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Décisions

CA Angers, ch. civ. A, 7 juin 2017, n° 15-02110

ANGERS

Arrêt

Infirmation

PARTIES

Défendeur :

Dynamique Auto (SARL)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Roehrich

Conseillers :

Mme Monge, Mme Portmann

TI Angers, du 9 juin 2015

9 juin 2015

Selon bon de commande du 24 janvier 2014, M. T. a acheté à la SARL Dynamique Auto un véhicule d'occasion Ford modèle S-Max, immatriculé BW-620-MZ, mis en circulation le 26 septembre 2006 et dont le compteur indiquait un kilométrage de 142 063 km, ce pour le prix de 8 000 euros.

Le bon de commande prévoyait une garantie contractuelle complémentaire de 12 mois.

Par acte d'huissier du 20 mars 2015, M. T., se plaignant d'une panne immobilisant le véhicule depuis le 23 octobre 2014 et du refus de l'assureur de prendre en charge le sinistre, a fait assigner la SARL Dynamique Auto devant le tribunal d'instance d'Angers aux fins de voir, sous le bénéfice de l'exécution provisoire :

à titre principal,

- prononcer la nullité de la vente pour erreur sur les qualités substantielles, et subsidiairement pour dol,

- prononcer la nullité du bon de commande et condamner la SARL Dynamique Auto à lui payer la somme de 8 000 euros en remboursement du prix de vente avec intérêts au taux légal à compter de l'assignation,

- ordonner l'enlèvement du véhicule aux frais de la SARL Dynamique Auto sous astreinte de 50 euros par jour de retard passé un délai de 15 jours suivant la signification du jugement à intervenir,

- condamner la SARL Dynamique Auto à lui payer 372,40 euros en remboursement des frais de transfert de la carte grise et 557,55 euros en remboursement des réparations effectuées sur le véhicule, avec intérêts au taux légal à compter de l'assignation,

- condamner la SARL Dynamique Auto à lui payer la somme de 1 000 euros à titre de dommages et intérêts pour son préjudice moral,

à titre très subsidiaire, ordonner une expertise sur les causes de la panne,

en tout état de cause, condamner la SARL Dynamique Auto au paiement de la somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile.

Par jugement réputé contradictoire du 09 juin 2015, le Tribunal d'instance d'Angers, a :

- débouté M. T. de toutes ses demandes,

- condamné M. T. aux dépens,

- dit n'y avoir lieu à faire application de l'article 700 du Code de procédure civile,

- dit n'y avoir lieu à ordonner l'exécution provisoire du jugement.

Le tribunal a jugé que si M. T. justifiait bien de l'acquisition du véhicule litigieux assortie d'une garantie contractuelle de 12 mois, il n'apportait aucun élément permettant à la juridiction d'apprécier la réalité des éléments matériels de l'erreur ou du dol dont il se plaignait, tant au titre de la garantie que des vices supposés affecter le véhicule.

M. T. a interjeté appel total de cette décision par déclaration du 10 juillet 2015.

M. T. a régulièrement conclu et l'ordonnance de clôture a été rendue le 16 mars 2017.

La SARL Dynamique Auto, régulièrement assignée suivant les dispositions de l'article 659 du Code de procédure civile (procès-verbal de recherches infructueuses) n'a pas conclu.

Pour un plus ample exposé des prétentions et moyens des parties, il est renvoyé, en application des dispositions des articles 455 et 494 du Code de procédure civile, à leurs dernières conclusions respectivement :

- du 28 septembre 2015 pour M. T.,

qui peuvent se résumer comme suit.

M. T. demande à la cour, au visa des articles 1109 et suivants et 1604 du Code civil, :

- d'infirmer en toutes ses dispositions le jugement entrepris,

en conséquence, à titre principal,

- de le déclarer recevable et bien fondé en son action en annulation de la vente pour erreur sur les qualités substantielles,

- de prononcer en conséquence sur le fondement des articles 1109 et 1110 du Code civil la nullité du bon de commande en date du 24 janvier 2014 et portant sur le véhicule Ford S-Max immatriculé BW-620-MZ,

- de condamner la SARL Dynamique Auto à verser à M. D. (') la somme de 8 000 euros en remboursement du prix de vente du véhicule avec intérêts au taux légal à compter de l'assignation,

- d'ordonner l'enlèvement dudit véhicule aux frais de la SARL Dynamique Auto et sous astreinte de 50 euros par jours de retard passé un délai de 15 jours suivant la signification de la décision à intervenir,

- de condamner la SARL Dynamique Auto à lui verser la somme de 372,40 euros en remboursement des frais de transfert de la carte grise avec intérêts au taux légal à compter de l'assignation,

- de condamner la même à lui verser la somme de 557,55 euros en remboursement des réparations effectuées sur le véhicule avec intérêts au taux légal à compter de l'assignation,

- de condamner la même à lui verser la somme de 518,48 euros en remboursement des intérêts de l'emprunt souscrit, somme à parfaire,

- de condamner la même à lui verser la somme de 1 000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice moral subi,

à titre subsidiaire,

- de le déclarer recevable et bien fondé en son action en annulation de la vente pour dol,

- de prononcer en conséquence sur le fondement des articles 1109 et 1116 du Code civil, la nullité du bon de commande du 24 janvier 2014 et portant sur le véhicule Ford S-Max immatriculé BW-620-MZ,

- de condamner la SARL Dynamique Auto à verser à M. D. (') la somme de 8 000 euros en remboursement du prix de vente du véhicule avec intérêts au taux légal à compter de l'assignation,

- d'ordonner l'enlèvement dudit véhicule aux frais de la SARL Dynamique Auto et sous astreinte de 50 euros par jours de retard passé un délai de 15 jours suivant la signification de la décision à intervenir,

- de condamner la SARL Dynamique Auto à lui verser la somme de 372,40 euros en remboursement des frais de transfert de la carte grise avec intérêts au taux légal à compter de l'assignation,

- de condamner la même à lui verser la somme de 557,55 euros en remboursement des réparations effectuées sur le véhicule avec intérêts au taux légal à compter de l'assignation,

- de condamner la même à lui verser la somme de 518,48 euros en remboursement des intérêts de l'emprunt souscrit, somme à parfaire,

- de condamner la même à lui verser la somme de 1 000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice moral subi,

à titre infiniment subsidiaire,

- de le déclarer recevable et bien fondé en son action pour défaut de conformité,

- de prononcer en conséquence sur le fondement de l'article 1604 du Code civil la résolution de la vente intervenue le 24 janvier 2014 et portant sur le véhicule Ford S-Max immatriculé BW-620-MZ,

- de condamner la SARL Dynamique Auto à verser à M. D. (') la somme de 8 000 euros en remboursement du prix de vente du véhicule avec intérêts au taux légal à compter de l'assignation,

- d'ordonner l'enlèvement dudit véhicule aux frais de la SARL Dynamique Auto et sous astreinte de 50 euros par jours de retard passé un délai de 15 jours suivant la signification de la décision à intervenir,

- de condamner la SARL Dynamique Auto à lui verser la somme de 372,40 euros en remboursement des frais de transfert de la carte grise avec intérêts au taux légal à compter de l'assignation,

- de condamner la même à lui verser la somme de 557,55 euros en remboursement des réparations effectuées sur le véhicule avec intérêts au taux légal à compter de l'assignation,

- de condamner la même à lui verser la somme de 518,48 euros en remboursement des intérêts de l'emprunt souscrit, somme à parfaire,

- de condamner la même à lui verser la somme de 1 000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice moral subi,

en tout état de cause,

- de condamner la SARL Dynamique Auto aux entiers dépens en ce compris ceux de première instance,

- de condamner la même à lui verser la somme de 2 500 euros sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile,

- d'ordonner l'exécution provisoire de la décision à intervenir.

A titre principal, sollicitant l'annulation de la vente, M. T. soutient que son consentement a été vicié à raison d'une erreur sur les qualités substantielles du véhicule acheté, lié à la durée de la garantie contractuelle, élément déterminant de l'achat d'un véhicule d'occasion. Il soutient qu'au regard des indications du bon de commande, eu égard à l'ancienneté du véhicule (mis en circulation en septembre 2006) et à son kilométrage (142 063 km), il pensait acheter un véhicule sous garantie " AGIR Auto Service Occasion MBTP " moteur-boîte-pont-turbo " " de 12 mois alors que le véhicule acquis ne bénéficiait que d'une garantie de 6 mois.

Pour appuyer sa prétention, l'appelant verse une lettre de l'assureur, la société Covéa Fleet, à laquelle étaient annexées les conditions générales de la garantie litigieuse.

Il prétend que cette erreur substantielle a provoqué une erreur sur la valeur du véhicule acquis. Il argue du caractère excusable de son erreur au vu des circonstances de la vente.

A titre subsidiaire, M. T. excipe que son consentement a été surpris par un dol. Il estime que la SARL Dynamique Auto s'est livrée à des manœuvres en rédigeant un bon de commande, une facture et un certificat de garantie volontairement inexacts et faux, pour lui faire croire que le véhicule objet de la vente serait garanti moteur-boite-pont-turbo de 12 mois suivant sa livraison et sa prise de possession. Il ajoute que l'intention frauduleuse est établie, l'intimée, professionnelle de la vente de véhicules d'occasion, ayant en réalité souscrit auprès de l'assureur une garantie de 6 mois, alors qu'elle ne pouvait ignorer l'importance pour l'acquéreur d'une garantie élargie de 12 mois. Il argue que l'erreur provoquée a déterminé son engagement à acheter.

A titre infiniment subsidiaire, aux fins de résolution de la vente pour défaut de conformité, M. T. invoque un manquement de l'intimée à son obligation de délivrance conforme, estimant démontré qu'elle n'a pas rempli son obligation de renseignement à son égard et que le véhicule vendu ne correspondait pas aux spécifications convenues entre les parties au sujet du bénéfice d'une garantie de 12 mois.

Motifs de la décision :

M. T. en première instance n'avait produit aucun document démontrant qu'il avait sollicité l'application de la garantie et que celle-ci lui aurait été refusée au motif qu'elle ne serait que de six mois et non de douze, comme cela était indiqué sur les documents contractuels.

Il ne versait pas non plus les conditions de la garantie mais simplement le certificat de garantie " Agir auto service occasion " à en tête de Covéa Fleet.

Il produit devant la cour :

- le bon de commande de véhicule d'occasion avec garantie complémentaire relatif au véhicule Ford S-Max indiquant une durée de garantie de 12 mois à compter du 24 janvier 2014 ;

- la facture du 31 janvier 2014 que lui a délivrée le garage SARL Dynamique Auto précisant la garantie chez Agir " 12 mois MBTP " ;

- le certificat de garantie prévoyant la souscription auprès de Covéa Fleet de la garantie " MBP élargie " d'une durée de 12 mois ayant effet du 31 janvier 2014 au 31 janvier 2015 ;

- une copie du carnet de garantie " Agir " rappelant les conditions de l'assurance ;

- l'intervention du garage Ford d'Angers pour prise en charge du véhicule arrivé le 23 octobre 2014 " non roulant " avec un kilométrage indiqué de 150 000 km et l'estimation des ateliers du concessionnaire Ford d'Angers prévoyant des réparations à hauteur de 9 997,52 euro avec changement du moteur ;

- le courrier de l'assureur " Covéa Fleet " certifiant avoir refusé sa garantie plafonnée à 1 525 euro TTC par intervention aux motifs que, d'une durée de 6 mois, elle était arrivée à expiration ;

- le courrier adressé le 14 novembre 2014 à la SARL Dynamique Auto faisant état de la difficulté liée à la durée de la garantie.

M. T. fait état d'une bielle coulée alors qu'il utilisait le véhicule depuis huit mois environ et qu'il avait parcouru 8000 kilomètres environ, ce, sans justifier de ce diagnostic par production de l'avis du garagiste auquel a été remis le véhicule.

Il produit cependant l'estimation des réparations préconisant la fourniture et la pose d'un nouveau moteur.

Monsieur T. n'agit pas sur le fondement de la garantie des vices cachés ce qui lui imposerait d'apporter la preuve de l'antériorité du vice de fonctionnement du véhicule et de son caractère rédhibitoire.

Monsieur T. ne se place sur le terrain du défaut de fonctionnement de la garantie du véhicule. Il fait uniquement grief au vendeur de lui avoir indiqué à tort que le véhicule vendu était garanti douze mois alors qu'il n'était assuré que six mois et qu'en conséquence, la garantie était éteinte lorsque la panne est survenue.

Alors que la SARL Dynamique Auto a reçu le courrier recommandée lui faisant part de l'expiration de la garantie au bout de six mois, elle n'a apporté aucune explication sur cette durée réduite de moitié.

M. T. agit à titre principal sur le fondement de l'erreur.

L'erreur pour constituer une cause de nullité du contrat doit être entrée dans le champ contractuel et porter sur la substance de la chose.

L'existence et la durée de la garantie contractuelle dans une vente de véhicules d'occasion est un élément déterminant du consentement des parties.

En effet, elle est une source de sécurité appréciable pour l'acquéreur.

Par ailleurs, elle apparaît comme un gage de sérieux, sachant qu'un vendeur peu scrupuleux n'est pas susceptible de pouvoir offrir ce type de garantie.

Or, en l'espèce, la garantie contractuelle n'est pas celle qui était promise.

Le vendeur qui propose une garantie d'une durée aussi importante pour un véhicule d'occasion ne peut ignorer que cet élément est déterminant pour l'acquéreur en contribuant à le mettre en confiance sur l'état du véhicule qu'il achète et le recours dont il disposera en cas de pannes toujours possibles sur un véhicule d'occasion.

A ce titre et sans qu'il y ait lieu de rechercher quelles auraient été les chances de M. T. de pouvoir obtenir à titre total ou partiel la prise en charge par l'assureur Covéa Fleet, de la panne survenue huit mois après la vente, il sera considéré le caractère substantiel que revêtait pour lui la durée suffisamment longue de la garantie contractuelle de 12 mois couvrant le véhicule d'occasion vendu par le garage 'Dynamique Auto' et qui fait défaut.

Dans ces conditions, la vente doit être annulée.

Il y a lieu de faire droit à la demande de restitution du prix, à charge pour le vendeur de récupérer le véhicule dans les 30 jours de la signification du présent jugement et passé ce délai sous astreinte de 20 euro par jour de retard, ladite astreinte courant durant un délai de 60 jours à l'issue duquel il pourra à nouveau être fait droit à la requête de la partie la plus diligente.

La SARL Dynamique Auto devra rembourser en outre les frais de carte grise et les intérêts d'emprunt.

S'agissant de la nullité de la vente portant sur un bien matériel, il n'est pas justifié de l'existence d'un préjudice moral lequel se distingue du préjudice de jouissance dont l'appelant n'invoque pas l'existence.

Il convient au titre des frais irrépétibles d'accorder à M. T. une somme de 800 euro étant observé que l'appel qu'il a eu à diligenter n'a pour origine que le manque de justificatifs produits en première instance.

S'agissant d'un arrêt de cour d'appel, la demande d'exécution provisoire s'avère sans objet.

Par ces motifs : LA COUR statuant publiquement et par arrêt rendu par défaut ; infirme le jugement du Tribunal d'instance d'Angers du 9 juin 2015, Et statuant à nouveau, prononce la nullité de la vente portant sur le véhicule Ford S-Max immatriculé BW-620-MZ, condamne la SARL Dynamique Auto à verser à M. T. la somme de 8 000 euros en remboursement du prix de vente du véhicule avec intérêts au taux légal à compter de l'assignation, ordonne l'enlèvement dudit véhicule aux frais de la SARL Dynamique Auto et sous astreinte de 20 euros par jours de retard passé un délai de 30 jours suivant la signification de la décision, dit que ladite astreinte courra durant un délai de 60 jours à l'issue duquel il pourra à nouveau être fait droit à la requête de la partie la plus diligente, condamne la SARL Dynamique Auto à verser à M. T. la somme de 372,40 euros en remboursement des frais de transfert de la carte grise avec intérêts au taux légal à compter de l'assignation, 557,55 euros en remboursement des réparations effectuées sur le véhicule avec intérêts au taux légal à compter de l'assignation et 518,48 euros en remboursement des intérêts de l'emprunt souscrit, déboute M. T. de sa demande présentée à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice moral subi, condamne la SARL Dynamique Auto à verser à M. T. 800 euro en vertu des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile, condamne la SARL Dynamique Auto aux entiers dépens de première instance et d'appel, déclare la demande d'exécution provisoire sans objet.