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Décisions

CA Paris, Pôle 5 ch. 11, 23 juin 2017, n° 15-14400

PARIS

Arrêt

Confirmation

PARTIES

Demandeur :

Budget Telecom (SA)

Défendeur :

Cash Telecom (Sté)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Birolleau

Conseillers :

Mme Lis Schaal, M. Thomas

Avocats :

Mes Jougla Ygouf, Bertrand, Lallement, Amsellem

T. com. Marseille, du 25 juin 2015

25 juin 2015

Faits et procédure

La société Cash Télécom a pour activité la fourniture des services de télécommunication surtaxés (numéros en 08).

La société Kast Télécom est un opérateur de télécommunication attributaire de numéros de téléphone surtaxés (08).

Cash Télécom a commandé le 23 septembre 2008 à la société Kast Télécom un certain nombre de numéros surtaxés.

Le 12 novembre 2008 Kast Télécom a suspendu sans préavis la totalité des numéros alloués alléguant que Cash Télécom en effectuait une utilisation frauduleuse.

Budget Télécom a repris Kast Télécom, aux droits de laquelle elle vient.

Une facture d'un montant de 90 112,41 euros au titre des reversements générés par les communications sur la période de septembre à novembre 2008 étant restée impayée, la société Cash Télécom a assigné Budget Télécom en paiement de cette facture ainsi qu'en rupture brutale des relations contractuelles.

Par décision du 4 septembre 2014, le Tribunal de commerce de Marseille a rejeté l'exception de nullité de l'assignation soulevée par Kast Télécom, s'est déclaré compétent territorialement et a mis en demeure les parties de conclure sur le fond.

Le tribunal a estimé qu'il n'était pas démontré que la société Cash Telecom n'avait pas d'existence légale au moment de l'assignation délivrée le 20 septembre 2013.

Il a également jugé que sa compétence territoriale découlait de la combinaison des articles L. 442-6 et D. 442-3 du Code de commerce, le siège social de la société défenderesse Budget Télécom étant situé à Montpellier.

Par décision en date du 25 juin 2015, le Tribunal de commerce de Marseille a :

- condamné la société Budget Télécom à payer à la société Cash Télécom la somme de 92 112,41 euros avec intérêts au taux légal à compter du 1er juin 2009,

- condamné la société Cash Télécom à payer à la société Budget Télécom la somme de 30 000 euros à titre de dommages et intérêts,

- fait masse des dépens et les a partagés à raison de moitié à la charge de chacune des parties,

- ordonné l'exécution provisoire,

- rejeté pour le surplus toutes autres demandes.

Il a jugé que la créance de Cash Télécom était certaine, liquide et exigible. Il a rejeté la demande de Cash Télécom fondée sur la rupture brutale des relations commerciales en raison de la brièveté de cette relation et en raison de la légitimité de la rupture sans préavis pour comportement fautif de Cash Télécom. Le tribunal a accordé à Budget Télécom la somme de 30 000 euros au titre du préjudice financier.

La société Budget Télécom a interjeté appel de cette décision.

Par conclusions signifiées par RPVA le 23 avril 2016, auxquelles il sera fait référence pour plus amples exposés des motifs, des moyens et de leur argumentation, la société Budget Télécom, sollicite de la cour de :

Vu les articles 1126 et suivants, 1134, du Code civil,

Vu les pièces produites au débat,

- reformer le jugement en date du 4 septembre 2014 en ce qu'il a rejeté l'exception de nullité et l'exception d'incompétence soulevée par la société Budget Télécom,

Statuant à nouveau, A titre principal,

- prononcer la nullité de l'assignation pour défaut d'existence de la société Cash Télécom et défaut de pouvoir du représentant pour ester en justice à la date de délivrance de l'assignation (20 septembre 2013),

En conséquence, rejeter les demandes de la société Cash Télécom dirigées contre la société Budget Télécom,

A titre subsidiaire,

- dire et juger que le Tribunal de commerce de Marseille est territorialement incompétent pour statuer sur la demande en paiement de la somme de 90 112,41 euros prétendument due au titre d'une facture en date du 9 janvier 2009, au profit du Tribunal de commerce de Montpellier,

- renvoyer sur ce chef de demande la société Cash Télécom à mieux se pourvoir devant ladite juridiction,

En tout état de cause,

- confirmer le jugement du Tribunal de commerce de Marseille en date du 25 juin 2015 en ce qu'il a rejeté les demandes de la société Cash Télécom tendant à la condamnation de la société Budget Télécom SA à lui payer :

· une somme de 29 436 euros à titre d'intérêts de retard sur les reversements dus,

· une somme de 270 000 euros de dommages et intérêts pour rupture brutale des relations contractuelles,

· une somme de 540 000 euros de dommages et intérêts pour rupture abusive des relations contractuelles,

· une somme de 10 000 euros de dommages et intérêts pour résistance particulièrement abusive,

· une somme de 10 000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile, et aux dépens,

- confirmer le jugement du Tribunal de commerce de Marseille en date du 25 juin 2015 en ce qu'il a constaté la responsabilité de la société Cash Télécom

- le reformer en ce qu'il a limité le montant des dommages intérêts alloués à la société Budget Télécom à la somme de 30 000 euros,

- reformer le jugement du Tribunal de commerce de Marseille en date du 25 juin 2015 en ce qu'il a condamné la société Budget Télécom à payer à la société Cash Télécom une somme de 90 112,41 euros avec intérêts au taux légal à compter du 1er juin 2009,

- reformer le jugement du Tribunal de commerce de Marseille en date du 25 juin 2015 en ce qu'il a rejeté la demande de la société Budget Télécom formulée au titre des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile,

- reformer le jugement du Tribunal de commerce de Marseille en date du 25 juin 2015 en ce qu'il a fait masse des dépens et les partage à raison de moitié à la charge de chacune des parties

Statuant à nouveau sur les points infirmés,

- condamner la société Cash Télécom à payer à la société Budget Télécom la somme de 100 000 euros à titre de dommages intérêts en réparation du préjudice financier et d'image subi,

- condamner la société Cash Télécom à payer à la société Budget Télécom la somme de 7 500 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile pour les frais irrépétibles exposés en première instance,

- rejeter les appels incidents et l'ensemble des demandes de la société Cash Télécom comme irrecevables et mal fondées.

- condamner la société Cash Télécom à payer à la société Budget Télécom la somme de 10 500,00 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile pour les frais irrépétibles exposés en cause d'appel,

- condamner la société Cash Télécom au paiement des entiers dépens d'instance et d'appel. A l'appui de ses prétentions, elle soutient,

In limine litis : sur l'appel du jugement du 4 septembre 2014

La société Budget Télécom a légitimement soulevé " in limine litis ", et avant toute défense au fond, une exception de nullité de l'assignation pour défaut de preuve de l'existence de la personne morale et/ou de sa capacité d'agir en justice conformément à l'article 117 du Code de procédure civile. En effet, La société Cash Telecom Inc. a assigné la société Budget Télécom, le 20 septembre 2013. A cette date le demandeur n'avait plus d'existence juridique

Sur le fond

Sur le rejet de la demande de condamnation au paiement de 90 112,41 euros

La société Cash Télécom a sollicité la condamnation de la société concluante au paiement d'une somme de 90 112,41 euros correspondant à une prétendue facture de réversion en date du 9 janvier 2009 et relative au trafic du 1 septembre 2008 au 30 novembre 2008.

Or, non seulement la société Cash Télécom fonde sa demande sur la base d'un contrat dont la cause était illicite mais en outre elle ne rapporte nullement la démonstration du caractère fondé de cette facturation.

La société Cash Télécom fonde ses demandes sur un contrat dont la cause était illicite. En effet, les numéros affectés à Cash Télécom ont fait l'objet de multiples plaintes et actions pénales engagées au bout de quelques semaines seulement d'exploitation des numéros, notamment concernant des appels intempestifs afin de susciter des rappels du destinataire et permettre de faire des bénéfices colossaux.

Ces faits constituent des fautes lourdes, intentionnelles et délictuelles commises par Cash Télécom et d'une particulière gravité, rendant impossible le maintien de relations contractuelles, et justifiant la résiliation unilatérale et immédiate du contrat, sans respect d'un délai de préavis.

Sur la demande reconventionnelle de la société Budget Télécom

Il ressort des éléments produits que les comportements frauduleux de Cash Télécom ont nui gravement à la réputation et à l'activité de Kast Télécom. Dans ces conditions, et conformément à ce qui était notifié à Cash Télécom par courrier LRAR du 22.06.2009, Budget Télécom est en droit de faire indemniser également le préjudice direct subi du fait des agissements délictueux de Cash Télécom.

Ce préjudice comporte notamment les pertes de chiffre d'affaires, le temps passé en pure perte à gérer avec les autorités, les opérateurs et leurs clients, les suites des agissements délictueux de Cash Télécom.

Sur l'absence de rupture brutale des prétendues relations commerciales établies

Budget Télécom soutient et prouve qu'il n'existait aucune relation commerciale établie. La relation commerciale dont se prévaut la société Cash Télécom a duré 50 jours, soit moins de deux mois, de telle sorte que la brièveté des relations exclut l'existence de relations établies comme n'étant pas habituelle car était naissante et non pas suivie.

La société Kast Telecom étant contrainte sous peine de responsabilité pénale en tant que coauteur ou complice d'escroquerie et de responsabilité civile, de cesser immédiatement la mise à disposition de numéros dont l'utilisation violait les règles légales, réglementaires et contractuelles, était en droit de résilier sans préavis sans que Cash Télécom ne puisse s'en plaindre.

Cash Télécom ne prouve pas son préjudice. Celui-ci ne pourrait résulter que du non-respect d'un préavis suffisant. Or, celui-ci aurait été forcément très bref du fait de la durée de 50 jours, de la faculté pour la société Cash Télécom d'obtenir des prestations identiques auprès d'autres entreprises, l'inexistence d'une exclusivité ou d'une dépendance économique, et du fait que du fait des réclamations et actions frauduleuses de la requérante, les opérateurs auraient continué de ne pas verser les rétributions.

Par conclusions signifiées par RPVA le 25 février 2016, auxquelles il sera fait référence pour plus amples exposés des motifs, des moyens et de leur explications, la société Cash Télécom, sollicite de la cour de :

- déclarer la société Budget Télécom recevable mais mal fondé en son appel,

- confirmer le jugement rendu le 4 septembre 2014 sur la validité de l'assignation et la compétence territoriale,

Sur le fond,

Vu les pièces versées, Vu le Code civil et en particulier les articles 1134, 1993 et 1996 du Code civil,

Vu le Code de commerce et en particulier l'article L. 442-6 du Code de commerce,

- confirmer le jugement du 25 Juin 2015 en ce qu'il a condamné la société Budget Télécom à payer à la société Cash Télécom une somme de 90 112,41 euros en paiement de sa facture du 30 janvier 2009 et aux fins de restitution des retenues abusivement pratiquées sur les reversements dus,

- recevoir la société Cash Télécom en son appel incident et y faisant droit,

- condamner la société Budget Télécom à payer à la société Cash Télécom une somme de 29 436 euros (à parfaire) à titre d'intérêts de retard sur les reversements dus,

- dire que ces sommes porteront intérêts au taux légal à compter de la décision à intervenir, et que le taux de l'intérêt légal sera majoré de cinq points à l'expiration d'un délai de deux mois à compter du jour où la décision de justice sera devenue exécutoire,

- ordonner la capitalisation des dits intérêts dans les termes de l'article 1244 du Code civil,

- condamner la société Budget Télécom à payer à la société Cash Télécom une somme de 270 000 euros de dommages et intérêts pour rupture brutale des relations contractuelles,

- condamner la société Budget Télécom à payer à la société Cash Télécom une somme de 540 000 euros de dommages et intérêts pour rupture abusive des relations contractuelles, à parfaire au vu des investissements publicitaires réalisés en pure perte qui sont en cours d'évaluation,

- condamner la société Budget Télécom à payer à la société Cash Télécom une somme de 10 000 euros de dommages et intérêts pour résistance abusive,

- condamner la société Budget Télécom à payer à la société Cash Télécom une somme de 15 000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile,

- condamner la société Budget Télécom aux entiers dépens qui seront recouvrés par la SCP Bolling Durand Lallement conformément à l'article 699 du Code de procédure civile,

A l'appui de ses prétentions, elle soutient,

- sur l'irrecevabilité, elle produit le certificat d'incorporation de Floride du 18 février 2014 justifiant de son existence.

- sur l'incompétence territoriale, une de ses demandes est fondée sur la rupture brutale des relations commerciales ce qui explique la saisine du Tribunal de Marseille.

Sur le paiement de la facture de janvier 2009, la restitution des sommes retenues abusivement et le paiement d'intérêts de retard

La société Kast Télécom, puis la société Budget Télécom, retiennent depuis près de cinq ans, en dehors de tout cadre légal et sans aucun droit ni titre, l'intégralité des reversements dus sur les sommes perçues auprès des opérateurs de téléphonie au nom et pour le compte de la société Cash Télécom, qui représentaient, selon le calcul effectué en janvier 2009, la somme de 90 112,41 euros.

Sur l'indemnisation de la rupture brutale et abusive des relations commerciales

La société Budget Télécom doit être condamnée à réparer le préjudice causé à la demanderesse par la rupture brutale et abusive des relations contractuelles.

Cette rupture est intervenue le 12 novembre 2008 par la suspension de l'ensemble des numéros de Cash Télécom par Kast Télécom, sans préavis d'aucune sorte. La société Cash Télécom s'est retrouvée de fait dans l'incapacité totale de fournir ses services et de poursuivre une quelconque activité, sans connaître de surcroît les raisons de cette suspension.

Ce n'est qu'à la demande expresse de la société Cash Télécom et plusieurs mois après la rupture, que certains éléments, au demeurant non probants, seront présentés, à torts, comme de nature à justifier une suspension des services. Cette rupture est donc tout à la fois brutale et abusive.

Elle est d'autant plus préjudiciable que la demanderesse se trouvait vis-à-vis de la société Kast Télécom dans une situation de dépendance économique totale, doublée d'une dépendance technique ; en effet, les numéros fournis par la société Kast Télécom constituent une infrastructure indispensable à la fourniture par Cash Télécom de ses services au public.

Sur ce

Sur la nullité de l'assignation délivrée le 20 septembre 2013 et sur l'incompétence territoriale du Tribunal de commerce de Marseille

Considérant qu'il convient d'adopter la motivation des premiers juges dans le jugement du 4 septembre 2014 qui ont fait un juste appréciation des faits, des moyens soulevés et de l'argumentation des parties et a déclaré l'assignation du 20 septembre 2013 délivrée à Budget Télécom comme valide, Cash Télécom Inc. ayant la pleine capacité à agir comme l'établit le certificat à en tête " State of Florida - Département of State " en date du 18 février 2014 et a déclaré le Tribunal de commerce de Marseille compétent territorialement en application de la combinaison des articles L. 442-6 et D. 442- 3 et de son annexe du Code de commerce ; qu'il y a donc lieu à confirmer ce jugement entrepris ;

Sur le fond

Sur la demande de paiement de la facture de 90 112,41 euros

Considérant qu'en application de l'article 1315 du Code civil, dans sa rédaction applicable à la cause, : " Celui qui réclame l'exécution d'une obligation doit la prouver. Réciproquement, celui qui se prétend libéré doit justifier le paiement ou le fait qui a produit l'extinction de son obligation. " ;

Considérant qu'en l'espèce, il est établi que la société Cash Télécom a commandé le 23 septembre 2008 à la société Kast Télécom (devenue Budget Télécom) une mise à disposition de 30 numéros en 08 ; que ce document prévoyait une durée initiale de 1 an qui devait être tacitement renouvelée par périodes de 3 mois, le client pouvant le résilier à tout moment avec un préavis de 1 mois ; que la société Cash Télécom réclame le paiement de la facture sus-visée représentant le reversement généré par les communications sur la période de septembre 2008 à novembre 2008, constituée par des rétrocessions que Kast Télécom a perçues auprès des opérateurs au nom et pour le compte de Cash Télécom en vertu d'un mandat donné par cette dernière ; que Cash Télécom soutient que cette retenue est abusive ; que les griefs invoqués par Budget Télécom pour refuser le paiement de la facture réclamé par Cash Télécom reposent notamment sur les éléments suivants :

· la société Bouygues a demandé dans un courrier du 13 novembre 2008 la fermeture de 4 numéros de téléphone,

· par lettre du 26 novembre 2008 Bouygues Telecom demandait la fermeture de deux autres numéros de téléphone indiquant : " nous suspendons sur la période allant du 7 novembre 2008 (date des premières plaintes des clients) au 26 novembre 2008 (date de réception de votre courrier) les versements relatifs aux numéros incriminés dans notre courrier du 13 novembre 2008. ",

que s'y ajoutent :

- une réquisition judiciaire du 20 novembre 2008 portant sur un numéro de téléphone visé dans le courrier de Bouygues du 13 novembre 2008 pour la période entre le 1er juin et le 24 juillet 2008,

- une demande de la DGCCRF du 18 novembre 2008 au sujet de deux numéros visés par la courrier de Bouygues du 13 novembre 2008,

- une demande de l'ARCEP du 9 décembre 2008 au sujet de deux numéros de téléphone portant sur deux numéros de téléphone visés par le courrier de Bouygues le 13 novembre 2008,

- des mails provenant d'utilisateurs qui se plaignent ;

Que Budget Télécom soutient ne pas avoir reçu de versement de la part des opérateurs de téléphonie et l'a indiqué à Cash Télécom dans son courrier du 22 juin 2009 et explique en outre que Cash Télécom est infondée à réclamer le reversement de sommes issues de son activité illicite en application de l'article 1126 ancien du Code civil ;

Mais considérant qu'en application de l'article 1315 ancien du Code civil, il appartient à Budget Télécom d'établir qu'elle n'a pas reçu des opérateurs le versement généré par les communications à l'exception de la suspension par Bouygues sur 4 numéros de téléphones pour la période du 7 novembre 2008 au 26 novembre 2008 soit 19 jours ; qu'en outre il lui appartient d'établir que l'activité illicite portait sur l'ensemble des numéros de téléphone, ce qu'elle ne fait pas ; qu'il convient donc de retenir sur la somme de 90 112,41 euros portant sur trois mois, un montant de 8 009,99 euros représentant la proportion de 4 numéros suspendus pendant 2/3 du mois ; qu'il convient donc de confirmer le jugement entrepris mais de le réformer sur le montant du par Budget Télécom qui s'élève à 82 102,42 euros avec les intérêts au taux légal (et non majoré de 8 % qui n'est justifié par aucun élément) à compter du 1er juin 2009 date de la mise en demeure ;

Sur la rupture brutale des relations commerciales

Considérant que l'article L. 442-6 I 5° du Code de commerce dispose : " Engage la responsabilité de son auteur et l'oblige à réparer le préjudice causé le fait, par tout producteur, commerçant, industriel ou artisan : ... 5° De rompre brutalement, même partiellement, une relation commerciale établie, sans préavis écrit tenant compte de la durée de la relation commerciale et respectant la durée minimale de préavis déterminé, en référence aux usages du commerce, par des accords interprofessionnels ( '). " ; que l'application de ces dispositions suppose l'existence d'une relation commerciale, qui s'entend d'échanges commerciaux conclus directement entre les parties, revêtant un caractère suivi, stable et habituel laissant raisonnablement anticiper pour l'avenir une certaine pérennité dans la continuité du flux d'affaires entre les partenaires commerciaux ; qu'en outre la rupture doit avoir été brutale, soit sans aucun préavis soit avec un délai de préavis trop court ne permettant pas à la partie qui subit la rupture d'être en mesure de trouver des solutions de rechange ou de retrouver un partenaire commercial offrant des conditions commerciales équivalentes ;

Considérant qu'en l'espèce il n'est pas contesté que les relations commerciales entre les parties ont débuté le 23 septembre 2008 (commande de numéros surtaxés) et se sont interrompues le 12 novembre 2008 par l'envoi par Budget Télécom d'un mail qui indique : " Nous vous informons que tous vos numéros 0899 ont été coupés. Les plaintes ne cessent pas de toute part et nous sommes menacés par de nombreux procès à cause de l'utilisation frauduleuse que vous faites des numéros. Pour ces raisons, nous vous informons que nous suspendons votre contrat. " ; qu'une relation d'à peine un mois et demi ne peut constituer la relation suivie, stable et habituelle exigée par la loi ; que les conditions de l'application de l'article L. 442-6 I 5° du Code de commerce ne sont pas réunies, d'autant plus que l'absence de préavis se justifie par les griefs invoqués par Budget Télécom (utilisation frauduleuse des numéros de téléphone) qui constituent une comportement fautif d'une particulière gravité de Cash Télécom en application du même article précité qui précise : " Les dispositions qui précèdent ne font pas obstacle à la faculté de résiliation sans préavis, en cas d'inexécution par l'autre partie de ses obligations ou en cas de force majeure " ; qu'en effet, comme l'écrit Bouygues dans son courrier du 1 novembre 2008 : " Il apparaît en effet, que les fournisseurs ont mis en place des mécanismes déloyaux d'incitation à l'appel de ces numéros consistant à laisser des appels en absence sur les terminaux de nos clients (...) En conséquence, ces faits sont d'une particulière gravité (...) " ; qu'en conséquence, il convient de confirmer le jugement entrepris qui a débouté la société Cash Télécom de ses demandes d'indemnisation de son préjudice résultant de la rupture brutale et abusive des relations commerciales ;

Sur la demande de dommages et intérêts de Budget Télécom;

Considérant qu'il convient de confirmer le jugement entrepris par adoption des motifs qui a fait une juste appréciation des moyens et des faits et qui a évalué le préjudice subi par Budget Télécom à la somme de 30 000 euros de dommages et intérêts pour le préjudice financier subi ;

Considérant que l'équité n'impose pas l'application de l'article 700 du Code de procédure civile ;

Sur la demande de dommages et intérêts pour résistance abusive de Budget Télécom

Considérant que Cash Télécom n'établit pas de faute de la part de Budget Télécom qui constituerait une résistance abusive ; qu'il y a donc lieu à confirmer le jugement entrepris qui a débouté Cash Télécom de sa demande en dommages et intérêts ;

Par ces motifs, LA COUR statuant publiquement et contradictoirement, Confirme le jugement entrepris, sauf sur le montant de la facture dû par Budget Télécom à Kash Telecom ; Statuant à nouveau du chef infirmé ; Condamne la SA Budget Télécom à payer à la société Kash Telecom la somme de 82 102,42 euros, avec intérêts au taux légal à compter du 1er juin 2009 ; Dit n'y avoir lieu à l'application de l'article 700 du Code de procédure civile ; Fait masse des dépens qui seront supportés par chaque partie pour moitié.