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Décisions

Cass. com., 26 avril 2017, n° 15-14.450

COUR DE CASSATION

Arrêt

Rejet

PARTIES

Demandeur :

Etablissements Chatel et Gallay (Sté)

Défendeur :

Top Automazioni (Sté), Top Automazioni France (SAS)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Riffault-Silk

Rapporteur :

Mme Poillot-Peruzzetto

Avocat général :

Mme Pénichon

Avocats :

SCP Lyon-Caen, Thiriez, SCP Richard

T. com. Lyon, du 18 sept. 2012

18 septembre 2012

LA COUR : - Sur le moyen unique : - Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 7 janvier 2015), que la société Etablissements Chatel et Gallay (la société Chatel) commercialise depuis fin 2006 des produits pour l'alimentation des tours industriels fabriqués par la société Top Automazioni ; que cette dernière, par courriel du 6 juillet 2009, lui a réclamé le paiement de factures échues et l'a informée de sa décision de créer une filiale en France auprès de laquelle elle pourrait s'approvisionner ; que la société Chatel l'a assignée en paiement de dommages-intérêts pour rupture brutale d'une relation commerciale établie ;

Attendu que la société Chatel fait grief à l'arrêt du rejet de sa demande alors, selon le moyen : 1°) qu'engage la responsabilité de son auteur le fait de rompre brutalement, même partiellement, une relation commerciale établie sans préavis écrit tenant compte de la durée de cette relation ; qu'en l'espèce, les juges du fond ont eux-mêmes constaté que, après trois années de relation commerciale établie, la société italienne Top Automazioni a indiqué au cours de l'année 2009 à son distributeur français, la société Etablissements Chatel et Gallay, qu'une filiale allait être créée en France à l'effet d'assurer la distribution de ses machines, et qu'il appartenait à la société Etablissements Chatel et Gallay, si elle souhaitait continuer à distribuer ces machines, de se fournir à l'avenir auprès de la filiale ; qu'il en résultait que la société Top Automazioni avait mis un terme, au moins partiellement, à cette relation commerciale ; qu'en opposant que la société Top Automazioni avait, par un courriel du 13 juillet 2009, conditionné la vente de nouvelles machines à la société Etablissements Chatel et Gallay au règlement par cette dernière de la totalité de son arriéré, quand cette circonstance n'était pas de nature à remettre en cause le principe de la rupture des relations commerciales établies entre les deux sociétés au jour de la création de la filiale, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations, en violation de l'article L. 442-6, I, 5° du Code de commerce ; 2°) que les juges sont tenus de ne pas dénaturer les pièces sur lesquelles ils se fondent ; qu'en affirmant que les propositions faites dans le courriel du 13 juillet 2009 visaient pour la société Top Automazioni à maintenir la relation commerciale établie avec son distributeur quand, au vu des autres échanges intervenus entre les parties, tant antérieurement que postérieurement à ce courriel, il était clair que ces propositions n'avaient pour objet que de résorber l'arriéré de la société Etablissements Chatel et Gallay tout en offrant une solution temporaire dans l'attente de la création de la filiale, et qu'elles ne tendaient nullement à poursuivre au-delà des relations dont il avait été précédemment indiqué qu'elles devraient passer à l'avenir par la filiale française de la société Top Automazioni, la cour d'appel a dénaturé le courriel du 13 juillet 2009, en violation de l'article 1134 du Code civil ; 3°) que le fait de modifier les conditions d'approvisionnement d'un distributeur en imposant des contraintes nouvelles est susceptible de valoir rupture au moins partielle des relations commerciales ; qu'en l'espèce, il était constant et constaté par les juges eux-mêmes comme résultant de la correspondance échangée par les parties que la société Top Automazioni avait fait savoir qu'elle avait pris la décision de créer une filiale à l'effet d'assurer par ce moyen la distribution de ses machines en France et qu'il appartiendrait à la société Etablissements Chatel et Gallay de se fournir auprès d'elle ; qu'en décidant néanmoins de se fonder entièrement sur les seuls termes d'un courriel du 13 juillet 2009, qui consistait à conditionner toute nouvelle vente à la société Etablissements Chatel et Gallay au règlement par cette dernière de la totalité de son arriéré, quand ce courrier n'était pas de nature à établir que la société Top Automazioni aurait renoncé à la décision qu'elle avait précédemment arrêtée et communiquée à la société Etablissements Chatel et Gallay, les juges du fond se sont prononcés par des motifs impropres à exclure toute rupture, fût-elle partielle, de la relation commerciale établie entre les deux sociétés, privant ainsi leur décision de base légale au regard de l'article L. 442-6, I, 5° du Code de commerce ;

Mais attendu qu'après avoir constaté, par un motif non critiqué, que la société Chatel ne bénéficiait pas d'une exclusivité de distribution sur le territoire français, l'arrêt relève que postérieurement à l'annonce de la constitution d'une filiale en France auprès de laquelle cette société pourrait s'approvisionner, et en réponse à ses réserves exprimées le 9 juillet 2009, la société Top Automazioni, par courriel du 13 juillet 2009, a proposé la poursuite de la relation commerciale en maintenant le paiement habituel à 90 jours, sous réserve du règlement de l'arriéré, et que cette proposition n'a pas été acceptée par la société Chatel, qui s'est bornée à restituer les matériels invendus; qu'en l'état de ces constatations et appréciations, dont il résulte que la seule création d'une filiale en France par la société Top Automazioni n'avait modifié ni les conditions de distribution, ni les conditions commerciales d'approvisionnement de la société Chatel, la cour d'appel a pu, sans dénaturation et sans méconnaître les conséquences légales de ses constatations, écarter l'existence d'une rupture brutale imputable à la société Top Automazioni ; que le moyen n'est pas fondé ;

Par ces motifs : rejette le pourvoi.