Livv
Décisions

Cass. 1re civ., 26 avril 2017, n° 16-11.967

COUR DE CASSATION

Arrêt

Cassation

PARTIES

Demandeur :

Conseil Départemental de l'Ordre des Chirurgiens-Dentistes du Bas-Rhin, Syndicat des Chirurgiens-Dentistes du Bas-Rhin

Défendeur :

Mutualité Française d'Alsace, Fédération FSDL d'Alsace

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Batut

Rapporteur :

Mme Duval-Arnould

Avocat général :

M. Drouet

Avocats :

SCP Lyon-Caen, Thiriez, SCP Célice, Soltner, Texidor, Périer, SCP Fabiani, Luc-Thaler, Pinatel

TGI Strasbourg, du 3 juill. 2014

3 juillet 2014

LA COUR : - Attendu, selon l'arrêt attaqué, que, quelques jours avant l'ouverture d'un espace de santé mutualiste à Saverne, la Mutualité française d'Alsace (la mutuelle) a fait paraître dans le journal l'Alsace un publireportage intitulé " Bienvenue dans votre espace santé mutualiste de Saverne " et, dans le périodique le Mag édition pays de Saverne, un encart publicitaire ; que la mutuelle a fait diffuser un dépliant sur les activités du centre de Saverne, accompagné d'une lettre de présentation ; qu'un article dédié à l'extension des activités de l'espace de santé mutualiste de Colmar a, en outre, été publié dans le journal l'Alsace ; que le conseil départemental de l'ordre des chirurgiens-dentistes du Bas-Rhin, aux côtés duquel est intervenu le conseil départemental de l'ordre des chirurgiens-dentistes du Haut-Rhin (les conseils départementaux), le syndicat des chirurgiens-dentistes du Bas-Rhin (le syndicat) et la Fédération des syndicats dentaires libéraux d'Alsace (la fédération), ont assigné la mutuelle afin d'obtenir le paiement de dommages-intérêts, la publication de la décision et une injonction de cesser immédiatement tout acte publicitaire et tout acte de concurrence déloyale en réparation des préjudices causés par ses agissements ;

Sur les moyens uniques des pourvois principal et incident n° P 16-11.967, pris en leurs première et deuxième branches, rédigés en termes identiques, et sur le moyen unique du pourvoi n° C 16-15.108, pris en sa première branche, réunis et ci-après annexés : Attendu que les conseils départementaux et le syndicat font grief à l'arrêt de juger que la mutuelle n'est pas soumise aux dispositions issues du Code de déontologie des chirurgiens-dentistes ;

Attendu que, selon l'article R. 4127-201 du Code de la santé publique, les dispositions du Code de déontologie des chirurgiens-dentistes s'imposent à tout chirurgien-dentiste inscrit au tableau de l'ordre et à tout chirurgien-dentiste exécutant un acte professionnel dans les conditions prévues à l'article L. 4112-7 du même Code ou par une convention internationale, quelle que soit la forme d'exercice de la profession, et s'appliquent également aux étudiants en chirurgie dentaire ; que ces dispositions ne régissent que ces professionnels et ne peuvent être opposées aux personnes morales qui les emploient ; qu'il s'ensuit que la cour d'appel en a, à bon droit, écarté l'application à la mutuelle ; que le moyen n'est pas fondé ;

Mais sur la troisième branche du moyen unique des pourvois principal et incident n° P 16-11.967 rédigés en termes identiques et sur la seconde branche du moyen unique du pourvoi n° C 16-15.108 réunis : - Vu l'article 1382, devenu 1240 du Code civil, ensemble les articles L. 6323-1 et R. 4127-215 du Code de la santé publique ; - Attendu que, pour rejeter les demandes des conseils départementaux, du syndicat et de la fédération, l'arrêt relève que, dès lors que le Code de déontologie des chirurgiens-dentistes n'est pas opposable à la mutuelle, aucune faute délictuelle fondée sur une inobservation de ce Code ne peut être retenue à son encontre ;

Qu'en se déterminant ainsi, sans rechercher, comme il le lui était demandé, si, bien que la mutuelle ne soit pas soumise aux dispositions du Code de déontologie des chirurgiens-dentistes, elle n'avait pas eu recours à des procédés publicitaires de nature à favoriser le développement de l'activité des chirurgiens-dentistes employés par elle, constitutifs, comme tels, d'actes de concurrence déloyale au préjudice de praticiens exerçant la même activité hors du centre de santé mutualiste, la cour d'appel a privé sa décision de base légale ;

Par ces motifs et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs : casse et annule, mais seulement en ce qu'il rejette les demandes des conseils départementaux de l'ordre des chirurgiens-dentistes du Bas-Rhin et du Haut-Rhin et du syndicat des chirurgiens-dentistes du Bas-Rhin, l'arrêt rendu le 20 janvier 2016, entre les parties, par la Cour d'appel de Colmar ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la Cour d'appel de Paris.