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Décisions

CA Paris, Pôle 5 ch. 5, 7 septembre 2017, n° 15-14822

PARIS

Arrêt

PARTIES

Demandeur :

Vencorex France (Sasu) ; Chloralp (Sasu)

Défendeur :

Quadrimex Chemical (SAS) , Quadrimex Sels (Sasu)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Schaller

Conseillers :

Mmes du Besset, Castermans

Avocats :

Mes Esquier, Diesbecq

T. com. Paris, du 22 juin 2015

22 juin 2015

Faits et procédure

La société Quadrimex Chemical commercialise des produits chimiques et notamment du sel destiné au déneigement ou à l'adoucissement et au traitement de l'eau. La société Quadrimex Sels (Alpasel), filiale à 100 % de la société Quadrimex Chemical a pour activité la fabrication et le conditionnement de pastilles de sel. Pour les besoins de son activité, elle se fournissait en sel en Slovaquie et en Espagne.

La société Vencorex France (Perstorp et Rhodia) a pour activité la fabrication de produits chimiques via un procédé d'électrolyse qui produit du chlore et de la soude caustique. La société Chloralp exploite une mine de sel et approvisionne l'usine de la société Vencorex France en saumure (mélange de sel et d'eau) via un saumoduc. Cette saumure est affinée avant son utilisation pour la fabrication du chlore et de la soude. Seule une partie du sel réagit au moment de l'électrolyse à diaphragme. Le sel cristallisé en sortie d'électrolyse et non utilisé est communément appelé " sel fatal ".

Au début de l'année 2003, les sociétés Quadrimex Chemical et Vencorex France ont entamé des discussions aux fins d'exploiter ce " sel fatal ", ce qui permettait à Quadrimex Chemical d'éviter le coût du transport depuis l'Espagne et à Vencorex de vendre ses stocks de sel inutilisé.

Après plusieurs études de faisabilité, analyses des avantages et inconvénients de plusieurs projets, et après exécution de divers tests dudit sel, le projet initial de sel à déneigement a été abandonné et celui de fabrication de pastilles de sel compactes destinées à des adoucisseurs d'eau a été retenu. Ce projet nécessitant l'implantation d'une usine de production de pastilles au Pont de Claix, un cahier des charges a été élaboré et les parties ont conclu le 30 janvier 2009 quatre contrats pour une durée de 10 ans : un protocole d'engagement, un contrat de vente portant sur le sel, un contrat de fourniture d'utilités et de prestations de services et un contrat de prêt à usage d'un local industriel à titre gratuit. Aux termes de ces contrats, la société Quadrimex Sels (Alpasel) s'engageait à acquérir auprès de Vencorex un minimum de 12 000 tonnes de " sel fatal " par an au prix négocié de 28 euros la tonne.

La société Quadrimex Sels a investi dans un outil industriel au Pont de Claix pour fabriquer les pastilles. Elle recueillait le sel fatal sur place, le séchait, le compactait et le conditionnait.

Des difficultés sont apparues très rapidement portant à la fois sur un mauvais écoulement du sel sur la trémie, ralentissant la production, et sur le délitement des pastilles au lieu de leur dissolution. Des réunions ont été organisées pour trouver l'origine de ces difficultés et y remédier, et il a été fait appel à des consultants qui ont conclu soit à la présence de " sel triple " dans le sel, soit à la formation de cristaux de sel contenant de la soude occluse, ce qui dans les deux cas rendait impossible la neutralisation de la soude contenue dans le sel, surtout lorsque l'eau était dure, ce qui était le cas dans le processus d'adoucissement de l'eau.

Au cours d'une réunion organisée le 29 septembre 2011, la société Quadrimex a sollicité une réduction du prix de la tonne de sel mais également la possibilité de s'affranchir de la clause d'achat minimum de 12 000 tonnes par an de sel fatal. Par courrier du 17 novembre 2011, la société Vencorex a refusé cette demande.

Toujours le 29 septembre 2011, la société Vencorex a annoncé aux sociétés Quadrimex et Alpasel l'arrêt de fourniture du sel à horizon 2014-2016 en raison d'une transformation de la technologie utilisée pour son activité, le nouveau procédé d'électrolyse ne rejetant plus de sel, cette nouvelle technologie étant la conséquence d'un plan de prévention des risques technologiques.

Par courrier en date du 22 novembre 2011, la société Quadrimex Chemical a mis en œuvre la procédure de conciliation prévue aux contrats, puis a saisi le juge des référés d'une demande de désignation d'un expert.

Par ordonnance du 16 mars 2012, le Tribunal de commerce de Paris a désigné M. X en qualité d'expert afin de déterminer les causes du comportement anormal du sel et dit qu'il n'y avait pas lieu de statuer sur la question de la mise à l'arrêt de l'unité de production de pastilles de sel.

Par courrier du 25 mai 2012 la société Alpasel (Quadrimex Sels) a résilié le contrat de vente avec effet au 31 mai 2012.

L'expert a rendu son rapport le 10 décembre 2012.

Par actes des 22 et 26 mars 2013, les sociétés Quadrimex Chemical et Alpasel, aux droits de laquelle vient la société Quadrimex Sels ont assigné les sociétés Vencorex France et Chloralp en résolution des différents contrats pour vice caché et en réparation de divers préjudices.

Par jugement du 22 juin 2015, assorti de l'exécution provisoire, le Tribunal de commerce de Paris a :

· Dit les demandes des sociétés Quadrimex et Alpasel recevables et bien fondées,

· Dit que le sel vendu par la société Vencorex France est affecté d'un vice rédhibitoire et indécelable le rendant impropre à l'usage auquel il était destiné,

· Dit que la société Vencorex France a sa responsabilité engagée au visa de l'article 1645 du Code civil,

· Prononcé la résolution des contrats de vente, du contrat de fourniture et d'utilités et de prestations de services et du contrat de prêt à usage industriel,

· Ordonné la restitution du prix du sel et les frais y afférents soit 899 450 euros, par la société Vencorex France à la SAS Alpasel

· Libéré la SAS Alpasel de son obligation de restitution du sel à la société Vencorex France

· Condamné la société Vencorex France à payer à la SAS Alpasel à titre de dommages et intérêts, la somme de 400 000 euros outre intérêts au taux légal à compter du prononcé du présent jugement avec anatocisme selon les dispositions de l'article 1154 du Code civil,

· Condamné la société Vencorex France à payer à la SAS Quadrimex la somme de 160 353,79 euros à titre de dommages et intérêts subi par la SAS Quadrimex

· Condamné la société Vencorex France à payer à la SAS Alpasel la somme de 50 000 euros à titre de dommages et intérêts au titre du manque à gagner,

· Dit les sociétés Vencorex France et Chloralp mal fondées en leurs demandes reconventionnelles et les en débouté,

· Condamné la société Vencorex France à payer aux sociétés Quadrimex et Alpasel ensemble la somme de 60 000 euros au titre de l'article 700 du CPC

· Débouté les parties de leurs demandes autres, plus amples ou contraires au présent dispositif,

Vu l'appel interjeté le 7 juillet 2015 par la société Vencorex France et la société Chloralp

Vu les dernières conclusions signifiées le 7 mars 2017 par les sociétés Vencorex France et Chloralp par lesquelles il est demandé à la cour de :

Vu les articles 1134 (dans sa rédaction applicable) et 1641 et suivants du Code civil,

· Infirmer le jugement du Tribunal de commerce de Paris en date du 22 juin 2015 et, statuant à nouveau,

A titre principal :

· Dire et Juger que les sociétés Quadrimex Sels et Quadrimex Chemicals ne démontrent pas l'existence d'un vice caché affectant le sel vendu par Vencorex ;

En conséquence :

· Débouter les sociétés Quadrimex Sels et Quadrimex Chemicals de l'ensemble de leurs demandes, fins et conclusions ;

A titre subsidiaire :

· Dire et Juger que les sociétés Quadrimex Sels et Quadrimex Chemicals ne peuvent invoquer l'application de la garantie légale des vices cachés dans le cadre du contrat de vente du 30 janvier 2009, car les parties ont exclu contractuellement l'application de cette garantie ;

En conséquence :

· Débouter les sociétés Quadrimex Sels et Quadrimex Chemicals de l'ensemble de leurs demandes, fins et conclusions ;

A titre plus subsidiaire :

· Dire et Juger que si l'action en garantie des vices cachés engagée par les sociétés Quadrimex Sels et Quadrimex Chemicals était accueillie, ces dernières ne seraient pas en mesure de restituer le sel vendu à Vencorex dès lors qu'elles l'ont pastillé et commercialisé ;

En conséquence :

· Débouter les sociétés Quadrimex Sels et Quadrimex Chemicals de leur action rédhibitoire en résolution du contrat de vente de Sel du 30 janvier 2009 et de leur action en " résolution " des autres contrats conclus entre les parties à la même date, l'action en " résolution " pour ces derniers contrats dépendant de la résolution du contrat de vente de sel ;

· Dire et Juger que les sociétés Quadrimex Sels et Quadrimex Chemicals ne justifient pas du quantum et de la matérialité du préjudice qu'elles invoquent, ni d'un lien de causalité avec le vice caché qu'elles allèguent ;

· Dire et Juger en tout état de cause que la société Vencorex d'une part, et les sociétés Quadrimex Sels et Quadrimex Chemicals, d'autre part, sont des professionnels de même spécialité au sens de l'article 1645 du Code civil et que la clause limitative de responsabilité prévue à l'article 7 du contrat de vente du 30 janvier 2009 est valable et opposable ;

En conséquence :

· Débouter les sociétés Quadrimex Sels et Quadrimex Chemicals de leur demande de dommages-intérêts formée au titre de l'article 1645 du Code civil ou à tout le moins limiter les dommages-intérêts prononcés à la somme de 700 000 euros en application de la clause imitative de responsabilité prévue à l'article 7 du contrat de vente du 30 janvier 2009 ;

A titre encore subsidiaire (si l'action rédhibitoire des sociétés Quadrimex Sels et Quadrimex Chemicals était accueillie) :

· Dire et Juger que la résolution d'un contrat faisant partie d'un ensemble contractuel entraîne, non pas la résolution mais la caducité des autres contrats de cet ensemble;

· Prononcer, compte tenu des circonstances du litige et de la nature des contrats dont la caducité est invoquée, à savoir des contrats à exécution successive, la caducité avec effet seulement pour l'avenir du contrat de fourniture d'utilités et de prestation de services et du contrat de prêt à usage industriel à titre gratuit conclus le 30 janvier 2009 entre les parties ;

· Dire et Juger que les sociétés Quadrimex Sels et Quadrimex Chemicals ne justifient pas du quantum et de la matérialité du préjudice qu'elles invoquent, ni d'un lien de causalité avec le vice caché qu'elles allèguent ;

· Dire et Juger en tout état de cause que la société Vencorex d'une part, et les sociétés Quadrimex Sels et Quadrimex Chemicals, d'autre part, sont des professionnels de même spécialité au sens de l'article 1645 du Code civil et que la clause limitative de responsabilité prévue à l'article 7 du contrat de vente du 30 janvier 2009 est valable et opposable ;

· Débouter les sociétés Quadrimex Sels et Quadrimex Chemicals de leur demande de dommages-intérêts formée au titre de l'article 1645 du Code civil ou à tout le moins limiter les dommages-intérêts prononcés à la somme de 700 000 euros en application de la clause imitative de responsabilité prévue à l'article 7 du contrat de vente du 30 janvier 2009 ;

A titre reconventionnel :

· Condamner solidairement les sociétés Quadrimex Sels et Quadrimex Chemicals à payer à Vencorex la somme de 390 265,90 euros TTC correspondant à des factures impayées au titre du contrat de vente de sel du 30 janvier 2009 et du contrat de fourniture d'utilités et de prestation de services du 30 janvier 2009 ;

· Condamner solidairement Alpasel et Quadrimex à payer à Vencorex la somme de 1 208 375 euros (902 000 euros + 306 375 euros) au titre de son manque à gagner du fait de la résiliation brutale du contrat de vente de sel et du contrat de fourniture d'utilités et de prestation de services du 30 janvier 2009 par les sociétés Quadrimex Sels et Quadrimex Chemicals ;

En tout état de cause :

· Condamner in solidum les sociétés Quadrimex Sels et Quadrimex Chemicals à verser à chacune des sociétés Vencorex et Chloralp la somme de 100 000 euros, sur le fondement des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile ;

Vu les dernières conclusions signifiées le 6 mars 2017 par les sociétés Quadrimex Sels et Quadrimex Chemical par lesquelles il est demandé à la cour de :

Vu les articles 1641 et suivants du Code civil,

· Confirmer en toutes ses dispositions, sauf sur la réparation du préjudice résultant notamment du manque à gagner éprouvé par la société Quadrimex Sels le jugement du Tribunal de commerce de Paris du 22 juin 2015 ;

· Dire et juger les demandes des sociétés Quadrimex Sels et Quadrimex Chemical recevables et bien fondées ;

· Dire et juger que le sel vendu par la société Vencorex France à la société Quadrimex Sels est affecté d'un vice rédhibitoire et indécelable le rendant impropre à l'usage auquel il est destiné ;

· En conséquence,

· Prononcer la résolution et subsidiairement la caducité du contrat de vente conclu le 30 janvier 2009 entre la société Vencorex France et la société Quadrimex Sels

· Dire et juger que le contrat de vente, le contrat de fourniture d'utilités et de prestations de services et le contrat de prêt à usage industriel sont indivisibles ;

· Prononcer la résolution du contrat de fourniture d'utilités et de prestations de services et du contrat de prêt à usage industriel ;

· Dire et juger que la caducité comme la résolution aura un effet rétroactif ;

· Ordonner la restitution par la société Vencorex France du prix du sel et des frais payés par la société Quadrimex Sels soit les sommes de 335 774 euros et 563 676 euros (899 450 euros) ;

· Dire et juger en toute hypothèse que les factures de la société Vencorex France qui correspondraient à la différence entre l'engagement d'achat minimum de sel et les quantités utilisées ne sont pas fondées ;

· Dire et juger que la société Vencorex France connaissait le vice affectant le sel vendu à la société Quadrimex Sels au moment de la conclusion du contrat de vente;

En conséquence,

· Confirmer l'ensemble des condamnations prononcées par le jugement dont appel, à l'exclusion des dommages et intérêts au titre du manque à gagner ;

· Sur ce point, infirmer le jugement et condamner la société Vencorex France à payer à la société Quadrimex Sels à réparer l'entier préjudice par elle subi, soit les sommes de :

· 1 557 000 euros au titre des pertes sur immobilisations,

· 1 268 000 euros au titre des pertes incluant les frais de personnels et de licenciement et les coûts de démantèlement,

· Dire et juger que la société Vencorex France en ayant connaissance du vice affectant le sel vendu à la société Quadrimex Sels engage en outre sa responsabilité contractuelle à l'égard de la société Quadrimex Chemical ;

En conséquence,

· Confirmer le jugement en ce qu'il a condamné la société Vencorex France à payer à la société Quadrimex Chemical dans la limite toutefois de la somme de 41 872 euros au titre des préjudices subis par cette dernière, hors manque à gagner.

· Condamner la société Vencorex France à payer au titre du manque à gagner aux sociétés Quadrimex Sels et Quadrimex Chemical,

· la somme de 3 183 000 euros telle qu'estimée par le cabinet Argaune sur la base d'un plan d'affaires établi par les dirigeants, et après prise en compte des immobilisations en propre.

· Subsidiairement et au minimum, la somme de 549 000 euros telle que calculée par le cabinet Deloitte sur la base des volumes visés aux contrats, pour toute la durée de celui-ci.

En conséquence,

· Débouter la société Vencorex France de l'ensemble de ses demandes, fins et prétentions ; A titre subsidiaire,

· Condamner la société Vencorex France à payer à la société Quadrimex Sels la somme de 1 598 640,90 euros (390 265,90 euros + 902 000 euros + 306 375 euros) à titre de préjudice complémentaire pour le cas où il serait faire droit à sa demande de paiement de factures correspondant à du sel qu'elle n'a pas eu à livrer ou à des prestations dont elle n'a pas justifié, ou à d'autres titres (manque à gagner et lissage des frais d'aménagement) ;

· Confirmer le jugement en ce qu'il a condamné la société Vencorex France à supporter une partie des frais irrépétibles des sociétés Quadrimex Sels et Quadrimex Chemical, les dépens qui comprennent les frais d'expertise.

Y ajoutant,

· Condamner la société Vencorex France à payer aux sociétés Quadrimex Sels et Quadrimex Chemical la somme de 100 000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile au titre des frais irrépétibles exposés en appel, ainsi qu'aux entiers dépens dont distraction au profit de Maître Antoine Diesbecq du cabinet Racine au titre de l'article 699 du Code de procédure civile.

Les sociétés Vencorex France et Chloralp soutiennent que le sel vendu n'était affecté d'aucun vice caché, et qu'en tout état de cause, à supposer même qu'un vice caché existe, les parties avaient exclu contractuellement cette garantie, qu'en outre l'action rédhibitoire n'est pas possible, le sel ne pouvant être restitué.

Elles rappellent que les discussions précontractuelles ont été très longues, que c'est en 2004-2005 que la société Quadrimex a proposé d'acquérir le sel de la société Vencorex en vue d'une utilisation dans le cadre de son activité de pastillage et ceci alors que la compatibilité du sel avec cette activité paraissait incertaine et impliquait de réaliser des analyses complémentaires, qu'à la sortie de la mine le sel est non traité, qu'il contient des traces de soude dues à l'activité de la société Vencorex et que la société Quadrimex était informée de cette différence de qualité par rapport à son autre fournisseur espagnol, ce qui avait justifié un prix très inférieur par rapport à ce dernier (58 euros moins cher).

Elles indiquent avoir mis en garde plusieurs fois la société Quadrimex sur son impossibilité de garantir l'adéquation de la composition du sel avec l'objet auquel il était destiné. Elles indiquent que la difficulté liée à la composition aléatoire du sel fourni était connue dès l'origine par la société Quadrimex qui a étudié chacun des composants étrangers présents dans le sel (métaux lourds, sulfates, soude). Concernant le sulfate, après avoir procédé à une analyse, Quadrimex n'a exigé aucune spécification minimale concernant le taux de sulfate contenu dans le sel. Concernant la présence de soude, elles affirment que la société Quadrimex avait connaissance du lien entre le pH élevé du sel et la présence de soude et qu'elle a considéré que la présence de soude n'était pas problématique au regard de l'utilisation qu'elle entendait donner au sel de telle sorte qu'elle a accepté de relever la spécification contractuelle du pH à 12.

Sur les difficultés liées au délitement des pastilles dans l'eau des adoucisseurs, elles exposent que c'est bien la présence de soude dans le sel et l'absence d'essai comportemental sérieux qui sont à l'origine des désordres. Elles indiquent que les sociétés Alpasel et Quadrimex ont reconnu ne pas avoir observé, lors des tests, le délitement des pastilles dans l'eau du fait que ces tests avaient été réalisés avec de l'eau déminéralisée alors que le délitement des pastilles était causé par la réaction de la soude de sel avec le calcaire de l'eau dure.

Elles précisent que la société Quadrimex a instrumentalisé l'hypothèse de la présence de " sel triple " non démontrée pour remettre en cause les relations contractuelles et sortir d'une situation économique devenue déficitaire, que la société Quadrimex avait été informée du fait qu'elles stopperaient la production de sel à horizon 2014-2016 en raison de l'instauration obligatoire d'un plan de prévention des risques technologiques ainsi que de l'éventualité qui en découlerait de mise en œuvre à moyen terme de la clause d'imprécision stipulée au contrat de vente, qu'il n'existait aucun vice caché.

Elles indiquent que les opérations d'expertise ont confirmé qu'il n'existait aucun vice caché, que la présence de sel triple, qui est toujours restée au stade d'hypothèse, n'a jamais été démontrée, que la cause du délitement des pastilles était la présence de soude dans le sel, que ceci ne peut constituer un vice caché dès lors que cette caractéristique était connue des parties avant la conclusion des contrats, que les sociétés Quadrimex et Alpasel, qui sont des acheteurs professionnels, avaient été mises en garde de manière répétée avant la vente et avaient une parfaite connaissance des caractéristiques du sel et qu'elles se sont montrées particulièrement négligentes dans la conduite de leurs essais sur le sel, qu'elles n'ont pas conduit leurs tests en situation d'eau dure, mais d'eau douce, qu'en outre le sel n'était pas impropre à l'usage auquel il était destiné, que la seule destination contractuelle du sel était son séchage et pastillage, que les parties ont volontairement exclu du champ contractuel toute destination spécifique.

A titre subsidiaire, les sociétés Vencorex et Chloralp soutiennent que les sociétés Alphasel et Quadrimex ne peuvent invoquer l'application de la garantie légale des vices cachés, car celle-ci a été exclue contractuellement à l'article 6 du contrat de vente qui exclut toute garantie des vices cachés et limite la responsabilité de la société Vencorex au respect des spécifications contractuelles du sel.

Sur l'action rédhibitoire, les sociétés Vencorex et Chloralp soutiennent que les premiers juges ont statué ultra petita en libérant la société Alpasel de son obligation de restituer le sel acheté, qu'il n'est pas contesté que le sel vendu ne pouvait être restitué, puisque celui-ci a été pastillé, commercialisé et revendu sous forme de pastilles, que l'action rédhibitoire leur est fermée dès lors qu'elles ne peuvent restituer la chose affectée d'un vice.

Elles sollicitent la caducité pour l'avenir des autres contrats à compter de la prise d'effet de la lettre de résiliation de la société Alpasel du 31 mai 2012.

Elles contestent la demande de dommages et intérêts des sociétés Quadrimex et Alpasel. Concernant les pertes d'exploitation, elles précisent que la perte sur immobilisations a été causée par la revente de 70% des immobilisations quasi-neuves par la société Alpasel à des entités du groupe Quadrimex pour un prix symbolique. Concernant les " autres pertes ", elles précisent que les justificatifs des montants sont absents ou suspects. Concernant le manque à gagner, elles font valoir que l'évaluation du rapport Argaune est fondée sur une durée contractuelle erronée de 10 ans alors que les contrats auraient pu être exécutés 7 ans au maximum et que les éléments de calcul sont irréalistes. Concernant le rapport Deloitte, elles font valoir que l'évaluation est erronée car également fondée sur une durée d'exécution de 10 ans. Sur la demande au titre des frais induits par le projet Alpasel, elles estiment qu'elle devra être rejetée car non justifiée.

Sur le lien de causalité entre le vice allégué et le préjudice prétendument subi, les sociétés Vencorex et Chloralp indiquent que les appelantes ne rapportent pas la preuve de la rentabilité économique de l'activité en l'absence de prétendu vice affectant le sel et sollicitent des dommages et intérêts couvrant l'intégralité des charges et des pertes de l'activité alors que la société Alpasel a poursuivi la production de pastilles jusqu'en 2012 et sa commercialisation jusqu'en 2015.

En tout état de cause, elles précisent qu'une clause limitative de responsabilité est opposable par le vendeur professionnel à l'acquéreur de même spécialité disposant des compétences techniques nécessaires pour déceler les vices affectant la chose vendue et, qu'en conséquence, la clause limitative de responsabilité du contrat de vente est opposable aux sociétés Quadrimex et Alpasel.

A titre reconventionnel, les sociétés Vencorex et Chloralp demandent en exécution des contrats le paiement des factures impayées d'un montant de 390 265,90 euros et des sommes correspondant au manque à gagner du fait de la résiliation anticipée des contrats, soit 902 000 euros au titre de la marge brute moyenne annuelle de la société Vencorex sur la vente de sel et 306 375 euros au titre du lissage des frais d'aménagement du site du Pont-de-Claix sur dix ans.

En réplique, les sociétés Quadrimex Sels et Quadrimex Chemical soutiennent que la société Vencorex France est à l'initiative du projet et, qu'en intégrant dans le champ contractuel des spécifications techniques visant à définir les caractéristiques chimiques du sel vendu, elle a tenté de se décharger de toute garantie. Elles indiquent que le prix de vente du sel est conforme aux valeurs du marché pour les volumes considérés et précisent avoir dû procéder à diverses mises au point de l'installation à leurs frais pour parvenir à un débit d'extraction suffisamment important.

Elles opposent la mauvaise foi de la société Vencorex France qui n'a pas informé son cocontractant du changement programmé du système d'électrolyse (abandon de l'électrolyse à diaphragme pour un procédé à membrane qui ne génère plus aucun sel résiduel) qui entrainait inéluctablement la fin prématurée des relations entre les parties et précisent que la clause visée par la société Vencorex France intitulée " qualité " n'a pas pour objet de libérer la société Vencorex France de son obligation légale de garantir les défauts cachés de la chose vendue dès lors que cette clause ne fait que définir l'étendue de l'obligation délivrance de la société Vencorex France au regard de spécifications techniques précisées dans une annexe.

Elles soutiennent que le défaut caché du sel vendu le rend impropre à l'usage auquel il est destiné, que l'expert judiciaire a conclu que " la qualité variable de la matière première et la tenue aléatoire des pastilles avec le procédé actuel, rendent les pastilles impropres à leur destination comme adoucisseur d'eau " de telle manière que le défaut de qualité intrinsèque du sel vendu, tenant à l'instabilité de sa composition, interdit à la société Quadrimex Sels de le vendre à ses clients sous forme de pastilles pour adoucisseurs d'eau, que c'est en raison de la qualité non constante et intrinsèque du sel vendu que les pastilles de sel sont elles-mêmes de qualité variable dans leur comportement, indépendamment du processus industriel de fabrication des pastilles, que le caractère rédhibitoire du vice du sel est indépendant de sa commercialisation dès lors que le vice ne se révèle que lors de l'utilisation de celui-ci par le client final.

Les sociétés Quadrimex Sels et Quadrimex Chemical précisent que l'usage auquel était destiné le sel, à savoir la transformation en pastilles commercialisées pour l'adoucissement de l'eau, était connu de la société Vencorex France qui ne peut soutenir que l'usage normal du sel fatal était d'être jeté alors qu'elle le commercialisait notamment auprès d'une société tierce, que l'usage du sel peut être spécial dès lors que cet usage a été convenu entre les parties lors de la vente.

Elles font valoir que le vice rédhibitoire affectant le sel vendu était indécelable pour la société Quadrimex Sels qui a procédé à toutes les vérifications nécessaires et s'est comportée en acheteur sérieux et diligent en réalisant des tests de pastillage probants, ainsi qu'une étude comportementale des pastilles en les plaçant dans un bécher et soutiennent qu'il ne peut leur être reproché aucune négligence, qu'elles ont mis en œuvre toutes les compétences disponibles et relevant de leur spécialité. Elles précisent que lors d'une réunion en date du 30 janvier 2012, la société Vencorex France a confirmé l'existence de sel triple dans le sel vendu, ce qu'elles ne pouvaient soupçonner. Elles font valoir que l'expert a constaté l'existence d'un aléa constitué par l'absence de stabilité et de prédictibilité de la qualité du sel vendu par la société Vencorex France et indiquent que cet aléa non maîtrisable constitue un vice rédhibitoire et indécelable par un acheteur même très diligent.

Sur l'action rédhibitoire, les sociétés Quadrimex Sels et Quadrimex Chemical font valoir que le sel ne peut être restitué en nature à la société Vencorex France que le sel étant totalement impropre à l'usage auquel il était destiné, l'action estimatoire ne peut se substituer à l'action rédhibitoire et que si le vice avait été connu de l'acheteur, il n'aurait pas créé une installation industrielle sur le site de Pont-de-Claix.

Sur la résolution des autres contrats, elles font valoir que la résolution d'un contrat emporte celle des autres lorsque ces contrats poursuivent un unique objectif, qu'en l'espèce, le contrat de vente, le contrat de fourniture d'utilités et de prestations de services et le contrat de prêt à usage industriel ont été indivisiblement conclus dans un objectif unique, qu'en conséquence, toutes les conventions dont le contrat de vente est le pivot doivent être résolues rétroactivement.

Concernant les restitutions, le vendeur est tenu de restituer le prix et de rembourser à l'acquéreur les frais occasionnés par la vente, tandis que ce dernier doit restituer la chose affectée du vice. Les sociétés Quadrimex Sels et Quadrimex Chemical sollicitent la restitution du prix du sel payé par la société Quadrimex Sels (335 774 euros), le remboursement des frais occasionnés par la vente comprenant les frais afférents au contrat de fournitures d'utilités et de prestations de services indivisible du contrat de vente (563 676 euros).

Elles soutiennent que le contrat de vente porte sur une chose fongible, du sel, et précisent que la société Quadrimex Sels avait offert de restituer la quantité de sel qui lui avait été vendue.

Concernant les dommages et intérêts, elles font valoir qu'une présomption irréfragable de connaissance du vice affectant le sel pèse sur la société Vencorex France vendeur professionnel renommé dans le domaine de la chimie, et, qu'en conséquence, elle est tenue d'indemniser l'ensemble du préjudice subi par elle. En tout état de cause, elles soutiennent que la société Vencorex France avait connaissance, au moment de la conclusion du contrat, du vice affectant le sel objet du contrat.

Concernant le préjudice au titre des pertes subies, elles l'estiment à 2 825 975 euros (1 557 000 euros au titre des pertes sur immobilisations et 1 268 000 euros au titre des autres pertes), que la société Quadrimex Chemicals a engagé des frais liés à l'étude du projet (44 887 euros) ainsi que des frais de stockage du sel (115 466 euros), que leur manque à gagner est de 3 183 000 euros (estimation du cabinet Argaune) sur la base d'un plan d'affaires établi par les dirigeants et après prise en compte des immobilisations en propre, ou, subsidiairement, la somme de 549 000 euros (cabinet Deloitte) sur la base des volumes visés aux contrats, pour toute la durée de celui-ci.

Sur les demandes reconventionnelles de la société Vencorex France elles soutiennent que les demandes de la société Vencorex France au titre des factures ne sont pas justifiées, que les conventions ont été résiliées aux torts de la société Vencorex France de façon parfaitement régulière par courrier du 25 mai 2012 sur le fondement de l'article 8-2 du contrat de vente, que la demande de la société Vencorex France en réparation du préjudice complémentaire n'est pas justifiée ni étayée par une quelconque pièce ayant valeur probante.

La cour renvoie, pour un plus ample exposé des faits et des prétentions et moyens des parties, à la décision déférée et aux écritures susvisées, en application des dispositions de l'article 455 du Code de procédure civile.

Sur ce, LA COUR,

Considérant qu'aux termes de l'article 1641 du Code civil " le vendeur est tenu de la garantie à raison des défauts cachés de la chose vendue qui la rendent impropre à l'usage auquel on la destine, ou qui diminuent tellement cet usage que l'acheteur ne l'aurait pas acquise, ou n'en aurait donné qu'un moindre prix, s'il les avait connus " ;

Qu'aux termes de l'article 1642 du même code, " le vendeur n'est pas tenu des vices apparents et dont l'acheteur a pu se convaincre lui-même " ;

Qu'aux termes de l'article 1645 du même code, " si le vendeur connaissait les vices de la chose, il est tenu, outre la restitution du prix qu'il en a reçu, de tous les dommages et intérêts envers l'acheteur " ;

Que la charge de la preuve d'un vice caché pèse sur l'acheteur qui s'en prévaut ;

Considérant qu'en l'espèce, il n'est pas contesté que les pastilles de sel produites par Quadrimex Sels avec le sel vendu par Vencorex s'effritaient et se délitaient dans l'eau des adoucisseurs alors qu'elles auraient dû se dissoudre lentement ;

Que l'expert désigné par le tribunal, Monsieur X, interrogé sur la possibilité de fabriquer des pastilles de sel pour l'adoucissement de l'eau, a conclu que le comportement des pastilles était totalement imprévisible, relevant que " la qualité du sel Perstorb utilisé était différente au cours du temps, [qu']il s'agit d'un sous-produit issu d'une production industrielle dont le système cristallin est variable avec des taux d'impuretés solubles très différents " ;

Qu'il en a conclu que " l'obtention de pastilles de qualité constante pour leur utilisation comme adoucisseur d'eau était particulièrement difficile et surtout imprévisible sur cette matière première " ;

Qu'indépendamment de la contestation par Vencorex, de ce que la destination du sel était uniquement pour l'adoucissement de l'eau, le défaut des pastilles qui se délitent dans l'eau au lieu de se dissoudre n'est pas contesté par les parties, ce défaut résultant, selon l'expert, de la qualité du sel utilisé provenant de Vencorex, et non de l'empastillage fait par Quadrimex ;

Mais considérant que pour être constitutif d'un vice au sens de l'article 1641 susrappelé, nonobstant la destination unique ou non prévue par les parties, encore faut-il que le vice allégué ne se soit révélé qu'après la vente et qu'il n'ait pu être connu ou présumé connu de l'acquéreur professionnel avant ladite vente ;

Que s'agissant de la société Quadrimex Sels spécialiste de la fabrication de pastilles de sel pour adoucisseurs et traitement de l'eau des piscines, il lui appartenait de faire toutes diligences habituelles pour un professionnel de ce secteur pour s'assurer que le sel utilisé pour la fabrication des pastilles correspondait bien à l'usage auquel il était destiné ;

Qu'en l'espèce, il résulte des éléments versés aux débats que de nombreux essais ont été faits par Quadrimex avec le sel et avec les pastilles et ce, à plusieurs reprises et à plusieurs mois d'intervalle, par des laboratoires missionnés par elle ;

Qu'il résulte notamment du courrier adressé par Quadrimex le 21 janvier 2011 à Perstorp (devenu Vencorex) que les questions de qualité dudit sel ont été évoquées à de nombreuses reprises entre les parties, justifiant au demeurant que les négociations aient à un moment achoppé, compte tenu de la qualité aléatoire du sel qui était connue dès le début, et du refus de Vencorex de s'engager sur une norme dont elle ne pouvait garantir la constance;

Qu'alors que l'usage prévu - quoique contesté par Vencorex - était de fabriquer des pastilles de sel destinées aux adoucisseurs d'eau, l'expert s'est étonné qu'aucune étude comportementale dudit sel n'ait été réalisée en milieu aqueux ;

Que la société Quadrimex a répondu à l'expert que des études comportementales avaient été réalisées, en omettant de préciser, alors qu'elle l'avait elle-même reconnu dans son courrier à Perstorp du 21 janvier 2011, que celles-ci avaient été effectuées dans de l'eau déminéralisée, c'est à dire de l'eau " douce ", circonstance qui rendait cette analyse inopérante compte tenu de l'usage final du sel, à savoir l'adoucissement d'eau calcaire ;

Qu'elle reconnaît elle-même que c'est parce qu'elle a effectué les essais préliminaires en laboratoire avec de l'eau déminéralisée que la précipitation des carbonates de calcium et de magnésium naturellement présents dans l'eau non adoucie n'a pas pu être observée ;

Qu'elle confirme qu'elle n'a effectué qu'une seule étude comportementale des pastilles, et uniquement dans un bécher avec de l'eau déminéralisée ;

Que si elle avait réalisé au moins une analyse comportementale du sel fatal en milieu aqueux normal, compte tenu de l'environnement auquel il était destiné, à savoir l'eau calcaire, la société Quadrimex aurait, selon les conclusions de l'expert, nécessairement pu constater le défaut, compte tenu du caractère imprévisible de la matière première (le sel) et de l'aléa pesant sur la qualité constante des pastilles qui était connue;

qu'ainsi, seul le test en eau calcaire, et donc non déminéralisée, apparaissait pertinent ;

Considérant que la société Quadrimex Chemical et sa filiale Quadrimex Sels (Alpasel), spécialisée dans la fabrication du sel en pastilles destiné au traitement adoucissant de l'eau, était tenue d'une obligation de se renseigner sur la conformité du sel à l'usage duquel elle l'avait destiné, à savoir le traitement adoucissant de l'eau calcaire et non de l'eau déminéralisée ;

Qu'elle n'a pas réalisé les analyses et tests adéquats qui lui auraient nécessairement permis de connaître le défaut rendant le sel impropre à l'usage auquel il était destiné ;

Qu'il s'agit d'une erreur non admissible pour un professionnel de son importance; Que cette erreur ne peut être imputée qu'à Quadrimex ;

Qu'en effet, il résulte des pièces versées aux débats que la société Quadrimex a été mise en garde à de nombreuses reprises par la société Perstorp devenue Vencorex, de l'instabilité dudit sel et que, malgré ces mises en garde préalables, elle a décidé de continuer le projet compte tenu de l'attractivité économique de celui-ci, le sel vendu par Vencorex étant beaucoup moins cher que le sel espagnol ;

Qu'elle ne saurait enfin se prévaloir de la qualité de vendeur professionnel de la société Perstop devenue Vencorex, cette dernière étant spécialisée dans la fabrication de produits chimiques à destination du secteur des peintures et des revêtements industriels et non de sel, la saumure qui lui était fournie par Chloralp n'étant utilisée que pour l'électrolyse afin de fabriquer de la soude caustique, le reste de la saumure étant rejeté ;

Que Vencorex revendait le sel ou le stockait à titre accessoire, et ne disposait pas d'une expérience dans l'utilisation du sel résiduel en tant qu'adoucisseur d'eau ;

Considérant enfin qu'il n'est pas établi que le sel était affecté d'un autre défaut qui n'aurait pu être décelé avant la vente ;

Que le débat sur la présence ou non de sel triple est dénué de tout élément probant et que cette hypothèse n'a pas été retenue par l'expert ;

Qu'il y a lieu par conséquent d'infirmer le jugement en ce qu'il a dit que le sel vendu par la société Vencorex France était affecté d'un vice caché, indécelable, le rendant impropre à l'usage auquel il était destiné et engagé la responsabilité de la société Vencorex France sur le fondement de l'article 1645 du Code civil et toutes ses conséquences ;

Qu'il y a lieu de débouter les sociétés Quadrimex Sels et Quadrimex Chemical de toutes leurs demandes tant en résolution de la vente qu'en restitution du prix et en indemnisation au titre de la garantie des vices cachés et au titre de la qualité de vendeur professionnel de Vencorex ;

Sur les demandes reconventionnelles formées par la société Vencorex

Considérant que selon l'article 1134 (ancien) du Code civil, les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites et doivent être exécutées de bonne foi ;

Qu'aux termes de l'article 1315 du Code civil celui qui réclame l'exécution d'une obligation doit la prouver ;

Qu'aux termes de l'article 1147 (ancien) du même code, le débiteur est condamné, s'il y a lieu, au paiement de dommages et intérêts, soit à raison de l'inexécution de l'obligation, soit à raison du retard dans l'exécution, toutes les fois qu'il ne justifie pas que l'inexécution provient d'une cause étrangère qui ne peut lui être imputée, encore qu'il n'y ait aucune mauvaise foi de sa part;

Considérant qu'en exécution des contrats conclus le 30 janvier 2009, la société Alpasel (Quadrimex) s'était engagée à acheter à Perstorp (Vencorex) une quantité de sel d'au moins 800 tonnes par mois et d'au moins 12 000 tonnes par an, au prix de 28 euros la tonne de sel sec, et ce pour une durée de dix ans ;

Que la société Quadrimex a mis fin à ces contrats par lettre RAR du 25 mai 2012, à échéance à fin mai 2012 et qu'elle n'a plus commandé de sel à compter de cette date ;

Que la société Vencorex ne conteste pas ne plus avoir fourni de sel, mais réclame toutefois le paiement de factures à hauteur de 390 265,90 euros correspondant aux engagements d'achat de Quadrimex, sans toutefois justifier ni de la réalité, ni de la quantité de sel facturé ;

Qu'il résulte des échanges de mail et des contestations par Quadrimex des factures produites que ces dernières ne correspondent pas à des livraisons effectives, mais à une " indemnité correspondant au delta entre l'engagement d'Alpasel d'achat minimum et les quantités utilisées " ;

Qu'en conséquence la demande en paiement de Vencorex ne saurait prospérer, cette demande consistant en réalité en une indemnisation pour inexécution des engagements contractuels ;

Qu'il y a lieu, par motifs propres, de confirmer la décision des premiers juges qui ont débouté la société Vencorex de sa demande en paiement desdites factures ;

Considérant que la société Vencorex sollicite également le versement d'une indemnisation de 902 000 euros correspondant selon elle à quatre ans et sept mois de perte de marge brute suite à la rupture abusive des relations entre les parties ;

Mais considérant qu'eu égard à cette demande, dont le fondement juridique n'est pas précisé, et à supposer que la société Quadrimex n'ait pas respecté un préavis suffisant alors même que la convention limite la durée du préavis à douze mois, il appartient à la société Vencorex de justifier des montants sollicités au regard de sa marge brute, ce qu'elle ne fait pas et de justifier la durée du préavis demandé ;

Qu'en outre, la société Vencorex ne conteste pas qu'elle avait informé la société Quadrimex qu'elle allait être amenée à cesser son activité d'électrolyse à diaphragme au profit d'un procédé d'électrolyse à membrane ne générant plus de rebut de sel et qu'en conséquence, la convention des parties deviendrait caduque en raison de cet arrêt qui lui était imposé par un arrêté préfectoral relatif au plan de prévention des risques technologiques de Pont de Claix ;

Qu'en conséquence, la demande d'indemnité de la société Vencorex devra être rejetée ;

Que par motifs propres, la décision des premiers juges sera dès lors confirmée sur ce point ;

Considérant que la société Vencorex sollicite en outre une indemnisation pour la perte des frais de remise en état des locaux et pour le " lissage des frais d'aménagement " à laquelle la société Quadrimex s'était engagée ;

Mais considérant qu'à l'exception d'un engagement par mail non chiffré, la société Vencorex ne justifie pas du principe et du montant de sa créance à ce titre ;

Que la décision des premiers juges sera dès lors confirmée ;

Considérant enfin qu'il y a lieu d'infirmer la décision des premiers juges sur l'indemnisation allouée au titre de l'article 700 du Code de procédure civile aux sociétés Quadrimex Sels et Quadrimex Chemicals et de condamner ces dernières qui succombent en appel à payer à la société Vencorex et à la société Chloralp la somme globale de 20 000 euros à ce titre ;

Que les dépens seront mis à la charge des sociétés Quadrimex Sels et Quadrimex Chemicals ;

Par ces motifs, LA COUR, Statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort, Infirme le jugement en toutes ses dispositions, Statut à nouveau : Déboute les sociétés Quadrimex Sels et Quadrimex Chemicals de l'ensemble de leurs demandes, Déboute la société Vencorex de ses demandes reconventionnelles, Condamne solidairement les sociétés Quadrimex Sels et Quadrimex Chemicals à verser à la société Vencorex et à la société Chloralp la somme globale de 20 000 euros au titre des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile, Condamne solidairement les sociétés Quadrimex Sels et Quadrimex Chemicals aux entiers dépens qui seront recouvrés selon les dispositions de l'article 699 du Code de procédure civile.