CA Toulouse, 1re ch. sect. 1, 22 mai 2017, n° 15-04685
TOULOUSE
Arrêt
PARTIES
Demandeur :
Rambervillers Automobiles (SARL)
Défendeur :
Hourtal, BMW France (SA)
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Beauclair
Conseillers :
Mme Mazarin-Georgin, M. Soubeyran
Avocats :
Mes Marbot, Crouvizier, Jeay, Gorrias, Serreuille
Exposé du litige
Vu l'appel interjeté le 30 septembre 2015 par la SARL Rambervillers Automobiles à l'encontre d'un jugement du Tribunal d'instance de Toulouse en date du 28 août 2015 ;
Vu les conclusions de la SARL Rambervillers Automobiles en date du 30 mars 2017 ;
Vu les conclusions de Monsieur Jonathan Hourtal en date du 26 janvier 2016 ;
Vu les conclusions de la SA BMW France en date du 29 février 2016 ;
Vu l'ordonnance de clôture du 11 avril 2017 pour l'audience de plaidoiries fixée au 25 avril 2017 ;
Monsieur Jonathan Hourtal a acheté en décembre 2012 un véhicule d'occasion de marque Mini Cooper immatriculé BJ 289 SV. Le véhicule est tombé en panne sur l'autoroute le 7 avril 2014. Monsieur Hourtal a informé son assurance, qui a mandaté le cabinet BCA. Ce dernier a réalisé un premier examen du véhicule le 6 mai 2014, et a relevé des dommages pour la réparation desquels un devis de 4 628,80 euros a été établi, déduction faite d'une participation consentie à hauteur de 70 % par le constructeur aux frais de changement du moteur, estimés à 5 076,51 euros HT.
Monsieur Hourtal a mandaté un expert en la personne de Monsieur Dominique Meyer, qui a procédé le 15 juillet 2014 à de nouvelles investigations auxquelles la société BMW France n'a pas assisté. Aux termes de son rapport en date du 24 juillet 2014, l'expert a conclu que le moteur du véhicule était atteint d'un défaut constituant un vice de conception ou de fabrication.
La société BMW France a maintenu sa proposition.
Par exploit d'huissier en date du 6 novembre 2014, Monsieur Jonathan Hourtal a assigné la société BMW France aux fins de voir avec exécution provisoire :
- condamner la société BMW France au paiement des sommes suivantes :
8 297,46 euros au titre des frais de remise en état ;
1 500 euros à titre de dommages et intérêts ;
2 200 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile ;
outre les entiers dépens.
Par assignation en date du 25 mars 2015, Monsieur Jonathan Hourtal a appelé en cause à la SARL Rambervillers Automobiles.
Les dossiers ont été joints le 28 avril 2015.
Par jugement en date du 28 août 2015, le Tribunal d'instance de Toulouse a :
- débouté Monsieur Jonathan Hourtal de ses demandes à l'encontre de la société BMW France ;
- condamné la SARL Rambervillers Automobile à payer à Monsieur Jonathan Hourtal les sommes de :
8 297,46 euros correspondant au coût des réparations du véhicule Mini Cooper immatriculé BJ 289 SV ;
1 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile ;
- débouté Monsieur Jonathan Hourtal du surplus de ses demandes ;
- débouté la société BMW France de sa demande de dommages et intérêts ;
- débouté la société BMW France de sa demande sur le fondement des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile ;
- prononcé l'exécution provisoire ;
- condamné la SARL Rambervillers Automobiles aux dépens.
La SARL Rambervillers Automobiles demande à la cour, le dispositif de ses écritures reprenant ses moyens, de :
- à titre principal, constater que la SA BMW France n'a jamais communiqué ses pièces à la SARL Rambervillers Automobiles, en violation du principe du contradictoire ;
- annuler le jugement entrepris ;
- statuant à nouveau, dire que le rapport d'expertise privé de Monsieur Dominique Meyer est inopposable à la SARL Rambervillers Automobiles ;
- à titre subsidiaire, dire le rapport d'expertise de Monsieur Dominique Meyer nul et de nul effet pour violation du principe du contradictoire ;
- dire que Monsieur Jonathan Hourtal ne rapporte pas la preuve de l'existence d'un vice caché préalable à la vente du véhicule de marque Mini Cooper immatriculé BJ 289 SV par la SARL Rambervillers Automobiles à Monsieur et Madame Tatham;
- en toutes hypothèses, infirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions ;
- dire que les demandes présentées par Monsieur Jonathan Hourtal à l'encontre de la SARL Rambervillers Automobiles sont mal fondées ;
- débouter Monsieur Hourtal de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions ;
- condamner Monsieur Jonathan Hourtal à verser à la SARL Rambervillers Automobiles la somme de 9 297,46 euros, somme qui a été réglée en vertu de l'exécution provisoire, avec intérêts au taux légal à compter du 29 février 2016 ;
- très subsidiairement, condamner la SA BMW France à garantir la SARL Rambervillers Automobiles de toutes les condamnations qui pourraient être prononcées contre elle ;
- en tout état de cause, débouter Monsieur Hourtal de sa demande de dommages-intérêts complémentaires ;
- condamner Monsieur Jonathan Hourtal à verser à la SARL Rambervillers Automobiles la somme de 8 400 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens de la procédure, dont distraction au profit de la Selarl Lexavoué Pau-Toulouse.
La SA BMW France demande à la cour, le dispositif de ses écritures reprenant ses moyens, de :
- débouter la société Rambervillers de sa demande d'annulation du jugement ;
- confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a débouté Monsieur Hourtal de ses demandes à l'encontre de BMW France au visa de la garantie légale des vices cachés, BMW France n'étant pas l'un des vendeurs successifs du véhicule litigieux ;
- dire irrecevable l'appel en garantie de la société Rambervillers à l'encontre de BMW France, s'agissant d'une demande nouvelle en cause d'appel ;
- subsidiairement, considérer mal fondée la demande de garantie formée par la société Rambervillers à l'encontre de BMW France et par conséquent l'en débouter ;
- en toute hypothèse, débouter toute partie de ses demandes, fins et conclusions dirigées à l'encontre de BMW France ;
- condamner tout succombant à verser à BMW France la somme de 3 000 euros au titre des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile ;
- condamner tout succombant aux dépens dont distraction au profit de la SCP Boyer & Gorrias. Maître Pascal Gorrias.
Monsieur Jonathan Hourtal demande à la cour, le dispositif de ses écritures reprenant ses moyens, de :
- vu les pièces énumérées au bordereau annexé, et prenant droit des dispositions des articles 1641 et suivants du Code civil à titre principal et 1154 et 1147 à titre subsidiaire ;
- réformer le jugement entrepris en ce qu'il a débouté Monsieur Hourtal de ses demandes à l'encontre de BMW France et statuant à nouveau ;
- condamner la société BMW France, in solidum avec la société Rambervillers Automobiles, à payer à Monsieur Hourtal les sommes de 8 297,46 euros correspondant au coût des réparations du véhicule Mini Cooper immatriculé sous le N° BJ 289 SV, et de 1 500 euros à titre de dommages et intérêts complémentaires ;
- confirmer le jugement du 28 août 2015 en ce qu'il a retenu la responsabilité de la société Rambervillers Automobiles et l'a condamnée à payer à Monsieur Hourtal la somme de 8 297,46 euros ;
- réformer la décision s'agissant du préjudice lié aux frais et à l'immobilisation du véhicule et condamner la société Rambervillers Automobiles au paiement de la somme de 1 500 euros à titre de dommages et intérêts ;
- condamner la société BMW France in solidum avec la société Rambervillers Automobiles a payer à Monsieur Hourtal une indemnité de 3 000 euros sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile ;
- les condamner in solidum aux entiers dépens, distraction en étant prononcée au profit de Me Jeay.
Motifs de la décision.
1- Sur la nullité du jugement
La SARL Rambervillers soutient que le jugement est nul faute pour le premier juge de ne pas avoir assuré la communication contradictoire des pièces entre les parties, en particulier de ne pas avoir vérifié que les pièces produites par BMW France avaient été communiquées à la SARL Rambervillers.
La procédure devant le tribunal d'instance est orale, la communication des pièces se fait entre les parties, en l'espèce toutes représentées à l'audience du 23 juin 2015.
La SARL Rambervillers a été avisée de l'existence des deux pièces communiquées par BMW France dans l'assignation que lui a délivrée Monsieur Hourtal qui emportait signification des conclusions de BMW France en date du 20 janvier 2015, auxquelles était joint le bordereau de communication de pièces. Lesdites conclusions développaient les arguments de BMW France fondées sur les pièces litigieuses.
Une fois assignée, la SARL Rambervillers n'a pas informé la société BMW France, qu'elle n'avait pas reçu ses pièces, et ne les a pas réclamées à l'audience ni soulevé devant le premier juge d'incident de communication.
La société BMW France n'a pas conclu contre la SARL Rambervillers et n'a formé aucune demande à son encontre. La SARL Rambervillers ne justifie d'aucun grief.
2- Sur l'action engagée par Monsieur Hourtal à l'encontre de la SA BMW France
L'action de Monsieur Hourtal à l'encontre de la SA BMW a pour fondement la garantie des vices cachés de l'article 1641 du Code civil dont sont tenus les vendeurs successifs du véhicule, l'importateur et le constructeur.
La SA BMW France est l'importateur des véhicules neufs de la marque BMW et Mini pour la France. En l'espèce il est établi que le véhicule est un véhicule d'occasion importé d'Allemagne par la SARL Rambervillers Automobiles.
La SA BMW France n'est donc ni le constructeur ni l'importateur ni un vendeur du véhicule litigieux. La demande ne peut donc prospérer sur le fondement de l'article 1641 du Code civil.
Monsieur Hourtal produit aux débats des factures d'entretien du véhicule par la SA Pelras concessionnaire local de la marque BMW. Monsieur Hourtal fait donc partie de la clientèle de la marque BMW pour l'entretien de son véhicule.
Une proposition commerciale de la SA BMW France à un propriétaire d'un véhicule de la marque, qui fait procéder à son entretien dans une concession de son réseau, ne constitue pas une reconnaissance de responsabilité relative à la garantie des vices cachés due à l'occasion d'une vente à laquelle elle n'est pas partie.
C'est donc à bon droit que le premier juge a débouté Monsieur Hourtal de sa demande à l'encontre de la SA BMW France.
3- Sur la demande à l'encontre de la SARL Rambervillers
Aux termes de l'article 1641 du Code civil, le vendeur est tenu de la garantie à raison des défauts cachés de la chose vendue qui la rendent impropre à l'usage auquel on la destine ou qui diminuent tellement cet usage que l'acheteur ne l'aurait pas acquise, ou n'en aurait donné qu'un moindre prix, s'il les avait connus.
Aux termes de l'article 1644 du Code civil, dans le cas des articles 1641 et 1643, l'acheteur a le choix de rendre la chose et de se faire restituer le prix, ou de garder la chose et de se faire rendre une partie du prix.
Le premier juge a justement rappelé que le sous-acquéreur dispose à l'encontre du fabricant ou d'un vendeur intermédiaire, pour la garantie du vice caché affectant le véhicule dès sa fabrication, d'une action directe de nature contractuelle. Aucune disposition ne l'oblige à appeler en cause son vendeur direct.
Monsieur Hourtal fonde sa demande sur deux rapports d'expertise non contradictoires dressés par le cabinet BCA puis par Monsieur Meyer. Ces opérations se sont déroulées avant l'intervention de la SARL Rambervillers Automobiles à l'instance.
Ces rapports ont été régulièrement communiqués et ont été discutés tant devant le premier juge que devant la cour.
Cependant, le juge ne peut se fonder exclusivement sur des rapports établis de manière non contradictoire, peu important que ces rapports aient été soumis à la libre discussion des parties. Ainsi, si le juge peut tenir compte d'une expertise réalisée non contradictoirement, c'est à la condition que cette dernière vienne corroborer d'autres éléments de preuve.
Or le seul élément de preuve produit à l'appui de l'existence du vice caché allégué est constitué des rapports BCA et Meyer établis à la demande de Monsieur Hourtal et non contradictoires qui, en l'absence d'autres éléments de preuve, sont insuffisants pour établir l'existence dudit vice caché.
La demande de Monsieur Hourtal ne peut donc prospérer et le jugement doit donc être infirmé de ce chef.
3- Sur les demandes accessoires.
La SARL Rambervillers Automobiles a exécuté le jugement assorti de l'exécution provisoire. Ce jugement ayant été réformé par le présent arrêt, l'obligation de rembourser résulte de plein droit de la réformation de la décision de première instance ayant alloué des sommes d'argent. L'arrêt infirmatif constitue le titre exécutoire permettant le recouvrement forcé des sommes versées en vertu du jugement réformé.
Monsieur Hourtal succombe, il supportera la charge des dépens augmentée d'une somme de 1 000 euros au bénéfice de la SA BMW France et de la SARL Rambervillers Automobiles sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile.
Par ces motifs, LA COUR, Confirme le jugement entrepris en ce qu'il a débouté Monsieur Jonathan Hourtal de ses demandes à l'encontre de la société BMW France ; L'infirme pour le surplus et statuant à nouveau ; Déboute Monsieur Jonathan Hourtal de ses demandes à l'encontre de la SARL Rambervillers Automobiles ; Condamne Monsieur Jonathan Hourtal à payer à la SA BMW France et à la SARL Rambervillers Automobiles, chacune la somme de 1 000 euros en application des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile. Condamne Monsieur Jonathan Hourtal aux entiers dépens de première instance et d'appel dont distraction au profit de la Selarl Lexavoué Pau-Toulouse et de la SCP Boyer & Gorrias.