CA Paris, Pôle 5 ch. 4, 21 juin 2017, n° 15-15949
PARIS
Arrêt
Infirmation partielle
PARTIES
Demandeur :
Mikit France (SAS)
Défendeur :
Goubil, 3R-33 (SARL)
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
Mme Luc
Conseillers :
Mme Mouthon Vidilles, M. Thomas
Avocats :
Mes Vignes, de Balmann, Rousseau, Peron
FAITS ET PROCÉDURE
La société Mikit France exploite un réseau de franchise pour la commercialisation d'un concept de vente de maisons individuelles en " prêt-à-finir ". Les franchisés, qui contractent un engagement d'exclusivité, livrent la maison gros-œuvre (clos et couvert) construit et les éléments nécessaires à la finition de la maison en " kits " avec notice de montage par le client lui-même.
Le 22 mai 2008, M. Jean-Christophe Goubil et la société Mikit France ont conclu un protocole d'accord valant avenant au contrat de franchise initialement conclu entre la société Mikit France et M. Peyronnet le 24 mars 2004. L'exploitation du concept Mikit était limitée sur le département de la Gironde à l'arrondissement de Bordeaux lui-même limité aux cantons d'Arcachon, Audenge, Gradignan, Pessac 1° et 2°, Mérignac 1° et 2° et Belin Beliet. M. Goubil a créé la société 3R-33 pour exploiter la franchise. Ce contrat, renouvelable tacitement, a été prorogé jusqu'au 24 mars 2013.
Par lettre recommandée avec accusé de réception du 17 septembre 2012, la société 3R-33 a indiqué renoncer à la reconduction tacite du contrat de franchise, le contrat prenant fin à sa date d'échéance, soit le 24 mars 2013.
Suspectant la société 3R-33, exerçant dorénavant son activité sous l'enseigne " Pavillon de l'Atlantique ", de commettre des actes de concurrence déloyale et parasitaire au préjudice de son réseau, la société Mikit a obtenu du président du Tribunal de commerce de Bordeaux, sur le fondement de l'article 145 du Code de procédure civile, la désignation d'un huissier de justice chargé de se rendre dans les locaux de la société 3R-33 et d'établir un rapport. Un procès-verbal de constat d'huissier a été établi le 30 mai 2013.
Par exploit du 6 novembre 2013, la société Mikit a assigné la société 3R-33 ainsi que M. Goubil devant le Tribunal de commerce de Paris lequel a, par jugement du 4 juin 2015 :
- condamné la société 3R-33 à verser la somme de 7 415,71 euros due à la SAS Mikit France avec intérêts de droit entre les mains de la Carpa qui la libérera lors de la production par la SAS Mikit France des factures correspondant aux dossiers Bertrand & Darriet, et le dossier Livet & Mussard,
- condamné la société 3R-33 à verser à la SAS Mikit France la somme de 15 383 euros HT au titre des mois de janvier, de juin et de juillet 2011,
- condamné solidairement la société 3R-33 et M. Jean-Christophe Goubil à verser à la société Mikit France au titre de l'article 700 du Code de procédure civile la somme de 5 000 euros,
- ordonné l'exécution provisoire du présent jugement,
- débouté les parties de toutes leurs demandes plus amples ou contraires,
- condamné solidairement la société 3R-33 et M. Jean-Christophe Goubil aux dépens.
La société Mikit France a interjeté appel de ce jugement.
Sur ce, LA COUR,
Vu les dernières conclusions déposées et notifiées le 2 février 2016, par la société Mikit France, appelante, par lesquelles il est demandé à la cour de :
- confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a condamné la société 3R-33 à payer à la société Mikit France la somme de 7 415,71 euros au titre du dossier Livet & Mussard, outre celle de 15 381 euros HT au titre des mois de janvier, de juin et de juillet 2011 et celle de 5 000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile,
- débouter la société 3R-33 et M. Goubil de leur appel incident de ces chefs,
- le réformer pour le surplus,
- y ajoutant, préciser que la somme de 15 381 euros est HT et qu'il convient d'y ajouter la TVA au taux de 20 %,
- condamner solidairement M. Jean-Christophe Goubil et la société 3R-33 à payer à la société Mikit France la somme de 250 000 euros en réparation du trouble commercial et de la captation de savoir-faire commise au préjudice de cette dernière,
- ordonner la publication de l'arrêt à intervenir dans trois journaux au choix de la société Mikit France et aux frais de la société 3R-33, dans la limite de 3 000 euros,
- condamner solidairement M. Jean-Christophe Goubil et la société 3R-33 à payer à la société Mikit France la somme de 10 000 euros au titre des frais irrépétibles d'appel,
- condamner solidairement M. Jean-Christophe Goubil et la société 3R-33 aux dépens qui pourront être recouvrés par Maître Marie-Catherine Vignes par application de l'article 699 du Code de procédure civile ;
Vu les dernières conclusions déposées et notifiées le 18 décembre 2015 par la société 3R-33 et M. Jean-Christophe Goubil, intimés et appelants à titre reconventionnel, par lesquelles il est demandé à la cour, au visa des articles 1134, 1382 et 1383 du Code civil, 145 et 700 du Code de procédure civile et la loi n° 2015-990 du 6 août 2015, de :
- dire recevable et bien fondée la société 3R-33 en toutes ses demandes, fins et conclusions, liminairement et principalement,
- constater le vice dont est entachée l'intégralité de la procédure de saisie et en conséquence infirmer le jugement du Tribunal de commerce de Paris en date du 4 juin 2015 en ce qu'il :
* a constaté la validité de la saisie opérée le 30 mai 2013,
* a ordonné le versement par 3R-33 de redevances au titre des dossiers Livet & Mussard et Bertrand & Darriet pour un montant de 7 415,71 euros,
* a ordonné le versement par 3R-33 de redevances au titre des mois de janvier, juin et juillet 2011 pour un montant de 15 381 euros,
* a constaté que la société 3R-33 n'a pas retardé de mauvaise foi le règlement des factures des dossiers Livet & Mussard et Bertrand & Darriet,
- constater le règlement des dits dossiers, et en conséquence, réformer le jugement querellé en ce qu'il a condamné la société 3R-33 à payer à la société Mikit la somme de 7 415,71 euros au titre de redevances des dossiers Livet & Mussard et Bertrand & Darriet,
- confirmer le jugement du Tribunal de commerce de Paris en date du 4 juin 2015 en ce qu'il :
* a constaté la nullité de la clause de non concurrence post-contractuelle et à ce titre débouté la société Mikit France de sa demande de la cessation d'activité de la société 3R33,
* a constaté que le parasitisme n'est pas établi et à ce titre débouté la société Mikit France de toutes ses demandes s'y rapportant,
* a constaté que la société Mikit ne rapporte pas la preuve d'une violation de la clause de non-concurrence ou des actes de concurrence déloyale,
* a constaté l'absence de lien de causalité entre le comportement de la société 3R-33 et de M. Goubil et le préjudice prétendument réclamé par la société Mikit,
* a constaté l'absence de préjudice matériel et/ou moral,
En conséquence :
- débouter la société Mikit de toutes ses demandes, fins et prétentions,
- y ajoutant :
- condamner la société Mikit à verser à la société 3R-33 la somme de 24 722,73 euros à titre de remboursement des redevances proportionnelles calculées sur les primes d'assurances, la somme de 12 167,32 euros à titre de remboursement des redevances publicité calculées sur les redevances proportionnelles,
- condamner la société Mikit à payer à la société 3R-33 et à M. Goubil, chacun, la somme de 5 000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile,
- condamner la même aux entiers dépens de première instance et d'appel ;
Sur la régularité des opérations de constat et la validité du procès-verbal du 30 mai 2013
Pour solliciter l'infirmation du jugement qui les ont déboutés de leur demande de nullité des opérations de saisie aux motifs que la qualité de salarié de la société Mikit du technicien assistant l'huissier est sans incidence et surabondamment, qu'ils ont autorisé la transmission à la société Mikit de tous les documents saisis, la société 3R-33 et M. Goubil font valoir que la saisie s'est déroulée hors des limites fixées par l'ordonnance et dans des conditions de partialité et de déloyauté qui doivent conduire à son annulation. Ils rappellent, à juste titre, que selon l'ordonnance du président du tribunal de commerce de Bordeaux, l'huissier devait s'adjoindre un représentant de la société Mikit en la personne de M. Peltier ainsi qu'un technicien informatique pour procéder à toutes investigations utiles. Ils soutiennent que le technicien était en réalité, M. Mougeolle, également salarié de la société Mikit alors qu'il n'a pas été présenté et ne s'est pas présenté comme tel et que sous couvert de la fonction de technicien, celui-ci a diligenté une véritable perquisition dans ses fichiers informatiques.
Ils considèrent qu'une telle déloyauté vicie l'intégralité de la procédure et que la saisie qui en résulte doit être annulée. Enfin, ils estiment que leur accord pour la communication des pièces retenues par l'huissier ne peut leur être opposé en ce que leur connaissance de l'irrégularité est postérieure à cette autorisation et que le fait de ne pas s'opposer à la communication ne confère aucune légitimité à des preuves obtenues de façon illicite.
La société Mikit réplique que les opérations conduites dans le cadre de l'ordonnance de saisie du président du tribunal de commerce de Bordeaux sont régulières et que la demande de nullité formulée par les défendeurs doit être écartée. Elle estime que l'ordonnance prévoyant la présence d'un de ses salariés afin de faciliter les opérations de constat, M. Mougeolle, qui ne s'est pas substitué à l'huissier, n'a eu aucune incidence sur les opérations. Elle ajoute que M. Goubil qui ne s'est pas opposé à la saisine de documents par l'huissier, ne peut lui reprocher leur utilisation ultérieure, dès lors qu'elle les a obtenus régulièrement. Elle indique chercher en vain quel grief les intimés peuvent tirer de cette circonstance.
Aux termes de l'article 175 du Code de procédure civile, la nullité des actes d'exécution relatifs aux mesures d'instruction est soumise aux dispositions qui régissent la nullité des actes de procédure et l'article 114 du même Code dispose qu'aucun acte de procédure ne peut être déclaré nul pour vice de forme si la nullité n'en est pas expressément prévue par la loi, sauf en cas d'inobservation d'une formalité substantielle ou d'ordre public, à charge pour celui qui l'invoque de prouver l'existence d'un grief.
Par ordonnance du 15 mai 2013, rendue sur requête de la société Mikit, le président du Tribunal de commerce de Bordeaux a autorisé l'huissier à se faire assister d'un technicien informatique pour procéder à toutes investigations utiles. Il n'est pas contesté que le technicien qui a assisté l'huissier, M. Mougeolle, s'est avéré être salarié de la société Mikit.
Or, le droit à un procès équitable consacré par l'article 6, § 1, de la Convention de sauvegarde des droits de l'Homme et des libertés fondamentales, commande que la personne qui assiste l'huissier instrumentaire lors de l'établissement d'un procès-verbal soit indépendante de la partie requérante.
Par suite, les documents saisis lors d'opérations menées dans de telles conditions ne peuvent valoir preuve en justice, peu important à cet égard que la société 3R-33 ait autorisé leur remise, cet accord ayant, de surcroît, été donné alors qu'elle n'avait pas connaissance de la qualité de salarié de la société Mikit du technicien ayant assisté l'huissier. L'atteinte à ce droit fondamental fait nécessairement grief à la société 3R-33. Dès lors, le procès-verbal de constat dressé le 30 mai 2013 étant nul et de nul effet, les documents saisis selon ce procès-verbal ne peuvent servir de fondement aux demandes de la société Mikit. Le jugement entrepris sera donc infirmé de ce chef.
Sur la demande en paiement des redevances restant dues au titre du chantier Livet & Musard à hauteur de 7 415,71 euros
Les parties s'accordent à reconnaître qu'ensuite de la décision des premiers juges, la société 3R-33 qui ne contestait pas devoir cette somme mais attendait la facture correspondante que la société Mikit ne lui établissait pas, s'est exécutée, la société Mikit lui adressant alors la facture correspondante.
Cette demande en paiement est donc devenue sans objet.
Sur la demande au titre du lissage des ouvertures de chantiers et des redevances éludées à hauteur de la somme totale de 21 873 euros HT
La société Mikit soutient que M. Goubil a procédé à un " lissage " de ses déclarations de chantier afin d'éviter le paiement de planchers de redevances contractuellement prévus. Elle explique que lorsqu'aucun chantier n'est ouvert sur un mois donné et en l'absence d'appels de fonds au titre du coulage des fondations, une redevance plancher est due, ce qui est le cas pour la somme de 15 381 euros au titre des mois de janvier, juin et juillet 2011, à laquelle il convient d'ajouter les redevances dites " planchers " exigibles mensuellement et qui sont dues lorsque les redevances proportionnelles sont inférieures au montant plancher, soit la somme de 6 493 euros HT, que le tribunal de commerce n'a pas accordée à tort alors même qu'il relevait que la société 3R-33 a acquitté au titre des mois d'avril, mai, septembre et décembre 2012 ainsi qu'au titre des mois de janvier et mars 2013, des redevances inférieures au montant plancher. Elle ajoute que la société 3R-33 ne peut se prévaloir de la note Mikit de janvier 2012 proposant d'adopter un système de lissage non plus mensuel mais semestriel. Elle se réfère à sa pièce n° 46 constituée d'un décompte que selon ses dires, elle aurait établi à la suite des investigations de l'huissier et sur la base de la comptabilité de la société 3R-33.
La société 3R-33 et M. Goubil répliquent que la société Mikit ne rapporte aucune preuve du lissage dont elle se prévaut ni de son caractère interdit. Ils relèvent que le contrat ne mentionne à aucun moment que le montant total des redevances puisse être forfaitaire ou non compensable. Ils se réfèrent à une note adressée par la société Mikit le 9 janvier 2012 faisant valoir un lissage semestriel et non plus mensuel à compter d'octobre 2011 et en déduisent que celle-ci a validé le principe du lissage qu'elle ne peut aujourd'hui leur reprocher. Ils sollicitent la réformation du jugement qui estimant à tort que le lissage n'était en place qu'à compter de l'année 2012, a condamné la société 3R-33 à payer la somme de 15 381 euros HT.
Il ressort de l'article VI du contrat de franchise que le franchisé paiera au franchiseur " b) Une redevance proportionnelle de 4,5 % HT. " et " De plus, aux termes des 12 premiers mois, ... un plancher mensuel de redevance proportionnelle de 2 300 euros HT, qui donnera lieu à l'acceptation trois mois avant la fin de chaque période de 12 mois, des 12 effets correspondants. " qui passera à 4 600 euros HT au terme des 36 premiers mois et sera revalorisé ensuite de 3 % par an, et que " L'assiette des redevances proportionnelles est la totalité du chiffre d'affaires TTC du franchisé de quelque nature qu'il soit (contrat de base, avenants, révision de prix, etc... ".
Par note du 29 janvier 2012, la société Mikit a indiqué que " Comme indiqué dans les comptes rendus du Comité de travail, un système de lissage des redevances a été mis en place sur une période semestrielle civile. Le taux de redevance est appliqué sur un CA HT et non sur un CA TTC... Veuillez trouver ci-joint la note explicative qui vous avait été adressée en octobre 2011 sur le sujet " expliquant que " Le lissage a été mis en place pour permettre d'annuler les effets de déclarations irrégulières de fondations sur une période de 6 mois. Au lieu de se référer à un montant mensuel de plancher, la référence à des redevances minimums est maintenant considérée sur une période de 6 mois... ".
Il en ressort que la société Mikit qui a mis en place un système de lissage semestriel à compter d'octobre 2011, ne peut sérieusement affirmer que M. Goubil ne saurait s'en prévaloir.
En toute hypothèse, il apparaît que les demandes en paiement de la somme de 15 381 euros HT au titre des mois de janvier, juin et juillet 2011 et de celle de 6 493 euros HT dont la société Mikit s'abstient, au demeurant, de préciser les mois qu'elle concerne, sont fondées, selon les indications de la société Mikit elle-même (page 13 de ses dernières écritures) sur des pièces issues des opérations de saisie dont il a été vu ci-dessus qu'elle ne pouvait s'en prévaloir. La société Mikit ne produit aucun autre document démontrant que la société 3R-33 soit redevable ni de redevances plancher (elle n'en détaille d'ailleurs pas le montant total), ni des écarts sur plancher sollicités. Par suite, le jugement entrepris sera infirmé en ce qu'il a condamné la société 3R-33 à payer la somme de 15 381 euros HT et confirmé en ce qu'il a débouté la société Mikit de la demande en paiement d'une somme de 6 493 euros.
Sur la demande d'interdiction de poursuivre l'activité de commercialisation de maisons individuelles durant un an du fait de la clause de non-concurrence
La société Mikit soutient que M. Goubil, ès qualités, a violé la clause de non-concurrence post-contractuelle (clause III-2°) B) qui lui interdisait de poursuivre une activité de commercialisation de maisons individuelles, objet de la franchise, pendant un an. Elle se prévaut à cet égard d'un jugement du Tribunal de commerce de Paris du 18 décembre 2008 devenu définitif et relatif à un ancien franchisé Mikit, qui a dit que la clause de non-concurrence post-contractuelle n'était pas nulle dans son principe, mais qu'elle devait être limitée à une activité de maisons en " prêt-à-finir ", exploitée sur le territoire concédé au terme du contrat de franchise et utilisant les éléments caractéristiques du concept développé par Mikit.
La société 3R-33 et M. Goubil rappellent qu'une clause de non-concurrence post-contractuelle est valable s'il existe un savoir-faire à protéger, que ce savoir-faire a été transmis et a rapporté un avantage économique au franchisé, qu'elle doit être proportionnée aux intérêts légitimes du franchiseur au regard de l'objet du contrat et des intérêts du franchiseur et limitée dans le temps et l'espace. Ils considèrent que le savoir-faire de la société Mikit est inexistant et relèvent que la clause de non-concurrence n'est limitée ni dans l'espace en conformité avec le secteur contractuellement défini, ni quant à l'exercice de la profession et qu'elle interdit au franchisé la conservation et l'exportation de sa clientèle. Ils ajoutent que cette clause empêche la société 3R-33 d'exercer une quelconque activité dans le secteur de la maison individuelle, sans référence à un savoir-faire particulier. Ils en concluent qu'elle est nulle et subsidiairement, qu'elle doit être limitée au territoire fixé contractuellement.
La société 3R-33 et M. Goubil ajoutent que la société Mikit n'indique pas les agissements concurrentiels constitutifs de la violation de la clause de non-concurrence et la société Mikit réplique que l'activité de la société 3R-33 de construction de maisons individuelles révèle une poursuite de l'activité antérieure fondée sur son concept en violation de la clause de non-concurrence.
Il est constant que l'article III-2°) B du contrat de franchise instaure une clause de non-concurrence, le franchisé s'engageant pendant une durée d'un an à compter de la date de cessation du contrat quelqu'en soit la cause et ce, sur l'ensemble du territoire national, à n'exercer aucune activité en relation proche ou éloignée avec l'activité du réseau Mikit (maisons individuelles).
C'est par de justes motifs que la cour adopte que les premiers juges ont débouté la société Mikit de sa demande en cessation d'activité du fait de la nullité de la clause de non-concurrence en considérant que si celle-ci était causée, compte-tenu de l'existence d'un savoir-faire spécifique dont M. Goubil avait expressément admis la valeur et qui avait été transmis au cours de réunions, visites et par des comptes rendus pendant l'exécution du contrat, elle avait toutefois pour conséquence de restreindre abusivement les domaines dans lesquels la société 3R-33 pouvait exercer une activité à l'expiration du contrat.
En effet, d'une part, comme l'ont relevé à raison les premiers juges, si la notion de " prêt à finir " mise en avant par la société Mikit qui a créé sa franchise en 1983, a perdu de son originalité dans le monde de la construction de maisons individuelles, de nombreux autres acteurs économiques utilisant un concept comparable ainsi que la même appellation, la société Mikit conserve toutefois son originalité en ce qu'elle propose de livrer les matériaux nécessaires à la finition de la maison sous forme de kits numérotés avec notices de montage de sorte qu'elle justifie d'un savoir-faire spécifique.
D'autre part, cette clause de non-concurrence interdisant toute activité de construction de maisons individuelles sur tout le territoire national n'est pas valide n'étant limitée ni dans son objet, ni dans l'espace. Par suite, cette clause qu'il n'y a pas lieu d'aménager compte tenu des termes trop généraux qu'elle renferme, n'est pas opposable aux intimées. Dès lors, la société Mikit sera déboutée de sa demande en cessation d'activité de commercialisation de maisons individuelles durant un an.
Sur la concurrence parasitaire
La société Mikit soutient que son ancien franchisé a commis des actes de concurrence déloyale en reprenant son concept, la vente de maisons en " prêt-à-finir ", et en poursuivant cette activité pour son compte à l'issue du contrat. En outre, M. Goubil aurait calqué son site Internet, repris son slogan, plagié sa méthode de fidélisation des clients et repris son cahier de suivi des chantiers ainsi que ses fiches de prospects. Elle considère que ce dernier affirme à tort que le savoir-faire Mikit ne mériterait pas protection car il serait inexistant dès lors qu'elle apporte aux membres de son réseau un savoir-faire réel et en constante adaptation. Elle rappelle que la principale spécificité du concept Mikit réside dans la technique des kits et des manuels de montage et affirme que M. Goubil a voulu se l'approprier.
La société 3R-33 et M. Goubil répliquent que la société Mikit ne prouve pas que la société 3R-33 se soit appropriée les fruits de ses investissements et de son savoir-faire. Ils précisent que si la notion de prêt-à-finir constitue un réel savoir-faire et se distingue de la notion de travaux réservés, la société 3R-33 qui ne propose pas de " prêt à finir " ne peut se voir accuser de parasitisme et que si la notion de prêt-à-finir se confond avec la notion de travaux réservés, alors le contenu de la franchise et le savoir-faire de la société Mikit sont inexistants puisque celle-ci tente de s'approprier une pratique générale et constante depuis 25 ans. Ils ajoutent que de même, ni les ordres de services, ni le site Internet, ni la fiche de suivi, ni les fiches de prospects, ni les tracts manuscrits ne constituent une utilisation déloyale de la franchise et du savoir-faire Mikit.
Il est constant que le parasitisme consiste, pour un opérateur économique, à s'immiscer dans le sillage d'un autre afin de tirer profit, sans rien dépenser, de ses efforts et de son savoir-faire.
Examinant les pièces produites par la société Mikit France au soutien de ses affirmations quant à l'existence de faits de parasitisme, c'est à juste titre que les premiers juges en ont déduit que ceux-ci n'étaient pas établis. En effet, les propositions sur le site Internet de la société 3R-33 exploitant, selon l'extrait K-bis produit, son activité de " vente construction en sous-traitance et commercialisation de maisons individuelles " sous l'enseigne " Pavillon de l'Atlantique ", d'offrir des maisons à construire avec la possibilité de " travaux réservés " ou la proposition " ... de réaliser d'importantes économies en participant à des travaux de finition " ne constituent pas un plagiat des propositions par la société Mikit France de maisons à construire " en kit " qui font sa spécificité. De même, si le parrainage des " Ambassadeurs pavillon de l'Atlantique " est comparable à la méthode de fidélisation du " Club des Ambassadeurs Mikit " et si les dossiers de commandes ainsi que les modèles de maison proposés présentent une similarité technique, ils ne constituent pas des éléments d'usurpation en ce qu'ils sont usuels et ne caractérisent aucunement la notoriété et la spécificité de la société Mikit.
En conséquence, le jugement entrepris sera confirmé en ce qu'il a débouté la société Mikit de ses demandes au titre de la concurrence parasitaire.
Sur la demande en remboursement de redevances proportionnelles et de redevances publicité
Relevant à raison que le tribunal de commerce a omis de statuer sur leur demande reconventionnelle, la société 3R-33 et M. Goubil prétendent que la société Mikit est redevable d'un trop perçu de redevances proportionnelles calculées sur les primes d'assurances à hauteur de 24 722,73 euros TTC ainsi que des redevances " publicité ", calculées sur le montant des redevances proportionnelles dont le montant s'élève à 12 167,32 euros TTC dont ils sollicitent le remboursement.
Aux termes de ses écritures, la société Mikit France ne fait valoir aucune observation en réplique.
Il ressort des pièces versées aux débats par la société 3R-33, non contestées par la société Mikit, que celle-ci a inclus dans l'assiette des redevances proportionnelles le montant des assurances facturées aux clients, avancées par la société 3R-33 et remboursées par la société Mikit sur note de débours alors que l'article VI du contrat rappelé ci-dessus mentionne que les redevances proportionnelles sont calculées sur le chiffre d'affaires TTC du franchisé lequel n'inclut pas les primes d'assurance de sorte qu'il existe un trop perçu de redevances à hauteur de la somme de 24 722,73 euros TTC au remboursement de laquelle la société Mikit sera condamnée. En revanche, la société 3R-33 ne justifie pas de l'impact qu'elle invoque sur les redevances publicité, faute de démontrer que ces redevances aient été calculées sur la base des redevances proportionnelles. La société 3R-33 sera donc déboutée du surplus de sa demande formée à ce titre.
En définitive, la société Mikit sera déboutée de l'ensemble de ses demandes, en ce compris la demande de publication de la décision qui n'est pas justifiée.
Sur les dépens et l'article 700 du Code de procédure civile
La société Mikit, partie perdante, sera condamnée aux dépens de première instance et d'appel et devra verser à la société 3R-33 et M. Goubil la somme totale de 8 000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile.
Par ces motifs : LA COUR, Dit que le procès-verbal de constat du 30 mai 2013 est nul et de nul effet ; Constate que la demande en paiement d'une somme de 7 415,71 euros est devenue sans objet ; Confirme le jugement entrepris, sauf en ce qu'il a condamné la société 3R-33 à verser à la société Mikit France la somme de 15 381 euros HT et condamné solidairement la société 3R-33 et M. Goubil aux dépens et à verser à la société Mikit France la somme de 5 000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile ; L'infirme sur ces points ; Statuant à nouveau, déboute la société Mikit France de l'intégralité de ses demandes ; Et y ajoutant, Condamne la société Mikit France à rembourser à la société 3R-33 la somme de 24 722,73 euros TTC ; Déboute la société 3R-33 et M. Goubil du surplus de leurs demandes ; Condamne la société Mikit France aux dépens de première instance et d'appel ; Condamne la société Mikit France à verser à la société 3R-33 et M. Goubil la somme totale de 8 000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile.