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Décisions

CA Paris, Pôle 5 ch. 4, 20 septembre 2017, n° 16-04711

PARIS

Arrêt

Confirmation

PARTIES

Demandeur :

Aquilus Groupe (Sasu)

Défendeur :

AS Pool (SAS) , Albon (SAS), Albiges (Sasu)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Luc

Conseillers :

Mme Mouthon Vidilles, M. Thomas

Avocats :

Mes Lallement, Barthélémy, Etevenard, Richard, Duverne

T. com. Lyon, du 21 janv. 2016

21 janvier 2016

Exposé des faits

Le groupe NextPool constitué des sociétés Albon, AS Pool (anciennement dénommée Abriblue) et Albiges, a pour activité la fabrication et la vente d'équipements et accessoires destinés à l'univers de la piscine ; il est en relations commerciales depuis plusieurs années avec la société Aquilus Groupe (appartenant au groupe Atlantis) centrale d'achat et de référencement, laquelle distribue dans son réseau de concessionnaires les produits de ce groupe.

En 2001 et 2002, des propositions tarifaires ont été adressées au groupe Atlantis par le groupe NextPool; en 2003 et 2004 la société Abriblue a participé au forum organisé par la société Aquilus Groupe et accepté la parution de ses produits dans les catalogues de cette société ; le 16 décembre 2009 le groupe NextPool a adressé à la société Aquilus Groupe une proposition globale (pièce 14 de l'intimée) incluant les trois sociétés du groupe, en vue d'assurer une exclusivité au sein de l'enseigne Aquilus pour la fabrication des volets, liners, couvertures à barres, couvertures solaires et couvertures souples en contrepartie de laquelle une remise partenariale, des bonifications trimestrielles et annuelles ont été offertes.

Le 23 février 2012, le groupe NextPool et la société Aquilus Groupe ont conclu un nouvel accord commercial selon lequel sont versées au bénéfice de la seconde société en contrepartie d'une exclusivité d'approvisionnement pour les volets, couvertures à barres, liners, couvertures solaires :

- une remise partenariale de 4 % du chiffre d'affaires HT net remisé portant sur l'activité nette facturée et encaissée,

- une bonificiation trimestrielle inconditionnelle d'un montant de 4 % du chiffre d'affaires réalisés sur l'ensemble des points de vente Aquilus sur les volets, couvertures à barres, certains liners, couvertures solaires,

- des bonifications de fin d'année conditionnelles.

Par courrier du 3 décembre 2012, la société Aquilus Groupe a informé le groupe NextPool que " pour la saison prochaine, à compter du 1er janvier 2013, elle allait engager un partenariat pour un nouveau référencement ", en soulignant que " malgré les efforts entrepris (...) le service et les prestations attendues ne répondent pas aux exigences de nos clients ".

Par acte du 26 juin 2013, la société Aquilus Groupe a fait assigner les sociétés AS Pool, Albon et Albiges devant le juge des référés du Tribunal de commerce de Grenoble en vue de se voir communiquer les chiffres d'affaires du 4e trimestre 2012 réalisés par celles-ci.

Par ordonnance du 22 octobre 2013 cette juridiction, en raison d'une contestation sérieuse tirée d'une rupture brutale des relations commerciales établies, a renvoyé les parties à se pouvoir devant le juge du fond du Tribunal de commerce de Lyon.

Saisi par la société Aquilus d'une demande en paiement des remises contractuelles, le Tribunal de commerce de Grenoble par jugement du 5 janvier 2015 s'est déclaré incompétent au profit du Tribunal de commerce de Lyon.

Reprochant à la société Aquilus Groupe d'avoir rompu brutalement leurs relations, les sociétés AS Pool, Albon et Albiges l'ont assignée par acte du 21 janvier 2014 devant le Tribunal de commerce de Lyon, lequel par jugement 21 janvier 2016, sous le bénéfice de l'exécution provisoire, a :

- retenu qu'une relation commerciale durable était établie entre les sociétés AS Pool, Albon et Albiges du groupe NextPool et la société Aquilus Groupe depuis 6 ans,

- constaté que la société Aquilus Groupe a brutalement mis fin à cette relation commerciale,

- condamné la société Aquilus Groupe à payer :

* à la société AS Pool la somme de 31 606 euros en réparation du préjudice subi en l'absence de préavis suffisant, avec intérêts au taux légal à compter de la décision,

* à la société Albon la somme de 59 576 euros en réparation du préjudice subi en l'absence de préavis suffisant, avec intérêts au taux légal à compter de la décision,

* à la société Albiges la somme de 24 706 euros en réparation du préjudice subi en l'absence de préavis suffisant, avec intérêts au taux légal à compter de la décision,

* à la société Albon la somme de 2 595,97 euros TTC au titre des factures émises du 18 janvier au 14 mai 2013, majorée des intérêts au taux légal à compter du 21 novembre 2013 date de la dernière mise en demeure,

- estimé certaines, liquides et exigibles les créances de la société Aquilus Groupe au titre des bonifications et remises pour l'année 2012 en application de l'accord du 23 février 2012,

- rejeté la demande d'expertise formée par les sociétés AS Pool, Albon et Albiges,

- condamné à verser à la société Aquilus Groupe :

* à la charge de la société Albiges la somme de 11 831,47 euros augmentée des intérêts au taux légal à compter du 28 juin 2013 date de l'assignation en référé,

* à la charge de la société Albon la somme de 20 354,82 euros augmentée des intérêts au taux légal à compter du 28 juin 2013 date de l'assignation en référé,

* à la charge de la société AS Pool la somme de 38 447,71 euros majorée des intérêts au taux légal à compter du 28 juin 2013 date de l'assignation en référé,

- rejeté la demande d'indemnisation de la société Aquilus Groupe pour concurrence déloyale et détournement de clientèle ainsi que sa demande en dommages et intérêts pour résistance abusive et toutes les prétentions en vertu de l'article 700 du Code de procédure civile.

Par conclusions du 19 septembre 2016, la société Aquilus Groupe sollicite :

à titre principal, l'infirmation du jugement entrepris en ce qu'elle n'est pas à l'origine de la rupture des relations commerciales décidée d'un commun accord entre les parties,

- la constatation que compte tenu de l'historique des relations entre les parties, les sociétés du groupe NextPool ne pouvaient anticiper une continuité de la relation commerciale pour l'avenir,

- en conséquence l'infirmation du jugement querellé en ce que les premiers juges ont retenu qu'une relation commerciale durable était établie entre elle et les sociétés du groupe NextPool depuis 6 ans et qu'elle a brutalement mis fin à la relation commerciale établie, et en ce qu'elle a été condamnée à payer à la société Albon la somme de 59 576 euros en réparation du préjudice subi en l'absence de préavis suffisant, à la société AS Pool la somme de 31 606 euros et à la société Albiges la somme de 24 706 euros en réparation de leur préjudice,

à titre subsidiaire, la réformation du jugement du 21 janvier 2016 en ce qu'il a retenu une durée commerciale de 6 ans et un préavis d'une durée de 6 mois

- la fixation à 3 ans de la durée des relations commerciales et à 3 mois celle du préavis,

- la réformation dudit jugement en ce qu'il a retenu un taux de marge brute de 46,47 % et une injonction aux intimées de produire les comptes au vu desquels ce taux a été fixé,

- l'infirmation du jugement en ce qu'il l'a déboutée de sa demande en dommages et intérêts,

- la condamnation in solidum des sociétés AS Pool, Albon et Albiges à lui régler la somme de 70 000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice subi pour concurrence déloyale et détournement de clientèle,

pour le surplus, la confirmation du jugement en ce qu'il a condamné les sociétés AS Pool, Albon et Albiges respectivement à lui payer les sommes de 38 447,71 euros, 20 354,82 euros, et 11 831,47 euros majorées des intérêts au taux légal à compter du 28 juin 2013 date de l'assignation en référé,

- le rejet de l'appel incident formé par les sociétés AS Pool, Albon et Albiges tendant à voir fixer le délai de préavis à 12 mois et à voir ordonner une mesure d'expertise,

- la confirmation des dispositions du jugement entrepris relativement aux dépens et à l'article 700 du Code de procédure civile,

- la condamnation in solidum des sociétés AS Pool, Albon et Albiges à lui verser la somme de 5 000 euros par application de l'article 700 du Code de procédure civile.

Par conclusions du 20 juillet 2016, les sociétés SA.Pool, Albon et Albiges, intimées et appelantes à titre incident,

- déclarent mal fondé l'appel interjeté par la société Aquilus Groupe,

- estiment, sur le fondement de l'article L. 442-6-I-5° du Code de commerce, que depuis plus de 10 ans, elles étaient liées par des relations commerciales établies au sens dudit article avec la société Aquilus Groupe,

- considèrent qu'au regard de l'ancienneté de ces relations commerciales et de l'importance de leur chiffre d'affaires réalisé avec la société Aquilus Groupe et ses concessionnaires, cette dernière aurait dû leur donner un préavis écrit de 12 mois,

- en déduisent que celle-ci a rompu brutalement les relations commerciales établies avec elles,

- calculent que la moyenne annuelle du chiffre d'affaires dégagé sur les trois dernières années précédant la rupture des relations commerciales avec la société Aquilus Groupe :

* par la société AS Pool s'élève à la somme de 702 733 euros

* par la société Albon s'élève à la somme de 489 297 euros,

* par la société Albiges s'élève à la somme de 192 167 euros,

- font valoir que le chiffre d'affaires réalisé avec la société Aquilus Groupe et ses concessionnaires en 2013 :

* par la société AS Pool s'élève à la somme de 542 904,22 euros,

* par la société Albon s'élève à la somme de 188 024,64 euros,

* par la société Albiges s'élève à la somme de 67 230,37 euros,

- que la moyenne de pourcentage de marge brute réalisée par elles sur le chiffre d'affaires des trois dernières années précédent la rupture des relations commerciales est de 47,46 %,

- que le préjudice subi du fait de la rupture par la société Aquilus Groupe de la relation commerciale qui les unissait :

* pour la société AS Pool s'élève à la somme de 75 855 euros,

* pour la société Albon est de 142 984 euros,

* pour la société Albiges est de 59 295 euros,

- sollicitent la réformation du jugement querellé en ce qu'il a limité la réparation du préjudice à 5 mois et la condamnation de la société Aquilus Groupe à verser au titre du préjudice subi à :

* la société AS Pool la somme de 75 855 euros,

* la société Albon la somme de 142 984 euros,

* la société Albiges la somme de 59 295 euros,

- pour les factures impayées, prétendent que la société Aquilus Groupe n'a pas respecté son obligation à paiement,

- réclament en conséquence la confirmation du jugement du 21 janvier 2016 en ce qu'il a condamné la société Aquilus Groupe au paiement de la somme de 2 595,97 euros,

- arguent qu'elles n'ont pas commis la moindre faute, que la société Aquilus Groupe n'a pas subi le moindre préjudice, que la procédure intentée par elle n'est en aucun cas abusive,

- demandent en conséquence la confirmation dudit jugement en ce qu'il a débouté la société Aquilus Groupe de ses demandes en dommages et intérêts,

- sur les bonifications de fin d'année, de fin de trimestre de la remise partenariale, elles font valoir qu'elles étaient subordonnées au respect d'une obligation d'exclusivité pour les produits suivants : volets, liners, couvertures à barres, couvertures solaires et couvertures souples et qu'elles n'ont aucune preuve permettant de déterminer si cette exclusivité a été respectée,

- sollicitent en conséquence la désignation d'un expert judiciaire pour opérer cette vérification,

- souhaitent le renvoi de l'affaire à une prochaine audience de mise en état pour la reprise des débats suite au dépôt du rapport d'expertise ainsi que la condamnation de la société Aquilus Groupe à leur verser à chacune une somme de 10 000 euros par application de l'article 700 du Code de procédure civile.

Motifs de la décision

Sur la rupture des relations commerciales

La société Aquilus Groupe, à titre principal, dénie avoir rompu brutalement les relations commerciales établies au sens de l'article L. 442-6 I 5° du Code de commerce, dès lors que les parties par une volonté commune ont décidé de ne pas poursuivre leur partenariat, que chaque année les modalités de leurs relations étaient rediscutées et pouvaient ou non être acceptées, que ces relations ont d'ailleurs été interrompues en 2008 et 2009, qu'en 2013 le groupe NextPool ne lui a pas envoyé ses conditions de vente, que le non-renouvellement est un droit reconnu à la partie qui ne désire pas poursuivre les relations ; elle excipe également de l'absence de caractère suivi, stable et habituel des relations commerciales, de sorte que le groupe NextPool ne pouvait raisonnablement anticiper une continuité de la relation commerciale pour l'avenir. A titre subsidiaire, elle estime la durée des relations commerciales à 3 ans et souhaite que le délai du préavis soit fixé à 3 mois. Elle revendique une absence de préjudice subi par l'intimée en raison de la réorganisation de son réseau de vente au cours de l'année 2012 et critique le taux de marge brute réclamé.

Le groupe NextPool réplique qu'il a entretenu des relations commerciales établies pendant dix années à partir de 2002 et de manière ininterrompue jusqu'en 2012 avec la société Groupe Aquilus, laquelle les a rompues soudainement en ne lui consentant qu'un préavis insignifiant de trois semaines. Il réclame, du fait de la brutalité de la rupture, une indemnisation de son préjudice constitué par la privation du chiffre d'affaires réalisé jusqu'alors avec cette dernière société et ses concessionnaires, sans avoir eu le temps d'anticiper cette chute en prospectant de nouveaux clients potentiels ; il sollicite à ce titre le paiement des sommes de 75 855 euros au profit de la société AS Pool, de 142 984 euros au bénéfice de la société Albon et de 59 295 euros pour la société Albiges.

Aux termes de l'article L. 442-6 I 5° du Code de commerce :

" Engage la responsabilité de son auteur et l'oblige à réparer le préjudice causé le fait par tout producteur, commerçant industriel ou personne immatriculée au registre des métiers (.) de rompre brutalement, même partiellement une relation commerciale établie sans préavis écrit tenant compte de la durée de la relation commerciale et respectant la durée minimale de préavis déterminée en référence aux usages du commerce par des accords interprofessionnels ".

La notion de relation commerciale établie suppose démontré le caractère suffisamment prolongé, régulier, significatif et stable du courant d'affaires existant entre les partenaires commerciaux pour laisser augurer au prestataire que cette relation a vocation à durer.

A juste titre, les premiers juges n'ont retenu la réalité d'un courant d'affaires régulier et significatif entre les parties que pour les années 2007 à 2012, ainsi qu'il ressort du document établi le 4 novembre 2013 par Mme Peyrard en sa qualité d'expert-comptable, non remis en cause par l'avis d'un autre technicien. En outre, les pièces produites par le groupe NextPool, contrairement à ses allégations, manquent de force probante sur l'intensité et la régularité du courant d'affaires avant 2007. En effet, de simples offres tarifaires non signées émanant d'un fabricant à raison d'une correspondance par an (14 novembre 2001 et 5 avril 2002), ou une rencontre par an (23 septembre 2003, septembre 2004) pour faire le point sur un partenariat, ou une invitation à participer à un forum avec contribution aux frais (du 3 et 4 décembre 2003), ou une réservation par la seule société Abriblue au printemps 2004 d'un espace publicitaire dans les catalogues de la société Aquilus, s'ils sont autant d'indices de relations commerciales ponctuelles, ne sauraient constituer la preuve d'une activité commerciale habituelle générant un chiffre d'affaires conséquent. De même, il ressort des courriels échangés par les parties en juillet 2004 (pièces 33, 34 et 35 des intimées aux termes desquelles le représentant de la société NextPool écrit : " ils souhaitent nous intégrer dans le catalogue d'automne, ils sont en train de cesser leurs relations, avec DEL et vont certainement nous privilégier ") que le référencement des produits du groupe NextPool dans le catalogue d'automne Aquaguide ne faisait que commencer. Enfin les pièces 34 et 37 des intimées, si elles démontrent l'existence d'un partenariat avec la seule société Abriblue, n'établissent pas l'existence d'un flux important de ventes d'équipements pour piscines en 2005, au demeurant en chute par rapport à l'année 2004. Les intimées ne sont d'ailleurs pas en mesure de produire une seule pièce sur le chiffre d'affaires développé par elles avec la société Aquilus au cours des années 2001 à 2006.

En revanche, il est établi qu'à partir de l'année 2007, les relations commerciales entre les parties se sont intensifiées jusqu'à la dernière proposition globale du 23 février 2012, ainsi qu'il ressort de l'analyse du chiffre d'affaires global régulier et significatif du groupe NextPool réalisé avec la société Aquilus Groupe de 1 607 230 euros en 2007, 1 163 193 euros en 2008, 1 056 485euros en 2009, 1 588 942 euros en 2010, 1 421 811 euros en 2011 et 1 141 840 euros en 2012.

L'argumentation de la société Aquilus ne saurait non plus être retenue ; en effet, la circonstance que chaque année, les parties pouvaient rediscuter des modalités de vente des produits n'a pas empêché que la relation soit ininterrompue pendant ces 6 années, contrairement à ce que soutient l'appelante, qui ne justifie pas davantage de la réalité d'une cessation des relations commerciales en 2008 et 2009, compte tenu du chiffre d'affaires réalisé à cette période.

En outre, elle ne démontre par aucune pièce que la rupture des relations résultait, ainsi qu'elle le prétend, d'une décision commune des parties, alors qu'elle a envoyé à son fournisseur le 3 décembre 2012, une correspondance claire, non sujette à interprétation, pour l'informer qu'à compter du 1er janvier 2013 elle allait changer de partenaire, se prévalant du fait que le service et les prestations attendues du groupe NextPool ne répondaient plus aux exigences de ses clients, et ce, avant même de recevoir l'habituelle proposition tarifaire de son partenaire communiquée en fin d'année. Ainsi, cette rupture, qui lui incombe totalement, est brutale dans la mesure où, eu égard à la nature des prestations et à la durée de la collaboration de six années, le groupe NextPool pouvait légitimement s'attendre à la stabilité de la relation ; la brutalité de cette initiative est également constituée par l'insuffisance du préavis accordé d'un mois, car si la société Aquilus Groupe était en droit de ne pas poursuivre les relations commerciales avec son fabricant, elle avait l'obligation légale de respecter un préavis suffisant.

La durée du délai de prévenance, conformément à l'article L. 442-6 I 5° du Code de commerce, doit être appréciée au regard de l'étendue de la relation commerciale et en référence aux usages du commerce, ainsi qu'au vu des circonstances de l'espèce. En référence à la durée retenue de six années des relations commerciales établies entre les parties, à l'intensité du courant d'affaires, à l'exclusivité d'approvisionnement et à l'absence de dépendance économique de la victime de la rupture, la cour estime que le délai de préavis aurait dû être de 6 mois et non d'un mois. La décision des premiers juges sera donc confirmée de ce chef.

Il est de principe que la victime de la rupture peut réclamer une indemnisation au titre du gain manqué qui correspond à la marge que cette dernière pouvait escompter tirer pendant la durée du préavis qui aurait dû être respecté ; l'assiette retenue est la moyenne mensuelle du chiffre d'affaires HT réalisé au cours des 3 années précédant la rupture à laquelle est affectée cette marge pendant la durée du préavis.

Au cas particulier, les divers documents émanant de la société SSEC, en sa qualité d'expert-comptable de la société NextPool, se rapportant aux chiffres d'affaires des trois sociétés du groupe doivent être retenus comme émanant d'un professionnel de la comptabilité dont le sérieux ne saurait être mis en doute, d'autant qu'aucune pièce contradictoire d'une même technicité n'est versée aux débats par l'appelante pour corroborer ses simples allégations, alors que l'appelante avait la possibilité d'appuyer ses dires en justifiant de la marge réalisée par les autres sociétés de ce secteur d'activités.

Or elle ne produit aucun élément objectif et sérieux permettant de justifier sa critique du taux de marge brute consolidée retenu par l'expert-comptable de 47,46 %, mais irréaliste selon elle, et l'argument tiré d'une marge différente selon les activités est inopérant puisque ce taux est la moyenne de divers taux.

A juste titre les premiers juges ont donc retenu le chiffre d'affaires moyen annuel de chaque société du groupe NextPool pendant les trois années précédant la rupture, diminué du chiffre d'affaires réalisé par chacune d'elles en 2013 avec les concessionnaires de la société Aquilus Groupe, compte tenu de la date de la rupture des relations commerciales, soit un préjudice évalué à

- pour la société AS Pool, la somme de (702 733 euros - 542 904 euros = 401 460 euros) x 47,46 % x 5/12 = 31 606 euros,

- pour la société Albiges la somme de (192 167euros - 67 230 euros = 124 936 euros) x 47,46 % x 5/12= 24 706 euros

- pour la société Albon la somme de (489 297 euros - 188 024 euros = 301 273 euros) x 47,46 % x 5/12 = 59 576 euros

que la société Aquilus Groupe devra respectivement leur régler.

La décision des premiers juges sera donc confirmée de ce chef.

Sur les factures impayées

Le groupe NextPool réclame une somme globale de 2 595,97 euros HT au titre de factures impayées selon l'extrait de compte constituant la pièce 19 des intimées.

La société Aquilus dans ses dernières conclusions ne conteste plus cette demande ; le jugement querellé sera en conséquence confirmé de ce chef.

Sur la remise partenariale, les bonifications de fin d'année et la demande de désignation d'un expert judiciaire formée par le groupe NextPool

Dans la dernière offre commerciale du 23 février 2012, la remise partenariale, les bonifications de fin d'année ou de fin de trimestre, dont pouvait bénéficier la société Aquilus Groupe, n'ont été accordées qu'en contrepartie d'une obligation d'exclusivité d'approvisionnement de sa part.

Sans aucunement critiquer le calcul du montant de la remise partenariale et des bonifications opéré par la société Aquilus Groupe sur les éléments produits par le groupe NextPool, ce dernier sollicite la désignation d'un expert judiciaire pour déterminer si l'appelante et ses concessionnaires ont respecté l'obligation d'exclusivité en contrepartie de laquelle ces remises et bonifications étaient accordées.

Or aucun élément n'est versé aux débats par le groupe NextPool, sur lequel pèse la charge de la preuve, susceptible d'établir que l'appelante aurait manqué à son obligation d'approvisionnement exclusif. A bon droit les premiers juges, sur le fondement de l'article 146 alinéa 2 du Code de procédure civile, ont rejeté cette prétention du fait de la carence des intimées dans l'administration de la preuve qu'une mesure d'instruction ne peut suppléer. En effet, les intimées ne justifient nullement n'avoir aucune possibilité de vérifier si l'obligation d'exclusivité était ou non respectée, alors que des constatations par tout témoin pouvaient être opérées.

En l'absence de toute contestation du calcul des remises et bonifications par les intimées, la décision des premiers juges sera confirmée ; la société AS Pool sera en conséquence condamnée à régler la somme de 38 447,71 euros majorée des intérêts au taux légal à compter du 28 juin 2013 date de l'assignation en référé, la société Albon la somme de 20 354,82 euros augmentée des intérêts au taux légal à compter du 28 juin 2013, la société Albiges la somme de 11 831,47 euros avec intérêts au taux légal à compter du 28 juin 2013 à la société Aquilus Groupe.

Sur la demande en dommages et intérêts formée par la société Aquilus Groupe

La société Aquilus Groupe forme une demande en dommages et intérêts d'un montant de 70 000 euros en réparation de son préjudice du fait d'une attitude déloyale du groupe NextPool qui aurait démarché ses concessionnaires dès l'année 2012, la privant ainsi du chiffre d'affaires réalisé par la vente à ses concessionnaires et des bonifications contractuelles.

A juste titre, le groupe NextPool fait valoir que l'engagement d'exclusivité ne lui interdisait pas de contracter directement avec ses concessionnaires, s'agissant du principe même d'une centrale de référencement. En outre, l'appelante ne démontre par aucune pièce l'existence d'un préjudice.

La décision des premiers juges mérite en conséquence confirmation de ce chef.

Sur les autres demandes

Les dépens seront partagés par moitié entre les parties, chacune succombant partiellement en ses prétentions.

Il ne sera pas fait droit aux demandes présentées sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile.

Par ces motifs, LA COUR, confirme en toutes ses dispositions le jugement rendu le 21 janvier 2016 par le Tribunal de commerce de Lyon, déboute des parties de toutes leurs autres demandes, condamne par moitié le groupe NextPool et la société Aquilus Groupe aux dépens d'appel.