusivité pour l'exercice de son activité, est tenue, préalablement à la signature de tout contrat conclu dans l'intérêt commun des deux parties, de fournir à l'autre partie un document donnant des informations sincères, qui lui permette de s'engager en connaissance de cause ".

Selon le même article, le document d'information pré-contractuelle (ci-après DIP), " dont le contenu est fixé par décret, précise notamment, l'ancienneté et l'expérience de l'entreprise, l'état et les perspectives de développement du marché concerné, l'importance du réseau d'exploitants, la durée, les conditions de renouvellement, de résiliation et de cession du contrat ainsi que le champ des exclusivités ". En vertu de l'article R. 330-1 du Code commerce, le DIP doit contenir "1° L'adresse du siège de l'entreprise et la nature de ses activités avec l'indication de sa forme juridique et de l'identité du chef d'entreprise (...) ; 4° La date de la création de l'entreprise avec un rappel des principales étapes de son évolution, y compris celle du réseau d'exploitants, s'il y a lieu, ainsi que toutes indications permettant d'apprécier l'expérience professionnelle acquise par l'exploitant ou par les dirigeants. (...) Elles (les informations) doivent être complétées par une présentation de l'état général et local du marché des produits ou services devant faire l'objet du contrat et des perspectives de développement de ce marché. (...) 5° Une présentation du réseau d'exploitants qui comporte : a) La liste des entreprises qui en font partie avec l'indication pour chacune d'elles du mode d'exploitation convenu ; b) L'adresse des entreprises établies en France avec lesquelles la personne qui propose le contrat est liée par des contrats de même nature que celui dont la conclusion est envisagée ; la date de conclusion ou de renouvellement de ces contrats est précisée ; (...) Le nombre d'entreprises qui, étant liées au réseau par des contrats de même nature que celui dont la conclusion est envisagée, ont cessé de faire partie du réseau au cours de l'année précédant celle de la délivrance du document. Le document précise si le contrat est venu à expiration ou s'il a été résilié ou annulé ; d) S'il y a lieu, la présence, dans la zone d'activité de l'implantation prévue par le contrat proposé, de tout établissement dans lequel sont offerts, avec l'accord exprès de la personne qui propose le contrat, les produits ou services faisant l'objet de celui-ci ; 6° L'indication de la durée du contrat proposé, des conditions de renouvellement, de résiliation et de cession, ainsi que le champ des exclusivités ".

Il résulte de ces articles que le franchiseur est tenu, préalablement à la signature du contrat, de remettre à l'autre partie un document d'information. La violation de l'obligation pré-contractuelle d'information et de renseignements prévue ci-dessus, si elle peut fonder la nullité du contrat de franchise en cas de vice du consentement, ne saurait entraîner à elle seule sa résiliation. Il incombe donc d'une part à la société Gant de démontrer qu'elle a bien communiqué ce document à la société Jeanna, et d'autre part à la société Jeanna d'établir que l'omission ou l'inexactitude des mentions de ce document ont vicié son consentement.

Sur la remise du document

Dans ses écritures, la société Jeanna fait référence à un document d'information pré-contractuelle de 2010 et à un document d'information pré-contractuelle de 2013.

Même si elle semble ne plus contester avoir reçu celui de 2010, puisqu'elle écrit dans ses conclusions " il sera donc tenu pour acquis que Monsieur Le Scaon a reçu le DIP au mois de mai 2010 ", il y a lieu de souligner qu'est versé aux débats l'accusé de réception du 12 mai 2010 dans lequel Monsieur Le Scaon atteste en avoir reçu communication, ainsi qu'une capture d'écran du système informatique de la société Gant démontrant que ce document a été enregistré pour la dernière fois le 12 mai 2010 et n'a pas été modifié ultérieurement, ce qui a été formellement attesté par constat d'huissier du 16 avril 2014. La société Jeanna ne peut donc sérieusement prétendre que la société Gand aurait modifié a posteriori le DIP en le complétant par des mentions qui faisaient défaut en mai 2010, notamment sur le marché local et l'état du réseau de distribution.

Le fait que les projets de contrat de commission-affiliation et de nantissement conventionnel, annexés à ce DIP ne soient pas entièrement renseignés, s'explique par le fait que la société Jeanna était encore en cours de formation, et ne constitue pas une faute dolosive de la société Gant. L'intimée a donc bien démontré que la société Jeanna a reçu les informations pré-contractuelles plus de 20 jours avant la signature du contrat de commission-affiliation.

Sur les mentions du document d'information pré-contractuelle

Les appelants soutiennent que la société Gant aurait commis un dol, en fournissant un document d'information pré-contractuelle et des informations inexacts.

Ils exposent que le DIP de mai 2010 ne contient aucun état du marché local, ni aucune liste exhaustive du réseau, celle-ci étant inexacte et incomplète, voire mensongère. Ils en veulent pour preuve la mention de la société Villard qui n'était plus franchisée depuis 2008.

Mais la société Jeanna ne démontre pas en quoi cette description sommaire, mais non erronée du marché local, et la mention de la société Villard, dont l'inexactitude a été reconnue par la société Gant, étaient de nature à tromper son consentement.

Par ailleurs, les appelants prétendent que le DIP serait trompeur et mensonger en son affirmation de la forte augmentation de la demande sur le marché de la confection pour femme. Le DIP serait également mensonger sur l'expérience de la société Gant France dans la mode femme.

Mais la société Jeanna ne démontre pas davantage en quoi une inexactitude, portant sur 10 % des ventes sous-marques, aurait pu l'induire en erreur.

Le DIP ne comporte aucune information comptable sur le bilan de la société Gant France au 31 décembre 2009. Les appelants prétendent que si ce bilan avait été intégré, il les aurait alertés sur la faiblesse du chiffre d'affaire moyen généré par les nouvelles boutiques ouvertes de 2008 à 2009. Mais le bilan de la tête de réseau ne renseigne pas sur celui des affiliés.

Si les appelants prétendent que la présentation du réseau d'exploitants aurait dissimulé la fermeture de certains affiliés en 2009 (boutiques de Bordeaux, Lille, société MOG), le franchisé de Bordeaux n'est sorti du réseau qu'en juin 2010 et la société Edgewood, qui avait deux boutiques à Lille répertoriées comme franchisées, a réuni les deux durant l'été 2010. Le DIP ne pouvait donc en tenir compte.

Les informations communiquées sur l'affilié de Tours, la société Villard, seraient également fausses, cette société ne réalisant qu'une faible part de son chiffre d'affaires avec la société Gant France. De même, l'affilié de Rouen, la société Gabin aurait possédé deux boutiques englobées dans le même bilan, une boutique multimarques et une boutique Gant hommes. Dès lors le chiffre d'affaires de cette société serait inexact et trompeur sur la réalité de la rentabilité du réseau Gant.

Mais il appartenait à la société Jeanna de procéder à ces études sur les chiffres d'affaires des affiliés, la société Gant ayant à juste titre mentionné ces deux franchisés sur la liste du DIP, sans que la loi l'oblige à fournir de surcroît le chiffre d'affaires de chaque affilié.

Sur le prévisionnel

Les appelants soutiennent également que la société Gant France a fourni des chiffres inexacts pour établir le prévisionnel. Monsieur Trébuchet et Monsieur Collet, interrogés par Monsieur Le Scaon, dans un mail du 27 mai 2010, n'ont pas émis de critiques sur les chiffres retenus par celui-ci et lui ont indiqué des objectifs pour la boutique d'Orléans de 20 % plus élevés que ceux constatés dans la réalité. S'agissant de la ville de Rennes, c'est un écart de 25 % par rapport aux annonces de la société Gant qui a été constaté. Au vu de ces chiffres, la société Gant France aurait dû avertir la société Jeanna du fait que le seuil de rentabilité envisagé de 480 000 € ne pouvait être atteint.

Mais le franchiseur n'est pas tenu de remettre un compte d'exploitation prévisionnel au candidat à la franchise, mais s'il remet un tel compte d'exploitation, il doit donner des informations sincères et vérifiables. Aux termes du 6° de l'article R. 330-1 du Code de commerce, le document d'information précontractuelle doit contenir " la nature et le montant des dépenses et investissements spécifiques à l'enseigne ou à la marque que la personne destinataire du projet de contrat engage avant de commencer l'exploitation ". Il appartient ensuite à chaque franchisé d'établir son compte prévisionnel à partir de ces données.

Il résulte des pièces du dossier que par e-mail du 28 mai 2010, soit neuf mois avant la conclusion du contrat de commission-affiliation, la société Gant a écrit à Monsieur Le Scaon en ces termes : " suite à notre conversation téléphonique, vous trouverez ci-dessous quelques chiffres d'affaires : Le Havre (uniquement homme) : 500 Keuros pour 73 m² soient 6850/m² ; Nantes (uniquement Nantes) : 450 Keuros pour 70 m² soient 6543 €/ m² ; Orléans (homme + femme) : objectif de 550 Keuros sur 90 m² (2 étages) soit 6112 €/ m² ; Le Touquet (homme + femme) : objectif : 1 Meuros pour 110 m² soit 9090/€ m². Pour Rennes (uniquement homme), l'objectif est à 500 Keuros mais je ne retrouve pas la surface ".

Il ressort de la comparaison entre ces prévisions, expressément mentionnées comme des " objectifs " pour le Touquet, Rennes et Orléans, et les chiffres d'affaires effectivement réalisés par les affiliés de ces villes, que ces chiffres étaient réalistes, puisqu'ils ont été dépassés s'agissant de Rennes et du Touquet dès 2012, 2013, seul l'affilié d'Orléans n'atteignant en 2012 qu'un chiffre d'affaires de 483 782 € contre l'objectif initial de 550 000 €, soit 80 % de l'objectif, cette seule différence ne pouvant en soi établir la non sincérité des objectifs indiqués au moment de leur transmission.

L'écart signalé entre ces indications et les résultats de la société Jeanna, de l'ordre de 21 %, ne peut davantage être considéré comme révélant un manque de sincérité des informations transmises. Il ne peut être reproché à la société Gant de ne pas avoir donné son avis sur le prévisionnel établi par Monsieur Le Scaon dès le 10 février 2010, soit bien avant la conclusion du contrat.

Il lui incombait en effet d'établir son propre prévisionnel en effectuant les études nécessaires sur la base des quelques éléments indiqués, qui n'étaient pas erronés et des éléments recueillis par lui. Il avait en effet tout loisir pendant ces neuf mois de réflexion de procéder aux études qu'il a menées tardivement en 2013. Par ailleurs, son ancienne profession de banquier aurait dû lui permettre d'affiner ses calculs. Enfin, compte tenu de la faible durée d'exploitation du magasin, les pertes constatées pendant ces 18 mois ne sauraient attester, en soi, du caractère irréalisable des prévisions ou du manque de rentabilité de l'activité du réseau.

Sur l'exécution des obligations contractuelles

L'appelante soutient en outre n'avoir reçu aucune formation, ni aucun savoir-faire. Elle ajoute que la société Gant France ne l'a jamais assistée et n'a jamais réalisé la campagne de publicité de lancement à laquelle elle s'était engagée.

Mais le document d'information pré-contractuelle mentionnait bien une obligation de formation contrairement aux assertions des appelants. Le jugement entrepris souligne à juste titre que si la société Gant ne produit aucune pièce démontrant les diligences entreprises pour que les appelants s'acquittent de la formation obligatoire de début du contrat, Monsieur Le Scaon ne produit pour sa part pas davantage de pièces démontrant avoir postulé à cette formation initiale.

L'article 10 du contrat de commission-affiliation n'a pas mis l'obligation de publicité à la charge de la société Gant, mais à la charge de l'affilié, seul le remboursement de 50 % des actions de communication et de promotion engagées par l'affilié pouvant donner droit à remboursement de la société Gant. Or la société Jeanna ne démontre pas avoir mis en place de telles campagnes et avoir sollicité en vain le remboursement des frais.

Aucun manquement de la société Gant à son obligation d'assistance n'est établi, les appelantes ne versant au dossier aucun élément faisant état de demandes d'aide qui n'auraient pas été entendues, la société Gant n'étant pas tenue contractuellement de renflouer son affilié en cas de difficultés financières.

Il a y lieu de confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a débouté la société Jeanna et Monsieur Le Scaon de toutes leurs demandes.

Sur les demandes reconventionnelles de la société Gant

Il y a lieu d'approuver le jugement entrepris en ce qu'il a constaté que la résiliation du contrat de commission-affiliation, qui a pris fin le 31 août 2013 avec l'accord des parties, a respecté l'article 20.1 du contrat de commission-affiliation qui stipule : " le présent contrat pourra être résilié par anticipation de plein droit à l'initiative de l'une ou l'autres des parties, par l'envoi d'une lettre recommandée avec accusé de réception, dans les cas suivants, sans qu'aucune indemnité de quelque nature que ce soit ne soit due à l'affilié à l'initiative de l'une des parties moyennant le respect d'un préavis de six mois ". La société Gant qui demande l'allocation de dommages intérêts au titre de la perte de chiffre d'affaires subie par la faute de la société Jeanna, échoue à démontrer cette faute et sera donc déboutée de sa demande. Le jugement entrepris sera donc également confirmé sur ce point.

Sur les frais irrépétibles

La société Jeanna et Monsieur Le Scaon, succombant, seront condamnés aux dépens ainsi qu'à payer à la société Gant France la somme de 6 000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile.

Par ces motifs : Confirme le jugement entrepris en toutes ses dispositions, Condamne la société Jeanna et Monsieur Le Scaon in solidum aux dépens de l'instance d'appel, qui seront recouvrés selon les dispositions de l'article 699 du Code de procédure civile, Les condamne in solidum à payer à la société Gant France la somme de 6 000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile.