Cass. crim., 11 juillet 2017, n° 16-81.064
COUR DE CASSATION
Arrêt
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Guérin
Rapporteur :
Mme Chaubon
Avocat général :
Mme Moracchini
Avocats :
SCP Rocheteau, Uzan-Sarano, SCP Baraduc, Duhamel, Rameix
LA COUR : - Statuant sur les pourvois formés par la société X France Holding, la société X France, contre l'ordonnance du premier président de la Cour d'appel de Paris, en date du 13 janvier 2016, qui, confirmé les ordonnances des juges des libertés et de la détention autorisant Mme la Rapporteure générale de l'Autorité de la concurrence à effectuer des opérations de visite et saisie en vue de rechercher la preuve de pratiques anticoncurrentielles ; - Vu les mémoires en demande et en défense et les observations complémentaires produits ;
Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de procédure que suite à une requête présentée à l'occasion de l'enquête des services de l'Autorité de la concurrence d'où il résultait que les entreprises de travail temporaires X, Y et Z utiliseraient leurs filiales respectives, X' (groupe X), Y' (groupe Y), Z' (groupe Z) et W (société commune aux trois groupes), spécialisées dans la gestion externalisée du travail temporaire, pour acquérir des informations commerciales sensibles sur leurs concurrents, de nature à orienter leurs stratégies commerciales pour faire obstacle à la fixation des prix par le libre jeu du marché en favorisant artificiellement leur hausse, le juge des libertés et de la détention du Tribunal de grande instance de Paris a autorisé, par ordonnance du1er juillet 2013, Mme la Rapporteure générale de l'Autorité de la concurrence à faire procéder en application des dispositions de l'article L. 450-4 du Code de commerce à des opérations de visites et de saisies dans les locaux desdites sociétés ; que les opérations de visites et de saisies ont été effectuées simultanément le 10 et le 11 juillet 2013 ; que les sociétés X France Holding, et X France ont demandé l'annulation de l'ordonnance du juge des libertés et de la détention de Paris et celle du juge des libertés et de la détention du Tribunal de grande instance de Nanterre, rendue sur commission rogatoire ;
Sur le premier moyen unique de cassation, pris de la violation des articles L. 450-1, L. 450-3, L. 450-4, L. 461-1, L. 461-4 et L. 462-5 du Code de commerce, 6 et 8 de la Convention européenne des droits de l'Homme, 591 du Code de procédure pénale, défaut de base légale, détournement de pouvoirs et de procédure, du principe de loyauté dans l'administration de la preuve ;
"en ce que l'ordonnance attaquée a confirmé en toutes ses dispositions l'ordonnance rendue le 1er juillet 2013 par le juge des libertés et de la détention du Tribunal de grande instance de Paris, et celle subséquente rendue sur commission rogatoire le 3 juillet 2013 par le Tribunal de grande instance de Nanterre ;
"aux motifs que l'ordonnance autorisant les opérations de visite et de saisie est dépourvue de base légale : qu'en droit, le Code de commerce n'autorise pas l'Autorité de la concurrence de procéder à des opérations de visite et de saisie dans le cadre d'une procédure pour avis ; que sur la fonction consultative et la fonction décisionnelle de l'Autorité de la concurrence : que le Code de commerce n'habilite pas l'Autorité de la concurrence à procéder à des opérations de visite et de saisie dans le cadre d'une procédure pour avis ; qu'en fait : l'ordonnance a autorisé, en dehors de toute base légale, l'Autorité à procéder à des opérations de visite et de saisie dans le cadre d'une procédure pour avis ; que la réforme du Code de commerce, apportée par la loi n° 2008-776 du 4 août 2008 et l'ordonnance du 13 novembre 2008, octroie au rapporteur général de l'Autorité de la concurrence le pouvoir d'initier des enquêtes pour des affaires dont l'Autorité de la concurrence est saisie mais également celui de déclencher à son initiative et avant toute saisine contentieuse des enquêtes visant à vérifier le respect les dispositions du livre II et III du Livre IV du Code de commerce, sans que celle-ci ne fasse l'objet d'une saisine préalable de l'Autorité de la concurrence ; que ces deux missions distinctes ont été codifiées au sein des articles L. 450-1 et L. 461-4 du même code ; que si la rapporteure générale de l'Autorité de la concurrence a été saisie pour avis par le syndicat SNTT-CFTC visant les sociétés Alisia et X, celà n'excluait pas la possibilité pour elle d'ouvrir une enquête distincte de la procédure d'avis n'exigeant nullement une quelconque obligation de saisine d'office de l'Autorité de la concurrence par la rapporteure générale ; qu'en l'espèce, c'est par une note datée du 13 juin 2013 (annexe 1 des documents produits à l'appui de la requête et que nous avons vérifiée), que la rapporteure générale de l'Autorité de la concurrence a prescrit des investigations sur toutes les pratiques anticoncurrentielles intéressant le secteur des entreprises de travail temporaire avec le recours à une enquête dite "lourde" en application des dispositions de l'article L. 450-4 du Code de commerce ; qu'il s'agit donc d'investigations distinctes basées sur des articles différents de ceux qui régissent les saisines pour avis et dont le choix de recourir à une requête d'autorisation de visite et de saisie est discrétionnaire, la procédure de l'article L. 450-4 du Code de commerce n'ayant pas un caractère subsidiaire par rapport aux autres prérogatives découlant des textes de 2008 susmentionnés ; qu'en conséquence, la procédure sera déclarée régulière et le moyen sera écarté ;
"alors que si la loi confère des pouvoirs d'enquête au rapporteur général de l'Autorité de la concurrence et aux agents des services d'instruction de l'Autorité qu'il habilite, dans le cadre de l'application des titres II et III du livre IV du Code de commerce, ces pouvoirs d'enquête n'existent pas en revanche dans le cadre de la procédure de saisine de l'Autorité pour avis prévu par l'article L. 462-5 du Code de commerce ; que si des mesures d'investigation, impliquant notamment des visites domiciliaires et des saisies, sur le fondement des articles L. 450-1 et suivants du Code de commerce, peuvent être mises en œuvre par les organes habilités de l'Autorité de la concurrence, ce ne peut donc être consécutivement à l'examen d'éléments recueillis dans le cadre d'une simple procédure d'avis, dès lors que ces éléments sont le facteur déclencheur unique ou prépondérant des mesures en cause, sauf à consommer un détournement de la procédure d'avis ; qu'au cas d'espèce, la cour d'appel ne pouvait, sauf à violer les textes et principes visés au moyens, juger que la procédure visant à être autorisée à procéder à des visites domiciliaires et des saisies, en particulier à l'encontre des sociétés X France Holding et X France, était justifiée sur le fondement des pouvoirs d'enquête conférés aux organes habilités de l'Autorité de la concurrence par les articles L. 450-1 et suivants du Code de commerce, peu important que l'Autorité eût préalablement été saisie dans le cadre d'une demande d'avis émanant d'un syndicat, dès lors que l'Autorité avait le droit d'ouvrir une enquête distincte de la procédure d'avis, quand il était par ailleurs constant que les éléments recueillis à l'occasion de la procédure d'avis, notamment les réponses aux questionnaires adressés aux clients et la communication de factures, étaient le facteur unique ou à tout le moins prépondérant de mise en œuvre des mesures d'investigation litigieuses, en sorte que la mesure d'enquête litigieuse avait été prise en dehors de toute base légale, et au prix d'un détournement de la procédure d'avis ;
Sur le deuxième moyen de cassation, pris de la violation des articles L. 450-1 et L. 450-4 du Code de commerce, 6 et 8 de la Convention européenne des droits de l'Homme, 591 et 593 du Code de procédure pénale, des principes régissant la charge de la preuve, du principe de loyauté de la preuve ;
"en ce que l'ordonnance attaquée a confirmé en toutes ses dispositions l'ordonnance rendue le 1er juillet 2013 par le juge des libertés et de la détention du Tribunal de grande instance de Paris, et celles subséquentes rendues sur commission rogatoire le 3 juillet 2013 par le Tribunal de grande instance de Nanterre ;
"aux motifs que l'origine illicite de certaines pièces sur lesquelles se fondent l'ordonnance : qu'en droit, sur l'opération de vérification de l'origine licite des pièces ; qu'en fait, sur l'origine illicite de certaines pièces sur lesquelles repose l'ordonnance ; que si les pièces contestées, à savoir les annexes 26, 28 et 30, jointes à la requête, ont été obtenues suite à une demande d'avis de la rapporteure générale de l'Autorité de la concurrence, force est de constater que ces pièces ont été obtenues licitement car il n'est pas démontré que les entreprises consultées auraient pu se méprendre sur l'objet de l'enquête pour avis ou que le principe de loyauté ait été enfreint ; que l'examen in concreto de ces pièces (annexes 26 et 28) n'est pas particulièrement défavorable aux entreprises de travail temporaire et notamment aux sociétés X et Alisia, les réponses à certains questionnaires pouvant exonérer X et Alisia de toute transmission d'informations commerciales sensibles (cf. questionnaire Cooper Standard France questions 3 et 4) ; qu'enfin, l'Autorité avait le pouvoir au moment des faits de recourir à ses attributions d'enquête simple, pour recueillir les déclarations ou des documents dans le cadre d'un avis, étant précisé que l'instruction de l'avis est une procédure non coercitive où des entreprises coopèrent volontairement (annexe 30) ; que l'origine illicite de ces pièces ou de leur obtention ne sont pas caractérisées ; que ce moyen sera rejeté ;
"1°) alors que le juge saisi d'une demande d'autorisation de visite domiciliaire doit s'assurer de l'origine apparemment licite des pièces produites par l'Autorité de la concurrence à l'appui de sa requête ; qu'il incombe à l'autorité demanderesse de démontrer l'origine apparemment licite des pièces, et non à la partie objet de la mesure de démontrer le contraire ; qu'au cas d'espèce, la cour d'appel ne pouvait pas, sauf à inverser la charge de la preuve et violer les textes précités, retenir que les pièces produites par l'Autorité de la concurrence à l'appui de sa requête aux fins d'être autorisée à mener des visites domiciliaires avaient une origine apparemment licite, en particulier les annexes 26, 28 et 30, motif pris de ce que l'origine illicite des pièces ou de leur obtention n'était pas caractérisée, faisant ainsi peser la charge de la preuve sur les sociétés X, quand elle incombait à l'Autorité de la concurrence ;
"2°) alors que ne peuvent avoir une origine apparemment licite les pièces obtenues par la demanderesse à l'autorisation de visite domiciliaire dans le cadre de l'utilisation de ses pouvoirs d'investigation simple relevant de la procédure d'avis, dès lors que les personnes qui ont été sollicitées et ont délivré les informations concernées n'ont pas été informées de ce que lesdites informations pourraient ensuite être utilisées dans un cadre procédural distinct, en particulier une enquête à finalité répressive assortie de visites domiciliaires ; qu'au cas d'espèce, en considérant au contraire que l'origine apparemment licite des pièces produites par l'Autorité de la concurrence à l'appui de sa requête n'était pas affectée par la circonstance, considérée comme établie en fait, qu'un certain nombre de ces pièces, dont les annexes 26, 28 et 30, avaient été obtenues par l'Autorité dans le cadre de la consultation d'entreprises effectuée à l'occasion de la demande d'avis, une telle demande entrant dans le champ des pouvoirs de cette autorité administrative dès lors qu'aucun procédé coercitif n'avait été utilisé et que les entreprises concernées avaient coopéré volontairement, quand il n'était pas constaté que lesdites entreprises avaient donné leur accord en connaissance de l'utilisation future des informations délivrées dans un cadre procédural autre que celui utilisé pour les obtenir, le juge du fond a, de ce point de vue encore, violé les textes susvisés ;
"3°) alors que le contrôle de l'origine apparemment licite des pièces produites par l'Autorité de la concurrence à l'appui de sa requête tendant à être autorisée à procéder à des visites domiciliaires et des saisies impose au juge, lorsque certaines pièces proviennent d'une autre procédure mise en œuvre par l'Autorité, de s'expliquer sur le moyen par lequel lesdites pièces ont été distraites de la première procédure pour être utilisées dans la seconde ; qu'au cas d'espèce, en ne s'expliquant à aucun moment sur le moyen par lequel l'Autorité avait pu légalement utiliser des pièces issues de la procédure d'avis au soutien de sa demande de visites et de saisie, le juge du fond n'a pas donné de base légale à sa décision au regard des textes susvisés ;
"4°) alors que la question de l'origine apparemment licite des pièces produites par l'Autorité de la concurrence à l'appui de sa requête tendant à être autorisée à mettre en œuvre une visite domiciliaire est indépendante du contenu de ces pièces, et en particulier du point de savoir si elles sont favorables ou défavorables à la personne à l'encontre de laquelle la visite domiciliaire est envisagée ; qu'au cas d'espèce, en se fondant encore sur la circonstance que certaines des pièces (annexes 26 et 28) produites par l'Autorité de la concurrence à l'appui de sa requête n'étaient pas, à l'examen concret, défavorables aux entreprises de travail temporaire, et notamment aux sociétés X, pour statuer sur leur origine apparemment licite, le juge du fond, qui s'est déterminé par un motif inopérant, a de nouveau violé les textes susvisés" ;
Sur le troisième moyen de cassation, pris de la violation des articles L. 450-4 du Code de commerce, 6 et 8 de la Convention européenne des droits de l'Homme, 591 du Code de procédure pénale ;
"en ce que l'ordonnance attaquée a confirmé en toutes ses dispositions l'ordonnance rendue le 1er juillet 2013 par le juge des libertés et de la détention du Tribunal de grande instance de Paris et celles subséquentes rendues sur commission rogatoire le 3 juillet 2013 par le Tribunal de grande instance de Nanterre ;
"aux motifs que sur l'absence d'indices de pratiques anticoncurrentielles : en droit, l'exigence d'indices de pratiques anticoncurrentielles ; qu'en fait l'absence d'indice de pratiques anticoncurrentielles ; que la différence entre la possibilité et la réalité des échanges d'informations ; que la dénaturation des déclarations des clients, selon lesquels il n'existait aucun échange d'informations de pratiques anticoncurrentielles ; que la proximité de quatre taux horaires : si les sociétés appelantes font valoir que sur les 32 annexes présentées au juge des libertés et de la détention de Paris, une minorité concernait effectivement les sociétés du groupe X, il n'en demeure pas moins que le juge qui autorise des opérations de visite et de saisie sur le fondement de l'article L. 450-4 du Code de commerce est tenu de vérifier si la demande d'autorisation doit comporter tous les éléments d'informations utiles en possession du demandeur de nature à justifier la visite; que par suite, le juge doit s'assurer que les éléments produits par l'administration aient une apparence de licéité et sont suffisants pour justifier que la mesure intrusive de visite et de saisie soit justifiée ; qu'à cette fin, le juge des libertés et de la détention doit vérifier, en se référant aux éléments d'informations fournis par l'Autorité qu'il existait des indices laissant apparaître des faisceaux de présomptions d'agissements prohibés justifiant que soit recherchée leur preuve au moyen d'une visite et de saisies de documents s'y rapportant sans qu'il soit nécessaire que soient caractérisées des présomptions précises, graves et concordantes ou des indices particulièrement troublants des pratiques ; que les présomptions sont appréciées par le juge en proportion de l'atteinte aux libertés individuelles que sont susceptibles de comporter la visite et les saisies envisagées ; qu'il est inopérant d'arguer qu'un juge des libertés et de la détention étant saisi d'une requête en application des dispositions de l'article L. 450-4 du Code de commerce se contente d'analyser une par une, les annexes, de les analyser séparément et de lire la requête qui lui est présentée pour prendre sa décision ; qu'en effet, dans la plupart des requêtes qui lui sont présentées par l'Autorité de la concurrence, celles-ci visent un secteur de l'économie qui intègre de nombreuses sociétés de ce secteur et c'est en prenant en considération l'intégralité des pièces produites que le juge par la méthode dite " du faisceau de présomptions " décide ou non d'accorder une autorisation de visite et de saisie ; qu'en l'espèce, s'agissant de la société X et de sa filiale Alisia, il apparaît que le juge a relevé qu'au regard de sa structure capitalistique, de ses résultats financiers, de sa gestion managériale, et de l'administration de son site internet, la filiale n'était pas autonome et constituait avec sa société-mère X France Holding et sa société soeur X France une unité économique, d'autant plus que dans le domaine informatique, support de nombreux services de collectes d'informations, la même personne est responsable des sites internet de X France Holding, X France et V ; que de surcroît, les services proposés par la filiale Alisia devenue Tapfin, nécessitaient pour être accomplis un accès à des informations sensibles provenant des entreprises de travail temporaire concurrentes ; que par ailleurs, dans la même analyse du secteur visé dans l'autorisation le juge a pris en considération que trois groupes avaient une place prépondérante dans le secteur des entreprises de travail temporaire à savoir les groupes Y, Randstad et X lesquels avaient emporté en 2011, 58 % des contrats de missions d'intérim soit directement soit par l'intermédiaire de leurs filiales ; que ces groupes avaient une filiale commune à parts égales (la société W) et qu'il existait des présomptions d'uniformité de coefficients multiplicateurs ou de prix unitaires appliqués par les entreprises de travail temporaires, notamment au sein des sociétés du groupe X et ce pour une même catégorie professionnelle ; que le parallélisme des comportements entre les trois groupes additionné aux liens évoqués ci-dessus entre les sociétés du groupe X et leur filiale commune Pixid, ainsi que des pratiques similaires constatées sur les coefficients et les taux horaires ont constitué pour le juge de l'autorisation des indices laissant apparaître des présomptions simples sur des agissements prohibés sans pour autant qu'il puisse porter de qualification à ce stade préalable des investigations étant précisé qu'à ce stade aucune accusation n'est portée à l'encontre des sociétés appelantes ; que ce n'est que par l'examen des documents saisis lors des investigations que la juridiction du fond pourra permettre de déterminer si ce parallélisme de comportement reposait ou non sur une action concertée, convention ou entente ; que sur la critique des coefficients multiplicateurs et des prix unitaires relevés qui ne pourraient pas être comparés pour les trois groupes concernés, il y a lieu de relever que le juge a retenu que l'Autorité avait comparé des catégories professionnelles identiques aux moyens de factures (annexe 30) et les qualifications professionnelles pour chacun des salariés travaillant dans les entreprises temporaires a retenu cette présomption laquelle ajoutée à d'autres présomptions laissent apparaître au moins un indice susceptible de se rattacher à des agissements prohibés éventuels ; qu'en tout état de cause, c'est au regard de la requête et des éléments fournis en annexe les liens entre les trois groupes qui détiennent à parts égales une filiale commune Pixid, le parallélisme des comportements supposé et le manque d'autonomie de leurs filiales respectives vis-à-vis de la maison mère que le juge des libertés et de la détention a pris la décision d'autoriser les opérations de visite et de saisie concernant les sociétés X ; qu'il y a lieu de rappeler qu'à ce stade de l'enquête préalable où aucune accusation n'est portée le rôle du juge, est de s'assurer qu'il existe des indices laissant apparaître des présomptions simples d'agisse,ments prohibés lesquels seront examinés par la juridiction du fond ; que ces moyens seront rejetés ;
"alors que le juge saisi d'une demande d'autorisation de visite domiciliaire doit vérifier que celle-ci est fondée, ce qui implique l'existence de présomptions de pratiques anticoncurrentielles ; que le seul parallélisme de comportements ne suffit pas à constituer une telle présomption ; qu'au cas d'espèce, en se bornant, au titre des présomptions de pratiques anticoncurrentielles justifiant l'autorisation de visites et de saisies, à retenir à titre principal la référence faite par le premier juge au parallélisme de comportements entre les groupes X, Y et Randstad, en raison de coefficients multiplicateurs et de taux horaires similaires, le juge du fond a violé les textes susvisés" ;
Les moyens étant réunis ; - Attendu que pour confirmer les ordonnances attaquées, le premier président a, par des motifs exempts d'insuffisance comme de contradiction, et sans méconnaître les dispositions conventionnelles invoquées, justifié sa décision ; que, d'une part, le rapporteur général de l'Autorité de la concurrence a le pouvoir de déclencher à son initiative, avant toute saisine contentieuse, y compris lorsque cette Autorité est saisie pour avis, des enquêtes visant à vérifier le respect des dispositions des livre II, III et IV du Code de commerce ; que d'autre part, le premier président qui a analysé l'ensemble des éléments qui lui étaient soumis a apprécié souverainement, et sans inverser la charge de la preuve, que l'origine des pièces jointes à la requête était licite ; qu'enfin, il n'a pas uniquement, pour retenir l'existence de présomptions de pratiques anticoncurrentielles, pris en compte le parallélisme des comportements entre les trois groupes de sociétés, mais il a également relevé les liens entre celles-ci et leurs filiales et leurs pratiques similaires ; d'où il suit que le moyen doit être écarté ;
Sur le quatrième moyen de cassation, pris de la violation des articles préliminaire du Code de procédure pénale, L. 450-4 du code de commerce, 6 de la Convention européenne des droits de l'Homme, 591 du Code de procédure pénale, du principe du respect des droits de la défense ;
"en ce que l'ordonnance attaquée, rendue le 13 janvier 2016, a confirmé en toutes ses dispositions l'ordonnance rendue le 1er juillet 2013 par le juge des libertés et de la détention du Tribunal de grande instance de Paris, et celles subséquentes rendues sur commission rogatoire le 3 juillet 2013 par le Tribunal de grande instance de Nanterre ;
"aux énonciations que le 1er juillet 2013, le juge des libertés et de la détention de Paris a rendu, en application des dispositions de l'article L. 450-4 du Code de commerce, une ordonnance de visite et de saisie (...) ; que les opérations de visites et de saisies ont été effectuées simultanément les 10 et 11 juillet 2013 (...) ; que les sociétés X Holding France et X France ont formé appel le 19 juillet 2013 (...) ; que l'affaire a été appelée à l'audience du 15 janvier 2014, renvoyée au 2 juillet 2014, puis renvoyée de nouveau au 3 décembre 2014, puis mise en délibéré sans être rendue ; qu'une réouverture des débats a été fixée le 4 novembre 2015 avant mise en délibéré puis prononcé de la décision le 13 janvier 2016 ;
"alors que toute personne a droit à ce que sa cause soit jugée dans un délai raisonnable ; que si la méconnaissance du délai raisonnable n'emporte en principe pas de nullité de la procédure ou des décisions de justice rendues, pour n'ouvrir qu'un recours indemnitaire contre l'Etat du fait du fonctionnement défectueux de la justice, il en va différemment lorsqu'en raison de la nature du contentieux concerné, la seule sanction appropriée est la remise en cause des actes et décisions faisant grief au demandeur ; que tel est le cas des ordonnances d'autorisation de visite domiciliaire et de saisie, dès lors que la méconnaissance du délai raisonnable de jugement par le premier président de la cour d'appel prive de tout intérêt, et donc de toute effectivité, l'exercice du recours par la partie qui subit la mesure, et rend illusoire toute mesure qui pourrait être ordonnée plusieurs années après que les opérations de visite et de saisie ont eu lieu ; qu'au cas d'espèce, en ne statuant sur le recours formé dès le 19 juillet 2013, par les sociétés X, contre l'ordonnance d'autorisation rendue le 1er juillet 2013, que par une ordonnance rendue le 13 janvier 2016, soit plus de deux ans et demi plus tard, et ce, alors même qu'une précédente mise en délibéré n'avait pas conduit à une décision et avait obligé à une réouverture des débats, le juge du fond a violé les textes susvisés" ;
Attendu que la méconnaissance du délai raisonnable, à la supposer établie, est sans incidence sur la validité des procédures ; d'où il suit que le moyen sera écarté ;
Et attendu que l'ordonnance est régulière en la forme ;
Rejette les pourvois.