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Décisions

CA Rennes, 4e ch., 18 mai 2017, n° 16-02803

RENNES

Arrêt

PARTIES

Demandeur :

Engie Home Services (Sté)

Défendeur :

AGPM Assurances (Sté), M. Construction (SAS), Chaffoteaux et Maury (SAS)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Hubert

Conseillers :

Mmes Delapierregrosse, Gros

TGI Nantes, du 18 févr. 2016

18 février 2016

FAITS et PROCÉDURE

Monsieur Jean-Luc H. et Madame Claude C. épouse H. ont confié la construction de leur maison d'habitation à la société M. Construction SAS selon contrat de CMI du 20 juillet 2000.

La réception est intervenue le 31 juillet 2002 sans réserves concernant l'installation de chauffage.

Par contrat du 15 octobre 2008, les époux H. ont confié l'entretien de leur chaudière murale de marque Chaffoteaux et Maury installé dans leur garage à la société Savelys devenue Engie Home Services.

Cette société a effectué la visite d'entretien annuelle le 22 novembre 2010.

Le 27 novembre 2010, un incendie s'est déclaré dans le garage de l'immeuble et s'est propagé à l'ensemble de l'habitation la rendant inhabitable.

Par acte d'huissier du 10 mars 2011, la compagnie AGPM Assurances, assureur habitation des époux H., a fait assigner la société M. Construction et la société Savelys en référé expertise.

Les époux H. sont intervenus volontairement à cette procédure par conclusions du 17 mars 2011.

Par ordonnance du 26 mai 2011, le juge des référés du Tribunal de grande instance de Nantes a confié une mesure d'expertise à Monsieur D.

Par ordonnance rendue le 20 octobre 2011, les opérations d'expertise ont été étendues, sur assignations en date du 20 septembre 2011 de la société M. Construction, à la société CEDEO fournisseur de la chaudière ainsi que la société Chaffoteaux et Maury fabricant.

Monsieur D. a déposé son rapport le 2 janvier 2014 après s'être adjoint les services, en qualité de sapiteurs, d'une part de Monsieur Patrick H., architecte, afin d'évaluer les préjudices mobiliers et immobiliers, ainsi que de préciser et de chiffrer les travaux de remise en état ou de reconstruction, et d'autre part de Monsieur S. afin d'évaluer les préjudices mobilières.

Le 23 avril 2015, la compagnie AGPM Assurances a refusé sa garantie invoquant la mauvaise foi et les fausses déclarations des époux H.

Par acte des 29 et 30 juillet et du 5 août 2015, les époux H. ont fait assigner à jour fixe la compagnie AGPM Assurances, la société M. Construction, la société Chaffoteaux et Maury ainsi que la société Savelys aux fins d'indemnisation de leurs préjudices. Ils ont à titre essentiel sollicité la condamnation in solidum des défendeurs à leur verser la somme de 173 713,01 euros à titre de dommages-intérêts en réparation des préjudices consécutifs à l'incendie ainsi que celle, à titre provisionnel, de 58'326,35 euros pour les frais de relogement jusqu'au 1er juillet 2015 en précisant que la compagnie AGPM Assurances leur avaient versé la somme de 39 875 euro compte tenus de la franchise de 125euro.

Par jugement en date du 18 février 2016 le Tribunal de grande instance de Nantes a

- Débouté la Compagnie AGPM Assurances de se demande de déchéance de garantie à l'encontre de Monsieur et Madame H. et donc de restitution des sommes versées par elle ;

- Condamné in solidum la compagnie AGPM Assurances, la SAS M. Construction et la SAS Savelys à payer à Monsieur et Madame H.:

- la somme de 147 400,27 euro au titre des préjudices consécutifs à l'incendie du 27 novembre 2010 et ce, avec indexation sur l'indice BT01 entre le 23 décembre 2013 et la date du présent jugement sur la somme de 131 551,60 E, et pour le surplus avec intérêts au taux légal à compter du 5 août 2015, puis avec intérêts au taux légal jusqu'au jour du paiement pour la totalité de la somme à compter du présent jugement,

- la somme de 58 326,35 euro arrêtée au 1er juillet 2005 au titre des frais de relogement et ce, à titre provisionnel en attente de leur réinstallation dans leur maison,

- Dit que la Compagnie AGPM Assurances sera tenue des condamnations prononcées à son encontre dans la limite de la franchise contractuelle de 125 euro et que la somme de 39 875euro, déjà versée par la Compagnie d'assurances AGPM à titre de provision, viendra en déduction de sa part ;

- Dit que la charge définitive des condamnations judiciaires principales prononcées à l'encontre de la Compagnie AGPM Assurances, de la SAS M.

Construction et de la SAS Savelys sera supportée à proportion de 80 % par la SAS Savelys et de 20 % par la SAS M. Construction ;

- Condamné in solidum la Compagnie AGPM Assurances, la SAS M. Construction et la SAS Savelys à payer à M et Mme H. la somme de 7 000 euro en application de l'article 700 du Code de procédure civile ;

- Condamné in solidum la Compagnie AGPM Assurances, la SAS M. Construction et la SAS Savelys aux entiers dépens comprenant les frais d'expertise judiciaire, et Dit qu'ils seront recouvrés conformément à l'article 699 du Code de procédure civile au profit de la Selarl Claire L. Avocat ;

- Dit que la charge définitive des condamnations judiciaires prononcées à l'encontre de la Compagnie AGPM Assurances, de la SAS M. Construction et de la SAS Savelys, au titre des dépens et en application des dispositions de l'article 700 du Code de

Procédure Civile, sera supportée à proportion de 40 % par la Compagnie AGPM Assurances, de 40 % par la SAS Savelys et de 20 % par la SAS M. Construction ;

- Dit que la Compagnie AGPM Assurances, subrogée dans les droits de son assurée, et la SAS M. Construction sont bien fondées en leur recours en garantie aux conditions et proportions susdites ;

- Rejeté les demandes en garantie à l'encontre de la société Chaffoteaux et Maury;

- Débouté la SAS Savelys et la SAS M. Construction de leurs autres demandes formées à l'encontre de la Compagnie AGPM Assurances,

- Débouté M. et Mme H. et du surplus de leurs demandes, et les défendeurs de leurs propres demandes plus amples ou contraires ;

- Ordonné l'exécution provisoire du présent jugement.

Le tribunal a débouté la compagnie AGPM Assurances de sa demande tendant à la déchéance de sa garantie pour mauvaise foi et fausses déclarations des époux H. Il a retenu la responsabilité décennale de la société M. Construction sur le fondement de l'article 1792-2 du Code civil, la responsabilité contractuelle de la société Savelys et exonéré la société Chaffoteaux et Maury de toute responsabilité.

La société M. Construction a interjeté appel de ce jugement le 4 avril 2016. (RG 16/4250).

La Sasu Savelys a aussi interjeté appel du même jugement le 12 avril 2016. (RG 16/2803).

Elle a renouvelé son appel le 13 avril 2016 sous la dénomination Sasu Engie Home Services anciennement Savelys (RG 16/2848).

Les procédures ont été jointes par ordonnances du conseiller de la mise en état des 21 avril et 30 juin 2016 sous le numéro 16/2803.

Les parties ont conclu.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 14 février 2017.

PRÉTENTIONS et MOYENS DES PARTIES

Vu les conclusions en date du 31 janvier 2017 de la société M. Construction qui demande à la cour de

- Infirmer e jugement déféré en ce qu'il a considéré que la responsabilité de la société M.

Construction était engagée et l'a condamnée à garantir la société AGPM à concurrence de 20 % du dommage subi par les époux H. ;

- Mettre la société M. Construction purement et simplement hors de cause ;

A titre subsidiaire,

- dire que la société M. Construction devra être garantie solidairement tant par la société Savelys que par la société Chaffoteaux et Maury de toute condamnation pouvant intervenir à son encontre ;

- Sur le préjudice, constater que le préjudice des époux H. a été aggravé d'un pourcentage qui ne saurait être inférieur à 1/3 minimum par les carences et l'inertie de la compagnie d'assurances AGPM, qui devra seule assumer dans cette proportion les conséquences de ses actes, concernant l'importance du préjudice dont elle est seule responsable ;

- Les condamner aux entiers dépens et à 5 000 euros au titre de l'article 700 au profit de la société M. Construction.

La société M. Construction soutient pour l'essentiel que :

- il résulte de l'expertise judiciaire ainsi que du rapport de la SDISS 44 annexés aux procès-verbaux de gendarmerie que la cause de l'incendie provient d'un dysfonctionnement de la chaudière qui constitue, pour le constructeur, une cause étrangère exonératoire ; la société Savelys intervenu sur la chaudière 5 jours avant l'incendie engage sa responsabilité contractuelle pour n'avoir pas détecté la micro fuite de gaz à l'origine de l'inflammation ; la responsabilité sans faute du fabricant, la société Chaffoteaux et Maury est engagée sur le fondement des articles 1386-1 et 1386-4 du Code civil puisque la chaudière n'offrait pas la sécurité à laquelle on pouvait s'attendre et que l'expert conclut que la micro fuite peut être due à l'inflammation d'un des composants situés à son voisinage c'est-à-dire à l'ensemble pompe-dégazeur et la vanne de gaz ; malgré la proposition de l'expert judiciaire, la société Chaffoteaux et Maury n'a pas fait expertiser la chaudière ; en cas de condamnation, les sociétés Savelys et Chaffoteaux et Maury doivent garantir la société M. Construction,

- l'inertie de la compagnie AGPM et l'absence de protection efficace permettant de sauvegarder une grande partie du bâtiment sinistré ont contribué à l'aggravation des préjudices des époux H. ; l'assureur doit donc supporter 1/3 de ces préjudices.

Vu les conclusions en date du 27 septembre 2016 de la société Engie Home Services anciennement dénommée Savelys Sasu qui demande à la cour de

Vu l'article 9 du Code de procédure civile,

Vu les articles 1147 et 1134 du Code civil,

Vu les articles 1386-1 et suivants et 1641 du Code civil,

A TITRE PRINCIPAL

- Dire que la charge de la preuve incombe au demandeur à l'action,

- Dire et juger que la cause du sinistre n'est pas établie,

- Dire et juger que la faute de la société Savelys devenue Engie Home Services, n'est pas établie,

- Dire que le Tribunal, en retenant que l'incendie a eu pour origine une micro-fuite que la société Savelys devenue Engie Home, aurait dû détecter, a fait une lecture erronée du rapport d'expertise,

- Dire que la société M. Construction n'établit pas davantage la faute de la société Engie Home Services,

En conséquence,

- Infirmer le jugement entrepris en ce qu'il a retenu un manquement de la société Savelys, devenue Engie Home Services, dans l'exécution de ses obligations contractuelles,

- Débouter la société M. Construction de son appel à l'encontre de la société Savelys, devenue Engie Home Services,

- Condamner la Compagnie AGPM, in solidum avec les époux H., à verser à la société Savelys, devenue Engie Home Services, une somme de 5 000 euros au titre des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile,

- Condamner la Compagnie AGPM, solidairement avec les époux H., aux entiers dépens de référés, de première instance et d'appel, en ce compris les frais d'expertise,

A TITRE SUBSIDIAIRE,

- Confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a retenu une part de responsabilité à charge de la société M. Construction,

- Infirmer le jugement en ce qu'il a fixé la part résiduelle de responsabilité de la société M. Construction à 20 %, et, statuant à nouveau, la fixer à 50 %,

- Dire et juger que les prétentions des époux H. devront être réduites à de plus justes proportions,

- Dire que les provisions versées par la société AGPM devront venir en réduction des sommes versées aux époux H.,

- Dire que la société AGPM a contribué à la pérennisation des dommages des demandeurs en adoptant une attitude incohérente à l'égard de ses assurés et en ne mettant pas en œuvre ses garanties,

- Dire que la société AGPM, en tant qu'assureur habitation des demandeurs, devra supporter le remboursement de leurs frais de relogement,

- Débouter la société AGPM des demandes qu'elle formule au titre de ses frais d'assistance à expertise ainsi qu'au titre de ses frais irrépétibles,

EN TOUT ETAT DE CAUSE

Dire que l'appareil fabriqué par la société Chaffoteaux et Maury ne présentait pas la sécurité à laquelle on pouvait légitimement s'attendre,

- Dire que l'appareil fabriqué par la société Chaffoteaux et Maury était défectueux,

- Dire que la société Chaffoteaux et Maury, est tenue en sa qualité de fabricant, des conséquences des défauts de sécurité affectant son matériel,

- Dire que la société Chaffoteaux et Maury devra garantir la société Savelys, devenue Engie Home Services, de toutes condamnations éventuellement prononcées à son encontre,

- Condamner la société Chaffoteaux et Maury, ou qui mieux le devra, à verser à la société Savelys devenue Engie Home Services une somme de 5 000 euros au titre des dispositions de l'articIe 700 du Code de procédure civile,

- Condamner la société Chaffoteaux et Maury, ou qui mieux le devra, aux entiers dépens de référé, de première instance et d'appel.

L'argumentation de la société Engie Home Services anciennement dénommée Savelys Sasu est pour l'essentiel la suivante :

Sur l'absence de responsabilité de la société Savelys

- ni l'origine ni la cause de l'incendie ne résultent du rapport d'expertise judiciaire qui prouve au contraire que la micro fuite de gaz n'est que la conséquence de l'inflammation de la vanne gaz située à proximité ; l'employé de la société Savelys qui n'était tenu qu'à une obligation de moyens n'a donc pas pu détecter la micro fuite et sa responsabilité n'a pas été mise en cause par l'expert judiciaire ; il lui était impossible de prévenir l'inflammation de la vanne gaz; les demandeurs et la compagnie AGPM n'ont pas répondu à la proposition de l'expert judiciaire de faire expertiser le composant à l'origine de l'inflammation et le scénario de celle-ci par un laboratoire spécialisé ; en l'absence de cette expertise, le lien de causalité entre l'intervention du technicien Savelys et le sinistre n'est pas établi ; les époux H. sont restés évasifs sur le positionnement de leur lave-linge pourvu d'une alimentation électrique provisoire et sur la fuite d'eau dont il était affecté ;

À titre subsidiaire, sur les préjudices et le partage de responsabilité

- la responsabilité de la société M. Construction doit être portée à 50 % ;

-le chiffrage du montant des travaux réparatoires immobilier à la somme de 131'551,60 euros effectués par le tribunal doit être confirmé ;

- la réfection de la cuisine aménagée (4 593,13 euros) a été incluse dans le chiffrage de l'expert ;

- le réaménagement du jardin (3 432 euro) n'est pas la conséquence de l'incendie ;

- le coût du bâchage provisoire (535,94 euros) est justifiée ;

- le coût de l'intervention du plombier pour vidange des sanitaires (80,18 euros) est déjà compris dans le devis général des travaux réparatoires immobiliers ;

- la demande au titre du mobilier endommagé (12 076,55 euros) n'est pas expliquée ;

-les frais de relogement (58 328,35 euros) doivent être imputés à l'assureur qui a fini, à tort, par dénie sa garantie ;

- aucun préjudice moral n'est prouvé ;

- la demande de doublement des frais d'emménagement arbitrés par le tribunal à 3256 euroon doit être rejetée ;

- la somme de 40 000 euro versée par la compagnie AGPM à ses assurés doit être déduite des sommes qui leur seront réglées ; l'assureur ne peut récupérer les frais d'assistance à l'expertise qui peuvent faire l'objet d'une demande au titre des frais irrépétibles de procédure ;

Sur la garantie de la société Chaffoteaux et Maury

- au titre des articles 1386-1 et suivants du Code civil, la société Chaffoteaux et Maury, fabricant de la chaudière, est responsable de la défectuosité de celle-ci pour défaut de sécurité intrinsèque au seul constat de l'inflammation de la vanne gaz qui a provoqué le percement de la prise de pression ; en tout état de cause, sa responsabilité est engagée au titre d'un vice caché ; la société Chaffoteaux et Maury doit garantir intégralement la société Engie Home Services en cas de condamnation .

Vu les conclusions en date du 21 février 2017 de la société Chaffoteaux et Maury qui demande à la cour de

Vu l'article 1382 du Code Civil,

Vu les articles 1386-1 et suivants du Code Civil,

Vu les articles 1641 et suivants du Code Civil,

Vu les articles 1792-4 et suivants du Code Civil,

A TITRE PRINCIPAL

- Confirmer le jugement rendu par le Tribunal de grande instance de Nantes en date du 18 février 2016 en l'ensemble de ses dispositions ;

- Constater l'absence de faute, vice caché et défaut du produit imputable à la société Chaffoteaux et Maury ;

- Débouter toutes les parties de toutes demandes susceptibles d'être dirigées à l'encontre de la Société Chaffoteaux et Maury ;

À TITRE SUBSIDIAIRE

- Dire et Juger que la société AGPM a contribué à l'aggravation des dommages subis par les époux H. ;

EN TOUT ÉTAT DE CAUSE,

- Dire et Juger que la société Savelys a commis une faute de nature à engager sa responsabilité dans la survenance du sinistre ;

- Condamner in solidum les sociétés Savelys et AGPM à garantir la société Chaffoteaux et Maury de toutes condamnations qui pourraient être prononcées à son encontre ;

- Condamner in solidum les sociétés Savelys et AGPM à verser à la société Chaffoteaux et Maury la somme de 5 000 euro en application des dispositions de l'article 700 du Code de Procédure Civile ainsi qu'aux entiers dépens.

La société Chaffoteaux et Maury fait essentiellement plaider que :

Sur l'absence de responsabilité de la société Chaffoteaux et Maury

- la cause de l'incendie n'a pas pu être déterminée dans le cadre de l'expertise judiciaire ; la société Chaffoteaux et Maury ne s'est pas opposée à une expertise en laboratoire;

- les conclusions hypothétiques de l'expert judiciaire ne permettent pas auxépoux H. et à la compagnie AGPM de rapporter la preuve qui leur incombe d'une faute imputable à la société Chaffoteaux et Maury en relation de causalité directe avec l'incendie, ou de l'existence d'un vice caché ; le procès-verbal de réception des travaux en 2002 ne fait état d'aucune réserve sur l'installation de chauffage et les visites d'entretien des années 2008,2009 et 2010 ne font état aucun problème particulier alors que la chaudière à fonctionner pendant 8 ans ;

- sur le fondement des articles 1386-1 et 1386-9 du Code civil, la preuve n'est pas rapportée d'un défaut intrinsèque de la chaudière en lien de causalité avec l'incendie, la seule implication de celle-ci étant insuffisante ;

- la chaudière litigieuse n'est pas un EPERS au sens de l'article 1792-4 du Code civil pour n'avoir pas été conçue et fabriquée pour répondre à des exigences propres à la maison des époux H. ;

À titre subsidiaire, sur les demandes indemnitaires et la garantie de la société Savelys

- la compagnie AGPM est responsable de l'aggravation du préjudice pour n'avoir pas accepté le devis de décembre 2011 de réfection totale du bâchage endommagé par la tempête ; le coût du déménagement intermédiaire résultant du congé notifié aux époux H. n'est pas en relation avec le sinistre ;

- la cause du sinistre réside dans l'intervention de la société Savelys le 22 novembre 2010; cette société doit, en cas de condamnation, garantir la société Chaffoteaux et Maury.

Vu les conclusions en date du 9 mars 2017 de Monsieur Jean-Luc H. et Madame Claude C. épouse H. qui demandent à la cour de

- Confirmer le jugement en ce qu'il a retenu la responsabilité de la compagnie AGPM Assurances, de la société M. Construction et de la société Savelys,

Le réformer en ce qu'il a écarté la responsabilité de la société Chaffoteaux et Maury,

Statuant à nouveau,

- Condamner in solidum la compagnie AGPM Assurances, la société M. Construction, la société Savelys et la société Chaffoteaux et Maury à indemniser les époux H. des préjudices consécutifs à l'incendie en date du 27 novembre 2010,

- Le réformer en ce qu'il a fixé le montant de l'indemnisation des préjudices consécutifs à la somme de 147 400,27 euro ;

Statuant à nouveau,

- Fixer le montant total des préjudices consécutifs à l'incendie du 27 novembre 2010 à la somme totale de 264 949,26 euro ;

- Tenant compte des provisions versées, la compagnie AGPM, la société M. Construction, la société Savelys et la société Chaffoteaux et Maury seront condamnées in solidum à verser aux époux H. la somme de 52 347,64 euro;

- Le confirmer en ce qu'il a alloué la somme provisionnelle de 58 326,35 euro arrêtée au 1er juillet 2015 au titre des frais de relogement ;

- Actualiser cette somme à 81 464,05 euro arrêtée au 31 mai 2017, à parfaire jusqu'au jour de réinstallation dans la maison,

- Débouter la compagnie AGPM et toutes autres parties de toutes leurs demandes, fins et conclusions,

- Condamner la compagnie AGPM à verser aux époux H. une somme de 5 000 euro à titre de dommages et intérêts pour résistance abusive et préjudice moral ;

Subsidiairement,

- Condamner in solidum la société M. Construction, la société Chaffoteaux et Maury et la société Savelys à garantir en intégralité les époux H. de toutes condamnations susceptibles d'être prononcées à leur encontre ;

- Condamner in solidum la compagnie AGPM, la société M. Construction, la société Savelys et la société Chaffoteaux et Maury à payer aux époux H. une indemnité de 5 000 euro au titre des frais irrépétibles exposés en cause d'appel ;

- Autoriser la Selarl Ab Litis - de M. S. H. - P. - V. avocats postulants à les recouvrer conformément aux dispositions de l'article 699 du Code de procédure civile.

Les époux H. soutiennent pour l'essentiel que

Sur la cause de l'incendie

-l'expertise prouve que l'incendie a pour cause un dysfonctionnement de la chaudière murale mais les sociétés M. Construction, Chaffoteaux et Savelys n'ont pas souhaité l'expertise complémentaire proposée par Monsieur D. sur l'origine de l'inflammation et le scénario de celle-ci ; les époux H. ne sont pas concernés par la répartition des responsabilités puisqu'il dispose d'un recours contre tous,

Sur les responsabilités

- la société M. Construction engage responsabilité décennale en sa qualité de constructeur l'origine de l'incendie se trouvant au niveau de la chaudière, élément d'équipement dissociable dont le dysfonctionnement a rendu l'ouvrage impropre à sa destination ;

- la société Savelys engage sa responsabilité contractuelle pour n'avoir pas détecté les défauts dont la chaudière était affectée 5 jours avant l'incendie ; le rôle causal du lave-linge a été écarté par l'expert judiciaire ;

- la société Chaffoteaux et Maury engage sa responsabilité quasi délictuelle pour avoir fabriqué la chaudière défectueuse qui n'offre pas la sécurité à laquelle on pouvait légitimement s'attendre en application des articles 1386-1 et 1386-4 du Code civil ;

- la compagnie AGPM doit garantir le risque incendie ; après n'avoir invoqué aucune difficulté, elle a brusquement, le 23 avril 2015, refusé à tort sa garantie en faisant preuve de mauvaise foi ; la provision de 40 000 euro versée aux époux H. en 3 fois sur 4 ans n'avait pour objet que de les indemniser que de leur relogement ;

Sur les demandes indemnitaires

- le devis Articoncept du 17 février 2015 doit être retenu pour le chiffrage des travaux réparatoires immobiliers correspondant à la reconstruction avec conservation de tout ce qui est récupérable ; grâce à la somme de 172 726,62 euros versée par la compagnie AGPM dans le cadre de l'exécution provisoire, les travaux sont en cours sur la base d'un devis Articoncept du 10 octobre 2016 de 154 729,60 euros et devraient prendre fin en mai 2017;

-la réfection de la cuisine aménagée doit être chiffrée sur la base du devis Articoncept de 5491,63 euros TTC du 10 octobre 2016 ;

- après démolition il est apparu indispensable de nettoyer les 2 murs pignons pour un coût de 693 euro TTC ;

- le réaménagement du jardin laissé en déshérence depuis 5 ans n'est pas garanti par le contrat AGPM mais les sociétés M., Savelys et Chaffoteaux doivent être condamné in solidum à la somme de 3432 euro TTC sur la base du devis Articoncept du 22 3 février 2015 ;

- le bâchage provisoire (facture COLLEAUX du 7 décembre 2010 535,94 euros TTC), l'intervention du plombier pour la vidange des sanitaires (facture PYDO du 1er décembre 2010 80,18 euros TTC) et le montant du mobilier endommagé (11'976,55 euros retenus par le jugement déféré) sont dus aux époux H. ;

- les frais de relogement depuis le 3 décembre 2010 6 jusqu'en mai 2017 inclus s'élèvent à 81'464,0 5 euro à parfaire ;

- les époux H. ont été condamnés par le juge de proximité le 25 mars 2016 à payer à la société BMS la somme de 3229,20 euros au titre frais de stockage du mobilier ainsi que celle de 300 euro sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile ; l'assureur, la société M., la société Savelys et la société Chaffoteaux doive être condamnée à leur rembourser cette somme ;

- le préjudice moral des époux H. et de leur fils Sébastien aggravé par la procédure de congé pour vente en cours doit être indemnisé à hauteur de 5 000 euro ;

- le coût du déménagement pour le retour au domicile doit être indemnisé à hauteur de 3 256 euro;

- au total le montant des préjudices s'élève à 264 949,26 euros dont, à déduire 39 875 euro versés à titre provisionnel par l'assureur ainsi que 172 726,62 euros versés par celui-ci dans le cadre de l'exécution provisoire ; la compagnie AGPM, les sociétés Savelys, M. et Chaffoteaux doivent être condamnés in solidum à la somme de 52 347,64 euros.

Vu les conclusions en date du 2 février 2017 de la compagnie AGPM Mutuelle d'assurance qui demande à la cour de

Vu les articles 1134 et 1147 du Code civil

Vu les articles 1386-1 et 1386-4 du Code civil,

Vu l'article 1641 du Code civil,

Vu les articles 1792 et suivants du Code civil,

Vu la jurisprudence

- Confirmer le Jugement du Tribunal de grande instance de Nantes du 18 février 2016 en ce qu'il a condamné solidairement la société M. Construction, la société Engie Home Service à garantir et à relever indemne l'AGPM de toutes condamnations et de toutes sommes versées aux époux H. ;

- Confirmer le Jugement du Tribunal de grande instance de Nantes du 18 février 2016 en ce qu'il a fixé à 147 400,27 euro le montant de l'indemnisation des préjudices des consorts H.;

- Infirmer le jugement du Tribunal de grande instance de Nantes du 18 février 2016 en ce qu'il a omis de prendre en compte la somme provisionnelle avancée par AGPM Assurances;

Statuant de nouveau,

- la Cour d'appel dira que la provision versée par AGPM Assurances était de 57 393,26euro;

- Condamner les parties succombant, à savoir Engie Home Service et la SAS M. ou toute autre société dont la responsabilité serait retenue notamment la société Chaffoteaux et Maury, à lui verser la somme de 58 003,22 euro TTC, déduction faite des sommes déjà perçues au titre de l'exécution provisoire du jugement du 18 février 2016 ;

- Condamner solidairement les mêmes à verser à l'AGPM la somme de 5 000 euro sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile ;

- Condamner les mêmes aux entiers dépens distraction faite au profit de Maître Claude M.

L'argumentation de la compagnie AGPM Mutuelle d'assurance est pour l'essentiel la suivante:

Sur la garantie des sociétés Engie Home Services, M. Construction et Chaffoteaux et Maury

- ces trois sociétés ont refusé les investigations complémentaires proposées par l'expert judiciaire ;

- la société M. Construction ne peut s'exonérer de sa responsabilité décennale en qualité de constructeur en invoquant une cause étrangère tenant aux sociétés Savelys et Chaffoteaux et Maury ;

- la responsabilité contractuelle de la société Engie Home Service (Savelys) est engagée pour manquement à son obligation de résultat de maintenance de la chaudière et à son devoir de conseil et d'information lors de la visite annuelle du 22 novembre 2010 ;

- s'agissant de la société Chaffoteaux et Maury, sa responsabilité est engagée pour fabrication d'un produit défectueux sur le fondement de l'article 1386-1 du Code civil et, en tout état de cause, elle est solidairement responsable sur le fondement de l'article 1792-4 du Code civil puisque la chaudière litigieuse constitue un EPERS ; puisque le dysfonctionnement de la chaudière est la cause du dommage, peu importe l'origine de ce dysfonctionnement ; la société Chaffoteaux et Maury ne peut s'exonérer de sa responsabilité qu'en démontrant le fait d'un tiers ; rien ne permet de penser que la chaudière a été mal posée lors de sa construction ou que la société Savelys a commis une faute ;

Sur l'absence de garantie due par la compagnie AGPM

- la compagnie AGPM a fait preuve de diligence dans le traitement du sinistre en débloquant la somme de 40 000 euro à titre provisionnel et en déléguant la société BMS Technologies pour une somme de 11 346,90 euros ; elle n'a pas refusé de participer aux frais de bâchage; l'expertise judiciaire a été longue et complexe ;

Sur les demandes indemnitaires

- l'évaluation de Monsieur H. doit être prise en compte pour le préjudice immobilier et la réfection de la cuisine ;

- le coût du réaménagement du jardin n'est pas garanti par le contrat assurance ;

- la demande des époux H. au titre du préjudice mobilier est excessive ;

- la compagnie AGPM ne prend en charge les frais de déblais qu'à hauteur de 5 % des dommages mobiliers et immobiliers, les frais de maîtrise d'œuvre à hauteur de 5 % des dommages immobiliers et limiter l'indemnisation de la perte d'usage du bien à un an ;

- la somme de 58 003,22 euros correspondant aux frais expertise amiable (609,96 euro + 6171,36 euro) et à la délégation de la société BMS Technologies (11 346,90 euros) doit être déduite alors que le tribunal n'a déduit que la somme provisionnelle de 39 875 euro

Pour un plus ample exposé des prétentions et moyens des parties il est renvoyé, en application des dispositions des articles 455 et 954 du Code de procédure civile, à leurs dernières conclusions ci-dessus rappelées.

MOTIFS DE LA DÉCISION

1 Sur les causes de l'incendie

Monsieur D., expert judiciaire, parvient, de façon circonstanciée et contradictoire, aux mêmes conclusions que celles du cabinet Cunningham, en indiquant que l'incendie apparaît d'origine accidentelle et qu'un dysfonctionnement de la chaudière constitue sa cause probable.

Il exclut l'hypothèse d'un départ de feu à côté de la chaudière par son constat qu'il n'existe aucune alimentation électrique autre que celle de la chaudière murale gaz en partie centrale du mur pignon du garage et qu'aucun autre récepteur électrique n'était alimenté dans cette zone.

L'expert judiciaire a pu constater contradictoirement qu'une très forte élévation de température s'est produite en partie basse de la chaudière où se situe le panneau de commande qui a totalement disparu et que le " V de carbonisation " mis en évidence par le rapport du SDISS 44 sur le capot de la chaudière, côté intérieur, face aux appareillages de celle-ci au droit de la prise de pression du réglage gaz, peut résulter d'une micro fuite de gaz qui ne s'est enflammée que pendant un bref laps de temps jusqu'à la mise en sécurité du système.

Il a constaté que la vanne gaz située juste au-dessous de la prise de pression du réglage gaz comporte une zone parfaitement localisée " fortement attaquée et combustée ".

Dans ces conditions, l'expert judiciaire a, de façon motivée, pertinemment proposé le scénario suivant : Lorsque Madame H. a augmenté le réglage d'un radiateur du séjour, cette modification s'est répercutée sur la vanne gaz qui module la puissance de la chaudière en fonction des besoins. L'explosion perçue par les époux H. peu après peut être due à l'inflammation de la vanne gaz de la chaudière murale qui aurait causé la micro fuite au niveau de la prise de pression du réglage gaz située juste au-dessus suivi de son inflammation de courte durée.

Monsieur D. précise, en réponse à un dire, qu'il n'a jamais affirmé qu'une micro fuite soit à l'origine du sinistre mais seulement " que cette micro fuite pourrait être due à l'inflammation d'un des composants situés à son voisinage : l'ensemble pompe et dégazeur et la vanne gaz se situent notamment sous cette prise de pression. "

L'expert rappelle qu'il a vainement proposé à plusieurs reprises aux parties une expertise de la chaudière murale en laboratoire spécialisé qui " pourrait permettre de connaître précisément, mais sous toutes réserves, le composant à l'origine de l'inflammation, et le scénario de cette inflammation. " En l'absence d'une telle expertise il indique n'être pas en mesure d'indiquer s'il existe un lien de causalité entre l'intervention du technicien de maintenance de la société Savelys le 22 novembre 2010 et l'incendie du 27 novembre suivant.

Le rapport d'expertise judiciaire permet d'affirmer que le point de départ de l'incendie est situé au niveau de la vanne gaz en partie basse de la chaudière puis qu'il s'est propagé de proche en proche par un phénomène de pyrolyse. L'inflammation d'un composant de la chaudière est donc la cause du sinistre.

2 Sur la responsabilité de la SAS Savelys devenue Engie Home Service

Les époux H. recherchent la responsabilité contractuelle de cette société pour manquement contractuel dans l'exécution du contrat d'entretien lors de la visite annuelle du 22 novembre 2010.

Si le rapport d'expertise judiciaire permet d'affirmer que le départ de feu est lié à un dysfonctionnement de la chaudière murale, il ne saurait être reproché à la société Savelys de n'avoir pas détecté la micro fuite de gaz dont Monsieur D. fait état puisque celle-ci n'est que la conséquence de l'inflammation d'un des composants de la chaudière situés juste au-dessous de la prise de pression du réglage gaz.

Rien dans le rapport de Monsieur D., dans l'enquête de gendarmerie ou dans le rapport du SDISS 44 ne permet d'affirmer que les contrôles prévus dans le cadre de la visite d'entretien annuelle prévue au contrat dans le cadre de la " formule Sécurité " souscrite par les époux H. n'ont pas été réalisés ou qu'ils ont été mal réalisés, et qu'ils auraient permis d'éviter le sinistre.

En conséquence, par voie infirmation, la cour mettra hors de cause la société la société Savelys devenue Engie Home Service.

3 Sur la responsabilité de la société Chaffoteaux et Maury

Les époux H. fondent leurs demandes indemnitaires sur la responsabilité de la société Chaffoteaux et Maury pour avoir fabriqué la chaudière défectueuse qui n'offre pas la sécurité à laquelle on pouvait légitimement s'attendre en application des articles 1386-1 et suivants anciens devenus 1244 et suivants du Code civil. Ils invoquent aussi la garantie des vices cachés.

La compagnie AGPM soutient en outre que la responsabilité de la société Chaffoteaux et Maury est engagée sur le fondement de l'article 1792-4 du Code civil.

Cependant, la chaudière Chaffoteaux et Maury modèle Niagara 23 FF mise en œuvre lors de la construction du pavillon des époux H. a été choisie sur catalogue et produite en série et non pour les besoins spécifiques de ce pavillon. Par ailleurs, rien ne permet d'affirmer qu'elle n'a pas été mise en œuvre conformément aux règles édictées par son fabricant. La chaudière litigieuse ne constitue donc pas un EPERS permettant de retenir la responsabilité décennale solidaire de son fabricant.

En application de l'article 1386-9 ancien devenu 1245-8 du Code civil, les époux H. doivent rapporter la preuve d'un dommage, d'un défaut et du lien de causalité entre ce défaut et le dommage.

Ainsi qu'il a été indiqué ci-dessus, le rapport d'expertise judiciaire permet de conclure de façon certaine, au vu de la combustion intense de cette partie de la chaudière, que le foyer de l'incendie a pris naissance dans une zone parfaitement localisée dans sa partie basse au niveau de l'ensemble pompe et dégazeur ou de la vanne gaz suite à une variation manuelle du robinet thermostatique d'un radiateur du séjour.

L'existence d'un défaut intrinsèque à la chaudière en relation directe avec l'incendie est donc rapportée même s'il n'est pas possible de définir précisément la nature de ce défaut.

La société Chaffoteaux et Maury engage donc sa responsabilité pour avoir fabriqué un produit défectueux n'offrant pas la sécurité à laquelle on pouvait légitimement s'attendre.

Cette société ne fait état d'aucune cause d'exonération prévue à l'article 1386-11 ancien devenu 1245-10 du Code civil et elle ne peut utilement invoquer ni le fonctionnement normal de la chaudière pendant huit ans, ni l'absence de problèmes relevés lors des visites annuelles précédentes.

En conséquence, la cour, par voie d'infirmation condamnera la société Chaffoteaux et Maury à indemniser les époux H. des conséquences dommageables de l'incendie.

4 Sur la responsabilité de la société M. Construction

Les époux H. recherche la responsabilité décennale du constructeur de maisons individuelles qui est réputé constructeur de l'ouvrage au sens de l'article 1792-1 du Code civil et doit donc, à ce titre, supporter les garanties décennales et biennales des articles 1792 et suivants du même Code.

Par des motifs pertinents adoptés par la cour, le jugement déféré a considéré que la présomption de responsabilité décennale prévue à l'article 1792-2 du Code civil est applicable à l'installation de la chaudière murale avec ballon d'eau chaude intégré raccordée au système de tuyauterie procurant à la maison non seulement le chauffage mais aussi l'eau chaude qui constitue un élément équipement indissociable. En tout état de cause, la présomption de responsabilité prévue à l'article 1792 du Code civil s'applique aux éléments d'équipement mêmes dissociables qui rendent l'ouvrage impropre à sa destination, ce qui est le cas en l'espèce.

La société M. Construction conteste sa responsabilité décennale en invoquant une cause étrangère exonératoire.

En l'absence de faute de la société Savelys, la société M. Construction ne peut utilement invoquer le fait de ce tiers.

Par ailleurs, aucune cause exonératoire ne peut résulter d'un vice affectant la chaudière puisque le constructeur doit garantir les matériaux qu'il a mis en œuvre dans le cadre de l'exécution du contrat de construction de maison individuelle. La société M. Construction ne peut donc s'exonérer en invoquant la responsabilité de la société Chaffoteaux et Maury.

La cour confirmera donc le jugement déféré en ce qu'il a retenu la responsabilité de plein droit de la société M. Construction.

5 Sur les demandes indemnitaires

5.1 Sur les travaux réparatoires immobiliers

Les époux H. sollicitent à ce titre la somme de 154 729,60 euros sur la base d'un devis Articoncept du 10 octobre 2016.

Dans le cadre de l'expertise judiciaire, Monsieur H. a évalué, sans contestation des parties sur ce point, à la somme de 106 150 euro HT le montant des travaux de reconstruction avec conservation de tout ce qui est récupérable.

Ce montant sera retenu par la cour comme il l'a été par les premiers juges aux motifs que, d'une part le devis Articoncept du 10 octobre 2016 n'a fait l'objet d'aucun débat contradictoire et que rien ne permet d'affirmer qu'il porte sur des travaux strictement identiques à ceux préconisés par Monsieur H. qui, seuls, sont de nature à réparer intégralement le préjudice des époux H. résultant directement de l'incendie, étant précisé que l'indexation sur l'indice BT 01 suffit revaloriser le chiffrage effectué par Monsieur H.

Par ailleurs, l'expert H. a, à bon droit, retenu des honoraires de maîtrise de l'œuvre à hauteur de 8 % du montant HT des travaux, soit la somme de 8492 euro.

Les époux H. présentent, au titre du réaménagement de leur jardin, une demande indemnitaire à hauteur de 3432 euro TTC selon devis Articoncept du 23 février 2015.

Contraints de quitter leur maison depuis plus de six ans et ne pouvant de ce fait entretenir le jardin qui devra être refait suite aux travaux de reconstruction, la société Chaffoteaux et Maury et la société M. Construction seront condamnées au paiement de cette somme que l'expert H. avait inclue dans son chiffrage à hauteur de 1 000 euro HT.

Au titre des travaux réparatoires immobiliers, le préjudice des époux H. sera chiffré à la somme de 136 370,40 euro TTC [(113 642 euro HT = (105 150 + 8 492)], à laquelle doit s'ajouter la remise en état du jardin (3 432 euro TTC), soit un total de 139 802,40 euros TTC.

5.2 Sur la réfection de la cuisine aménagée

Les époux H. sollicitent à ce titre la somme de 5 491,63 euros TTC correspondant aux lots 11 et 12 du devis Articoncept du 10 octobre 2016.

À défaut de débat contradictoire sur ce devis et considérant que le chiffrage de Monsieur H. comprend la réfection de la cuisine aménagée à hauteur de 4 000 euro HT, le jugement déféré sera confirmé en ce qu'il a débouté les époux H. de leur demande de ce chef.

5.3 Sur le nettoyage des deux murs pignon

S'agissant d'une simple préconisation de la société Articoncept dans le cadre de la réalisation des travaux actuellement engagés qui n'a pas été soumise à un débat contradictoire dans le cadre des opérations d'expertise judiciaire, il ne sera pas fait droit à cette demande.

5.4 Sur le bâchage provisoire, les frais de plomberie pour vidange sanitaire et le coût du mobilier endommagé

S'agissant de frais consécutifs à l'incendie, la cour fixera à la somme de 535,94 euros le coût du bâchage provisoire, à celle de 80,18 euros le remboursement de la facture de plomberie et à celle de 11 976,55 euros le montant du forfait mobilier évalué par la compagnie d'assurances.

5.5 Sur les frais de relogement

Les époux H. demandent à ce titre la somme de 81 464,05 euro jusqu'à la fin du mois de mai 2017, date prévue d'achèvement des travaux selon le planning produit aux débats.

Ils rapportent la preuve des loyers acquittés pour la location d'un logement dans l'attente de la possibilité de réintégrer leur maison sinistrée.

La compagnie AGPM Assurances, la société Chaffoteaux et Maury et la société M. Construction seront donc condamnées à leur payer de ce chef la somme de 81'464,05 euro arrêtée au 31 mai 2017

5.6 Sur les frais de stockage du mobilier par la société BMS Technologies

Les époux H. rapportent la preuve qu'ils ont été condamnés le 25 mars 2016, à payer la somme de 3229,20 euro à la société BMS Technologies pour le stockage de leur mobilier en garde-meubles rendu obligatoire par la moindre surface de leur logement provisoire.

Il sera donc fait droit à leur demande indemnitaire à hauteur de cette somme et non de celle de 3 780,94 euros qui inclut les intérêts au taux légal et l'indemnité de procédure au titre de l'article 700 du Code de procédure civile qui doivent demeurer à leur charge.

5.7 Sur le préjudice moral familial

En réparation du stress consécutif à l'incendie, de la nécessité de quitter en urgence la maison incendiée en abandonnant leur mobilier et leurs objets personnels détruits ou dégradés ainsi que de leurs soucis et tracas, il sera alloué aux époux H. la somme de 5 000 euro au titre de leur préjudice moral.

5.8 Sur le coût du déménagement de retour au domicile

Sur la base de la facture de la société BMS, la cour allouera aux époux H., comme les premiers juges, la somme de 3 256 euro TTC.

Au total, au vu des pièces produites aux débats, les préjudices des époux H. seront retenus par la cour à hauteur des sommes suivantes:

- au titre des travaux réparatoires immobiliers 139 802,40 euros

- au titre du bâchage provisoire 535,94 euros

- au titre de la facture de plomberie 80,18 euros

- au titre du montant du forfait mobilier 11 976,55 euros

- au titre des frais de relogement arrêtés au 31 mai 2017 81 464,05 euros

- au titre des frais de stockage du mobilier 3 229,20 euros

- au titre du préjudice moral 5 000 euros

- au titre du coût du déménagement de retour au domicile 3256 euros.

TOTAL : 245 344,32 euros

6 Sur l'étendue de la garantie de la compagnie AGPM Assurances

Les époux H. sollicitent la condamnation in solidum de leur assureur habitation, la compagnie AGPM Assurances, à les indemniser à hauteur de la somme de 264 949,26 euros. Compte tenu de la somme de 39 875 euro perçue à titre provisionnel en 2010, 2011 et 2012 et du versement de la somme de 172 726,62 euros au titre de l'exécution provisoire du jugement déféré, ils demandent la condamnation in solidum de l'assureur à leur payer la somme de 52 347,64 euros.

Au vu du contrat habitation versé aux débats par les époux H., la compagnie AGPM fait valoir à bon droit que le contrat l'assurance souscrit par les époux H. prévoit un plafonnement des frais de déblais à 5 % des dommages mobiliers et immobiliers, que les frais de maîtrise d'œuvre sont plafonnés à 5 % des dommages immobiliers et que la perte d'usage du bien est limité contractuellement à un an.

La compagnie AGPM Assurance sera donc tenue in solidum, sous réserve des sommes déjà versées, à indemniser les époux H. à hauteur de la somme de 245 344,32 euros dans la limite des dispositions contractuelles relatives aux franchises et plafonds de garantie.

La société M. Construction et la société Chaffoteaux et Maury soutiennent que la compagnie d'assurance doit assumer une part des préjudices de ses assurés au motif qu'elle a contribué à l'aggravation de ceux-ci en refusant de prendre en charge le devis de décembre 2011 de réfection du bâchage endommagé par la tempête.

Cependant, par des motifs pertinents adoptés par la cour, les premiers juges ont considéré que le défaut de bachage de la maison sinistrée n'a pas contribué à aggraver les préjudices au titre desquels ces sociétés sont condamnées puisque l'incendie a rendu nécessaire la réfection complète de l'immeuble et que la durée de la procédure et des opérations des expertise ne peut être imputée à faute à la compagnie AGPM mais à sa complexité et aux multiples contestations et dires échangés au cours de ces opérations.

En conséquence, la cour confirmera le jugement déféré en ce qu'il a rejeté les demandes de garantie dirigées à l'encontre de la compagnie AGPM Assurances et ne lui a laissé aucune part de responsabilité dans la charge finale de l'indemnisation des époux H. au titre des conséquences de l'incendie.

7. Sur les recours en garantie

La société Engie Home Service étant mise hors de cause et la compagnie AGPM Assurances n'étant pas jugée responsable de l'aggravation des préjudices des époux H. indemnisés dans le cadre du présent arrêt, aucune demande de garantie ne peut prospérer à leur encontre.

La compagnie d'assurance subrogée dans les droits de ses assurés doit être garantie par les sociétés M. Construction et Chaffoteaux et Maury à hauteur de la somme payée en exécution du contrat l'assurance au titre de sa condamnation in solidum à indemniser les préjudices des époux H.

La société M. Construction demande à juste titre la garantie de la société Chaffoteaux et Maury. En effet, tenue de réparer les préjudices résultant de l'incendie en sa qualité de constructeur présumé responsable, la société M. Construction à l'encontre de laquelle aucune faute n'est retenue, doit être intégralement garantie par la société Chaffoteaux et Maury fabricant de la chaudière défectueuse qui a causé le dommage.

9. Sur le montant de la condamnation in solidum sollicitée par les époux H.

Compte tenu de la somme de 39 875 euro perçue à titre provisionnel en 2010, 2011 et 2012 et du versement de la somme de 172 726,62 euros au titre de l'exécution provisoire du jugement déféré, les époux H. demandent la condamnation in solidum de l'assureur à leur payer la somme de 52 347,64 euros (264 949,26 - 39 875 - 172 726,62).

La compagnie AGPM Assurances conteste la somme de 39 875 euro et soutient que doit être déduite la somme de 58 003,22 euros versée à titre provisionnel compte tenu de la somme de 11 346,90 euros avancée au titre de la délégation BMS Technologies et des frais d'expertise amiable d'un montant de 609,96 euros et 6 171,36 euros.

Cependant, seules les sommes directement versées à titre de provision aux époux H. en réparation de leurs préjudices résultant de l'incendie couvert par l'assurance peuvent être déduites de leur indemnisation finale.

Ainsi, ni la somme correspondant à la facture de la société BMS Technologies relative au bâchage en date du 31 décembre 2010 d'un montant de 11 346,90 euros, ni celles correspondant aux frais d'expertise amiable n'ont été versées aux époux H. même si elles ont été engagées par l'assureur en exécution du contrat d'assurance-incendie.

La compagnie AGPM Assurances sera donc déboutée de sa demande de voir porter à la somme de 58 003,22 euros le montant des provisions versées aux époux H. en indemnisation de leurs préjudices résultant de l'incendie.

Par contre, les sociétés M. Construction et Chaffoteaux et Maury seront condamnées in solidum à payer cette somme à la compagnie AGPM Assurances.

10 Sur les autres demandes

Les époux H. sollicitent, à l'encontre de la compagnie AGPM, la somme de 5 000 euro à titre de dommages intérêts pour résistance abusive et préjudice moral.

Il résulte des pièces versées aux débats que l'assureur habitation des époux H. a d'abord fait diligenter une expertise amiable par le cabinet CUNNINGHAM, versé des provisions puis solliciter une expertise judiciaire à laquelle il a activement participé avant de dénier sa garantie en invoquant à tort jusque devant les premiers juges la mauvaise foi et les fausses déclarations de ses assurés auxquels il a, en justice, réclamé la restitution des sommes versées.

Même si la compagnie des assurances ne conteste pas en cause d'appel le jugement déféré en ce qu'il l'a déboutée de sa demande de déchéance de garantie et de restitution, la position accusatoire de l'assureur a, à la fois retardé l'indemnisation des époux H. qui n'ont pu commencer les travaux qu'en application de l'exécution provisoire attachée au jugement déféré, et leur a causé un préjudice moral par la mise en doute injuste de leur honnêteté.

La compagnie AGPM Assurance sera condamnée à réparer ce préjudice à hauteur de 1 000 euro.

Partie perdante, la société Chaffoteaux et Maury sera condamnée aux dépens de première instance et d'appel en ce compris les frais d'expertise ainsi qu'à payer, sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile, au titre de leurs frais non répétibles de procédure de première instance et d'appel, la somme de 5 000 euro à la société M. Construction et la même somme aux époux H.

Par ailleurs, la société Savelys devenue Engie Home Service ayant été attraite en justice à tort par la compagnie AGPM, celle-ci sera condamnée à lui verser, sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile, la somme de 5000 euro au titre de ses frais non répétibles de procédure de première instance et d'appel.

L'équité ne commande pas qu'il soit fait plus ample application des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile.