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Décisions

ADLC, 7 septembre 2017, n° 17-D-16

AUTORITÉ DE LA CONCURRENCE

Décision

relative à des pratiques mises en œuvre par la société Engie dans le secteur de l'énergie

ADLC n° 17-D-16

7 septembre 2017

L'Autorité de la concurrence (section IA)

Vu la saisine enregistrée le 13 octobre 2015 sous le numéro 15/0095 F par laquelle la société Direct Energie a saisi l'Autorité de la concurrence de pratiques mises en œuvre par la société Engie dans le secteur de l'énergie ; Vu l'article 102 du Traité sur le fonctionnement de l'Union européenne ; Vu le livre IV du code de commerce modifié ; Vu le code de l'énergie ; Vu la décision n° 16-MC-01 du 2 mai 2016 relative à une demande de mesures conservatoires présentée par la société Direct Energie dans le secteur de l'énergie ; Vu l'évaluation préliminaire transmises aux parties le 13 mars 2017 ; Vu la proposition d'engagements d'Engie du 17 mars 2017, mise en ligne le 22 mars 2017 sur le site internet de l'Autorité de la concurrence, et les modifications proposées les 29 juin et 13 juillet 2017 ; Vu la décision de secret d'affaires n° 15-DSA-343 du 20 octobre 2015 ; Vu les observations présentées par la société Direct Energie, la société ENI, l'association française indépendante de l'électricité et du gaz (AFIEG), l'association nationale des opérateurs détaillants en énergie (ANODE) et le commissaire du Gouvernement ; Vu l'avis de la Commission de Régulation de l'Energie en date du 20 avril 2017; Vu les autres pièces du dossier ;

La rapporteure, le rapporteur général adjoint, le commissaire du Gouvernement, la Commission de Régulation de l'Energie et les représentants des sociétés Engie et Direct Energie, entendus lors de la séance de l'Autorité de la concurrence du 5 juillet 2017 ;

Adopte la décision suivante :

Résumé1

Dans la décision ci-après, l'Autorité de la concurrence accepte les engagements d'Engie et clôt la procédure au fond ouverte en octobre 2015 par Direct Energie, qui dénonçait des pratiques mises en œuvre par Engie dans le secteur de l'énergie.

Dans leur évaluation préliminaire, les services d'instruction ont identifié plusieurs préoccupations de concurrence relatives au comportement d'Engie. Tout d'abord, les prix de ses offres individualisées destinées aux clients non résidentiels étaient susceptibles d'être qualifiés de prix d'éviction ou de prix prédateurs et donc de constituer une pratique contraire aux articles L. 420-2 du code de commerce et 102 du TFUE. Il en était de même pour les prix de ses offres dites " catalogue ", destinées à la clientèle tant résidentielle que non résidentielle.

Les services d'instruction ont également relevé que les contrats de services de comptage individuel et de fourniture de gaz conclus avec les copropriétés contenaient des clauses qui pouvaient revêtir un aspect anticoncurrentiel. Il s'agissait notamment de clauses de durée de contrat d'une longueur excessive, ou encore interdisant le recours à d'autres sources d'énergie que le gaz pour le chauffage et l'eau chaude.

À la suite de cette évaluation préliminaire, Engie a présenté une série d'engagements le 17 mars 2017. Ces engagements ont fait l'objet d'un test de marché, conduisant à une nouvelle proposition d'engagements présentée le 29 juin 2017. Ils ont ensuite été discutés lors d'une séance devant l'Autorité, à l'issue de laquelle Engie a proposé une ultime version de ces engagements le 13 juillet 2017.

En ce qui concerne les aspects tarifaires de ses offres de marché, Engie s'engage ainsi à :

- mettre en place, tant pour ses offres individualisées que " catalogue ", des analyses de profitabilité ex ante et ex post identifiant le coût évitable moyen et le coût incrémental moyen ;

- fixer ses prix à un niveau au-dessus du coût évitable moyen tel qu'identifié dans ses analyses de profitabilité ex ante ;

- mettre en place un processus de contrôle interne des prix ; celui-ci comportera, notamment, une validation par une personne d'encadrement habilitée pour ce faire, en cas de prix inférieur au coût incrémental moyen, et la prise en considération dans les futures analyses ex ante des enseignements résultant des analyses ex post ;

- renforcer la sensibilisation des personnels d'Engie aux aspects tarifaires des règles de concurrence.

En ce qui concerne les clauses des contrats de services de comptage individuel et de fourniture de gaz conclus avec les copropriétés, Engie s'engage notamment à :

- informer ses clients sur la possibilité de résilier leur contrat sans frais à l'issue de 5 ans ;

- ne pas proposer de contrat combinant des prestations de service de comptage et de fourniture de gaz naturel dont la fourniture de gaz naturel aurait une durée d'exécution supérieure à 5 ans ;

- supprimer les clauses contraignant les copropriétés à s'engager à n'utiliser que le gaz naturel comme source d'énergie pour le chauffage collectif et, le cas échéant, l'eau chaude de l'ensemble de la copropriété.

Ces engagements sont complétés par des mesures permettant le suivi de leur exécution, et notamment la nomination d'un mandataire dédié. Ils sont conclus pour une durée de cinq ans, s'agissant des engagements tarifaires relatifs à la clientèle résidentielle, et de trois ans, s'agissant des engagements tarifaires relatifs à la clientèle non résidentielle et de ceux concernant les contrats avec les copropriétés.

I. Constatations

A. LA SAISINE

1. Par lettre enregistrée le 13 octobre 2015 sous le numéro 15/0095 F, l'Autorité de la concurrence a été saisie d'une plainte de la société Direct Energie dirigée contre des pratiques mises en œuvre par la société Engie dans le secteur de l'énergie.

2. Dans sa saisine, Direct Energie dénonçait plusieurs types de pratiques mises en œuvre par la société Engie, qu'elle estimait contraires aux règles de concurrence. Les comportements dénoncés concernaient la politique tarifaire de l'entreprise, ainsi que des pratiques de démarchage illicite.

3. Accessoirement à la saisine au fond, par lettre enregistrée le 13 octobre 2015 sous le numéro 15/0096 M, Direct Energie a sollicité, sur le fondement de l'article L. 464-1 du code de commerce, le prononcé de mesures conservatoires.

4. Par une décision n° 16-MC-01 du 2 mai 2016, l'Autorité a prononcé des mesures conservatoires à l'encontre d'Engie et a également décidé que l'instruction devait être poursuivie au fond pour l'ensemble des pratiques dénoncées (§ 223, 252, 271 et 286 de la décision).

B. LES ENTREPRISES CONCERNÉES

1. LA SOCIÉTÉ DIRECT ENERGIE

5. Direct Energie est une société anonyme spécialisée dans le secteur de l'énergie. Elle revendique être le 1er fournisseur alternatif d'énergie sur le marché de détail en France et le " troisième acteur français de l'électricité et du gaz ". Acteur intégré de l'énergie en France, la société Direct Energie intervient dans la production et la fourniture d'électricité, la fourniture de gaz et la fourniture de services énergétiques. Elle est en particulier fournisseur de gaz au détail depuis 2009.

2. LA SOCIÉTÉ ENGIE

6. La société Engie est issue de l'entreprise Gaz de France, créée en 1946 sous la forme d'un EPIC, avant d'être transformée en société anonyme par la loi n° 2004-803 du 9 août 2004 relative au service public de l'électricité, du gaz et aux entreprises électriques et gazières. Le 7 juillet 2005, Gaz de France a ouvert son capital par voie d'introduction en bourse.

7. Le 22 juillet 2008, la société Gaz de France a absorbé Suez, groupe international actif également dans l'électricité, le gaz et les services de l'énergie, et est devenue GDF Suez.

8. Le 27 juillet 2015, la société GDF Suez est devenue la société Engie.

9. L'activité principale d'Engie est la fourniture de gaz naturel au détail en France. Elle est également chargée de la commercialisation de services liés au comptage d'énergie thermique permettant l'individualisation des consommations collectives de gaz naturel (dossier 15/0096 M, cote 4343).

C. LE SECTEUR CONCERNÉ

10. La présente affaire concerne deux types d'activités au sein du secteur de l'énergie. Il s'agit tout d'abord de la fourniture de gaz au détail (1) et, ensuite, de la fourniture de services de comptage d'énergie thermique (2).

1. LA FOURNITURE DE GAZ AU DÉTAIL

11. Le secteur du gaz naturel est organisé en France autour de six grands pôles : la production/importation, le transport, les terminaux méthaniers, le stockage, la distribution et la commercialisation. Parmi les activités de commercialisation, l'activité de commercialisation de gaz au consommateur final est seule ici concernée.

12. L'ouverture à la concurrence de l'activité de fourniture de gaz au détail a été engagée dès 1998, avec l'adoption de la directive 98/30/CE du Parlement européen et du Conseil du 22 juin 1998 concernant des règles communes pour le marché intérieur du gaz naturel. La directive 2009/73/CE du Parlement européen et du Conseil du 13 juillet 2009 concernant des règles communes pour le marché intérieur du gaz naturel est la dernière directive encadrant l'activité de fourniture de gaz au détail.

13. La transposition progressive de ces différentes directives s'est traduite par une ouverture par étapes de l'activité de fourniture de gaz au détail à la concurrence d'opérateurs autorisés (voir notamment l'article L. 443-1 du code de l'énergie). Cette ouverture était effective pour tous les clients, résidentiels et non résidentiels, au 1er juillet 2007.

14. Les pouvoirs publics français ont, en parallèle de cette ouverture à la concurrence, maintenu l'existence de tarifs réglementés de vente au détail (ci-après " TRV "). Les articles L. 445-1 et suivants du code de l'énergie prévoient ainsi que les TRV sont arrêtés conjointement par les ministres chargés de l'énergie et de l'économie, après avis de la Commission de Régulation de l'Energie (ci-après " CRE "). L'article L. 445-3 du code de l'énergie précise également que : " Les tarifs réglementés de vente du gaz naturel sont définis en fonction des caractéristiques intrinsèques des fournitures et des coûts liés à ces fournitures. Ils couvrent l'ensemble de ces coûts à l'exclusion de toute subvention en faveur des clients qui ont exercé leur droit prévu à l'article L. 441-1 ".

15. La fourniture de gaz aux TRV relève des fournisseurs dits " historiques ", c'est-à-dire présents avant l'ouverture des marchés du gaz : Engie, Total Energie Gaz et les entreprises locales de distribution (ci-après " ELD "). Engie est le seul fournisseur commercialisant les TRV sur la zone de desserte de GrDF (le gestionnaire du réseau de distribution de gaz desservant 95% des consommateurs français) et de GRT Gaz (gestionnaire du réseau de transport de gaz) qui alimente en gaz une majorité des grands consommateurs industriels français.

16. Sur la quasi-totalité du territoire français (zones de desserte de GrDF et de GRT Gaz), les consommateurs pouvant bénéficier d'offres aux TRV ont donc actuellement le choix entre :

- les offres aux TRV qui sont proposées exclusivement par Engie ;

- les offres dites " de marché " qui sont proposées à la fois par Engie mais également par les nouveaux fournisseurs de gaz naturel, dits " fournisseurs alternatifs ".

17. Sur le régime des TRV, il est à noter que dans son avis n° 13-A-09 du 25 mars 2013, l'Autorité avait recommandé au gouvernement de supprimer, par étapes, les TRV dans la mesure où ils ont " une influence défavorable sur le fonctionnement de la concurrence sans pour autant contribuer positivement à la compétitivité des entreprises françaises et au pouvoir d'achat des ménages " (point 55 de l'avis).

18. Afin de mettre un terme à une procédure d'infraction engagée contre la France par la Commission européenne depuis 2006 du fait de l'existence, dans la réglementation, de TRV pour les consommateurs non résidentiels, la loi n° 2014-344 du 17 mars 2014 relative à la consommation a introduit à l'article L. 445-4 du code de l'énergie des dispositions prévoyant l'extinction progressive des TRV pour les clients non domestiques dont la consommation excède 30 MWh/an. Cette suppression est intervenue en trois étapes, entre le 19 juin 2014 et le 31 décembre 2015.

2. LA FOURNITURE DE SERVICES DE COMPTAGE DE CONSOMMATION INDIVIDUELLE DE

GAZ COLLECTIF

19. Depuis quelques années se sont développés des services de comptage évolué de consommation de gaz, favorisés par un cadre réglementaire propice, et qui permettent une meilleure individualisation de la facturation. La directive 2012/27/UE du 25 octobre 2012 impose ainsi que soient mis à disposition des consommateurs finals de gaz naturel, lorsque cela est possible, notamment dans le cadre du remplacement d'un compteur existant ou d'un nouveau raccordement, des compteurs individuels mesurant avec précision leur consommation effective et permettant des factures fondées sur la consommation réelle d'énergie (article 9 de la directive).

20. L'article R. 131-2 du code de la construction et de l'habitation prévoit ainsi que : " Tout immeuble collectif à usage principal d'habitation équipé d'un chauffage commun à tout ou partie des locaux occupés à titre privatif et fournissant à chacun de ces locaux une quantité de chaleur réglable par l'occupant doit être muni d'appareils permettant d'individualiser les frais de chauffage collectif. Ces appareils doivent permettre de mesurer la quantité de chaleur fournie ou une grandeur représentative de celle-ci ".

21. Engie fournit ce type de services de comptage, soit de manière isolée (via l'offre Logivalys de sa filiale Ecometering notamment), soit en les associant à des prestations de fourniture de gaz naturel (via notamment ses offres Fideloconso et Vertuoz Habitat).

D. LES PRATIQUES DÉNONCÉES

22. Direct Energie dénonce quatre types de pratiques imputées à la société Engie, qui enfreindraient les règles de concurrence (dossier n° 15/0096 M, cotes 511 à 568) :

- des pratiques tarifaires d'éviction à destination des clients résidentiels ;

- une stratégie tarifaire de préemption du segment des copropriétés, par le moyen de contrats imposant des remises de fidélité, des exclusivités et des frais de sortie anticoncurrentiels ;

- une stratégie prédatrice vis-à-vis des clients non résidentiels, notamment dans le cadre des appels d'offres ;

- un démarchage illicite des clients aux TRV, notamment ceux s'étant opposés à la communication de leurs coordonnées aux fournisseurs alternatifs.

23. Selon Direct Energie, en mettant en œuvre ces pratiques, la société Engie aurait abusé de sa position dominante sur les marchés de la fourniture de gaz naturel aux consommateurs français, pratique prohibée par les dispositions des articles L. 420-2 du code de commerce et 102 du Traité sur le fonctionnement de l'Union européenne (ci-après " TFUE ").

E. LA DEMANDE DE MESURES CONSERVATOIRES ET LA DÉCISION N° 16-MC-01 DE

L'AUTORITÉ

24. Accessoirement à sa saisine au fond, Direct Energie a déposé une demande de mesures conservatoires (dossier n° 15/0096 M, cotes 581 à 609). Par une décision n° 16-MC-01 du 2 mai 2016, l'Autorité a décidé de prononcer des mesures conservatoires portant sur les offres individualisées qu'Engie propose aux clients non résidentiels. Engie devait ainsi :

- fixer les prix de ses offres individualisées à un niveau permettant de couvrir les coûts évitables de ces offres, en ce compris les coûts évitables relatifs aux certificats d'économie d'énergie et aux coûts commerciaux, en tenant compte de tous les coûts que les règles, clés d'allocation et retraitements que la Commission de Régulation de l'Energie a déjà identifiés ou identifiera dans le futur au titre de la comptabilité réglementaire comme devant être exclus des coûts des offres aux TRV, dans la mesure où ils ont trait aux offres individualisées ;

- couvrir, ex ante comme ex post, ses coûts évitables par cohorte d'offres individualisées souscrites chaque trimestre et pour chacune des dix plus importantes offres individualisées en valeur souscrites chaque trimestre, à partir du troisième trimestre 2016 ;

- tenir à la disposition de l'Autorité et de la CRE, sur demande, les éléments détaillés ayant servi au calcul des coûts évitables, en ce compris la liste précise des coûts pris en compte, la méthode d'évaluation suivie et l'horizon temporel retenu, et ce au plus tard trente jours après la fin de chaque trimestre.

25. L'Autorité a également estimé que l'instruction devait être poursuivie au fond pour l'ensemble des pratiques dénoncées.

II. La mise en œuvre de la procédure d'engagements

A. L'ÉVALUATION PRÉLIMINAIRE

26. En application du I de l'article L. 464-2 et de l'article R. 464-2 du code de commerce, les services d'instruction ont exprimé des préoccupations de concurrence dans une note d'évaluation préliminaire. Cette évaluation préliminaire a été transmise à Engie, à Direct Energie et au commissaire du Gouvernement le 13 mars 2017.

1. L'APPLICABILITÉ DU DROIT DE L'UNION EUROPÉENNE

27. L'article 102 du TFUE interdit, dans la mesure où le commerce entre États membres est susceptible d'en être affecté, le fait pour une ou plusieurs entreprises d'exploiter de façon abusive une position dominante sur le marché intérieur ou dans une partie substantielle de celui-ci.

28. Conformément à la jurisprudence constante des juridictions européennes, et à la lumière de la communication de la Commission européenne relative à la notion d'affectation du commerce figurant aux articles 81 et 82 du traité CE (devenus les articles 101 et 102 du TFUE), trois éléments doivent être réunis pour que des pratiques soient susceptibles d'affecter sensiblement le commerce entre États membres (pages 81 à 96 de la communication) : l'existence d'échanges, à tout le moins potentiels, entre États membres portant sur les services en cause (i), l'existence de pratiques susceptibles d'affecter ces échanges (ii) et le caractère sensible de cette possible affectation (iii).

29. En l'espèce, les pratiques mises en œuvre par Engie couvrent l'ensemble du territoire français et sont susceptibles de rendre la pénétration des marchés français du gaz et des services de comptage plus difficile aux concurrents d'autres États membres.

30. En outre, en permettant à Engie de s'assurer un volume important de fourniture de gaz au détail sur les marchés français, les pratiques d'Engie sont la source d'externalités susceptibles d'altérer également la position concurrentielle d'Engie et de ses concurrents actifs dans les autres États membres.

31. Enfin, Engie commercialise les offres aux TRV de gaz sur la zone de desserte de GRDF, qui recouvre la quasi-totalité des consommateurs français de gaz (95 %). Les pratiques d'Engie sont par conséquent susceptibles d'affecter de manière sensible le commerce entre États membres.

32. Il résulte de ce qui précède que les pratiques d'Engie sont susceptibles d'affecter de manière sensible le commerce entre États membres et d'être qualifiées au regard de l'article 102 du TFUE.

2. LA DÉFINITION DES MARCHÉS PERTINENTS ET LA POSITION D'ENGIE

a) Les marchés pertinents

33. En l'espèce, plusieurs marchés en lien avec les pratiques peuvent être définis : il s'agit, d'une part, des marchés de la fourniture de gaz au détail et, d'autre part, du marché de la fourniture de services de comptage de consommation individuelle de gaz collectif.

Les marchés de la fourniture de gaz au détail

34. Dans sa décision n° 16-MC-01 relative à la demande de mesures conservatoires concernant les pratiques en cause en l'espèce (§ 52 à 74), l'Autorité a considéré qu'il convenait de retenir, d'une part, un marché français de la fourniture de gaz au détail aux clients résidentiels et, d'autre part, un marché français de la fourniture de gaz au détail aux clients non résidentiels raccordés au réseau de distribution (et excluant donc les clients connectés au réseau de transport).

35. En effet, la pratique décisionnelle retient une distinction selon que les clients sont des clients résidentiels ou des clients non résidentiels et selon que les clients non résidentiels sont reliés au réseau de transport ou au réseau de distribution (voir décision de l'Autorité n° 14-MC-02, § 45-48 et 61). En outre, les conditions actuelles du secteur conduisent à maintenir une définition des marchés pertinents incluant l'ensemble des consommateurs résidentiels, d'une part, et non résidentiels, d'autre part, sans opérer de distinction entre les offres aux TRV et les offres de marché.

36. Aucun élément nouveau n'est venu modifier depuis l'analyse de l'Autorité sur cette question et il convient donc de retenir également ces définitions dans le cadre de la présente décision.

37. Enfin, d'un point de vue géographique, il convient également de retenir une dimension nationale des marchés (voir décision n° 16-MC-01, § 72 à 74).

Le marché de la fourniture de services de comptage des consommations individuelles en aval d'un point de raccordement au réseau de distribution de gaz naturel

38. Les services de comptage évolué de consommation de gaz sont un ensemble généralement constitué des prestations suivantes (dossier n° 15/0096 M, cote 16) : la pose, la location et la maintenance du matériel de comptage, ainsi que la télé-relève périodique et la communication des relevés.

39. Dans le secteur du gaz, deux types de services de comptage existent : les services permettant un comptage évolué des consommations au niveau d'un point de raccordement, généralement par le moyen de compteurs intelligents destinés à remplacer les compteurs traditionnels, et les services de comptage permettant l'individualisation des consommations de gaz en aval d'un point de raccordement. Ces derniers permettent de décompter la consommation réelle de chacun des différents sites ou matériels d'un site relevant dudit point de raccordement et sont, notamment, mis en place progressivement au sein des copropriétés alimentées en gaz naturel de manière collective pour le chauffage, l'eau chaude et, plus rarement, la cuisson.

40. Dans la décision n° 16-MC-01 précitée (§ 75 à 80), l'Autorité a retenu un marché de la fourniture de services de comptage des consommations individuelles en aval d'un point de raccordement au réseau de distribution de gaz naturel. Il convient de retenir à nouveau cette définition dans le cadre de la présente décision.

41. Par ailleurs, d'un point de vue géographique, le marché présente une dimension nationale puisque (i) la règlementation relative aux compteurs individuels dans les immeubles collectifs à usage principal d'habitation est nationale et (ii) les fournisseurs des services en cause opèrent sur l'ensemble du territoire national.

42. Il résulte de ce qui précède que le marché pertinent peut être défini comme le marché français de la fourniture de services de comptage des consommations individuelles en aval d'un point de raccordement au réseau de distribution de gaz naturel.

b) La position dominante d'Engie sur les marchés de fourniture de gaz naturel identifiés

Principes applicables

43. L'article 102 du TFUE concerne une situation de puissance économique détenue par une entreprise qui lui donne le pouvoir de faire obstacle au maintien d'une concurrence effective sur le marché en cause, en lui fournissant la possibilité de comportements indépendants dans une mesure appréciable vis-à-vis de ses concurrents, de ses clients, et finalement des consommateurs (Cour de Justice, arrêt du 13 février 1979, Hoffmann-La Roche & Co.

AG/Com., aff. 85/76, point 38 ; Cour de Justice, arrêt du 6 décembre 2012, AstraZeneca e.a./Com., C-457/10 P, point 175).

44. L'appréciation de la position dominante d'une entreprise s'effectue donc à partir d'un faisceau d'indices qui prend en compte des données d'ordre structurel, comme les parts de marché de l'entreprise et celles de ses principaux concurrents, mais aussi des éléments qui sont de nature à donner un avantage concurrentiel à l'entreprise concernée, comme l'appartenance à un groupe puissant ou la détention d'une avance technologique.

45. En ce qui concerne plus particulièrement les parts de marché, la Cour de justice considère qu'une part de marché significative permet de présumer l'existence d'une position dominante : " S'agissant des parts de marché, la Cour a jugé (arrêt du 13 février 1979, Hoffmann La Roche, point 4l, 85/76, Rec. p. 461) que des parts extrêmement importantes constituent par elles-mêmes, et sauf circonstances exceptionnelles, la preuve de l'existence d'une position dominante. Tel est le cas d'une part de marché de 50 % comme celle constatée en l'espèce " (Cour de justice, arrêt du 3 juillet 1991, Akzo Chemie BV / Com., C-62/86, paragraphe 60).

46. Enfin, la baisse des parts de marché au cours de la période concernée par les pratiques n'exclut pas l'existence d'une position dominante, la réduction de parts de marché encore très importantes ne pouvant constituer, en elle-même, la preuve de l'absence de position dominante (Tribunal, arrêt AstraZeneca AB e.a. / Com. précité, paragraphe 288). L'Autorité a également retenu que des parts de marché qui diminueraient mais resteraient significatives peuvent constituer un élément pertinent pour qualifier une position dominante (décision n° 10-D-32 précitée, § 274 et 275).

Application au cas d'espèce

47. La position d'Engie sur les marchés concernés peut être appréciée, notamment, au regard du nombre de sites desservis (voir notamment la décision n° 16-MC-01, § 95 à 97). Les deux tableaux ci-dessous présentent les parts de marché d'Engie et de ses principaux concurrents sur le marché de la fourniture de gaz naturel aux clients résidentiels, d'une part, et sur le marché de la fourniture de gaz aux clients non résidentiels, d'autre part.

Tableau 1 - Parts de marché du groupe Engie sur le marché de la fourniture de gaz naturel aux clients résidentiels en nombre de sites - 2014- décembre 2016

[TABLEAU]

Source : CRE, Observatoire des marchés de l'électricité et du gaz naturel, Marchés de détail, 4ème trimestre 2014, p. 26 ; Observatoire des marchés de l'électricité et du gaz naturel, Marchés de détail, 2ème trimestre 2015, p. 26 ; Observatoire des marchés de l'électricité et du gaz naturel, Marchés de détail, 4ème trimestre 2016, p. 28 ; et cote 1316.

Tableau 2 - Parts de marché du groupe Engie sur le marché de la fourniture de gaz naturel aux clients non résidentiels en

[TABLEAU]

Source : CRE, Observatoire des marchés de l'électricité et du gaz naturel, Marchés de détail, 4ème trimestre 2014, p. 26 ; Observatoire des marchés de l'électricité et du gaz naturel, Marchés de détail, 2ème trimestre 2015, p. 26 ; Observatoire des marchés de l'électricité et du gaz naturel, Marchés de détail, 4ème trimestre 2016, p. 28 ; et cote 1316.

48. Bien qu'en recul depuis l'ouverture du marché à la concurrence, les parts de marché d'Engie sont encore très importantes sur le marché de la fourniture de gaz naturel aux clients résidentiels, comme l'indique le tableau ci-dessus. Par ailleurs, les parts de marché d'Engie sont également encore significatives sur le marché de la fourniture de gaz naturel aux clients non résidentiels.

49. Au surplus, et comme indiqué dans la décision n° 16-MC-01 (§ 111 à 115), des éléments complémentaires attestent de l'existence d'une position dominante d'Engie et notamment :

- l'écart entre la part de marché de l'opérateur historique et celles de ses concurrents, qui demeure important ;

- le fait qu'Engie bénéficie d'une notoriété significative liée à son statut d'opérateur historique ;

- le fait que les possibilités d'arbitrage de la clientèle résidentielle sont limitées par sa connaissance très imparfaite du fonctionnement du marché du gaz. En particulier, en 2016, 46 % des foyers consommateurs de gaz ne savaient toujours pas qu'ils pouvaient changer de fournisseur de gaz (dossier n° 15/0096 M, cote 3599) ;

- les barrières à l'entrée et à l'expansion sur ces marchés, et notamment les contraintes techniques et règlementaires qui s'appliquent aux fournisseurs agréés de gaz naturel.

50. Il résulte de l'ensemble de ce qui précède qu'Engie peut être considérée comme étant en position dominante sur les marchés de la fourniture de gaz à la clientèle résidentielle et à la clientèle non résidentielle.

3. LES PRÉOCCUPATIONS DE CONCURRENCE

51. L'instruction au fond montre que tant les pratiques tarifaires (a) que certaines clauses des contrats de services de comptage individuel et de fourniture de gaz (b) sont susceptibles de constituer des abus de position dominante contraires aux articles L. 420-2 du code de commerce et 102 du TFUE.

a) Sur les pratiques tarifaires

Rappel de la pratique décisionnelle et de la jurisprudence

52. Une pratique de prix bas mise en œuvre par une entreprise en position dominante peut être qualifiée de pratique de prix prédateurs lorsque les prix ne permettent pas à l'entreprise dominante de couvrir certains coûts.

53. Une pratique de prix bas peut également être qualifiée de pratique de prix d'éviction en raison de ses effets potentiels sur la concurrence. Comme souligné par la cour d'appel de Paris dans son arrêt du 6 novembre 2014, " la Cour de justice a, dans [l'arrêt Post Danmark A/S contre Konkurrencerådet, aff. C-23/14, point 27] estimé que cette grille de lecture n'est pas seulement pertinente pour apprécier la licéité de pratiques de prix prédateurs, en se fondant sur une comparaison des prix concernés et de certains des coûts encourus par l'entreprise dominante ainsi que sur la stratégie objectivement menée par celle-ci, mais aussi, plus largement, pour apprécier la légalité de toute pratique de prix bas mise en œuvre par une entreprise occupant une position dominante au regard de la prohibition des abus de position dominante " (cour d'appel de Paris, arrêt du 6 novembre 2014 précité, p. 47).

54. En pratique, en droit interne comme en droit européen (voir notamment Cour de Justice, arrêt du 27 mars 2012, Post Danmark A/S contre Konkurrencerådet, aff. C-209/10, points 27 et 28 et arrêts de la cour d'appel de Paris du 6 novembre 2014, page 47, et du 28 juillet 2016, pages 8 et 9), la mise en œuvre du test de coût, qu'il s'agisse d'apprécier l'existence d'un prix prédateur ou d'une pratique ayant un effet d'éviction, mobilise un double standard de coût et s'articule ainsi :

- zone blanche : lorsque les prix pratiqués par l'entreprise en position dominante sont supérieurs aux coûts totaux moyens (CTM, définis comme la moyenne de tous les coûts qu'une entreprise supporte) dans l'hypothèse d'une entreprise mono-produit, ou au coût incrémental moyen (CIM, défini comme la moyenne de tous les coûts qui auraient pu être évités en ne produisant pas du tout un produit déterminé), dans l'hypothèse d'une entreprise multi-produits, la pratique peut être présumée licite ;

- zone noire (ou rouge) : lorsque les prix pratiqués par l'entreprise en position dominante sont inférieurs à la moyenne des coûts évitables (CEM, défini comme la moyenne des coûts qui auraient pu être évités si l'entreprise n'avait pas produit la quantité de produit qui fait l'objet de l'analyse) en principe, la pratique peut être présumée abusive ;

- zone grise : lorsque les prix sont inférieurs au standard de coût à long terme (CTM/CIM), mais supérieurs au standard de coût à court terme (CEM en principe), la pratique doit être considérée comme abusive, s'il peut être prouvé soit que les prix sont fixés dans le cadre d'un plan ayant pour but d'éliminer un ou des concurrent(s), soit que les prix sont susceptibles de provoquer des effets, potentiels ou réels, d'éviction.

55. S'agissant du cas particulier des entreprises faisant l'objet d'une forme de réglementation des prix par les pouvoirs publics, l'Autorité a rappelé dans sa décision n° 16-MC-01 que " le coût d'un service déterminé par la comptabilité réglementaire tenue par une entreprise dominante en application des règles sectorielles ne saurait être, à titre général, l'étalon à l'aune duquel doivent nécessairement être appréciées les pratiques tarifaires de cette entreprise au regard des règles de droit de la concurrence " (§ 152 de la décision).

Application au cas d'espèce

Prix des offres individualisées à la clientèle non résidentielle

56. Dans sa décision n° 16-MC-01, l'Autorité a précisé qu'Engie a reconnu en séance être en " zone grise " dans une perspective ex ante pour les offres individualisées prises dans leur ensemble depuis le mois de juillet 2014 (§ 205 de la décision).

57. L'Autorité a également considéré que l'ensemble de l'activité de fourniture d'offres individualisées était susceptible de ne pas être profitable à court terme (§ 206 à 222 de la décision) dans la mesure où :

- la marge brute de l'ensemble de l'activité de fourniture d'offres individualisées était faible et ne tenait pas compte de certains coûts pourtant évitables, dont la réintégration se traduirait par une marge brute négative (notamment les certificats d'économie d'énergie et une partie au moins des coûts commerciaux) ;

- l'analyse des documents fournis sur les cinquante plus importants appels d'offres en volume remportés par Engie sur la période 2013-2015 (qui représentent une fraction significative de l'activité d'Engie) montre que la marge brute est calculée de la même façon que pour l'ensemble de l'activité et qu'elle est, dans un grand nombre de cas, négative.

58. Compte tenu de ces éléments, il convient de considérer que les prix pratiqués par Engie pour l'ensemble de son activité de fourniture d'offres individualisées aux clients non résidentiels sont susceptibles de se situer en " zone noire ".

Prix des offres " catalogue " à la clientèle résidentielle et à la clientèle non résidentielle

? Le rapport entre les prix et les coûts des offres " catalogue "

59. L'Autorité a relevé dans sa décision n° 16-MC-01 que les prix des offres " catalogue ", tant pour la clientèle résidentielle que la clientèle non résidentielle, étaient susceptibles de se situer en " zone grise ". En particulier, l'Autorité a considéré qu'il était probable que le prix de nombreuses offres ne permette pas de couvrir les coûts de l'entreprise à long terme, dès lors que les données de coût utilisées reposent en partie sur l'application de la comptabilité réglementaire, qui ne reflétait plus la stratégie commerciale d'Engie de manière appropriée (§ 176 à 187 et 196 à 199 de la décision).

60. L'analyse de l'Autorité est confortée par la position adoptée par la CRE, postérieurement à la décision n° 16-MC-01. Dans sa délibération du 17 mai 2016, la CRE a en effet approuvé une nouvelle méthode d'allocation des coûts aux offres aux TRV d'Engie. L'application de cette nouvelle clé d'allocation permet, selon le régulateur, de réaffecter 90 millions d'euros de l'activité de fourniture des TRV à l'activité de fourniture d'offres de marché de gaz et d'électricité.

61. L'Autorité considère par conséquent que les prix des offres " catalogue " d'Engie, tant pour la clientèle résidentielle que la clientèle non résidentielle, sont susceptibles de se situer en " zone grise ".

? Les autres éléments au dossier

62. Dans sa décision n° 16-MC-01, l'Autorité a relevé d'autres éléments susceptibles d'appuyer l'existence d'effets d'éviction pour les offres dont la couverture des coûts relève de la " zone grise ". La décision a notamment relevé qu'Engie ne détermine pas de façon fiable, ni la profitabilité ex ante, ni la profitabilité ex post de son activité de fourniture d'offres " catalogue " sur les marchés des clients résidentiels et non résidentiels (§ 237 à 251).

b) Sur la durée, les conditions de sortie et les exclusivités des contrats de services de comptage individuel et de fourniture de gaz conclus avec les copropriétés

63. L'Autorité a constaté (voir décision n° 16-MC-01, § 260 à 271) que les contrats de services de comptage individuel et de fourniture de gaz conclus avec les copropriétés contiennent des clauses qui, pratiquées par un opérateur dominant, peuvent, dans certaines conditions, revêtir un aspect anticoncurrentiel. L'Autorité a en particulier relevé les éléments suivants :

- l'obligation imposée aux clients de rembourser, en cas de rupture anticipée à leur initiative, outre les frais de dépose des équipements, la partie non amortie des investissements, n'apparaît pas justifiée dans la mesure où Engie peut par définition réutiliser les équipements non amortis restitués par le client et donc poursuivre cet amortissement ;

- la durée de dix ans des contrats liant services de comptage individuel et fourniture de gaz naturel semble excessive, au moins en ce qui concerne la fourniture de gaz, dès lors que, pour ce service, une telle durée n'est pas justifiée par l'amortissement d'installations particulières ;

- s'agissant des clauses prévoyant des indemnités de résiliation ou des frais de sortie aux copropriétés et bailleurs sociaux lorsque la rupture du contrat est intervenue à la suite de la disparition du TRV, si Engie a indiqué n'avoir jamais exigé de telles indemnités, le maintien de dispositions de ce type dans les contrats reste problématique compte tenu de leur rôle dissuasif vis-à-vis des copropriétés ignorant que la réglementation les autorise à mettre un terme sans frais à leur offre au TRV ;

- les clauses des contrats contraignant les copropriétés à s'engager à n'utiliser que le gaz comme source d'énergie pour le chauffage et, le cas échéant, la production d'eau chaude, pourraient renforcer de manière non justifiée les barrières au développement d'autres sources d'énergie.

64. Aucun élément nouveau ne vient modifier ces constats. Les clauses contractuelles précitées sont donc susceptibles de susciter des préoccupations de concurrence.

B. LES ENGAGEMENTS PROPOSÉS

1. LES ENGAGEMENTS PROPOSÉS PAR ENGIE LE 17 MARS 2017

65. Faisant suite à l'envoi de l'évaluation préliminaire des services d'instruction, Engie a communiqué une offre d'engagements le 17 mars 2017 (dossier n° 15/0095 F, cotes 805 à 815).

66. En ce qui concerne la préoccupation de concurrence liée aux tarifs des offres de marché, Engie proposait plusieurs engagements visant à :

- renforcer la fiabilité des analyses de profitabilité, avec des analyses de profitabilité ex ante et ex post identifiant le coût évitable moyen et le coût incrémental moyen (engagement n° 1.1) ;

- fixer ses prix à un niveau au-dessus du coût évitable moyen tel qu'identifié dans ses analyses de profitabilité ex ante (engagement n° 1.2) ;

- mettre en place un processus de contrôle interne des prix avec, notamment, une validation par une personne d'encadrement habilitée en cas de prix inférieur au coût incrémental moyen et la prise en considération dans les futures analyses ex ante des enseignements résultant des analyses ex post (engagement n° 1.3) ;

- renforcer la sensibilisation aux aspects tarifaires des règles de concurrence des personnels d'Engie (formation et engagement à respecter le droit de la concurrence) (engagement n° 1.4).

67. En ce qui concerne les clauses des contrats de services de comptage individuel et de fourniture de gaz conclus avec les copropriétés, Engie proposait :

- d'informer ses clients sur la possibilité de résilier sans frais et de résilier à l'issue de 5 ans (engagement n° 2) ;

- de ne pas insérer de clauses portant à 10 ans l'engagement des clients ou prévoyant le paiement d'indemnités de résiliation couvrant les investissements non amortis d'équipements (engagement n° 2).

68. Pour l'ensemble, Engie proposait qu'il soit procédé à la désignation d'un mandataire indépendant chargé du respect des engagements (engagement n° 3) ;

69. Enfin, en ce qui concerne la durée des engagements, Engie proposait de retenir :

- une durée de cinq ans à compter de la notification de la décision de l'Autorité rendant lesdits engagements obligatoires ou à la date de suppression des tarifs réglementés de vente de gaz naturel si celle-ci devait intervenir avant l'expiration du délai de 5 ans en ce qui concerne les engagements relatifs aux offres de marché proposées aux clients résidentiels ;

- une durée de trois ans à compter de la notification de la décision de l'Autorité rendant lesdits engagements obligatoires pour les engagements relatifs aux offres de marché proposées aux clients non résidentiels raccordés au réseau de distribution ;

- une durée de trois ans à compter de la notification de la décision de l'Autorité rendant lesdits engagements obligatoires (étant noté que les actions d'information des clients visées à la section 2 seront réputées réalisées dès qu'Engie aura procédé à ladite information des clients) en ce qui concerne l'engagement relatif aux futurs contrats proposés aux copropriétés.

2. LES OBSERVATIONS RECUEILLIES LORS DU TEST DE MARCHÉ

70. Conformément à l'article R. 464-2 du code de commerce, l'Autorité a soumis, dans le cadre d'un test de marché, les engagements proposés par Engie aux parties et aux tiers concernés. La CRE a par ailleurs été saisie le 3 avril 2017 d'une demande d'avis portant sur lesdits engagements.

71. À cette occasion, l'Autorité a recueilli les observations du commissaire du Gouvernement, de la saisissante, mais également d'ENI, de l'association française indépendante de l'électricité et du gaz (ci-après l'" AFIEG ") et de l'association nationale des opérateurs détaillants en énergie (ci-après l'" ANODE "). La CRE, saisie pour avis, a également communiqué à l'Autorité une délibération portant observations sur les engagements.

72. Le commissaire du Gouvernement considère que les engagements proposés par Engie sont de nature à répondre aux préoccupations de concurrence soulevées, sous réserve de modifications mineures (dossier n° 15/0095 F, cote 920), tandis que Direct Energie comme l'ANODE, ENI et l'AFIEG les considèrent insuffisants. Direct Energie estime, à titre principal, que le recours à la procédure d'engagements est inadéquat en l'espèce et critique, à titre subsidiaire, les engagements présentés au motif que ceux-ci ne permettraient pas de prévenir tout risque de pratique anticoncurrentielle mise en œuvre par Engie.

73. En substance, les différentes observations reçues portent sur les points suivants : la régularité de l'instruction (a), la possibilité de recourir à la procédure d'engagements (b), le contenu de l'évaluation préliminaire (c), les engagements de nature tarifaire (d), les engagements relatifs aux contrats conclus avec les copropriétés (e), l'absence d'engagements relatifs au démarchage des clients aux offres aux TRV (f) et le suivi des engagements (g).

a) Sur la régularité de l'instruction

74. À titre principal, Direct Energie fait valoir dans ses observations que les services d'instruction ne pouvaient pas recourir à une procédure d'engagements, pour les raisons suivantes :

- l'Autorité étant saisie in rem, elle ne pouvait pas le même jour rendre une décision de condamnation (la décision de transaction n° 17-D-06) et ouvrir une procédure d'engagements concernant les mêmes marchés ;

- l'article 4 de la décision n° 16-MC-01 comme l'arrêt de la cour d'appel de Paris du 28 juillet 2016 imposaient aux services d'instruction de poursuivre l'instruction au fond et de réaliser des actes d'instruction supplémentaires ;

- le choix d'une transaction dans le dossier n° 14/0037 F et le choix d'une procédure d'engagements dans le dossier n° 15/0095 F pourraient traduire un " détournement de procédure ".

b) Sur la possibilité de recourir à la procédure d'engagements au regard de la nature des pratiques

75. En ce qui concerne les aspects tarifaires, Direct Energie considère que la procédure d'engagements ne pouvait pas être utilisée en l'espèce, dans la mesure où les comportements faisant l'objet des préoccupations de concurrence sont par nature anticoncurrentiels ou comportent des effets qui sont tels qu'ils appellent a priori le prononcé d'une sanction. Ces pratiques seraient d'une particulière gravité et constitueraient un " trouble manifeste à l'ordre public ", excluant par sa nature même tout recours à la procédure d'engagements.

c) Sur le contenu de l'évaluation préliminaire

76. Direct Energie considère que les services d'instruction auraient dû retenir dans leur évaluation préliminaire que le seul fait qu'Engie renonce à des bénéfices en vendant ses offres de marché aux clients résidentiels à des prix inférieurs aux TRV constitue une pratique d'éviction. Direct Energie et l'ANODE estiment également qu'Engie devrait s'engager à ne pas commercialiser activement d'offres de marché auprès de clients aux TRV à des prix inférieurs à ceux-ci.

d) Sur les aspects tarifaires des offres de marchés

Sur le périmètre des offres concernées

77. Dans sa proposition initiale, Engie envisageait d'exclure de l'obligation de constitution de PnL les offres " catalogue " des clients résidentiels et non résidentiels " dont la part dans le stock est inférieure à 1 % du portefeuille et dont le taux de souscription par trimestre est inférieur à 10 % ". Par ailleurs, Engie, prévoyait que la segmentation entre les tranches 0-6 MWh, 6-30 MWh et 30-300 MWh ne s'appliquerait que pour autant que la part variable des offres concernées varie en fonction des différentes tranches. S'agissant des offres individualisées, Engie limitait le périmètre des engagements aux dix plus importantes offres souscrites chaque trimestre.

78. Direct Energie, ENI et l'ANODE estiment que les engagements devraient viser toutes les offres de marché. ENI précise que les analyses de profitabilité devraient avoir lieu offre par offre et surtout dans une perspective ex ante, la concurrence se faisant offre par offre.

79. Direct Energie et l'ANODE considèrent également qu'une segmentation par tranche de consommation est toujours nécessaire.

Sur la détermination des coûts

80. Les observations sur ce sujet concernent le degré de précision des briques de coût prises en compte et leur définition, d'une part, et la détermination du coût évitable et du coût incrémental, d'autre part.

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81. En ce qui concerne les briques de coût prises en compte, ENI, Direct Energie et l'ANODE font valoir dans leurs observations que les engagements d'Engie seraient insuffisants pour permettre un contrôle effectif de l'Autorité, le contenu des différentes briques qu'elle entend additionner dans ces analyses n'étant aucunement précisé.

82. Par ailleurs, Direct Energie considère que la proposition d'engagements est insuffisante puisqu'elle ne fournirait aucune indication concernant la proportion des briques de coût qui devrait être incluse dans le coût évitable (CEM) ou le coût incrémental (CIM).

Sur l'horizon temporel d'évitabilité pertinent

83. Dans sa proposition d'engagements initiale, Engie a indiqué qu'elle entendait, pour chaque catégorie d'offres (offres " catalogue " aux clients résidentiels, offres " catalogue " aux clients non résidentiels, offres individualisées), calculer le niveau d'évitabilité de chacune des briques de coût en se fondant sur la durée moyenne des contrats.

84. L'AFIEG, Direct Energie et l'ANODE estiment toutefois que seule la durée contractuelle de chaque offre permettrait de refléter la réalité, les offres de marché étant des produits commerciaux indépendants les uns des autres.

Sur le recours à la comptabilité règlementaire pour la valorisation

85. L'ANODE, Direct Energie et ENI estiment que le recours aux clés d'allocation issues de la comptabilité règlementaire pour déterminer la part des coûts affectés aux offres de marché n'est pas adéquat, compte tenu (i) de la défaillance constatée pour le passé de ce type de règles et (ii) de ce qu'elles n'ont pas été conçues pour éviter une pratique de prix d'éviction ou de prédation.

Sur la détermination des volumes et des recettes dans une perspective ex ante

86. Direct Energie considère que les engagements d'Engie seraient également trop imprécis en ce qui concerne tant les volumes que les recettes pris en compte dans les analyses de profitabilité.

Sur le positionnement des prix des offres d'Engie

87. Certains répondants considèrent que le standard de coût évitable ne serait pas approprié.

Ainsi, selon l'AFIEG, l'ANODE et Direct Energie, Engie devrait s'engager à fixer ses prix à un niveau supérieur au standard de coût à long terme et non pas seulement couvrir ses coûts évitables à court terme.

Sur le suivi de la politique tarifaire

88. Direct Energie précise qu'il serait nécessaire que des PnL ex post pour chaque groupe d'offres individualisées arrivant à échéance un trimestre donné soient établis dès la mise en œuvre des engagements (et donc même s'ils n'ont pas fait l'objet d'analyses ex ante).

Sur la durée des engagements en matière tarifaire

89. Le fait qu'Engie prévoie de s'engager vis-à-vis de la clientèle résidentielle pendant un délai de cinq ans, sauf si les TRV disparaissaient dans l'intervalle, est critiqué par le commissaire du Gouvernement, la CRE, l'ANODE et Direct Energie.

90. Direct Energie considère en outre que la durée d'engagement de trois ans pour les clients non résidentiels n'est pas adéquate et qu'elle devrait être remplacée par une durée de cinq ans. La CRE estime par ailleurs que les engagements d'Engie devraient s'appliquer tant que le fournisseur demeure dominant.

91. Enfin, Direct Energie comme l'ANODE soulignent que les engagements devront être appliqués sur l'ensemble de la durée des contrats dès lors que ces derniers auraient été signés avant la fin du délai de validité des engagements.

e) Sur les clauses des contrats relatifs aux copropriétés

92. ENI considère, à propos de l'engagement relatif aux contrats futurs, qu'une durée de contrat de cinq ans serait trop longue, s'agissant de consommateurs personnes physiques.

f) Sur le démarchage des clients aux TRV

93. L'ANODE considère que la proposition devrait contenir des engagements relatifs à l'interdiction pour Engie de démarcher les clients aux TRV (cote 925).

g) Sur le suivi des engagements

94. Direct Energie estime que les pouvoirs confiés au mandataire, tout comme ses missions, ne sont pas suffisamment détaillés alors que cela est essentiel au respect par Engie de ses engagements. Direct Energie considère que les engagements devraient être précisés sur plusieurs points, notamment s'agissant de l'étendue de la mission du mandataire et de sa capacité à demander à Engie des modifications de sa clé d'allocation des coûts.

95. ENI estime également que le mandataire devrait présenter des rapports à l'Autorité plus fréquemment qu'une fois par an, afin de permettre à l'Autorité de se saisir rapidement de toute offre qui susciterait des questions.

C. LES ENGAGEMENTS PROPOSÉS PAR ENGIE LE 29 JUIN 2017 ET LE 13 JUILLET 2017

96. Après avoir pris connaissance des résultats du test de marché, Engie a communiqué aux services d'instruction, le 29 juin 2017, une nouvelle version de ses engagements, qui a ensuite été débattue lors de la séance du 5 juillet 2017.

97. Une nouvelle version de ces engagements, modifiée afin de tenir compte des discussions intervenues en séance, a ensuite été transmise à l'Autorité le 13 juillet 2017.

III. Discussion

A. SUR LA RÉGULARITÉ DE L'INSTRUCTION

98. En premier lieu, il convient de rappeler que la cour d'appel de Paris, dans son arrêt du 19 décembre 2013, société Cogent Communications France, a relevé que " la procédure d'engagements constitue l'un des outils qui permet à une autorité de concurrence d'exécuter sa mission consistant à garantir le fonctionnement de la concurrence sur les marchés, cette mission de défense de l'ordre public économique habilitant ladite autorité à rendre des décisions d'engagements, non pour satisfaire la demande d'une partie plaignante mais pour mettre fin à des situations susceptibles d'être préjudiciables à la concurrence ".

99. Dans ce contexte, il convient de constater qu'aucun des arguments mis en avant par Direct Energie n'est de nature à remettre en cause la régularité de l'instruction et les choix opérés par les services d'instruction.

100. Premièrement, le fait que l'Autorité soit saisie in rem ne l'empêche pas d'instruire et de se prononcer dans le cadre de saisines distinctes sur des pratiques distinctes d'une même entreprise. En effet, la saisine in rem implique simplement que l'Autorité est saisie " de l'ensemble des faits et pratiques affectant le fonctionnement d'un marché et n'est pas liée par les demandes et qualifications de la partie saisissante, [et qu'elle] peut, sans avoir à se saisir d'office, retenir les pratiques révélées par les investigations auxquelles [elle] a procédé à la suite de sa saisine qui, quoique non visées expressément dans celle-ci, ont le même objet ou le même effet " (cour d'appel de Paris, 30 janvier 2007, Le Foll, page 8).

101. Deuxièmement, l'article 4 de la décision de mesures conservatoires n° 16-MC-01 et l'arrêt de la cour d'appel de Paris du 28 juillet 2016, aux termes desquels les services d'instruction devront poursuivre l'instruction au fond, n'imposent en aucune manière à ces derniers de recourir à telle ou telle voie procédurale parmi celles définies par le I de l'article L. 464-2 du code de commerce, et notamment pas le recours à une procédure pouvant conduire au prononcé d'une sanction plutôt qu'à une procédure pouvant déboucher sur l'acceptation d'engagements. En effet, le I de l'article L. 464-2 du code de commerce permet notamment à l'Autorité d'" accepter des engagements proposés par les entreprises ou organismes et de nature à mettre un terme à ses préoccupations de concurrence susceptibles de constituer des pratiques prohibées visées aux articles L. 420-1 à L. 420-2-2 et L. 420-5 ou contraires aux mesures prises en application de l'article L. 410-3 ". Ainsi, la procédure d'engagements constitue bien une voie de résolution contentieuse d'un dossier devant l'Autorité.

102. Troisièmement, le déroulement respectif des procédures relatives aux dossiers n° 14/0037 F et n° 15/0095 F ne saurait, en tant que tel, constituer l'indice d'un quelconque détournement de pouvoir ou de procédure de la part des services d'instruction. L'évocation par Direct Energie d'un " risque de compromission ", qui ne repose sur aucun élément tangible, est donc sans fondement.

103. Les arguments de Direct Energie relatifs à la régularité de l'instruction seront donc rejetés.

B. SUR LA NATURE ET LES EFFETS DES COMPORTEMENTS FAISANT L'OBJET DES

PRÉOCCUPATIONS DE CONCURRENCE

104. Comme indiqué précédemment, le I de l'article L. 464-2 du code de commerce permet à l'Autorité d'" accepter des engagements proposés par les entreprises ou organismes et de nature à mettre un terme à ses préoccupations de concurrence susceptibles de constituer des pratiques prohibées visées aux articles L. 420-1 à L. 420-2-2 et L. 420-5 ou contraires aux mesures prises en application de l'article L. 410-3 ", selon les modalités fixées par l'article R. 464-2 du même code. Ainsi, l'Autorité peut accepter des engagements dès lors que ces derniers sont de nature à mettre fin aux préoccupations de concurrence identifiées.

105. Dans son communiqué du 2 mars 2009, l'Autorité précise notamment que la mise en œuvre de la procédure d'engagements " permet à l'Autorité d'accélérer la résolution des affaires ne portant pas sur des pratiques dont la nature ou les effets sont tels qu'ils appellent a priori le prononcé d'une sanction " et que " L'Autorité n'applique pas la procédure d'engagements dans les cas où, en tout état de cause, l'atteinte à l'ordre public économique impose le prononcé de sanctions pécuniaires, ce qui exclut notamment a priori les ententes particulièrement graves comme les cartels et certains abus de position dominante ayant déjà causé un dommage à l'économie important ".

106. Comme le précise le communiqué précité, l'Autorité dispose ainsi d'un large pouvoir d'appréciation pour déterminer la voie procédurale la plus adaptée parmi celles prévues par le I de l'article L. 464-2 du code de commerce, et notamment pour opter entre la procédure d'acceptation d'engagements et la procédure de sanction.

107. À cet égard, l'Autorité a déjà considéré que le recours à une procédure d'engagements pouvait constituer une solution adéquate pour assurer l'effectivité´ de la concurrence sur un marché´ en cours de libéralisation, alors que les préoccupations de concurrence portaient sur de potentiels effets de ciseau tarifaire résultant de pratiques tarifaires du fournisseur historique d'électricité´ (décision n° 07-D-43 du 10 décembre 2007, relative à des pratiques mises en œuvre par l'opérateur historique de l'électricité).

108. Dans ce contexte, les comportements d'Engie, qui constituent des pratiques récentes, puisqu'elles auraient été mises en œuvre depuis la moitié de l'année 2014, et qui ont fait l'objet d'une décision de mesures conservatoires le 2 mai 2016, ne sont pas, en tout état de cause, d'une nature telle qu'ils appellent nécessairement le prononcé d'une sanction.

109. L'argument de Direct Energie sera donc rejeté.

C. SUR LE CONTENU DE L'ÉVALUATION PRÉLIMINAIRE

110. Comme indiqué ci-dessus, Direct Energie considère que les services d'instruction auraient dû retenir, dans leur évaluation préliminaire, que le seul fait qu'Engie renonce à des bénéfices en vendant ses offres de marché aux clients résidentiels à des prix inférieurs aux TRV constitue une pratique d'éviction.

111. Toutefois, la décision n° 16-MC-01 a déjà répondu à un argument identique (§ 139 de la décision) : " Il n'est pas (...) possible de considérer que vendre des offres à un prix inférieur au prix des TRV constitue en tant que tel nécessairement un manque à gagner pour Engie et un indice clair d'une intention anticoncurrentielle. Un tel comportement peut être économiquement justifié par exemple si, en l'absence de telles offres à un prix inférieur au TRV, une fraction significative des clients d'Engie changeait de fournisseur de gaz pour souscrire une offre de marché chez un concurrent. "

112. Par conséquent, le seul fait pour Engie de proposer des offres de marché à des prix inférieurs aux TRV ne saurait, en tout état de cause, constituer, en soi, une pratique anticoncurrentielle.

L'argument de Direct Energie sera donc rejeté.

D. SUR LES ASPECTS TARIFAIRES DES ENGAGEMENTS

1. SUR LE PÉRIMÈTRE DES OFFRES CONCERNÉES

a) Sur les offres " catalogue "

113. Les engagements présentés, dans la dernière version fournie par Engie, précisent que l'obligation de réaliser des PnL ex ante et ex post concernera la totalité des offres " catalogue ", à l'exception des offres dont la part dans le stock est inférieure à 1 %, et dont le taux de souscription par trimestre considéré est inférieur à 2 %. En outre, les PnL réalisés devront toujours représenter au moins 95 % des contrats souscrits sur la période considérée.

Enfin, les analyses de profitabilité devront toujours distinguer entre les différentes tranches de consommation (0-6 MWh, 6-30 MWh et 30-300 MWh).

114. Le périmètre proposé par Engie dans le cadre de sa dernière proposition répond de manière adéquate aux préoccupations de concurrence, en ce qu'il permet de couvrir, de façon complète et détaillée, la quasi-totalité des offres " catalogue " de l'entreprise. Le champ de l'exception à l'établissement de PnL ex ante et ex post a ainsi été considérablement réduit, répondant aux objections soulevées sur ce point dans le cadre du test de marché. Une telle formulation permet de limiter le risque de " contournement " par Engie de ses obligations, puisque, dès lors qu'une offre donnée deviendra suffisamment attractive pour la clientèle, elle entrera dans le champ de l'obligation d'analyse de profitabilité.

b) Sur les offres individualisées

115. Dans ses engagements, tels qu'ils résultent de la dernière proposition en date du 13 juillet 2017, Engie indique qu'elle établira les analyses de profitabilité suivantes :

- pour l'ensemble des offres individualisées souscrites au cours du trimestre concerné (la cohorte d'offres individualisées) ;

- pour chacune des dix offres individualisées les plus importantes en volume souscrites au cours du trimestre concerné (ces dix offres étant par ailleurs intégrées dans l'analyse de profitabilité de la cohorte d'offres individualisées) ;

- et enfin pour l'ensemble des offres individualisées, à l'exception des dix offres les plus importantes faisant l'objet d'analyses individuelles, afin que l'Autorité soit en mesure d'apprécier la profitabilité de l'ensemble des autres offres prises isolément.

116. Cet engagement pérennise l'injonction de l'article 2 de la décision n° 16-MC-01 qui a imposé à Engie " de couvrir, ex ante comme ex post, ses coûts évitables par cohorte d'offres individualisées souscrites chaque trimestre et pour chacune des dix plus importantes offres individualisées en valeur souscrites chaque trimestre, à partir du troisième trimestre 2016 ".

117. Sur ce point, les engagements proposés par Engie répondent également de manière satisfaisante aux préoccupations de concurrence ainsi qu'aux objections soulevées dans le cadre du test de marché. En effet, dès lors qu'Engie s'engage, d'une part, à vérifier la profitabilité de ses offres pour les clients les plus importants et, d'autre part, à mettre en œuvre une politique commerciale globale en matière d'offres individualisées lui imposant de couvrir ses coûts, le risque d'éviction des concurrents en raison de tarifs trop bas pour ces offres individualisées sera limité.

2. SUR LA DÉTERMINATION DES COÛTS

a) Sur le degré de précision des engagements

118. L'Autorité rappelle, à titre liminaire, les limites de sa mission lorsqu'une entreprise présente des engagements de nature tarifaire. Il n'appartient pas à l'Autorité de se substituer à une entreprise, fut-elle dominante sur son marché, dans la fixation de ses prix. Dans ce contexte, le rôle de la procédure d'engagements n'est pas de figer pour l'avenir ce que seront les coûts d'une entreprise, qu'il s'agisse des briques de coût pertinentes ou de la proportion dans laquelle sera alloué tel ou tel poste de coût dans la détermination du coût évitable ou du coût incrémental (voir notamment décision n° 16-MC-01 précitée, § 338).

119. Dans sa proposition d'engagements actuelle, Engie précise qu'elle " s'engage à déterminer ses coûts de manière raisonnable tel que le ferait un opérateur placé dans une situation équivalente et ce, en tenant à disposition de l'Autorité les éléments relatifs à la méthodologie retenue à cette fin ". Elle ajoute que " Compte tenu des évolutions qui sont susceptibles d'intervenir sur le marché au cours de la mise en œuvre des engagements (que ce soit en raison de choix d'ENGIE ou d'évolutions qui lui sont extérieures, notamment réglementaires ou législatives), le contenu de ces PnL et des éléments qui les fondent sont susceptibles d'être adaptés pour tenir compte de ces évolutions. ENGIE s'engage à informer l'Autorité de toute évolution sur une base trimestrielle ".

120. Dans ce contexte, il appartiendra à l'Autorité de vérifier, dans le cadre du suivi des engagements, qu'Engie a déterminé ses coûts évitables et incrémentaux dans le respect des principes du droit de la concurrence. À cet égard, les obligations d'information qui pèseront sur Engie dans le cadre du suivi des engagements, de même que la mise en œuvre de ses pouvoirs par le mandataire, permettront à l'Autorité de vérifier de manière concrète et effective le respect de ses obligations par l'entreprise.

b) Sur le recours à la comptabilité règlementaire pour la valorisation

121. Dans ses engagements, tels qu'ils résultent de la dernière version transmise, Engie précise que " pour mener ses analyses de profitabilité, Engie pourra tenir compte des données résultant de l'application des règles sectorielles validées et auditées par la CRE, étant observé que, conformément à la pratique décisionnelle de l'Autorité, ces données ne sauraient lier l'Autorité dans son appréciation des pratiques tarifaires d'Engie ".

122. Cette formulation apparaît pertinente et suffisante pour s'assurer qu'Engie ne se bornera pas à reprendre les principes des règles de comptabilité sectorielle pour l'établissement de ses analyses de profitabilité, mais vérifiera bien, à tout moment, que ces analyses sont en adéquation avec la pratique décisionnelle et la jurisprudence du droit de la concurrence en matière de pratiques tarifaires.

c) Sur l'horizon temporel d'évitabilité pertinent

123. Dans la dernière version de ses engagements, Engie s'engage à réaliser un calcul de la moyenne des durées des contrats " catalogue " deux fois par an sur la base des contrats souscrits (à savoir les contrats des nouveaux clients et des clients qui reconduisent leur contrat) au cours des six mois qui précèdent la dernière cohorte.

124. Pour les offres individualisées, le niveau d'évitabilité de chacune des rubriques de coûts prise en compte sera calculé deux fois par an sur la base d'un horizon temporel correspondant à la moyenne, pondérée par les volumes, des durées des contrats acquis (à savoir les contrats des nouveaux clients et des clients qui reconduisent leur contrat) au cours des douze mois qui précèdent la dernière cohorte.

125. La proposition d'Engie constitue une solution acceptable et pertinente. En effet, l'entreprise s'engage à réaliser cet exercice de détermination du coût évitable pour un nombre important d'offres chaque trimestre. La solution proposée par Engie, qui consiste donc à retenir non pas la durée de chacune des offres mais la moyenne des durées des offres souscrites pendant une période donnée, est donc plus aisée à mettre en œuvre et permettra un suivi plus efficace pour l'Autorité.

3. SUR LA DÉTERMINATION DES VOLUMES ET DES RECETTES DANS UNE PERSPECTIVE

EX ANTE

126. Sur ce point, comme indiqué ci-dessus, Engie précise dans sa proposition d'engagements que dans le cadre de l'établissement de ses analyses de profitabilité, elle " s'engage à déterminer ses coûts de manière raisonnable tel que le ferait un opérateur placé dans une situation équivalente et ce, en tenant à disposition de l'Autorité les éléments relatifs à la méthodologie retenue à cette fin ".

127. La méthodologie exposée par Engie, consistant à se fonder (i) sur ses dernières campagnes et ses objectifs commerciaux pour la détermination de ses volumes ex ante et (ii) sur le consommateur moyen pour la détermination de ses recettes ex ante, répond de manière satisfaisante aux préoccupations de concurrence. Il appartiendra à l'Autorité de s'assurer dans le cadre du suivi des engagements qu'Engie agit, dans la mise en œuvre des engagements, comme le ferait raisonnablement un opérateur placé dans une situation équivalente.

4. SUR LE POSITIONNEMENT DES PRIX DES OFFRES D'ENGIE

128. Dans ses engagements, Engie a proposé " que le prix de ses offres de marché couvre leur CEM tel qu'il ressortira des PnL ex ante (...) ".

129. Engie s'est également engagé sur le suivi de ses prix en ces termes : " (...) dans le cas où un PnL ex post ferait apparaître des recettes sous le niveau de CIMLT (alors que le PnL ex ante plaçait les recettes prévisionnelles au-dessus de ce niveau) ou sous le niveau de CEM (alors que le PnL ex ante plaçait les recettes prévisionnelles au-dessus de ce niveau), ENGIE s'engage à être en mesure de justifier cette évolution sur demande de l'Autorité.

Pour ce faire, ENGIE conservera les documents ou informations permettant de justifier les hypothèses prises en compte dans les PnL ex ante et conservera les documents ou informations permettant de justifier les raisons pour lesquelles les coûts constatés ex post se sont écartés de ces hypothèses.

Au-delà de la conservation des éléments permettant de justifier les raisons des écarts entre les hypothèses retenues et les couts constatés, dans l'hypothèse où les recettes d'un PnL ex post seraient inférieures au niveau de CEM, ENGIE s'engage à exposer dans un document le contexte et les raisons justifiant l'importance de l'écart entre les hypothèses retenues et les coûts constatés. Ce document sera tenu à disposition de l'Autorité ".

130. L'engagement proposé par Engie permet de répondre aux préoccupations de concurrence retenues, sans qu'il y ait lieu qu'Engie s'engage à fixer systématiquement les prix de toutes ses offres à un niveau supérieur au coût incrémental (et encore moins au coût total - ou coût complet) tel que déterminé par ses analyses de profitabilité ex ante. En effet, une telle obligation contraindrait de manière excessive la liberté tarifaire et commerciale d'Engie, s'agissant de ses offres de marché (voir à ce sujet la décision n° 16-MC-01 précitée, paragraphe 338).

131. En outre, Engie s'engage à mettre en place un suivi interne qui devrait lui permettre de limiter les situations qui pourraient être problématiques. Elle s'engage ainsi à " (i) (...) identifier le positionnement du prix par rapport au CIMLT et par rapport au CEM ; (ii) (...) déterminer la marge envisagée par rapport à ces niveaux de coûts ; (iii) et, si le prix proposé devait se situer sous le niveau du CIMLT pertinent, (...) obtenir une validation par une personne d'encadrement dûment habilitée à cet effet ".

132. Ce mécanisme de suivi interne garantit qu'Engie sera en mesure d'identifier les situations dans lesquelles son comportement tarifaire pourrait, s'il perdure, présenter des effets anticoncurrentiels.

5. SUR LE SUIVI DE LA POLITIQUE TARIFAIRE

133. L'Autorité estime que la modification des engagements jugée nécessaire par Direct Energie, consistant à imposer que des PnL ex post pour tous les groupes d'offres individualisées arrivant à échéance soient établis dès la mise en œuvre des engagements, ne se justifie pas au vu des préoccupations de concurrence exposées ci-dessus.

134. En effet, en l'absence d'analyses de profitabilité ex ante préalables, les analyses ex post qui seraient établies dans ces conditions ne contribueraient pas à répondre aux préoccupations de concurrence retenues dans la présente procédure. Au vu de celles-ci, ce qui importe est qu'Engie détermine correctement ses coûts ex ante à l'aune, notamment, de l'expérience résultant de ses analyses ex post et que l'entreprise mette en place un suivi de la profitabilité de ses offres, notamment en analysant les décalages entre ses analyses ex ante et ex post.

6. SUR LA DURÉE DES ENGAGEMENTS EN MATIÈRE TARIFAIRE

135. De manière générale, la durée proposée par Engie pour les engagements en matière tarifaire, tant pour la clientèle résidentielle (cinq ans) que pour la clientèle non résidentielle (trois ans) apparaît adéquate et suffisante pour s'assurer qu'Engie mettra effectivement en œuvre un système pérenne, et suffisamment large, de vérification de la profitabilité économique de ses offres de marché. Il convient, à cet égard, de noter que les engagements relatifs à l'établissement de PnL ex post et au suivi de la profitabilité devront s'appliquer à toutes les offres ayant fait l'objet de PnL ex ante pendant la durée des engagements.

136. Par conséquent, les engagements tels que proposés imposent à Engie une obligation durable et effective de détermination et de vérification de la profitabilité de ses offres de marché.

137. Par ailleurs, dans la dernière version de ses engagements, Engie a supprimé la référence à la date de suppression des TRV comme date de fin des engagements, et indique désormais qu'il s'agit, selon elle, d'un motif justifiant une possible demande de révision des engagements.

Dès lors qu'une éventuelle demande de révision d'engagements sera en tout état de cause soumise à un examen approfondi par l'Autorité, une telle formulation n'appelle pas de remarque particulière.

7. CONCLUSION SUR LES ENGAGEMENTS EN MATIÈRE TARIFAIRE

138. Il découle de ce qui précède que, pris ensemble, les engagements en matière tarifaire proposés par Engie, dans leur dernière version en date du 13 juillet 2017, sont de nature à répondre de manière adéquate aux préoccupations exprimées par les services d'instructions et aux observations reçues au cours de la procédure contradictoire.

E. SUR LES CLAUSES DES CONTRATS CONCLUS AVEC LES COPROPRIÉTÉS

139. En premier lieu, dans leur évaluation préliminaire, les services d'instruction, reprenant la position adoptée par l'Autorité dans la décision n° 16-MC-01, ont estimé que " les clauses des contrats contraignant les copropriétés à s'engager à n'utiliser que le gaz comme source d'énergie pour le chauffage et, le cas échéant, la production d'eau chaude, pourraient être excessives ".

140. Dans la nouvelle version de ses engagements, Engie s'engage à ne pas inclure de clause similaire à l'avenir. Engie s'engage également à informer chaque copropriété en cours de contrat qu'elle pourra utiliser d'autres sources d'énergie que le gaz naturel pour le chauffage collectif et, le cas échéant, la production d'eau chaude de l'ensemble de la copropriété, sous réserve d'utiliser d'autres équipements de comptage que ceux utilisés en exécution du contrat.

141. En second lieu, les engagements, dans leur rédaction initiale, ne déterminaient pas précisément quelle serait la durée maximum qu'Engie pourrait imposer au titre de ses contrats futurs avec les copropriétés. Dans sa nouvelle proposition d'engagements, Engie s'est engagée à ne pas proposer de contrat combinant des prestations de service de comptage et de fourniture de gaz naturel dont la fourniture de gaz naturel aurait une durée d'exécution supérieure à cinq ans.

142. Ces deux évolutions contenues dans la nouvelle proposition d'Engie permettront de renforcer significativement la liberté de choix des gestionnaires de copropriétés, au regard d'un éventuel changement de prestataire de fourniture de gaz et du recours à d'autres sources d'énergie pour le chauffage et l'eau chaude.

F. SUR LE DÉMARCHAGE DES CLIENTS AUX TRV

143. Les services d'instruction n'ont pas formulé de préoccupation de concurrence sur la question du démarchage des clients aux TRV, les comportements en cause ayant été spécifiquement abordés par la procédure au fond ayant donné lieu à la décision n° 17-D-06 du 21 mars 2017.

Par conséquent, contrairement à ce qui est avancé par l'ANODE (voir ci-dessus, § 93), il n'était pas nécessaire qu'Engie propose des engagements sur ce point.

G. SUR LE SUIVI DES ENGAGEMENTS

144. Dans sa proposition d'engagements initiale, Engie a défini les missions du mandataire comme suit : " Le mandataire aura pour mission de s'assurer de la mise en œuvre et du respect par ENGIE des présents engagements.

À cet effet, le mandataire présentera à l'Autorité un mois après la signature du contrat de mandat un premier rapport contenant un plan de travail précisant les modalités selon lesquelles il entend accomplir sa mission. Une copie de ce rapport sera transmise à ENGIE.

Le mandataire établira et communiquera ensuite à l'Autorité´ des rapports annuels sur l'avancement de sa mission. Une version non confidentielle de ces rapports sera communiquée à ENGIE ".

145. Dans sa dernière proposition d'engagements, Engie a ajouté que, outre les rapports annuels, le mandataire pourra également communiquer à l'Autorité à tout moment toute information en lien avec sa mission qu'il jugera utile.

146. Compte tenu des préoccupations de concurrence relevées par les services d'instruction, et de la nature des engagements proposés, le mandataire aura un rôle particulièrement important, tant dans l'analyse de la méthodologie de définition des coûts établie par Engie que dans le suivi de l'analyse de profitabilité des offres de marché de l'entreprise.

147. Les engagements n'ont pas, dans ce contexte, à détailler la liste des différents contrôles que devra effectuer le mandataire pour mener à bien sa mission. Il appartiendra à ce dernier d'effectuer toutes les vérifications qu'il jugera nécessaires et de demander les informations lui permettant de mener à bien sa mission. À cet égard, comme indiqué par Engie dans sa proposition d'engagements, le contrat de mandat sera soumis à l'Autorité.

148. La CRE recevra par ailleurs communication de l'ensemble des rapports et autres éléments que le mandataire communiquera à l'Autorité.

H. CONCLUSION

149. Les engagements d'Engie en matière tarifaire, dans leur version finale du 13 juillet 2017, sont de nature à garantir que l'entreprise mettra effectivement en place un processus interne pérenne et complet permettant de déterminer et de vérifier la profitabilité de ses offres de marché, en partant d'une structure de coûts pertinente et vérifiable, dans le respect des principes établis du droit de la concurrence.

150. En outre, les engagements proposés en ce qui concerne les contrats conclus avec les copropriétés permettront aux clients de faire jouer effectivement la concurrence pour leur approvisionnement en gaz dans des délais raisonnables, et d'avoir recours à d'autres sources d'énergie, s'ils le souhaitent, pour le chauffage et l'eau chaude.

151. Ces engagements répondent aux préoccupations de concurrence exprimées par les services d'instruction et présentent un caractère substantiel, crédible et vérifiable. Il y a donc lieu de les accepter, de les rendre obligatoires et de clore la procédure.

DÉCISION

Article 1er : L'Autorité de la concurrence accepte les engagements pris par Engie qui font partie intégrante de la présente décision à laquelle ils sont annexés. Ces engagements sont rendus obligatoires à compter du 1er octobre 2017.

Article 2 : La saisine enregistrée sous le numéro 15/0095 F est close.

Délibéré sur le rapport oral de Mme Elise Provost, rapporteure et l'intervention de M. Umberto Berkani, rapporteur général adjoint, par Mme Isabelle de Silva, présidente, et Mme Laurence Idot et Mme Carol Xueref, membres.

NOTES :

1 Ce résumé a un caractère strictement informatif. Seuls font foi les motifs de la décision numérotés ci-après.