Cass. soc., 5 juillet 2017, n° 16-15.961
COUR DE CASSATION
Arrêt
Rejet
PARTIES
Demandeur :
Total Marketing Services (SA)
Défendeur :
Lourenço (Epoux)
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
Mme Goasguen
Rapporteur :
Mme Aubert-Monpeyssen
Avocats :
SCP Boré, Salve de Bruneton, Mégret, SCP Piwnica, Molinié
LA COUR : - Attendu, selon l'arrêt attaqué (Versailles, 1er mars 2016), qu'un contrat de location-gérance a été conclu, le 11 juillet 1986, entre la société Total, aux droits de laquelle vient la société Total marketing services et la société Lourenço, dont les gérants sont M. et Mme Lourenço, concernant l'exploitation d'une station-service ; que le 16 avril 2012, M. Lourenço a saisi la juridiction prud'homale en réclamant le bénéfice des dispositions de l'article L. 7321-1 du Code du travail ;
Sur le premier moyen : - Attendu que la société fait grief à l'arrêt de dire que l'action en paiement de dommages-intérêts formée par le gérant, soumise à la prescription trentenaire, est recevable pour toute la période visée par la demande, alors, selon le moyen, qu'antérieurement à la réforme de la prescription par la loi n° 2008-561 du 17 juin 2008, l'action en responsabilité délictuelle fondée sur l'article 1382 du Code civil était soumise à la prescription décennale prévue à l'article 2270-1 ancien du Code civil ; qu'en retenant la prescription trentenaire, après avoir relevé que l'action exercée par les gérants était de nature délictuelle, la cour d'appel a violé l'article 2270-1 ancien du Code civil ;
Mais attendu qu'abstraction faite d'une référence erronée à la nature délictuelle de l'action en responsabilité considérée, la cour d'appel a exactement retenu qu'antérieurement à la loi nouvelle n° 2008-561 du 17 juin 2008, les actions tendant à la requalification du statut de gérant de succursale se prescrivaient par trente ans ; que le moyen n'est pas fondé ;
Sur le deuxième moyen : - Attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur le moyen annexé qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;
Sur le troisième moyen, ci-après annexé : - Attendu qu'abstraction faite du terme impropre de gérant-salarié, la cour d'appel, qui a caractérisé les conditions de fait du bénéfice du statut de gérant de succursale au sens de l'article L. 7321-2 du Code du travail, a exactement retenu que ce statut étant d'ordre public, la société était tenue de plein droit des obligations en résultant notamment au titre de la prime d'ancienneté, peu important qu'elle n'ait pas eu de comportement fautif ; que le moyen, irrecevable en sa troisième branche, n'est pas fondé pour le surplus ;
Sur le quatrième moyen : - Attendu que la société fait grief à l'arrêt de rejeter sa demande de compensation tendant à voir déduire du montant des sommes dont elle est redevable au gérant en application des articles L. 7321-2 et L. 7321-3 du Code du travail, le montant des sommes perçues par ce dernier de la société Lourenço, alors, selon le moyen : 1°) que la société Total marketing services n'avait pas invoqué le principe d'une compensation légale ; qu'en statuant sur un tel fondement, la cour d'appel a méconnu les termes du litige et violé les articles 4 et 5 du Code de procédure civile ; 2°) que le bénéficiaire du statut de gérant de succursale, sauf à justifier du contraire, n'exerce qu'une seule et unique activité pour le compte du fournisseur de marchandises ; que l'activité exercée antérieurement à la reconnaissance dudit statut a déjà fait l'objet d'une rémunération, dont la réitération n'est pas justifiée ; que la rémunération de gérants d'une station-service sous la forme de salaires en application des articles L. 7321-1 à L. 7321-4 du Code du travail doit être fixée en tenant compte des rémunérations perçues au titre de la gérance et de l'exploitation, qui a la même cause ; qu'en rejetant la demande de déduction de la société Total marketing services, la cour d'appel a violé les articles L. 7321-1 et suivants du Code du travail, ensemble les articles 1234 et 1236 du Code civil ; 3°) qu'en tout état de cause, le paiement emporte extinction de l'obligation ; que l'obligation peut être acquittée par toute personne qui y est intéressée ou par un tiers qui n'y est point intéressé, pourvu que ce tiers agisse au nom et en l'acquit du débiteur, ou que, s'il agit en son nom propre, il ne soit pas subrogé aux droits du créancier ; que la société Total marketing services avait fait valoir que la société Lourenço Joao pouvait être considérée comme un tiers intéressé mais également comme un tiers non intéressé ayant agi en son propre compte ; qu'en se bornant à énoncer que la société Total marketing services ne démontrait pas que la société Lourenço avait agi en son propre compte, quand elle avait également fait valoir sa qualité de tiers intéressé, la cour d'appel n'a pas satisfait aux exigences de l'article 455 du Code de procédure civile ;
Mais attendu qu'après avoir exactement retenu que les dividendes versés par la société Lourenço ne sauraient être assimilés à des salaires, la cour d'appel a, par une décision exempte de vices de la motivation, décidé à bon droit que ces sommes ne pouvaient être déduites de la créance due par la société Total marketing au gérant qui remplissait les conditions de l'article L. 7321-2 du Code du travail ; que le moyen qui, en sa première branche critique des motifs surabondants, n'est pas fondé ;
Par ces motifs : Rejette le pourvoi.