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Décisions

Cass. com., 11 mai 2017, n° 15-15.558

COUR DE CASSATION

Arrêt

Rejet

PARTIES

Demandeur :

SNIA (Sté), Financière Guez & fils (Sté)

Défendeur :

FCA France (Sté)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Mouillard

Avocats :

SCP Bénabent, Jéhannin, SCP Fabiani, Luc-Thaler, Pinatel

T. com. Paris, 19e ch., du 24 oct. 2012

24 octobre 2012

LA COUR : - Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 4 février 2015), que la Société normande d'importation automobile (la société SNIA), filiale de la société Financière Guez & fils (la société Guez), a conclu avec la société Fiat France, devenue FCA France (la société FCA), sept contrats de distribution de véhicules neufs ; que la société FCA ayant, par lettre du 27 février 2006, résilié les contrats avec un préavis de deux ans, les sociétés SNIA et Guez, invoquant le caractère abusif de la rupture, l'ont assignée en réparation de leur préjudice ;

Sur le premier moyen : - Attendu que les sociétés SNIA et Guez font grief à l'arrêt de rejeter leurs demandes alors, selon le moyen : 1°) que la contradiction de motifs équivaut à une absence de motifs ; qu'en retenant, pour estimer que l'accord du 29 juin 2004 ne faisait pas obstacle à la mise en œuvre, par la société Fiat France, de sa faculté de résilier les sept contrats de distributeur avant la fin de l'année 2006, que l'exécution de cet accord s'étalait seulement sur deux ans, de " 2003 à 2005 ", tout en relevant que l'objectif d'un tel accord était de permettre au distributeur de " retrouver en 2006 un résultat d'exploitation équilibré sur la base d'un volume d'activité véhicules neufs de 800 véhicules en 2006 ", la cour d'appel, qui s'est fondée sur des motifs contradictoires, n'a pas donné de motifs à sa décision et a violé l'article 455 du Code de procédure civile ; 2°) qu'en retenant, pour estimer que l'accord du 29 juin 2004 ne faisait pas obstacle à la mise en œuvre, par la société Fiat France, de sa faculté de résilier les sept contrats de distributeur avant la fin de l'année 2006, que l'exécution de cet accord s'étalait seulement sur deux ans, de " 2003 à 2005 ", après avoir pourtant relevé que l'objectif de cet accord était de permettre au distributeur de " retrouver en 2006 un résultat d'exploitation équilibré sur la base d'un volume d'activité véhicules neufs de 800 véhicules en 2006 ", ce dont il résultait que la période couverte par le plan de restructuration du distributeur formalisé par cet accord incluait nécessairement l'exercice de l'année 2006, la cour d'appel n'a pas tiré de ses propres constatations les conséquences qui s'en évinçaient et a violé l'article 1134 du Code civil ; 3°) qu'en retenant, pour estimer que l'accord du 29 juin 2004 ne faisait pas obstacle à la mise en œuvre, par la société Fiat France, de sa faculté de résilier les sept contrats de distributeur avant la fin de l'année 2006, qu'aucune disposition de cet accord ne pouvait faire naître, chez le concessionnaire, l'espoir de la pérennité des relations commerciales, après avoir pourtant relevé que les aides accordées au distributeur avaient été consenties, par la société Fiat France, " en contrepartie de l'exécution d'un plan de continuité ", ce dont il résultait que la SNIA pouvait légitimement s'attendre à la poursuite des relations contractuelles jusqu'au terme de ce plan, la cour d'appel n'a derechef pas tiré de ses propres constatations les conséquences qui s'en évinçaient et a violé l'article 1134 du Code civil ;

Mais attendu que l'arrêt relève qu'aucune clause de l'accord du 29 juin 2004 ne montre que les parties souhaitaient modifier les conditions d'exécution et de résiliation des contrats de distribution ; qu'il relève encore que cet accord, qui prévoyait l'octroi d'aides exceptionnelles au titre des années 2003, 2004 et 2005 par la société FCA en contrepartie de l'exécution par le distributeur d'un plan de continuité, passant par une recapitalisation, dans l'objectif de retrouver en 2006 un équilibre, a été exécuté par chacune des parties ; qu'il retient que, les aides ayant été versées, la clause de cet accord, aux termes de laquelle, en cas d'impossibilité pour la société SNIA de suivre le plan de retour à l'équilibre, leur versement serait suspendu et les dispositions prévues aux contrats de distribution seraient applicables, n'a pas lieu de s'appliquer ; que de ces constatations et appréciations, faisant ressortir l'indépendance des contrats l'un par rapport à l'autre, la cour d'appel, sans se prononcer par des motifs contradictoires ni méconnaître les conséquences légales de ses constatations, a pu déduire que l'accord ne faisait pas obstacle à la faculté de la société Fiat de résilier les contrats de distribution ; que le moyen n'est pas fondé ;

Et sur le second moyen : - Attendu que les sociétés SNIA et Guez font le même grief à l'arrêt alors, selon le moyen, que la résiliation d'un contrat de concession est abusive lorsqu'elle intervient après d'importants investissements réalisés par le concessionnaire, avec l'accord et l'implication du concédant, dans la perspective d'assurer la poursuite de leurs relations ; qu'en retenant, pour estimer que la société Fiat France n'avait pas commis d'abus dans la résiliation des sept contrats de distribution, que la SNIA ne rapportait " aucunement la preuve d'avoir engagé des dépenses à la demande de la société Fiat ", sans rechercher si de tels investissements, quand bien même ils n'avaient pas été réalisés sous la contrainte du concédant, n'avaient pas été engagés, avec l'accord de ce dernier, dans la perspective de permettre le maintien du contrat, et si la part active prise par la société Fiat France dans leur réalisation n'avait pas fait naître, chez la SNIA, la croyance légitime que les contrats de concession seraient maintenus, la cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision au regard des articles 1134, alinéa 3 et 1147 du Code civil ;

Mais attendu qu'ayant relevé, dans l'exercice de son pouvoir souverain d'appréciation des éléments de preuve versés au débat, qu'il n'était pas démontré que la société SNIA avait engagé des dépenses à la demande de la société FCA ni que cette dernière avait pu créer chez elle une confiance légitime dans le maintien des relations commerciales, la cour d'appel, sans être tenue de suivre les parties dans le détail de leur argumentation, a écarté le caractère déloyal de la résiliation et a ainsi légalement justifié sa décision ; que le moyen n'est pas fondé ;

Par ces motifs : rejette le pourvoi.