Cass. crim., 4 mai 2017, n° 16-81.061
COUR DE CASSATION
Arrêt
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Guérin
Rapporteur :
Mme Chauchis
Avocat général :
M. Gaillardot
Avocats :
SCP Garreau, Bauer-Violas, Feschotte-Desbois, SCP Baraduc, Duhamel, Rameix
LA COUR : - Statuant sur le pourvoi formé par la société X, contre l'ordonnance n° 15 du premier président de la Cour d'appel de Paris, en date du 6 janvier 2016, qui a confirmé l'ordonnance du juge des libertés et de la détention autorisant le rapporteur général de l'Autorité de la concurrence à effectuer des opérations de visite et de saisie dans ses locaux en vue de rechercher la preuve de pratiques anticoncurrentielles ; - Vu les mémoires produits, en demande et en défense ;
Sur le moyen unique de cassation, pris de la violation des articles 6 et 8 de la Convention européenne des droits de l'Homme, L. 450-3, L. 450-4 du Code de commerce, 591 et 593 du Code de procédure pénale, violation de la loi, insuffisance de motifs ;
"en ce que l'ordonnance attaquée a confirmé en toutes ses dispositions l'ordonnance du juge des libertés et de la détention du 9 octobre 2013 ayant autorisé les opérations de visite et de saisie dans les locaux de l'entreprise X et a rejeté les autres demandes ;
"aux motifs que, sur le choix de l'Autorité de la concurrence de recourir à la procédure de l'article L. 450-4 du Code de commerce : " I. L'Autorité de la concurrence "était pleinement avertie des modalités selon lesquelles la société X distribuait ses produits, notamment sur Internet" Le fait d'indiquer que l'Administration était au courant de la politique de distribution sélective de X ("Élégance" et "Prestige") par le biais de questionnaires que l'Autorité avait envoyé à cette société précédemment, n'exclut pas qu'il soit procédé par la suite à une procédure dite lourde dans l'hypothèse où il existerait une présomption que ce choix soit commun avec d'autres fabricants pour exclure les distributeurs sur Internet ne disposant pas de magasins physiques ; que l'Autorité de la concurrence n'a pas à justifier de son choix de recourir à la procédure de l'article L. 450-4 du Code de commerce laquelle n'a pas un caractère subsidiaire par rapport aux autres procédures pouvant et ayant déjà été utilisées ; que ce moyen sera rejeté ;
"1°) alors que les visites domiciliaires constituent une ingérence dans le droit des entreprises au respect de leurs locaux professionnels, tel que garanti par l'article 8 de la Convention européenne des droits de l'Homme ; que cette ingérence doit être nécessaire pour atteindre le but légitime poursuivi ; que la législation et la pratique internes doivent offrir des garanties adéquates et suffisantes contre les abus et l'arbitraire et à ce titre, les juges nationaux doivent se livrer à un contrôle efficace, concret et effectif, de la nécessité de la mesure ; que le recours à la procédure d'enquête lourde de l'article L. 450-4 du Code de commerce n'est nécessaire que si le caractère insuffisant du recours à l'enquête légère prévue à l'article L. 450-3 a été constaté du fait des modalités secrètes empruntées par les pratiques objet de l'enquête si bien qu'en se bornant, alors qu'il était saisi par la demanderesse d'éléments établissant que les pratiques de distribution sélective, objet de l'enquête, n'étaient en aucun cas secrètes puisque l'Autorité de la concurrence avait été parfaitement informée de leur existence par la société X dans le cadre d'une précédente enquête menée préalablement à un avis sur la situation concurrentielle du secteur du commerce en ligne, à relever que l'Autorité de la concurrence n'avait pas à justifier de son choix de recourir à la procédure de l'article L. 450-4 du Code de commerce laquelle n'a pas un caractère subsidiaire par rapport aux autres procédures pouvant et ayant déjà été utilisées, le premier président, qui s'est prononcé par un motif général et abstrait n'établissant pas qu'il s'est livré à un contrôle concret et effectif de la nécessité de mettre en œuvre la procédure de l'article L. 450-4 du Code de commerce eu égard à l'insuffisance du recours par l'Autorité de la concurrence à la procédure de l'enquête légère de l'article L. 450-3 du Code de commerce, a méconnu les exigences de l'article 8 de la Convention européenne des droits de l'Homme ;
"et aux motifs que, sur les conditions de fond requises pour la mise en œuvre de la procédure de l'article L. 450-4 du Code de commerce : II. Sur la nécessité d'infirmer l'ordonnance de tout indice de participation de la société X à des ententes verticales, secrètes justifiant le recours à des visites et saisies et sur la nécessité d'infirmer l'ordonnance en l'absence de tout indice de participation de la société X à une entente horizontale secrète ; que pour la première pratique visée dans l'ordonnance, il n'existerait aucune présomption ni aucun indice sérieux concernant la société X et pour la deuxième ou troisième pratique visée dans l'ordonnance, il n'existerait aucune présomption de pratiques anti-concurrentielles secrètes justifiant le recours à des visites et saisies domiciliaires ; que le juge qui autorise des opérations de visite et de saisie sur le fondement de l'article L. 450-4 du Code de commerce est tenu de vérifier si la demande d'autorisation doit comporter tous les éléments d'informations utiles en possession du demandeur de nature à justifier la visite ; que par suite le juge doit s'assurer que les éléments produits par l'Administration aient une apparence de licéité et sont suffisants pour justifier que la mesure intrusive de visite et de saisie soit justifiée ; qu'à cette fin le juge des libertés et de la détention doit vérifier, en se référant aux éléments d'informations fournis par l'Autorité qu'il existait des indices laissant apparaître des faisceaux de présomptions d'agissements prohibés justifiant que soit recherchée leur preuve au moyen d'une visite et de saisies de documents s'y rapportant sans qu'il soit nécessaire que soit caractérisées des présomptions précises, graves et concordantes ou des indices particulièrement troublants des pratiques ; que les présomptions sont appréciées par le juge en proportion de l'atteinte aux libertés individuelles que sont susceptibles de comporter la visite et les saisies envisagées ; qu'en l'espèce, il ressort de l'ordonnance querellée que le juge des libertés et de la détention près du tribunal de grande instance de Bobigny, a sur requête de la rapporteure générale de l'Autorité de la concurrence rendu une ordonnance visant les produits "blancs" qui rassemblent le petit et le gros électroménager notamment de nettoyage, de lavage, de cuisine, de cuisson et de froid et les produits "bruns" qui regroupent les appareils électriques et électroniques de loisirs au motif que les distributeurs ou revendeurs se sont plaints de l'immixtion des fabricants et grossistes de produits "blancs" et "bruns" dans leur politique tarifaire ; que cette immixtion s'effectue selon trois pratiques : la première, consistant à imposer des prix de reventes à des sites Internet qui distribuent les produits précités, la seconde pratique prohibée consisterait pour les fabricants de produits "blancs" et "bruns" de faire retirer de leur sites Internet certaines de leurs références et une troisième pratique prohibée, à refuser l'agrément à des distributeurs ; que le juge des libertés et de la détention de Bobigny qui n'est pas le juge du fond mais le juge de l'apparence a relevé dans l'ordonnance des présomptions d'ententes horizontales entre les fabricants et verticales entre les fabricants, les grossistes et le cas échéant des sociétés de grande distribution de détail et après un examen "in concreto" des 21 annexes jointes à la requête selon la méthode dite "du faisceau d'indices" a estimé qu'il existait des indices laissant apparaître des faisceaux de présomptions d'agissements prohibés justifiant que soit recherchée leur preuve au moyen d'une visite et de saisies ; qu'ainsi, il a examiné les 21 annexes jointes et a constaté que certains fabricants de ce secteur étaient susceptibles de participer à une entente horizontale et/ou verticale notamment en comparant certaines annexes qui prises isolément n'établissent pas en elles-mêmes des indices mais par leurs comparaisons, leurs rattachements à d'autres annexes concernant les fabricants ou des revendeurs peuvent établir un faisceau d'indices ; qu'ainsi, dans les annexes présentées il pouvait être déduit que certains protagonistes de ces ententes échangeaient des courriels avec des mots codés, le vocable "stocks" remplaçant celui de "prix"; que des listes étaient établies concernant des produits à retirer si des revendeurs ne s'alignaient pas sur les prix publics indiqués (PPI) des fabricants, que des produits étaient siglés par couleur (le bleu étant utilisé pour exclure certains produits), que des courriels comminatoires émanaient de représentants des fabricants, que des grossistes n'étaient pas exclus de ces schémas d'ententes ; que leur rôle consistait à relayer les instructions des fabricants auprès des revendeurs ; qu'à la lumière de ces éléments, certains documents étaient relevés notamment la déclaration anonymisée d'un distributeur mettant en cause la société X mais aussi d'autres pièces faisant état d'une liste disteo dans laquelle des produits de X figureraient ; qu'à ce stade de l'enquête préalable, notre juridiction se borne à relever d'éventuelles présomptions simples pouvant constituer des indices sans pour autant qualifier des infractions présumées lesquelles sont la conséquence de la juridiction qui statuera sur le fond et qui appréciera le bien-fondé ou le cas échéant l'absence de bien-fondé de ces éléments étant précisé qu'au stade de la phase préparatoire aucune accusation n'est portée à l'encontre des sociétés visées par l'ordonnance ; que s'agissant du principe de loyauté, le juge des libertés et de la détention en examinant notamment la totalité des 21 annexes était informé du recours à la distribution sélective pratiqué par la société X ; que l'annexe 5 relatant le procès-verbal de M. A, gérant de la société SARL Z, faisait état de la mention suivante : "s'agissant des listes noires liées à la distribution sélective, les fournisseurs (par groupe) concernés par la pratique par ordre décroissant de volume sont les suivants : Y (gamme Excellis et Preference) [..], X (totalité de la gamme)" ; que l'existence supposée d'entente horizontale entre les fabricants de produits courants blancs et bruns peut être constituée par le parallélisme du comportement entre entreprises du même secteur et susceptible de constituer une présomption simple de pratique anticoncurrentielle, au même titre que les actions concertées dans le même laps de temps et comme il a été indiqué précédemment cet élément n'est qu'une présomption parmi d'autres qui en elle seule n'est pas significative mais qui ajoutée à d'autres éléments peut constituer un indice, qu'il sera laissé à l'appréciation de la juridiction du fond ; que ces moyens seront écartés ; que l'ordonnance devra être infirmée faute pour l'Autorité de la concurrence d'apporter la preuve qui lui incombe d'indices de la participation de la société X dans les agissements frauduleux justifiant le recours à des visites et saisies domiciliaires ; qu'il a déjà été répondu ci-dessus à ce moyen ; qu'en conséquence, ce moyen sera rejeté ; que sur le rejet des arguments de l'Autorité de la concurrence ; que sur la pratique des ordonnances pré-rédigées par l'Administration, le juge des libertés et de la détention signataire de l'ordonnance et qui de ce fait se l'approprie en y apportant le cas échéant des rectifications ou des modifications, étant précisé qu'il est destinataire d'une copie de l'ordonnance en version numérique, entre le moment où la requête est déposée à son greffe et la signature de celle-ci ; qu'il peut également décider de ne pas faire droit à la requête, son rôle ne se limitant pas à une simple mission de chambre d'enregistrement ; qu'en l'espèce, la requête a été présentée le 4 octobre 2013 et signée le 9 octobre 2013, ce qui a laissé amplement le temps au juge des libertés et de la détention d'examiner la pertinence de la requête, d'étudier les pièces jointes à celle-ci, de vérifier les habilitations et le jour de la signature, de demander aux agents de l'Autorité de la concurrence toute information pertinente préalablement à la signature de son ordonnance ; que sur la violation alléguée des articles 6 et 8 de la Convention européenne des droits de l'Homme, l'examen in concreto effectué par le juge des libertés et de la détention sur l'ordonnance et ses 21 annexes permet d'écarter l'absence de contrôle de proportionnalité entre la requête présentée et l'autorisation délivrée permettant une visite et saisie au sein de la société eu égard à l'importance des enjeux économiques de ce secteur ; que sur l'atteinte alléguée à l'article 8 de la Convention européenne des droits de l'Homme, celle-ci est tempérée par une disposition de l'article 8, § 2, de la Convention européenne des droits de l'Homme qui subordonne cette intrusion dans les locaux d'une société à trois conditions, être prévue par la loi, viser un but légitime et dans le cas d'espèce constituait une mesure nécessaire au bien-être économique du pays et être nécessaire dans une société démocratique, ces trois conditions étant remplies, l'ingérence de l'Administration est justifiée ; que ces moyens seront rejetés ;
"2°) alors que le juge des libertés et de la détention doit vérifier concrètement que les éléments d'information présentés au soutien d'une demande de visite domiciliaire dans les locaux d'une entreprise spécifique sont suffisants à établir l'existence de présomptions de pratiques anticoncurrentielles justifiant cette mesure attentatoire au respect du domicile ; que le juge d'appel doit s'assurer lui-même de l'existence de telles présomptions ; que l'appréciation d'ensemble des éléments d'information produits par l'auteur de la requête ne saurait jamais justifier une opération de visite à l'égard d'une entreprise à l'encontre de laquelle aucun indice rendant possible sa participation personnelle à une pratique anticoncurrentielle n'est caractérisé ; qu'il résulte de l'ordonnance critiquée que le premier président, après avoir rappelé les trois pratiques anticoncurrentielles d'ententes verticales visées dans la requête résultant de l'imposition de prix par les fabricants aux distributeurs Internet, de l'imposition du retrait de certains produits sur les sites et enfin du refus d'agréer certains distributeurs, a retenu qu'il pouvait être déduit de l'analyse des vingt-et-une annexes à la requête, combinées entre elles, les indices de trois agissements à savoir l'échange de courriels faisant usage du vocable codé " stocks " à la place de " prix " en vue d'imposer ceux-ci aux distributeurs, de l'établissement de listes de produits à retirer usant de Codes couleur et de l'envoi de courriels comminatoires aux distributeurs ; qu'en refusant d'annuler l'ordonnance ayant autorisé la visite dans les locaux de la demanderesse, lorsque les 21 annexes jointes à la requête de l'Autorité de la concurrence ne laissaient apparaître aucun indice de participation de la société X à ces trois agissements déduits par le premier président lui-même de l'analyse des annexes et visaient exclusivement des tiers, le premier président, dont l'ordonnance ne reposait en réalité que sur l'appartenance de l'exposante au secteur de la fabrication de produits blancs et bruns, n'a pas justifié légalement sa décision au regard de l'article L. 450-4 du Code de commerce ;
"3°) alors que le juge des libertés et de la détention doit vérifier concrètement que les éléments d'information présentés au soutien d'une demande de visite domiciliaire dans les locaux d'une entreprise spécifique sont suffisants à établir l'existence de présomptions de pratiques anticoncurrentielles justifiant cette mesure attentatoire au respect du domicile ; qu'une déclaration anonyme ne peut constituer un indice que si elle est corroborée par d'autres éléments d'information ; que l'indice doit présenter un lien direct avec la matérialité d'une pratique prohibée ; qu'en visant, en sus de la déclaration anonyme d'un distributeur mettant en cause la demanderesse, la liste Disteo mentionnant les produits X, lorsque cette liste se rapportait uniquement à la deuxième pratique prohibée visée dans la requête résultant de l'imposition par les fabricants du retrait de certains produits sur les sites Internet, de sorte qu'elle ne pouvait corroborer la déclaration anonyme pour établir un prétendu indice de la première pratique prohibée résultant de l'imposition de prix, et lorsqu'aucune des annexes supposées établir cette première pratique ne visait la demanderesse, le premier président n'a pas justifié sa décision au regard des textes et principes susvisés ;
"4°) alors que le juge des libertés et de la détention doit vérifier concrètement que les éléments d'information présentés au soutien d'une demande de visite domiciliaire dans les locaux d'une entreprise spécifique sont suffisants à établir l'existence de présomptions de pratiques anticoncurrentielles justifiant cette mesure attentatoire au respect du domicile ; qu'une visite domiciliaire n'est justifiée qu'en l'état d'indices objectifs d'implication personnelle de la société objet de la visite dans des agissements susceptibles de constituer matériellement des pratiques anticoncurrentielles ; qu'en faisant état d'une déclaration anonyme " mettant en cause la société X " et d'une liste Disteo " dans laquelle des produits X figureraient " en des termes d'ailleurs particulièrement généraux n'établissant pas le moindre lien avec les trois agissements relevés par le premier président lui-même et/ou les trois pratiques prohibées visées dans l'ordonnance du juges des libertés et de la détention, lorsque la déclaration anonyme relative au simple refus d'un usage des " pop-up" par les distributeurs sur Internet était sans rapport avec la matérialité de la pratique prohibée de l'imposition d'une politique de prix aux distributeurs et lorsque la liste Disteo, établie par un tiers, ne faisait mention des produits X qu'au titre de la pratique de distribution sélective mise en place par la demanderesse, que l'Autorité de la concurrence connaissait et avait reconnu dans son principe comme régulière dans un avis du 18 septembre 2012, le premier président, qui n'a ainsi visé que des éléments imputables à des tiers et/ou sans rapport avec la matérialité des éventuelles pratiques prohibées à l'origine de la demande de visite, n'a pas caractérisé l'existence de présomptions d'ententes verticales entre la demanderesse, les grossistes et les sociétés de grande distribution ;
"5°) alors que le juge des libertés et de la détention doit vérifier concrètement que les éléments d'information présentés au soutien d'une demande de visite domiciliaire dans les locaux d'une entreprise spécifique sont suffisants à établir l'existence de présomptions de pratiques anticoncurrentielles justifiant cette mesure attentatoire au respect du domicile ; que la constatation d'un parallélisme de comportement ne suffit pas à elle seule à démontrer l'existence d'une présomption d'entente anticoncurrentielle horizontale ; qu'en se limitant, pour retenir l'existence d'une présomption d'entente horizontale, à faire état d'un " parallélisme de comportement " sans viser d'autres éléments susceptibles de constituer des indices de contacts entre la société X et ses concurrents, lesquels seraient nécessairement matériellement distincts de ceux invoqués au titre de prétendues ententes verticales, et en ne caractérisant pas quel parallélisme de comportement serait reproché à la société X et ses concurrents, le premier président n'a pas justifié légalement sa décision au regard de l'article L. 450-4 du Code de commerce ;
"6°) alors que le principe de loyauté des modes de preuve s'impose à l'Autorité de la concurrence ; que le respect de cette exigence doit faire l'objet d'un examen d'autant plus approfondi par les juges lorsqu'une mesure portant atteinte au respect du domicile a été autorisée en application d'une procédure non contradictoire ; que pour rejeter le moyen de la demanderesse tiré de la déloyauté de l'Autorité de la concurrence qui avait fait croire au juge des libertés et de la détention qu'elle aurait eu connaissance du recours, par la société X, à la pratique de la distribution sélective par l'intermédiaire de distributeurs, laissant entendre que la demanderesse aurait tenu cette pratique secrète, le premier président s'est borné à relever que le juge des libertés et de la détention avait été informé du recours à la distribution sélective par la société X au moyen de l'annexe 5 à la requête contenant la déclaration d'un distributeur ; qu'en statuant ainsi, lorsque la connaissance acquise par le juge des libertés et de la détention au moyen de l'annexe 5 de la pratique de la distribution sélective par la demanderesse attestait du silence déloyal conservé par l'Autorité de la concurrence quant à sa connaissance dès fin 2011 de cette pratique par l'intermédiaire de la société X elle-même et quant à la reconnaissance de la régularité de cette pratique dans son avis du 18 septembre 2012, le premier président a violé le principe fondamental susvisé ;
"7°) alors que le droit à un juge garanti par l'article 6 de la Convention imposant en matière de visites domiciliaires que les personnes concernées puissent obtenir un contrôle juridictionnel effectif, en fait comme en droit, de la suffisance et de la pertinence des motifs de la visite permettant de prévenir la survenance de l'opération, méconnaît cette exigence ainsi que celle d'impartialité la reproduction servile par le juge saisi d'une demande d'autorisation de la visite, dans les motifs de sa décision, des termes mêmes de la demande rédigée par les services de l'Autorité de la concurrence, laquelle donne l'apparence de l'absence de tout contrôle effectif des motifs de l'ingérence dans le droit au respect du domicile ; qu'en se bornant à relever que le juge des libertés et de la détention peut modifier le projet d'ordonnance rédigé par l'Autorité de la concurrence et qu'il a rendu son ordonnance cinq jours après la présentation de la requête pour retenir l'existence d'un contrôle effectif du juge lorsque les motifs de l'ordonnance constituaient la reproduction servile des termes de la requête ne révélant aucune appréciation personnelle du juge ayant autorisé la visite, le premier président a violé les articles 6 et 8 de la Convention européenne des droits de l'Homme ;
"8°) alors qu'une visite domiciliaire n'est nécessaire au sens de l'article 8 de la Convention que si elle est justifiée par des motifs pertinents et suffisants ; qu'en se fondant, pour retenir que la visite des locaux de la demanderesse était nécessaire, seulement sur deux éléments sans rapport avec la matérialité des présumées pratiques prohibées décrites dans la requête, dont une déclaration anonyme, non corroborée par d'autres éléments, ne rapportant aucun indice d'imposition d'une politique de prix par la demanderesse au distributeur concerné et une liste de produits, établie par un tiers, faisant état de surcroît d'une demande de retrait s'inscrivant dans le cadre de la pratique de distribution sélective mise en place par la demanderesse, dont l'Autorité de la concurrence était parfaitement informée et a reconnu sur le principe la régularité antérieurement à la demande de visite, le premier président, qui n'a pas caractérisé de motifs pertinents et suffisants justifiant la visite, a violé l'article 8 de la Convention européenne des droits de l'Homme" ;
Attendu, d'une part, que l'Administration n'a pas à rendre compte de son choix de recourir à la procédure de l'article L. 450-4 du Code de commerce, dont le déroulement est de nature à assurer la préservation des preuves et qui n'a pas un caractère subsidiaire par rapport aux autres procédures pouvant être utilisées ;
Attendu, d'autre part, que les énonciations de l'ordonnance attaquée mettent la Cour de cassation en mesure de s'assurer que le premier président de la cour d'appel a, sans insuffisance ni contradiction, répondu aux chefs péremptoires des conclusions dont il était saisi et caractérisé, s'étant référé, en les analysant, aux éléments d'information fournis par l'Administration, l'existence de présomptions de pratiques anticoncurrentielles touchant le secteur de la distribution des produits fabriqués, notamment, par la société en cause, justifiant la mesure autorisée et sa nécessité en considération des impératifs de lutte contre de telles pratiques ; d'où il suit que le moyen doit être écarté ;
Et attendu que l'ordonnance est régulière en la forme ;
Rejette le pourvoi.