CA Paris, Pôle 5 ch. 5, 21 septembre 2017, n° 15-23270
PARIS
Arrêt
PARTIES
Demandeur :
Veloscoot (SAS), Blanc (ès qual.)
Défendeur :
Manufacture Française du Cycle (SASU)
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
Mme Schaller
Conseillers :
Mmes du Besset, Castermans
Avocats :
Mes Herman, Cuif, Grappotte-Benetreau, Grall
Faits et procédure :
La société Véloscoot, société française créée en 2006, a une activité de conception et de commercialisation de vélos à assistance électrique (" VAE "). Elle a un réseau de distributeurs spécialisés en France et en Europe. Elle a commencé en 2011 à faire assembler en France les composants électriques qu'elle importait de Chine.
La société Manufacture Française du Cycle (ci-après " MFC ") a pour activité principale l'assemblage de cycles. Elle est présidée par la société Intersport France depuis 2013.
En 2011, la société Véloscoot a sous-traité l'assemblage de ses VAE à la société Planet Fun en vertu d'un contrat de sous-traitance. La société Planet Fun ayant connu des difficultés en avril 2013, la société Véloscoot s'est rapprochée de la société MFC avec laquelle elle a conclu un contrat d'assemblage en sous-traitance le 16 mai 2013.
Le contrat prévoyait un ordonnancement des commandes effectué à partir d'un prévisionnel sur six mois fourni par la société Véloscoot et déterminait également les modalités de paiement. En exécution de ce contrat, la société MFC achetait les pièces constitutives des VAE auprès de fournisseurs tiers, formait les VAE et les expédiait directement aux clients de la société Véloscoot. Il était prévu un règlement par la société Véloscoot dans les 45 jours fin de mois suivant la date d'émission des factures, celles-ci étant émises au moment de la livraison.
Le contrat prévoyait également une caution bancaire de garantie de paiement à hauteur de 100 000 euros accordée par la banque LCL au bénéfice de la société MFC.
Les livraisons de VAE par MFC aux clients de la société Véloscoot ont commencé effectivement à partir du 23 décembre 2013.
Au cours de l'année 2014, la production des VAE a pris du retard dans l'assemblage et a rencontré des difficultés d'ordre technique tenant à la programmation des VAE mais également d'ordre financière, la société MFC considérant que la société Véloscoot avait des retards dans ses paiements et la société Véloscoot rappelant à MFC qu'il lui appartenait de commander et payer les pièces détachées en temps utile et de respecter le planning des commandes. Des échanges de mails se sont échelonnés de mars à juillet 2014.
Par courrier recommandé du 5 septembre 2014, la société MFC a mis en demeure la société Véloscoot de payer les sommes échues à cette date, soit 155 060,43 euros. Le même jour, elle a dénoncé le contrat de sous-traitance avec un préavis jusqu'au 16 mai 2015.
Par courrier du 22 mai 2015, la société MFC a notifié à la société Véloscoot sa volonté de faire application des dispositions contractuelles prévues pour la cessation du contrat.
Par acte du 12 septembre 2014, la société Véloscoot a assigné en référé la société MFC et la société Intersport France devant le Tribunal de commerce de Poitiers qui, par ordonnance du 13 octobre 2014, s'est déclaré incompétent au profit de la juridiction parisienne.
Le 18 novembre 2014, la société Véloscoot a fait l'objet d'un jugement d'ouverture d'une procédure de redressement judiciaire. La société MFC a déclaré sa créance au passif de la société Véloscoot le 2 décembre 2015.
Par ordonnance du 25 février 2015, le Tribunal de commerce de Paris statuant en référé a débouté la société Véloscoot de l'ensemble de ses demandes.
C'est dans ces conditions que, par acte du 11 mai 2015, la société Véloscoot et la Selarl Frédéric Blanc en sa qualité de mandataire judiciaire au redressement judiciaire de la société Véloscoot, ont assigné à très bref délai la société MFC devant le Tribunal de commerce de Paris pour mauvaise exécution du contrat de sous-traitance et sollicité une indemnisation pour différents postes de préjudice.
Par jugement du 5 octobre 2015, assorti de l'exécution provisoire, le Tribunal de commerce de Paris a :
- pris acte de l'intervention volontaire de M. Sébastien, Michel, Pierre Beugin, M. Jean-Yves Beugin pris tant en leur nom personnel qu'en leur qualité d'héritier de feue Mme Beugin, la SAS Maverick consulting and management ;
- dit les demandes envers la SA Intersport France irrecevables et mis la société Intersport France hors de cause ;
- débouté les demandeurs de leur demande au titre de l'article L. 420-2 du Code de commerce ;
- débouté les demandeurs de leur demande au titre de l'article L. 420-6 du Code de commerce ;
- débouté les demandeurs de leur demande au titre de l'article 1382 du Code civil ;
- autorisé la SAS à associé unique Manufacture Française du Cycle à vendre le stock qu'elle détient, 217 VAE assemblés et 901 panoplies, et à faire intervenir des sociétés tiers sur le logiciel ;
- dit que la SAS à associé unique Manufacture Française du Cycle assurera le service après-vente de ce stock ;
- dit que la SAS à associé unique Manufacture Française du Cycle n'est pas redevable du service après-vente des VAE vendus par la SAS Véloscoot ;
- condamné in solidum les demandeurs à payer à la SAS à associé unique Manufacture Française du Cycle et la société Intersport France la somme de 1000 euros chacune au titre de la procédure abusive ;
- condamné in solidum les demandeurs à payer à la SAS à associé unique Manufacture Française du Cycle et la société Intersport France la somme de 6 000 euros chacune au titre de l'article 700 du Code de procédure civile ;
- débouté les parties de leurs demandes autres, plus amples ou contraires.
Par jugement du Tribunal de commerce de Poitiers rendu le 10 novembre 2015, la société Véloscoot a été placée en liquidation judiciaire. Maître Frédéric Blanc a été désigné mandataire liquidateur.
Vu l'appel interjeté le 19 novembre 2015 par la Selarl Frédéric Blanc, représentée par Maître Frédéric Blanc, mandataire judiciaire, es-qualité de liquidateur de la société Véloscoot,
Vu les dernières conclusions signifiées le 10 juin 2016 par lesquelles la société Véloscoot demande à la cour de :
recevoir la société Véloscoot SAS prise en la personne de son liquidateur, Maître Frédéric Blanc, bien fondée en son appel ;
réformer partiellement la décision entreprise ;
juger que la société Manufacture Française du Cycle a commis une faute consistant en la rupture brutale de ses relations commerciales avec la société Véloscoot sur le fondement des articles L. 420-1 et L. 442-6 du Code de commerce ;
Avant-dire-droit, ordonner une expertise financière de la société Véloscoot et désigner tel expert qu'il plaira au tribunal avec pour mission, outre celle habituellement ordonnée en pareilles circonstances, de calculer les préjudices subis par la société Véloscoot et ses actionnaires, et plus largement de l'ensemble du préjudice subi du fait des agissements de la société MFC ;
dire que l'expert rendra un pré-rapport sur lequel les parties pourront formuler leurs observations dans un délai suffisant ;
dire que tous les frais d'expertise seront intégralement avancés par la société Manufacture Française du Cycle ;
condamner la société Manufacture Française du Cycle à payer à la société Véloscoot prise en la personne de son liquidateur Maître Frédéric Blanc, la somme de 3 616 113,60 euros à titre de dommages-intérêts en réparation de son préjudice ;
Subsidiairement, dans l'hypothèse où la cour estimerait que les fautes commises par la société Manufacture Française du Cycle ne relèveraient pas des articles L. 420-1 et L. 442-6 du Code de commerce, statuer sur la responsabilité de la société Manufacture Française du Cycle sur le fondement de l'article 1382 du Code civil et condamner en conséquence celle-ci à payer à la société Véloscoot SAS prise en la personne de son liquidateur, Maître Frédéric Blanc, la somme de 3 616 113,60 euros à titre de dommages-intérêts en réparation de son préjudice.
confirmer la décision entreprise uniquement en ce qu'elle a :
- débouté la société Manufacture Française du Cycle de son appel incident, ainsi que de l'ensemble de ses autres demandes, fins et prétentions.
- condamner la société Manufacture Française du Cycle à payer à la société Véloscoot la somme de 20 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du CPC, ainsi qu'aux entiers dépens de première instance et d'appel et accorder à Maître Harold Herman le droit de recouvrer directement contre elle ceux des dépens dont il aurait fait l'avance sans avoir reçu provision conformément aux dispositions de l'article 699 du CPC.
- Subsidiairement, dans l'hypothèse où la cour déciderait de ne pas entrer en voie de condamnation contre la société Manufacture Française du Cycle, débouter la société de toute demande fondée sur l'abus de procédure et à l'indemnité sur le fondement de l'article 700 du CPC.
Vu les dernières conclusions signifiées le 5 août 2016 par la société Manufacture Française du Cycle par lesquelles il est demandé à la cour de :
recevoir la société MFC en ses écritures, l'y déclarer bien fondée ;
confirmer le jugement du Tribunal de commerce de Paris du 5 octobre 2015 en toutes ses dispositions, et en particulier en ce qu'il a :
- dit que la société MFC n'avait pas commis de faute au sens de L. 420-2 du Code de commerce et débouté la société Véloscoot de ses demandes,
- dit que la société Véloscoot a commis une faute grave dans l'exécution de ses obligations, notamment de paiement, ce qui a permis à la société MFC de légitimement résilier la relation contractuelle, et en conséquence, débouté la société Véloscoot de ses demandes sur le fondement de l'article L. 442-6 du Code de commerce,
- débouté la société Véloscoot de ses demandes sur le fondement de l'article 1382 du Code civil,
- débouté la société Véloscoot de l'ensemble de ses demandes,
- accueilli les demandes reconventionnelles de la société MFC visant notamment à être autorisée à vendre le stock de vélos qu'elle détient et à faire intervenir des sociétés tierces sur le logiciel,
et y ajoutant :
dire et juger que la société Véloscoot, par ses fautes et négligences, s'est rendue seule responsable de sa situation et du préjudice qu'elle allègue avoir subi ;
dire et juger que la société MFC n'a commis aucune faute de nature à engager sa responsabilité ;
constater le caractère abusif de l'appel interjeté et en conséquence ;
condamner la Selarl Blanc au paiement de la somme de 50 000 euros à la société MFC à titre de dommages et intérêts,
Et en tout état de cause,
condamner la Selarl Blanc à payer à la société MFC la somme de 20 000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile ;
la condamner aux entiers dépens de la présente instance, dont distraction au profit de la SCP Grappotte - Benetreau en application de l'article 699 du Code de procédure civile.
La société Véloscoot fait valoir que les premiers juges ont estimé à tort qu'il n'y avait aucune preuve de l'immixtion de la société Intersport France dans le processus de rupture des relations commerciales. Néanmoins, cette société n'étant pas intimée en appel, elle ne formule plus aucune demande contre elle. Elle rappelle que constitue une rupture partielle des relations commerciales la modification des clauses essentielles du contrat telle que la modification des tarifs et des conditions de règlement et, qu'en l'espèce, la société MFC a unilatéralement modifié les conditions du contrat en exigeant un paiement comptant, alors qu'en cas de non règlement d'une facture, le contrat prévoyait la possibilité pour la société MFC de se substituer dans le paiement à la société Véloscoot.
En outre, elle fait valoir qu'elle était en situation de dépendance économique à l'égard de la société MFC et soutient qu'après la cessation des relations avec son précédent sous-traitant, la société Planet Fun, il lui était impossible de se tourner vers un autre sous-traitant que la société MFC pour poursuivre son activité.
Elle précise que la société MFC devait commander, fabriquer et livrer 300 unités de vélos électriques par mois ou 2000 unités par an, selon un prévisionnel de 6 mois convenu entre les parties, et que cette quantité engendrait un en-cours de production qui devait permettre de livrer les vélos produits et d'en obtenir le paiement, tout en générant de la trésorerie permettant à Véloscoot de payer ses fournisseurs et de payer MFC suivant le délai contractuel de 45 jours fin de mois suivant la date d'émission de la facture par LFC, qu'en bloquant l'en-cours comme elle l'a fait, MFC l'a contrainte à restreindre la quantité de vélos par an.
Elle soutient que c'est la répétition des retards de production sans motifs de la société MFC qui a engendré un retard de facturation dès lors que les vélos électriques qui n'étaient pas produits ne pouvaient être livrés et donc payés par les clients et que sur la même période la société MFC continuait de s'approvisionner en pièces détachées dont les factures ne pouvait être honorées par la société Véloscoot faute de trésorerie, que les motifs invoqués par la société MFC ne justifient pas les retards de production, et a fortiori, ne pouvaient justifier ni la rupture brutale des relations contractuelles ni la rétention de 1118 panoplies complètes de vélos électriques.
En conséquence, elle estime que la société MFC a commis, de mauvaise foi, des lourdes fautes dans l'exécution de son contrat en décalant la production des produits et en la mettant en demeure le 11 juillet 2014 de lui régler la somme de 69 348, 57 euros alors que la production était arrêtée.
Elle précise que la limitation de l'en-cours de production à 100 000 euros est exorbitante du contrat car elle correspond à une production de 50 vélos électriques par mois alors que le planning prévisionnel de vente communiqué à la société MFC prévoyait une vente de 300 vélos électriques par mois ou 2000 par an. Elle fait valoir que la société MFC a également violé le contrat en imposant unilatéralement un paiement comptant préalable à la livraison puis en exigeant postérieurement un paiement d'avance. En conséquence, elle considère que la société MFC a unilatéralement et abusivement modifié les termes du contrat et par là-même abusé de sa situation de fournisseur exclusif de la société Véloscoot et ainsi engagé sa responsabilité sur le fondement de l'article L. 442-6 du Code du commerce.
Elle indique que la lettre recommandée avec avis de réception du 5 septembre 2014 de la société MFC dans laquelle cette dernière lui signifiait la résiliation du contrat d'assemblage avec un préavis allant au 16 mai 2015, manifeste son intention de nuire dès lors que la production des vélos électriques était déjà arrêtée depuis plusieurs mois, qu'ainsi la société MFC a rompu brutalement la relation commerciale établie avec la société Véloscoot sans respecter aucun préavis et engage sa responsabilité sur le fondement des articles L. 420-2 et L. 442-6, I, 2°, 4° et 5° du Code de commerce.
En outre, la société Véloscoot indique que la société MFC a tenté de récupérer la technologie de la société Véloscoot en tentant de débaucher le responsable du service-après-vente de la société Véloscoot le 7 mai 2015 afin de mettre à jour les logiciels sur les 1118 vélos électriques toujours en stock au sein de la société MFC en vue de leur revente et ceci, avant la fin du préavis fixé au 16 mai 2015. Il est clair selon Véloscoot que MFC obéit à Intersport France qui cherche à récupérer la société Véloscoot à bon compte, en asphyxiant les acteurs du marché les uns après les autres.
La société Véloscoot estime que son chiffre d'affaires a accusé un recul de plus de 42 % et la marge brute un recul de plus de 68 %, générant un préjudice de perte sèche de bénéfices à hauteur de 546 313,60 euros. Sur le préjudice résultant de la perte de clientèle et de la perte de son assembleur, elle estime avoir subi une perte de 672 800 euros en considération d'un taux de marge brute de 29 %.
Sur le préjudice commercial sur 2014, 2015 et 2016, elle estime avoir subi un préjudice d'image auprès de son réseau de distributeur d'un montant de 1 345 600 euros pour 2014 et 2015 et 672 800 euros pour 2016.
Sur la perte de trésorerie, elle l'estime à 378 400 euros.
Elle évalue la totalité du préjudice économique subi à 3 616 113,60 euros. Elle sollicite la désignation d'un expert pour évaluer plus précisément les préjudices qui ne peuvent être chiffrés, liés à la perte de l'entreprise, et donc à la valeur de celle-ci.
La société Véloscoot précise qu'étant actuellement en liquidation judiciaire elle n'est plus en mesure d'intervenir sur les 217 vélos électriques assemblés et 901 panoplies et à ce titre sollicite la confirmation de la décision entreprise et précise que la vente du stock permettra à la société Véloscoot de rembourser intégralement la créance de MFC, ce que le Tribunal de commerce de Nanterre, saisi d'une demande de paiement de la caution du LCL, avait préconisé.
A titre subsidiaire, la société Véloscoot précise qu'à défaut de remplir l'ensemble des conditions posées par l'article L. 442-6 I 5° du Code de commerce, la jurisprudence réserve la possibilité pour la victime d'invoquer l'article 1382 du Code civil, en raison des multiples fautes commises par MFC. Elle indique que la société MFC a fait preuve de mauvaise foi dans l'exécution du contrat en ralentissant puis en stoppant définitivement la production tout en exigeant de nouvelles conditions financières exorbitantes du contrat pour entendre le poursuivre. Elle estime avoir subi un préjudice d'exploitation d'un montant de 3 616 113, 60 euros.
Elle conteste tout abus de procédure de sa part.
En réponse, la société MFC conteste tout faute de sa part, estimant que c'est Véloscoot qui a manqué à ses obligations contractuelles de paiement, justifiant la mise en œuvre de l'exception d'inexécution. Elle indique qu'en décembre 2013, période à laquelle MFC a commencé à livrer des vélos à la société Véloscoot, cette dernière faisait face à d'importantes difficultés de trésorerie de telle sorte que sa situation financière paraissait déjà fortement compromise.
Elle conteste tout abus de position dominante et précise que le contrat de sous-traitance a été intégralement rédigé par la société Véloscoot, qu'il ne comprenait pas de clause d'approvisionnement exclusif, que la société Véloscoot avait toute liberté pour diversifier ses sources d'approvisionnement, que les factures étaient émises concomitamment à la livraison des vélos électriques aux clients de la société Véloscoot et qu'elles étaient ensuite réglées dans les 45 jours fin de mois suivant la date d'émission de la facture, qu'un éventuel retard dans la chaîne de production ne saurait impacter la facturation dès lors que les factures n'étaient émises qu'à la livraison des produits finis et que l'avance du prix des pièces constitutives des vélos était faite par la seule société MFC. De plus, la société MFC fait valoir que le contrat ne prévoyait pas d'en-cours de production, même si elle lui a accordé à titre commercial, dans la limite de 100 000 euros,un encours de facturation.
La société MFC confirme que les livraisons de vélos électriques ont commencé le 23 décembre 2013, soit 7 mois après la conclusion du contrat et soutient que les seules interruptions de livraisons ont été observées lorsque la société Véloscoot a décidé de bloquer les commandes et les expéditions en raison d'un problème relatif aux logiciels de ses vélos, qu'au 25 juin 2014, les retards de paiement étaient de 56 760, 34 euros pour des factures échues et qu'en conséquence elle a été contrainte de bloquer l'expédition de certaines commandes en vertu de l'exception d'inexécution et de mettre en demeure la société Véloscoot, par courrier recommandé du 11 juillet 2014, de payer ces sommes échues.
La société MFC soutient avoir reçu de nombreuses réclamations des clients finaux concernant des pannes et des problèmes de fonctionnement de la partie électrique des vélos, tenant notamment à une mauvaise programmation du logiciel du vélo pour laquelle la société Véloscoot était responsable, que la société Véloscoot a commis de nombreuses fautes vis-à-vis de son sous-traitant et précise que les factures dont le paiement a été demandé par ses mises en demeure des 11 juillet et 5 septembre 2014 étaient arrivées à échéance, ce qui justifie qu'elle ait mis en œuvre l'exception d'inexécution et ait arrêté ses livraisons. Elle conteste tout engagement à produire une quantité prévisionnelle de 2000 vélos électriques par an et, indique qu'elle a pris en outre le risque de tous les approvisionnements en pièces détachées dont elle a avancé le règlement auprès de ses fournisseurs. Elle précise que le décalage de trésorerie invoqué par la société Véloscoot est fictif, qu'en outre c'est elle qui a fermé en cours de préavis et a ainsi réduit le préavis qui lui avait été accordé par MFC.
Elle expose que la mauvaise situation financière de la société Véloscoot tient à ses choix stratégiques et notamment à son choix de ne confier sa production qu'à un seul assembleur.
La société MFC soutient que c'est à bon droit que les premiers juges ont fait application de la faculté de résiliation du contrat sans préavis prévue à l'article L. 442-6, I, 5° du Code de commerce en se fondant sur le non-respect par la société Véloscoot des délais de paiement, que le blocage d'un compte-client justifié par un retard de paiement ne constitue pas une rupture brutale, qu'en tout état de cause, elle fait valoir qu'elle a notifié à la société Véloscoot le 5 septembre 2014 la fin de leurs relations commerciales après l'expiration d'un préavis de plus de 8 mois, ce préavis étant suffisant au regard de la durée de la relation commerciale et des circonstances de l'espèce, et qu'elle aurait même pu rompre la relation sans préavis du fait de l'inexécution grave du contrat par la société Véloscoot. Elle soutient qu'il n'existe aucune rupture partielle de la relation de son fait dès lors qu'elle a satisfait toutes les commandes et les ordres de livraison passés par la société Véloscoot.
La société MFC soutient que l'appréciation du déséquilibre significatif doit s'effectuer seulement au moment de la conclusion du contrat ou lors de sa phase de négociation. Elle précise que le contrat conclu le 16 mai 2013 a été rédigé par la société Véloscoot, que la société Véloscoot n'apporte ni la preuve d'une soumission ou d'une tentative de soumission, ni l'instauration d'un déséquilibre significatif. Elle conteste aussi tout abus de dépendance économique et indique que l'article L. 420-2, al. 2 du Code de commerce suppose la détermination du marché pertinent sur lequel les pratiques alléguées ont pu être commises et soutient que la société Véloscoot ne procède pas à cette détermination, pas plus qu'à la caractérisation de l'état de dépendance économique ni de l'abus commis ainsi que de ses incidences sur le marché concerné. Elle soutient que les ententes intragroupes sont autorisées à l'intérieur d'un même groupe de sociétés et que la société Véloscoot n'apporte pas la preuve d'une entente prohibée au sens de l'article L. 420-1 du Code de commerce.
Sur la responsabilité sur le fondement de l'article 1382 du Code civil, la société MFC soutient que la société Véloscoot ne prouve pas l'existence d'une faute délictuelle commise par elle, ni d'un préjudice et d'un lien de causalité, qu'en l'absence de toute faute de sa part, la société Véloscoot ne pourra être que déboutée de sa demande. Elle indique que la demande de dommages et intérêts n'est soutenue par aucun fondement et précise que le seul préjudice dont la société Véloscoot réclame réparation est celui qui résulterait de la brutalité de la rupture des relations commerciales entre les parties. Elle indique que la société Véloscoot ne justifie pas de son préjudice et qu'à travers les différents postes de préjudice dont elle réclame une indemnisation, elle ne sollicite au final que l'indemnisation d'une prétendue perte de marge brute.
Sur la demande d'expertise, elle fait valoir que celle-ci est en contradiction avec les dispositions de l'article 146 du Code de procédure civile dès lors qu'elle aurait pour objet de pallier la carence de la société Véloscoot et de ses actionnaires dans l'administration de la preuve. Au surplus, elle indique que la société Véloscoot ne justifie d'aucun motif légitime ni d'aucun intérêt pour formuler cette demande d'expertise.
Sur la demande reconventionnelle de la société MFC, elle précise que la créance de 161 045,26 euros qu'elle détient sur la société Véloscoot correspond à des vélos qu'elle a déjà assemblés et livrés et donc correspond à d'autres vélos que ceux qu'elle dispose en stock et précise que ces vélos sont, en l'état, invendables.
LA COUR renvoie, pour un plus ample exposé des faits et prétentions des parties, à la décision déférée, et aux écritures susvisées, par application des dispositions de l'article 455 du Code de procédure civile.
Sur ce, LA COUR,
Considérant qu'aux termes de l'article L. 442-6, I, 5° du Code de commerce, " engage la responsabilité de son auteur et l'oblige à réparer le préjudice causé le fait, par tout producteur, commerçant, industriel ou personne immatriculée au répertoire des métiers :
5) de rompre brutalement, même partiellement, une relation commerciale établie, sans préavis écrit tenant compte de la durée de la relation commerciale et respectant la durée minimale de préavis déterminée, en référence aux usages du commerce, par des accords interprofessionnels (...) ; les dispositions qui précèdent ne font pas obstacle à la faculté de résiliation sans préavis, en cas d'inexécution par l'autre partie de ses obligations ou en cas de force majeure ";
Considérant que l'article L. 442-6, I, 5° s'applique à toute relation commerciale suivie, stable et habituelle;
Que la brutalité de la rupture résulte de l'absence de préavis écrit ou de l'insuffisance de la durée de ce préavis au regard des relations commerciales antérieures ;
Que la finalité du délai de préavis est de permettre au partenaire de prendre ses dispositions pour réorienter ses activités en temps utile ;
Considérant qu'en l'espèce, l'existence de relations commerciales établies entre la société MFC et la société Véloscoot n'est pas contestée, même si la durée desdites relations n'a été effective que pendant treize mois entre le 16 mai 2013 et le 5 septembre 2014, date à laquelle la société MFC a fait connaître à la société Véloscoot par écrit sa décision de rompre le contrat ;
Qu'il résulte des pièces versées aux débats et des échanges entre les parties que MFC a succédé à Planet Fun en avril pour l'assemblage des vélos électriques de Véloscoot, que cette succession s'est faite dans l'urgence, compte tenu des difficultés de Planet Fun, sur la base des mêmes conditions contractuelles ;
Que le contrat signé par les parties prévoyait un principe de commande ouverte de VAE fondée sur un prévisionnel établi par Véloscoot, évalué à 2 000 VAE par an, compte tenu des ventes dans le passé ;
Que Véloscoot a, à juste titre, rappelé que MFC s'était engagée à gérer ses stocks et cadencements de production pour maintenir à tout moment une disponibilité de produits selon le prévisionnel remis par Véloscoot, ce qui n'a pas été le cas à plusieurs reprises et a été signalé par Véloscoot à MFC pour qu'elle y remédie ;
Que nonobstant les difficultés de trésorerie de Véloscoot, antérieures à la reprise du contrat par MFC et que MFC connaissait puisqu'elle précise dans ses conclusions que " c'est une société moribonde qui a contracté avec MFC en mai 2013 ", la société Véloscoot s'est réorganisée pour survivre, le temps de la mise en route de la nouvelle production avec MFC qui a pris six mois, les premières livraisons de vélos n'ayant eu lieu qu'en décembre 2013 ;
Que la trésorerie de la société Véloscoot était obérée dès le début, mais que la société MFC en avait connaissance et avait néanmoins accepté de signer le contrat qui prévoyait un règlement des factures à 45 jours fin de mois, et qu'elle lui avait accordé en outre un encours de facturation à hauteur de 100 000 euros ;
Que dès la première livraison de VAE en décembre 2013, la société Véloscoot a payé la facture avec beaucoup de retard, sans que MFC ne soulève l'exception d'inexécution pour refuser de livrer les cycles ;
Qu'il n'a jamais été fait état de cette exception d'inexécution pour justifier les retards de production ou les défauts de livraison de la société MFC signalés dès le mois de mars 2014 par plusieurs échanges de mails ;
Que les retards de livraison de la société MFC ont eux-mêmes généré des retards de paiement par les clients de la société Véloscoot, des menaces de ruptures de commandes, et par là-même de nouvelles difficultés de trésorerie pour Véloscoot, qui ne pouvaient être résorbées malgré les conditions de paiement avantageuses prévues au contrat ;
Qu'il en est résulté un décalage de trésorerie qui ne peut être considéré comme imputable uniquement à la société Véloscoot ;
Qu'il est également démontré que la société MFC payait en retard ses propres fournisseurs, ce qui a généré un défaut ou un retard de livraison des pièces à assembler, engendrant là aussi un retard de paiement ;
Que contrairement aux motifs retenus par les premiers juges, il n'est pas établi que les retards de production de MFC soient dus aux retards de paiement de Véloscoot ;
Qu'ainsi, par mail du 3 avril 2014, Manon Beugin (Véloscoot) indiquait à la société MFC :
" suite au retard pris cette semaine dans la production, notre client Culture Vélo Henin Beaumont n'aura pas son Plios Urban en fin de cette semaine. Mais début semaine prochaine. Il a été clair, c'est sa dernière commande avec nous. Il a déjà reçu la batterie, donc il se sent obligé de maintenir sa commande. Mais il annule sa deuxième commande (...) merci donc de la supprimer de ton tableau. Pour la semaine prochaine, j'ai absolument besoin du planning de prod jour par jour. Il nous semble indispensable de produire un peu tous les jours afin de faire des expéditions régulières et ne pas congestionner les expé pour la fin de semaine, et surtout tenir les délais annoncés ! " ;
Que la société MFC répondait le 18 avril :
" désolé pour les retards de production mais la chaine prévue pour vélos Scoot a été arrêté pendant 2 jours à voir avec M. Yves Salaun. Production prévue ci-dessous le 17 ou le 18/4 reportée au mercredi 23/4
30 mistral (...) dispos en stock pas avant jeudi soir 24/4
30 Apolon (...) dispos en stock pas avant vendredi soir 25/4
Semaine suivant à confirmer, je ne suis pas sur du tout
Merci de préciser vos besoins suivants " ;
Qu'à aucun moment durant cette période il n'est allégué que la production aurait été arrêtée par la société MFC en raison des retards de paiement de Véloscoot ;
Qu'encore en juin 2014, des mails similaires étaient échangés, la société Véloscoot rappelant :
" vos retards de production engendre (sic) des annulations de commandes " ;
Que là encore, il n'était nullement question de retards de livraisons liés aux retards de paiement ;
Que toutefois la société MFC a décidé le 25 juin 2014 de bloquer la production au montant de l'encours de 100 000 euros garanti par la caution bancaire ;
Que malgré la demande de déblocage de Monsieur Beugin en date du 27 juin 2014, la société MFC a maintenu sa position, limitant la production à 50 vélos par mois maximum ;
Que la société MFC a ensuite expédié uniquement les commandes urgentes, puis a indiqué, par lettre RAR du 11 juillet 2014 qu'elle suspendait toutes livraisons jusqu'à complet paiement des échéances dues ;
Que par mail du 22 juillet 2014, elle a confirmé qu'elle bloquait toutes les livraisons, " celles-ci n'étant expédiées qu'avec le paiement d'avance pour les nouvelles commandes " ;
Qu'elle n'a plus livré aucun vélo, malgré les demandes de Véloscoot qui attirait son attention sur les graves conséquences d'un tel défaut de livraison ;
Qu'en outre la société MFC a cru pouvoir conserver les vélos commandés, sans autorisation judiciaire ni conventionnelle, alors que les vélos ne lui appartenaient pas, disposant ainsi d'un stock de 217 VAE assemblés et de 901 panoplies à la date du jugement ;
Considérant qu'il résulte de l'ensemble de ces éléments qu'avant la notification de la rupture par écrit le 5 septembre 2014, la société MFC a bloqué la livraison des commandes à compter du 25 juin 2014 puis de la totalité des livraisons à compter du 11 juillet 2014 et exigé un paiement comptant à la commande, qui n'était pas prévu contractuellement ;
Qu'en réalité la rupture était consommée depuis le 11 juillet 2014, sans notification écrite et sans préavis réalisable, compte tenu du blocage des livraisons imposé et des nouvelles conditions de règlement, ce qui n'a plus permis à Véloscoot de se faire payer par ses propres clients, ni a fortiori de payer MFC, ni d'exercer la moindre activité ;
Que la rupture des relations commerciales doit dès lors être qualifiée de partielle à compter du 25 juin 2014 et de totale à compter du 11 juillet 2014 ;
Qu'elle doit également être qualifiée de brutale puisque concrètement, nonobstant le courrier du 5 septembre 2014 qui accordait à la société Véloscoot un préavis de huit mois, soit jusqu'au 16 mai 2015, ce qui rendait formellement la rupture du contrat valable au regard des dispositions légales applicables, il résulte de l'ensemble des éléments susrappelés que la société MFC a rendu le préavis accordé à la société Véloscoot vide de tout sens, la société Véloscoot ne pouvant poursuivre son activité ;
Qu'il est vain de soutenir, comme le fait la société MFC, qu'elle était en droit de retenir les livraisons puisqu'elle n'était pas payée, faisant ainsi valoir tardivement l'exception d'inexécution, alors que la société MFC avait accepté les difficultés de trésorerie de la société Véloscoot depuis le début du contrat, que les parties avaient contractuellement prévu deux garanties, en cas de non-paiement, un cautionnement bancaire à hauteur de 100 000 euros, et un droit de substitution, permettant à la société MFC de se faire payer directement sur les ventes de VAE par les clients de la société Véloscoot ;
Que la société MFC ne justifie pas avoir sollicité l'une ou l'autre de ces solutions, avant de bloquer unilatéralement les livraisons, et avant de notifier la rupture ;
Qu'elle n'a pas non plus fait valoir son droit de rompre le contrat sans préavis pour inexécution puisqu'elle a expressément accordé un préavis de huit mois à la société Véloscoot par sa lettre du 5 septembre 2014, sans invoquer toute autre faute, ou la force majeure ;
Que le fait que la société MFC ait écrit au juge-commissaire le 16 janvier 2015 pour lui demander s'il entendait exiger l'exécution du contrat dénoncé le 5 septembre 2014 plus de quatre mois après la cessation de toute livraison, ne permet pas de considérer valablement que la société MFC ait de bonne foi envisagé d'exécuter le préavis, même partiellement ;
Que de même l'allégation selon laquelle les vélos livrés par la société Véloscoot présenteraient des pannes fréquentes générant un mécontentement des clients auquel la société Véloscoot n'aurait pas fait face est sans incidence sur le défaut d'exécution du préavis par la société MFC et ne justifie pas l'arrêt brutal des livraisons, la responsabilité des fabricants à l'égard des clients finaux étant un litige autonome, de même que le service après-vente, et alors au surplus que c'était la société MFC qui était en charge de l'assemblage ;
Que la rupture du contrat prononcée le 5 septembre 2014 était par conséquent effective depuis le 11 juillet 2014 et dénuée de tout préavis, sans motif justifiant l'inexécution du préavis, le simple défaut de paiement n'étant pas suffisant au vu des motifs rappelés ci-dessus, ce d'autant qu'il pouvait être compensé par la substitution de la société MFC dans les droits de Véloscoot auprès de ses clients pour un paiement direct ;
Qu'en ne respectant pas ce droit à préavis, alors qu'elle l'avait accordé, et en ne respectant pas les dispositions contractuelles applicables en cas de non-paiement, la rupture du contrat prononcée par la société MFC le 5 septembre 2014 sans préavis effectif doit dès lors être qualifiée de brutale au sens des dispositions susrappelées, et engage la responsabilité de la société MFC, l'obligeant à réparer le préjudice causé par la brutalité de cette rupture ;
Que le jugement sera infirmé sur ce point ;
Considérant qu'indépendamment de toute dépendance économique alléguée par la société Véloscoot, dont la réalité n'est pas avérée ainsi que l'ont retenu à juste titre les premiers juges dont la cour adopte, sur ce point uniquement, les motifs, la société Véloscoot pouvait naturellement penser que le contrat allait se poursuivre jusqu'à son terme et qu'elle allait pouvoir faire face à ses problèmes de trésorerie générés notamment par les défauts de livraison et les annulations de commandes par ses clients en raison des retards de livraison, sachant notamment que de nombreux vélos étaient prêts à être livrés ;
Que la durée du préavis prévue contractuellement était de six mois ;
Que la durée de huit mois accordée par la société MFC n'était dès lors pas excessive ni insuffisante au regard de l'activité exercée, du marché particulièrement restreint des vélos électriques et de la durée minimum de six mois nécessaire à l'assemblage et à la commercialisation d'un cycle VAE ;
Qu'un tel préavis aurait permis à la société Véloscoot de réorienter son activité et qu'il y a lieu de retenir cette durée, même si les relations commerciales n'étaient pas anciennes ;
Considérant que l'indemnisation accordée devra être de la perte de marge brute subie, escomptée sur la durée du préavis de huit mois accordée, calculée sur la moyenne des deux dernières années de chiffre d'affaires, sans qu'il soit nécessaire d'ordonner une expertise pour chiffrer des préjudices qui sont sans lien avec la rupture brutale retenue ;
Que c'est à juste titre que les premiers juges n'ont pas ordonné d'expertise avant-dire-droit à ce titre ;
Considérant que les autres demandes de la société Véloscoot, fondées sur les articles L. 420-1 et L. 442-6 du Code de commerce, pour lesquelles elle sollicite une indemnisation globale de 3 616 113,60 euros ne sont pas reprises dans le dispositif de ses conclusions, seule la rupture brutale étant visée ;
Qu'il convient néanmoins, pour vider le débat, de rappeler que le contrat signé entre les sociétés MFC et Véloscoot a été rédigé par cette dernière, que les conditions étaient les mêmes que celles convenues avec Planet-Fun, qu'il n'est pas établi que la société MFC ait soumis la société Véloscoot à des obligations exorbitantes et créé un déséquilibre significatif justifiant une indemnisation séparée de la rupture brutale retenue, qui sanctionne le comportement fautif de la société MFC ;
Qu'il n'est pas établi que la société MFC ait menacé la société Véloscoot de rompre le contrat, sous condition d'acceptation de clauses manifestement abusives, ni qu'elle ait obtenu un avantage préalable à la passation de commandes, la demande de paiement comptant étant concomitante à la rupture du contrat ;
Qu'aucune entente au sens de l'article L. 420-1 ni aucun abus de dépendance économique, au demeurant non avérée, au sens de l'article L. 420-2 du Code de commerce ne sont établis ;
Qu'aucune faute justifiant une indemnisation pour perte de clientèle, préjudice d'image n'est établie ;
Que seule ouvre droit à indemnisation la rupture qualifiée de brutale, dans la limite des huit mois de préavis accordé, les autres demandes étant infondées ;
Qu'il y a lieu de retenir le taux de marge brute moyen de 27 % correspondant aux documents versés aux débats par la société Véloscoot, taux corroboré par l'attestation de l'expert-comptable qui retient un taux de 29 %, et par les soldes intermédiaires de gestion prévoyant un taux de marge de 22,46 % sur 9 mois entre le 1er octobre 2013 et le 30 juin 2014 ;
Qu'au vu des comptes annuels versés aux débats, la moyenne du chiffre d'affaires réalisé sur les deux derniers exercices s'élève à 700 000 euros ;
Que c'est sur la base de ce chiffre d'affaires que se calcule l'indemnisation et non sur la base d'un chiffre d'affaires prévisionnel hypothétique ;
Que pour huit mois de préavis, en appliquant le taux de marge susvisé, le préjudice lié à la rupture brutale doit être fixé à la somme de 700 000 : 12 x 8 x 27 % = 126 000 euros ;
Qu'il y a lieu de faire droit à la demande de Véloscoot dans la limite de cette somme, et de la débouter du surplus ;
Considérant qu'en l'absence de tout élément relatif à la perte de trésorerie alléguée, au titre d'un prêt Oséo, la cour ne peut que rejeter cette demande, incluse dans la somme globale demandée ;
Considérant que les dispositions du jugement relatives au sort des VAE assemblés, actuellement en possession de la société MFC ne sont contestées par aucune des parties ;
Qu'il y a lieu de confirmer la décision sur ce point ;
Considérant que l'exercice d'une action en justice ne dégénère en abus que s'il constitue un acte de malice ou de mauvaise foi, qu'aucune démonstration n'est faite à l'appui de cette demande ;
Qu'il y a lieu d'infirmer la décision entreprise sur ce point ;
Considérant qu'il y a lieu de faire droit à la demande d'indemnisation de la société Véloscoot au titre de l'article 700 du Code de procédure civile dans les termes exposés au dispositif ci-après ;
Par ces motifs, LA COUR, Statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort, infirme le jugement déféré en ce qu'il a débouté les demandeurs de leurs demandes au titre de l'article L. 442-6 (noté par erreur L. 420-6) du Code de commerce, et en ce qu'il a condamné les demandeurs in solidum à payer à la société Manufacture Française du Cycle la somme de 1 000 euros au titre de la procédure abusive et la somme de 6 000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile, confirme pour le surplus, Statuant à nouveau, condamne la société Manufacture Française du Cycle à payer à la société Véloscoot la somme de 126 000 euros à titre d'indemnisation pour la rupture brutale de leur contrat, dit n'y avoir lieu à ordonner une expertise, déboute la société Véloscoot de ses autres demandes, déboute la société MFC de ses demandes reconventionnelles, condamne la société MFC à payer à la société Véloscoot la somme de 10 000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile, condamne aux dépens qui seront recouvrés au profit de Maître Harold Herman et ce dans les termes de l'article 699 du CPC.