Cass. com., 11 mai 2017, n° 15-28.175
COUR DE CASSATION
Arrêt
Cassation
PARTIES
Demandeur :
Lumiscaphe (SARL)
Défendeur :
PHD Consulting (SARL)
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
Mme Mouillard
Rapporteur :
Mme Laporte
Avocats :
SCP Richard, SCP Meier-Bourdeau, Lécuyer
LA COUR : - Statuant tant sur le pourvoi principal formé par la société Lumiscaphe que sur le pourvoi incident relevé par la société PHD Consulting ; - Attendu, selon l'arrêt attaqué, que la société Lumiscaphe ayant résilié pour fautes graves les contrats d'agence commerciale et de partenariat qui la liaient à la société PHD Consulting (la société PHD), celle-ci l'a assignée en réparation de ses préjudices ;
Sur le premier moyen, pris en ses trois premières branches, le deuxième moyen, pris en sa première branche, et le quatrième moyen du pourvoi principal, réunis : - Attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce moyen, qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;
Mais sur le premier moyen du pourvoi principal, pris en sa cinquième branche : - Vu l'article 4 du Code de procédure civile ; - Attendu que pour dire que la société PHD n'a pas commis de faute grave à raison de la violation de la clause de confidentialité conclue entre la société Lumiscaphe et la société Louis Vuitton Malletier, qui faisait interdiction à la mandante de mentionner le nom de ce client, et condamner celle-ci au paiement d'indemnités de cessation de contrat et de préavis, l'arrêt retient qu'il n'est pas rapporté la preuve que l'agent ait violé cette clause ;
Qu'en statuant ainsi, alors que la société PHD avait admis avoir divulgué à une société tierce le nom de la société Louis Vuitton Malletier en tant que client de la société Lumiscaphe, la cour d'appel a méconnu les termes du litige et violé le texte susvisé ;
Sur le même moyen de ce pourvoi, pris en sa huitième branche : - Vu les articles L. 134-11, alinéa 5, et L. 134-13 du Code de commerce ; - Attendu que pour exclure la faute grave résultant du défaut de souscription d'une assurance pour couvrir les risques liés à son activité d'agent commercial imputée à la société PHD, et condamner la société Lumiscaphe à lui payer les mêmes indemnités, l'arrêt retient que celle-ci n'a réclamé le justificatif de ce document qu'en 2011 bien que les relations entre les parties aient débuté en janvier 2008 ;
Qu'en se déterminant ainsi, par des motifs impropres à écarter toute faute grave dès lors que l'absence de réclamation d'un tel justificatif par la société Lumiscaphe ne dispensait pas la société PHD de remplir l'obligation qu'elle avait contractée à cet égard, selon les modalités définies au contrat, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision ;
Sur le même moyen de ce pourvoi, pris en sa neuvième branche : - Vu l'article 455 du Code de procédure civile ; - Qu'en statuant comme elle a fait, sans répondre aux conclusions de la société Lumiscaphe qui faisait valoir que la société PHD, ayant omis, à de nombreuses reprises, de l'informer sur le déroulement de sa mission et ses résultats, avait commis une faute grave en manquant à son obligation de loyauté, la cour d'appel a méconnu les exigences du texte susvisé ;
Sur le deuxième moyen de ce pourvoi, pris en sa deuxième branche : - Vu l'article 4 du Code de procédure civile ; - Attendu que pour condamner la société Lumiscaphe à payer à la société PHD la somme de 108 714,96 euros au titre des commissions sur les commandes passées antérieurement à la rupture du contrat d'agence commerciale, l'arrêt retient, par motifs adoptés, que les parties s'accordent sur les affaires soumises à commission au bénéfice de celle-ci, au titre de l'année 2011, hormis une commande Renault ;
Qu'en statuant ainsi, alors que la société Lumiscaphe contestait aussi dans ses conclusions devoir des commissions au titre de l'affaire Longtek, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;
Sur le troisième moyen de ce pourvoi : - Vu l'obligation pour le juge de ne pas dénaturer l'écrit qui lui est soumis ; - Attendu que pour condamner la société Lumiscaphe à payer à la société PHD la somme de 600 000 euros au titre des commissions sur les affaires réalisées avant la fin du contrat d'agence commerciale, l'arrêt retient qu'il ressort du décompte qu'elle produit que la société PHD a facturé la somme totale de 671 270,57 euros, toutes taxes comprises, entre mars 2011 et février 2012, correspondant à la période des douze derniers mois d'exécution du contrat d'agence commerciale ;
Qu'en statuant ainsi, alors que ce décompte se bornait à reprendre les commissions perçues pour l'année entière, sans indiquer celles dues au titre des mois de janvier et février 2011 ni mentionner le chiffre d'affaires réalisé pendant cette période, la cour d'appel, qui en a dénaturé les termes clairs et précis, a violé le principe susvisé ;
Sur le moyen unique du pourvoi incident, pris en sa première branche : - Vu l'article L. 134-1 du Code de commerce ; - Attendu que pour dire l'appel de la société PHD irrecevable au titre de ses demandes indemnitaires concernant le contrat de partenariat en rejetant sa demande de requalification de ce contrat en contrat d'agence commerciale, l'arrêt retient que les sociétés Lumiscaphe et PHD étaient liées par deux conventions formalisées parfaitement distinctes juridiquement, ayant à la fois un objet et des modalités propres ;
Qu'en statuant ainsi, alors que l'application du statut d'agent commercial ne dépend ni de la volonté exprimée par les parties dans le contrat, ni de la dénomination qu'elles ont donnée à leurs conventions, mais des seules conditions dans lesquelles l'activité est effectivement exercée, la cour d'appel, qui n'a pas recherché les conditions concrètes dans lesquelles avait été exécuté le contrat de partenariat, a violé le texte susvisé ;
Par ces motifs, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs : casse et annule, sauf en ce que, confirmant le jugement, il rejette les demandes de la société Lumiscaphe de nullité de la clause de non-concurrence stipulée dans le contrat d'agence commerciale et indemnitaire au titre de la violation de cette clause, l'arrêt rendu le 30 septembre 2015, entre les parties, par la Cour d'appel de Bordeaux ; remet, en conséquence, sur les autres points, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la Cour d'appel d'Angers.